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La langue du journal “Le Monde" (suite)

Envoyé par Renaud Camus 
Une fois de plus on constate que le relâchement syntaxique du journal, et l’apparente absence de tout contrôle de la part des correcteurs (il paraît qu’il y en a encore, ce qui semble peu croyable...), rendent les articles et leurs informations inintelligibles. Ainsi, à propos d’une pseudo-découverte de dessins du Caravage :

« Il n'en existait pas un seul. Pas une esquisse, par un coup de crayon de Michelangelo Merisi dit Le Caravage (1571-1610) qui ne soit parvenu jusqu'à nous. »

De toute évidence, on doit comprendre d’après le contexte : « qui soit parvenu jusqu’à nous », c'est-à-dire exactement le contraire de ce qui est écrit. Mais pour un journaliste du Monde il n’y a pas de différence.
C’est l’abus de la novlangue ça (war is peace, etc.). Une formule quelconque signifie tout et son contraire.
C'est le problème des explétifs... Trop compliqué pour les correcteurs. Cela dit, moi, j'ai une devise et un badge : "Touche pas à mon prote".
Ce journaliste participe, sans le savoir, à une Course à l'abîme des temps postmodernes. Mais, contrairement à celle du Caravage, elle se distingue par l'abondance de participants, et, pour ces derniers, par l'absence d'éducation, de finesse et de génie --- les trois étant souvent liées ---, de sorte que, ayant pourtant le même sens, ces deux Courses aboutissent à deux lieux opposés : le premier où le Caravage seul aurait suffi à la gloire de nombreux autres peuples (s'ils l'avaient eu) ; le dernier où l'horizon se noircit faute d'oraison.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2012, 00:13   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Renaud Camus
Une fois de plus on constate que le relâchement syntaxique du journal, et l’apparente absence de tout contrôle de la part des correcteurs (il paraît qu’il y en a encore, ce qui semble peu croyable...), rendent les articles et leurs informations inintelligibles. Ainsi, à propos d’une pseudo-découverte de dessins du Caravage :

« Il n'en existait pas un seul. Pas une esquisse, par un coup de crayon de Michelangelo Merisi dit Le Caravage (1571-1610) qui ne soit parvenu jusqu'à nous. »

De toute évidence, on doit comprendre d’après le contexte : « qui soit parvenu jusqu’à nous », c'est-à-dire exactement le contraire de ce qui est écrit. Mais pour un journaliste du Monde il n’y a pas de différence.

Oui mais enfin bof...nous connaisons tout de la caravane.
Mais que la première ait vu le jour en 1571 ça me laisse rêveur..
Utilisateur anonyme
08 juillet 2012, 01:18   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
C'est assez dur je comprends, d'avoir appris à coups de règle sur les doigts la belle langue.
Pour la voir martyrisée par un journal qui se prétend de référence.
C'est aussi pourquoi nous ne l'achetons plus.
Cher Bruno Chaouat, vous faites encore trop d'honneur aux gougnafiers qui ont laissé passer cette formulation, car le ne ici en cause n'est pas même explétif. Ce n'est pas qu'on aurait pu s'en passer ou l'utiliser aussi bien : il est bel et bien négation pleine, et transforme donc entièrement, en l'inversant, le sens de la phrase.
» C'est assez dur je comprends, d'avoir appris à coups de règle sur les doigts la belle langue.

ART. 22. Toute punition corporelle est interdite. Les punitions dont l'emploi est autorisé sont les suivantes : ...

Source : Réglement pour les écoles publiques de garçons du département des Hautes-alpes (1851)
"Que la République était belle sous l'Empire !"
J'étais un peu ironique : cette phrase témoigne d'une confusion entre le ne de négation et le ne explétif, il me semble.
Ne croyez-vous pas que la contamination en matière de dégradation linguistique n'épargne personne ?

Je trouve, pour ma part, qu'il faut faire preuve de beaucoup de vigilance, à longueur de journée, pour échapper au penchant de la facilité ainsi qu'au mimétisme instinctif qui nous conduisent à ces travers langagiers.
L'accélération de l'effondrement linguistique est fulgurante partout...
L'accélération de l'effondrement linguistique est fulgurante partout...

Pourtant, la communication ne s'effondre pas; les gens continuent de s'entendre, plus ou moins, la langue qu'ils pratiquent leur suffit, colle à son monde. Et chacun colle au petit monde qui pratique sa langue, colle à sa sphère, sa tribu, etc.

