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Communiqué n° 580 : Sur la réforme de l'école primaire

Le parti de l'In-nocence prend acte avec satisfaction de l'annonce du recentrement de l'enseignement primaire sur les savoirs fondamentaux, et tout particulièrement sur la maîtrise de la langue.

Il s'étonne cependant de l’association de cet objectif avec une baisse de l’horaire, baisse qui paraît davantage destinée à faciliter l’organisation du week-end des adultes que la continuité de l’effort des enfants.

Le parti de l'in-nocence exprime également son inquiétude quant à la capacité de la majorité du corps enseignant à retrouver les méthodes seules capables de donner une réalité tangible à cette orientation. Il estime qu'en l’absence de refonte du système de formation des maîtres et de remise en cause radicale de l’idéologie, des méthodes et de l'invraisemblable jargon enseignés dans les instituts de formation des maîtres, il sera impossible de sortir de la catastrophe éducative subie par les dernières générations d’enfants scolarisés.
23 février 2008, 08:40   Arithmétique d'école primaire
Pour abonder dans le sens de ce communiqué (les paragraphes 2 et 3 sont pleins de lucidité), je ferai un peu d'arithmétique. Dans les années 1950-60, les élèves de l'école primaire recevaient 30 heures d'enseignement : 6 heures par jour pendant 5 jours : lundi, mardi, mercredi, vendredi et samedi. Il était aussi entendu que les activités périscolaires (distractions, activités d'éveil, sports, etc.) se faisaient le jeudi. L'école était tenue d'organiser des "études" le soir : de 5 h à 6 h ou à 6 h demie, pendant lesquelles les élèves faisaient les devoirs du jour sous la responsabilité de leur maître.
Le temps scolaire méritait son nom.

Peu à peu, tout cela s'est délité : de 30 h, l'horaire hebdomadaire a été ramené (pour satisfaire la "demande sociale", comme disent les sciencieux, c'est-à-dire les groupes de pression et les corporations ?) à 27 h (en 1969 ou 70 : les cours ont vaqué le samedi après-midi), puis à 26 h; aujourd'hui à 24 h : 6 heures par jour pendant 4 jours. A ces 24 h, il faut retrancher les 5 h obligatoires de sport (au lieu de 4 antérieurement); plus les sorties dites culturelles ou les activités périscolaires, qui se font désormais pendant le temps scolaire. Il n'y a plus d'études du soir; plus de devoir à la maison.
Le temps consacré à l'étude est aujourd'hui inférieur d'au moins un tiers à ce qu'il était il y a cinquante ans. Autrement dit, six années de scolarité primaire d'aujourd'hui ne représentent plus que quatre années d'il y a un demi-siècle. Exercice d'école primaire à imposer aux ministres : sachant que le temps scolaire de 2008 ne représente plus que 60% du temps scolaire de 1958, combien d'années de "retard" accumule un bachelier de 2008 par rapport à un bachelier de 1958; un licencié de 2008, un docteur de 2008, etc. ? Déduisez-en les rudiments qui sont ignorés.

Cette diminution du temps scolaire a des effets sur la maîtrise des rudiments. Les enfants "issus de milieux défavorisés" ne sont pas les seules victimes de ce système fou : même les enfants de bourgeois sont touchés. Les seuls à échapper au désastre sont les enfants de "profs". On n'est jamais mieux servi que par soi-même (ou, dirait un mal pensant, ainsi on élimine les concurrents potentiels de ses propres enfants). L'arithmétique ignore les classes, les catégories et toutes les divisions sociales.
Les maîtres et les parents savent d'expérience que les rudiments, dans tout apprentissage (au tennis, en menuiserie, en calcul mental, en orthographe), s'acquièrent par des exercices répétés : on revoit, on révise, on reprend, on refait, on répète. Ce n'est pas très intelligent et cela ne donne sans doute pas une très belle image de l'humanité. Qu'y faire ? Il n'y a pas d'homme qui soit naturellement intelligent; personne n'apprend tout tout de suite et sans effort. L'homme parfait ou nouveau n'est pas près d'advenir.

