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Analyse de la crise de l'information et de l'expression

Envoyé par Virgil Waldburg 
« Le déclin de la presse partisane et l’avènement d’un nouveau type de journalisme qui professe des normes rigoureuses d’objectivité ne nous assurent pas un apport constant d’information utilisable. Si l’information n’est pas produite par un débat public soutenu, elle sera pour l’essentiel au mieux dépourvue de pertinence, et au pire trompeuse et manipulatrice. De plus en plus, l’information est produite par des gens qui désirent promouvoir quelque chose ou quelqu'un – un produit, une cause, un candidat ou un élu – sans s’en remettre pour cela à ses qualités intrinsèques ni en faire explicitement la réclame en avouant qu’il y ont un intérêt personnel. Dans son zèle à informer le public, une bonne partie de la presse est devenue le canal tout trouvé de ce qui est l’équivalent de cet insupportable courrier promotionnel qui encombre nos boîtes aux lettres. Comme la poste – encore une institution qui servait autrefois à élargir la sphère de la discussion interpersonnelle et à créer des « comités de correspondance » – elle distribue aujourd’hui une profusion d’information inutile, indigeste, dont personne ne veut, et qui pour la plus grande part va finir au panier sans qu’on l’ait lue. L’effet le plus important de cette obsession de l’information, à part la destruction d’arbres pour fabriquer du papier et le fardeau croissant que représente « la gestion des déchets », est d’affaiblir l’autorité du mot. Quand on se sert des mots comme de simples instruments de propagande ou de promotion, ils perdent leur pouvoir de persuasion. Ils cessent bientôt d’avoir la moindre signification. Les gens perdent leur capacité à se servir du langage avec précision et de façon expressive, ou même à distinguer un mot d’avec un autre. Le mot parlé se modèle sur le mot écrit au lieu que ce soit l’inverse, et la parole ordinaire commence à ressembler au jargon ampoulé que nous trouvons dans les journaux. La parole ordinaire commence à ressembler à de « l’information » – catastrophe dont peut-être la langue anglaise ne se relèvera jamais. »
Christopher Lasch, La révolte des élites et la trahison de la démocratie, p. 180.

Ce qui est dit de l'anglais vaut évidemment pour le français : il me semble que plus une langue sert à la presse et à l'information, plus elle se dégrade. Une langue plus marginale a de bonnes chances de demeurer plus apte à dire le réel. Le problème, c'est que l'anglais pollué contamine les autres langues avec ses mots de remplacement. C'est le cas du français, des langues scandinaves et des langues romanes. Il me semble que le français pourrait résister en se gardant des mots franglais et anglais.
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