Le retour en force des "tribus" doit logiquement s'accompagner de celui des patois, de la paracommunication phatique et de la pathétique mort de la syntaxe qui servait jadis à l'esprit et à la communication des idées et des relations (au sens de rapports, narrations) à grimper les murs des alvéoles sociales, du moins dans le français du grand siècle où cette langue s'est véritablement formée (le 18ème).

Régression du langage et repli social vont de pair quand il n'est plus nécessaire de bien parler pour se faire bien entendre de qui ne nous connaît pas encore, comme il n'est presque plus nécessaire de se présenter, de se vêtir avec respect pour le regard d'autrui... Chacun peut barboter dans l'entre-soi, dans son monde-langue, dans son jus, dans son lui-même sans dommage social. Cela eût été impossible dans l'âge passé où langue et nation étaient multiplement soudées: soudées l'une à l'autre comme soudée chacune dans tous ses constituants.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2012, 00:15   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Francis Marche
L'accélération de l'effondrement linguistique est fulgurante partout...

Pourtant, la communication ne s'effondre pas; les gens continuent de s'entendre, plus ou moins, la langue qu'ils pratiquent leur suffit, colle à son monde. Et chacun colle au petit monde qui pratique sa langue, colle à sa sphère, sa tribu, etc.

.

Je ne crois pas à la fin de la culture, de la langue.
Je crois qu'elles s'élitisent toujours d'avantage, qu'elles se bunkerisent.
Je fais souvent ce parallèle avec la bonne bouffe qui, elle non plus, n'a pas disparue: elle s'est sanctuarisée.
Alors oui, il faut savoir à quel monde on veut coller, quelle langue nous voulons pratiquer, quelle sphère nous voulons fréquenter.
Savoir ce que nous voulons bouffer en somme.
"Savoir ce que nous voulons bouffer en somme."

Pour l'instant, ce sont les pilules miraculeuses de Nasr Eddin, mais ça ne vient pas...
Je ne suis pas certain de vouloir vivre dans un bunker, même fréquenté par des individus extrêmement raffinés.
Tout le monde se comprend peu ou prou et quand même parce que plus personne n'a rien à dire. Plus personne n'a rien à dire de neuf, et ce bain de l'entente sur et dans le néant a la vertu de gommer ou de masquer l'autisme général et le fait que l'outil linguistique courant est désormais impuissant à transmettre de la nouveauté, de l'impensé et du non-déjà-dit. Et personne ne semble savoir que ce qu'il dit et écrit est sans substance aucune parce ce que la voie linguistique qui lui est seule désormais disponible est éteinte, fossilisée, impuissante, desséchée, non-langue, glacis, babil sans conséquence, bruit de fond, etc..
"L'Eve future" de Villiers de l'Ilse-Adam parlait élégamment (la langue, peu ou prou, des Symbolistes), et n'avait pourtant pas grand chose à dire... puisqu'elle était programmée par l'Edison du poète romancier...
Utilisateur anonyme
09 juillet 2012, 21:43   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Ce n'est pas dans Le Monde mais j'aimerais savoir ce qu'est exactement un "natif":
En effet, les deux tiers des immigrés des pays non européens sont employés ou ouvriers contre 50 % chez les natifs.
Serais-je un natif ?
Etre né quelque part n'est donc pas seulement un hasard.
Un natif.....
[www.saphirnews.com]
Utilisateur anonyme
09 juillet 2012, 22:13   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Et sommes-nous des “native speakers”, nous qui etc ?
Le HCI ajoute que « la situation de sous-emploi chronique que connaît notre pays depuis bientôt 40 ans peut expliquer, pour une bonne part, les difficultés d'intégration que les immigrés y rencontrent »...

Alors pourquoi nous avoir fait croire qu'on manquait de main-d'œuvre si l'on a la maladie du "sous-emploi [...] depuis bientôt 40 ans", qu'il fallait davantage d'immigrés pour payer les retraites s'il n'y avait pas de travail pour eux et donc pas de cotisations additionnelles, etc. ?


... et dit « se poser la question du volume de l'immigration régulière et de la situation de l'emploi ».

Hosanna !
Utilisateur anonyme
09 juillet 2012, 22:26   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Pyrrhon
Le HCI ajoute que « la situation de sous-emploi chronique que connaît notre pays depuis bientôt 40 ans peut expliquer, pour une bonne part, les difficultés d'intégration que les immigrés y rencontrent »...