Il est évident aussi que le "système éducatif", qui a été formaté, usiné, mis en ordre de bataille pour mener au désastre, ne s'opposera jamais à ce à quoi il a été préparé. "On ne change pas une société par décret", écrivait Crozier il y a trente ans (ou plus). On pourrait dire la même chose du "système éducatif". On peut craindre que M. Darcos, en dépit de sa bonne volonté, n'arrive à aucun résultat, s'il garde (comme c'est, semble-t-il, son intention) le système tel qu'il est.
Utilisateur anonyme
24 février 2008, 13:21   accessoirement
Fondamentalement, au sacro-saint chapitre du "faut êt' réaliste" ou autre "faisons preuve de pragmatisme", de quoi est-il plus douloureux d'être privé dans la vie sociale, professionnelle, amoureuse : d'orthographe ou de téléphone mobile ?

Ecrire, lire et compter ne sont plus des "fondamentaux", si on entend par ce terme un noyau de connaissances indispensables à la vie en société, la vie pratique, le taf, l'empoi, la séduction, l'art et la manière de remonter la veste d'un coup d'épaule, d'être un battant qui se lève tôt, un qui en veut etc. A ce modèle d'humanité triomphant, reconnaissons qu'un niveau acceptable d'illettrisme suffit largement, se révèle même, dans bien des cas, plus profitable qu'une maîtrise approfondie, pour naviguer dans le monde contemporain. Juste ce qu'il faut de capacité, c'est-à-dire fort peu, pour échanger des consignes avec des appareils n'empêche personne de "tirer son épingle du jeu", bien au contraire.

Grâce à la technique, lire, écrire, compter, redeviennent ce qu'ils ont été pour les hommes depuis toujours : un savoir accessoire, mais avec cette différence considérable que ce savoir accessoire tend à ne plus être un atout (quand il n'est pas un empêchement) à l'heure où la voie de la réussite commerciale, politique, sociale, n'est plus interdite (et le sera de moins en moins) à des individus maîtrisant très médiocrement ce savoir, équipés qu'ils sont et seront de toujours plus d'extraordinaires prothèses mentales.

Si l'effort consenti jadis à apprendre à lire, écrire, compter a pu être compris et accepté comme permettant d'accroître le champ d'action d'un individu, concourir à sa reconnaissance sociale, ce même effort, s'il n'empêche pas grand-chose de n'être pas fourni, comment maintiendrait-il ses exigences ?

Je me suis souvent demandé comment des idéologues proprement dingos ont pu parvenir au sommet de l'Education nationale y imposer leurs extravagantes théories et j'avais tendance à leur reconnaître, au moins, une intelligence stratégique très aiguë. Aujourd'hui, je crois plutôt qu'on les a laissé faire joujou avec leurs méthodes simplement parce que, déjà, obscurément, l'enjeu de la lecture, de l'écriture et du calcul n'était plus perçu comme une exigence d'avenir.
Utilisateur anonyme
24 février 2008, 15:21   Re : Communiqué n° 580 : Sur la réforme de l'école primaire
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
24 février 2008, 15:26   Lecture
(Message supprimé à la demande de son auteur)
25 février 2008, 15:06   De la morgue humaine
"son monde est une unité d'objets d'utilité et de civilisation que l'histoire a formée et continue de former"

Il était de bon aloi de penser ça, en effet, jusqu'à ce qu'on observe d'un peu plus près le monde animal pour s'apercevoir, pour ne citer qu'un exemple parmi d'autres, que les corneilles de Nouvelle-Calédonie, importées d'Australie, sont capables, non seulement d'utiliser des outils spécifiques et dédiés pour se procurer leur nourriture mais qui plus est en concevoir et en fabriquer de nouveaux.

"..Que l'histoire a formée", dites vous : les corneilles restées en Australie ne le peuvent.

Et que dire du redoutable ménate au périple planétaire qui s'apprend à déjouer tous les filets piégeurs qu'on lui tend ?

En attendant, a superbe civilisation humaine est en train de ruiner l'habitat de l'espèce, absolument partout et par tous les moyens, comme un ver dans un tronc d'arbre, comme un ver à QI d'huître.

On lira, pour un peu de modestie face au piaf à l'oeil rond sans paupière et à la cervelle d'oiseau: "L'Homme, le singe et l'oiseau" de Rémy Chauvin, Ed. Odile Jacob.
Utilisateur anonyme
25 février 2008, 16:16   Re : Communiqué n° 580 : Sur la réforme de l'école primaire
(Message supprimé à la demande de son auteur)
Utilisateur anonyme
25 février 2008, 21:04   Re : Communiqué n° 580 : Sur la réforme de l'école primaire
(Message supprimé à la demande de son auteur)
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