Je viens de découvrir depuis peu le parti de l'in-nocence. Croyez-moi, c'est un soulagement sans précédent de découvrir enfin une parole constructive et saine dans ce pays! Pour tout vous dire je suis plutôt anarchiste, Max Stirner est l'intellectuel qui à mon sens, a le plus touché la vérité politique. Pourtant je dois reconnaître que, d'une part il n'est pas compris par grand monde aujourd'hui, et d'autre part, au point où nous en sommes, il n'y a plus de Max Stirner qui tienne.
Je fais parti de ces personnes qui ont toujours voulu être tolérantes, ouvertes d'esprit, chassant autant que possible les à priori. Car comprendre, écouter, ne pas juger trop vite me paraissaient être des vertus essentielles. Jusqu'à un certain point, je me suis tenue à ces principes, comme damnée en vérité par un discours toujours plus propagandesque qui me faisait croire que c'était moi la vilaine manquant de solidarité ou d'amour quand c'était d'autres qui me causaient du tord. Puis un jour j'ai craqué. Le désespoir m'a envahie, anéantie. Je ne comprenais plus rien. J'avais tout fait pour être agréable à mon prochain, et ce prochain que j'avais respecté au plus haut point se foutait de ma gueule ouvertement. Un désastre. Pourtant autour de moi, les discours continuaient à fleurir : "nous ne sommes pas encore assez gentils, nous n'avons que des reproches à nous faire, regardez ce monde qui à cause de nous et de notre insuffisance, croule sous la misère". "Mais je n'ai rien fait" me suis-je dit. Qui autorise ces êtres qui m'entourent à se servir de ma foi en l'honnêteté, en la vie, en l'art, et autrefois en Dieu, pour me juger d'autant plus et me rouler dans la farine aux seules fins de se servir de moi?
Voilà que je découvre, pendant cette période de lucidité naissante, un parti qui parle mieux encore que je ne pourrais le faire des problèmes concrets et vitaux que rencontre ce pays. Un parti qui me confirme que je n'ai pas la berlue, que nous sommes bien dans un monde sans foi ni loi où tout et son contraire sont permis, et que ceux qui jouent les victimes, sont d'habiles bourreaux qui nous prennent pour des imbéciles ou des faibles parce nous avons trop accepté sans réagir. Un parti qui me fait comprendre que ce n'est pas moi qui rêve en voulant défendre mes valeurs, mais ceux qui prétendent que je rêve qui se la jouent.
Alors je parle, un peu, comme ça, autour de moi. Et j'en vois d'autres qui eux aussi en ont assez, mais ne disent rien, habitués à ne rien dire. Parfois, ils n'en pensent pas moins, mais qui les écouteraient? Curieux. Pourtant vrai. L'idée que parler est possible, que défendre la vérité existe, disparaît, doucement. Jusqu'à ne plus devenir que le souvenir d'une idée. Jusqu'à nous faire mourir dans des limbes obscures, vidés de toute forme qui autrefois avait créé un bonheur en marche. La nuisance, il s'agit bien de cela, a tout balayé. Je n'osais pas le reconnaître parce que ça me paraissait trop simple pour être vrai, et tellement l'impuissance, à force d'être soumise à la nocence, m'avait terrassée. Et tous ces gens à qui je commence à en parler comme ça, tout inopinément, délient leur langue, et à une vitesse qui me surprend moi-même, se soulagent et montrent leur tristesse enfouie. Il s'agit bien de ça, plus personne ne sait comment défendre son espace vital, parce chacun en vient à penser qu'il n'a pas à le faire.
J'ai lu le programme, je trouve prodigieuses toutes les propositions, justes, pertinentes. J'y vois le rapprochement entre l'école et le désir d'apprendre si indispensable à l'intellectualité, le contrôle des aides aux pays pauvres ou en voie de développement pour transmettre le partage et cesser d'entretenir le fantasme d'un occident dont on doit se venger ou "qu'il faudrait imiter" dans ses travers les plus vils.
Mais je vais arrêter là pour aujourd'hui. Depuis que je vous connais, je retrouve ma pleine légitimité de vivre et d'exiger la non nuisance qu'elle vienne de moi ou des autres. Je retrouve l'inspiration des projets, la force de conviction pour retrouver mes valeurs. La chance de pouvoir remettre les choses à leur place sans plus me sentir coupable.
Continuez, et tous mes voeux.
Chaque fois que je pourrais, je vous soutiendrais et parlerais de vous.
Marie Mavra