Alors pourquoi nous avoir fait croire qu'on manquait de main-d'œuvre si l'on a la maladie du "sous-emploi [...] depuis bientôt 40 ans", qu'il fallait davantage d'immigrés pour payer les retraites s'il n'y avait pas de travail pour eux et donc pas de cotisations additionnelles, etc. ?


... et dit « se poser la question du volume de l'immigration régulière et de la situation de l'emploi ».

Hosanna !

Oui !!!
Rien que ça discrédite tout le reste.
Ca fait 40 ans qu'il n'y a plus de travail, de leur propre aveu, mais il en faut encore.
Ce sont des forcenés.
Prochaine étape : remplacer "se poser la question" par vouloir régler le problème...
Citation
Francis Marche
Tout le monde se comprend peu ou prou et quand même parce que plus personne n'a rien à dire. Plus personne n'a rien à dire de neuf, et ce bain de l'entente sur et dans le néant a la vertu de gommer ou de masquer l'autisme général et le fait que l'outil linguistique courant est désormais impuissant à transmettre de la nouveauté, de l'impensé et du non-déjà-dit. Et personne ne semble savoir que ce qu'il dit et écrit est sans substance aucune parce ce que la voie linguistique qui lui est seule désormais disponible est éteinte, fossilisée, impuissante, desséchée, non-langue, glacis, babil sans conséquence, bruit de fond, etc..

Cher Francis Marche,

peut-être faut-il chercher ce rien de lumière [qui est] en chacun de nous et qui remonte bien avant notre naissance, bien avant toutes les naissances, [car] c'est ce qu'il importe de sauvegarder, si nous voulons renouer avec cette clarté lointaine, dont nous ne saurons jamais pourquoi nous fûmes séparés ? (Cioran, De l'inconvénient d'être né)
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 18:23   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Relevé par Claude Courouve-Oliviéri : ‎« Les Britanniques sont logiques avec eux-mêmes. Ils n'ont pas rejoint l'euro sans raison. » (Alain Frachon, Le Monde.)
Son commentaire (sur Facebook) :
1/ Ils ne l'ont pas rejoint tout court, et ce avec de bonnes raisons.
2/ Alain Frachon est directeur éditorial du Monde ...
Ce n'est pas sans raison qu'ils ne l'ont pas rejoint, quoi.
Merci, cher Leroy, ces relevés ne sont jamais inutiles.
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 19:23   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Francmoineau
Ce n'est pas sans raison qu'ils ne l'ont pas rejoint, quoi.
Merci, cher Leroy, ces relevés ne sont jamais inutiles.

Oui mais j'avoue que je bute là.
En quoi la phrase relevée plus haut est-elle incorrecte ?
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 19:58   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
La phrase incriminée veut dire que les Anglais avaient des raisons de rejoindre l'euro (« pas sans raison ») et qu'ils l'on fait, puisqu'il ne l'ont pas fait sans leurs raisons. Or, this is false.
En quoi la phrase relevée plus haut est-elle incorrecte ?

Elle n'est pas incorrecte, cher Maque, simplement elle signifie le contraire de ce qu'on veut lui faire dire ; ce qui est, vous l'avouerez, plutôt gênant.
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 20:06   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
« Simplement elle signifie le contraire... » Ah, Francmoineau, you're so funny !
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 20:12   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Jean-Michel Leroy
« Simplement elle signifie le contraire... » Ah, Francmoineau, you're so funny !

Très juste.
Simplement je trouve que ça fonctionne dans les deux sens.
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 20:17   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Que voulez-vous, c'est l'Inversion de toutes les valeurs !
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 20:47   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Citation
Jean-Michel Leroy
Que voulez-vous, c'est l'Inversion de toutes les valeurs !

Le plastique n'est pas et ne sera jamais une valeur.
Même les 4 pieds en l'air.
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 21:21   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
La plus vile trouvaille de l'homme.
Citation
Jean-Michel Leroy
« Simplement elle signifie le contraire... » Ah, Francmoineau, you're so funny !

Plaît-il ? À mon tour de ne pas comprendre.
Utilisateur anonyme
12 juillet 2012, 22:03   Re : La langue du journal “Le Monde" (suite)
Ce simplement donne l'impression qu'il s'agit d'un détail. Il m'a bien fait rire. Le “quotidien dit de référence” imprime n'importe quoi, sous la plume de son directeur et c'est simple. Personnellement, je trouve ça juste hallucinant, quoi !
Citation
Le Point
À la question de savoir si le constat selon lequel cet antisémitisme serait le fait notamment de jeunes se revendiquant de l'islam, Manuel Valls a répondu : "Je le crains."

Ce passage, indiqué en lien sur un autre fil, donne à penser que l'absence de syntaxe a un rôle précieux dans notre théâtre médiatique. Quand on ose du bout des lèvres approcher d'un tabou, la syntaxe s'affole sans doute pour des raisons psychanalytiques évidentes, mais aussi parce qu'un propos insensé n'est pas condamnable. C'est ce que montre entre autres, très entre autres, le jugement récent relaxant le rappeur qui appelait au meurtre contre Zemmour.

Citation
M. Youssoupha
A force de juger nos gueules, les gens le savent qu'à la télé souvent les chroniqueurs diabolisent les banlieusards, chaque fois que ça pète on dit que c'est nous, je mets un billet sur la tête de celui qui fera taire ce con d'Eric Zemmour.

Son propos n'étant pas français, il a été plus facile aux juges (et au journaliste du Monde) de (feindre de) ne pas le voir, en prétendant que l'on se plaignait du mot "con" ! (Ce mot "con" jouant ici le même rôle que le "journal laissé sur la banquette" de la RATP).
La Langue du Figaro (et de l’AFP) n’est pas mal non plus :

« Un jeune homme de dix-huit ans risque jusqu'à cinq ans de prison (...) Il a été inculpé de viol de droits d'auteurs en diffusant des liens d'au moins 150 films contre-façonnés » (AFP 13/07/2012)

Contre-façonnés ?
Le Figaro contrefait Le Monde...
Atlantico se perd lui aussi après que la grande majorité des journalistes n'eurent plus su écrire correctement.
Lu sur une étiquette d'eau minérale Perrier, ce soir (à Aix-en-Provence) :

Capturée à la source.


Capturée dans la montagne, à l'aide d'un piège et de filets, la bête a été présentée ce matin à l'adjoint au maire du village qui a reconnu dans ce spécimen un blaireau de la plus belle eau.

Pour ceux qui aurait déjà oublié ces termes fort simples et forts naturels de la France rurale: captage de l'eau, capter les eaux de surface, les eaux souterraines, l'eau de source dans le vallon etc.

(a water inlet en anglais: un point de captage).

Aucune explication, aucune excuse de Perrier, et l'on se croit dès lors fondé à supputer le pire: Perrier n'a point hésité a commettre ce barbarisme parce que sous le regard du consommateur étranger "capturé" ressemble suffisamment à l'anglais "captured" pour être aussitôt interprétable par ce consommateur; ainsi l'on renie son identité linguistique pour complaire à ceux qui en nient l'existence en refusant de s'en imprégner.

Boycottons Perrier !
Peut-être l'utilisent-ils pour signifier simplement qu'ils se sont appropriés cette eau à la source, comme les vils pirates s'approprient un navire en haute mer ? (prélever, recueillir cette eau à la source leurs semblant alors une délicatesse et une douceur d'un autre temps, d'ailleurs impropre à l'image sauvage et vigoureuse qu'ils veulent donner à la marque...)
De mieux en mieux, Le Monde. Chapeau !

« A l'issue du défilé, le chef de l'Etat s'est livré au traditionnel bain de foule. "Je serai à sa place, j'en profiterai aussi", nous a confié un légionnaire. »

Sans doute un légionnaire putschiste !
... ou sédévacantiste (littéralement, celui qui dit : « C'est des vacances... » (« qu'il lui faut », dans le cas de ce journaliste)).
"Sans doute un légionnaire putschiste ! "

Le Légionnaire a peut-être parlé au conditionnel.
16 juillet 2012, 16:15   Les destinations domestiques
Tel est le titre d’un article sur les Chinois qui prennent leurs vacances en Chine. Ces gens parlent (et écrivent) en anglais en français.
Le poste n’a pas encore dit ce qu’il en pensait...
« Le poste n’a pas encore dit ce qu’il en pensait... » (Renaud Camus à propos du Procureur Philippe Courroye proposé au poste d’avocat général)

--- Ne faudrait-il pas qu'il y ait, en général et pour notre plus grand bien, davantage de femmes proposées à "ces postes" ?! (D'ailleurs il faudrait demander au passage du facteur ce qu'il "pense" de cette "histoire de postes" !...)

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