Le site du parti de l'In-nocence

Ne jamais employer les mots des adversaires

Envoyé par Henri Rebeyrol 
Sur France-Culture était diffusé ce matin le "débat" entre M. Merle, sociologue et IUFMiste, et Renaud Camus, qui défendent l'un et l'autre des positions, analyses, thèses, constats inconciliables. Renaud Camus s'est efforcé de "dialoguer" ou de "débattre", par amitié pour Alain Finkielkraut ou par gratitude, avec quelqu'un avec qui il n'a quasiment rien en commun, mais parce qu'il est bien élevé, poli, courtois, bienveillant, etc. il a accepté, sans les récuser, les mots de cet adversaire. Or, ces mots sont pipés.

M. Merle a expliqué que les choses avaient changé en sociologie et que l'on y accordait moins d'importance au capital culturel, l'enjeu étant le capital cognitif. Ce ne sont pas les adjectifs "culturel" ou "cognitif" (bientôt ce sera un autre adjectif), variables, changeants au gré des modes ou de la situation idéologique, qui importent, mais le nom "capital", lequel ne change pas et qui est complètement faux. Désigner les connaissances (ou la culture) par le nom "capital", c'est non seulement les rabaisser, c'est surtout user de métaphores inadéquates et faire de "l'enfumage", à la manière des sophistes de l'Antiquité, en laissant croire que l'on fait la "lutte des classes", front contre front, capital contre travail, à l'IUFM, en didactique, en pédagogie et en sociologie...

Il en va de même de "ségrégation" - terme qui a été répété cinq ou six fois par M. Merle et en lequel se résument ses positions. Les Noirs d'Afrique du Sud ou des Etats-Unis seraient humiliés et offensés s'ils apprenaient qu'un hurluberlu comparait la scolarisation gratuite, laïque, obligatoire, avec programme national, etc. des jeunes Français au sort infâme qu'ils ont subi et à l'interdiction qui leur était faite de suivre des études. Il en va de même de "favorisés" (milieux culturellement favorisés, milieux socialement favorisés), répétés x fois par M. Merle et employés par euphémisme en lieu et place de "privilégiés". Par qui sont-ils favorisés ? Qui distribue ces faveurs ? En quoi consistent-elles ? La notion ne résiste pas à un examen de quelques secondes, mais elle a été reçue, sans examen, pendant une heure.

D'autres propositions faites par M. Merle et reprises par Allain Finkielkraut ou même par Renaud Camus, sans examen véritable, ont contenu le débat dans les seules limites établies par les dogmes de la sociologie. Il a été question à plusieurs reprises de (notre) "société démocratique". Le domaine de validité du concept (notion ?) de démocratie est restreint à la seule représentation d'un peuple dans les assemblées délibératives. S'il est un domaine qui est non seulement hétérogène (d'une autre nature) et même incompatible avec la démocratie, c'est la société, mais c'est aussi la culture, la connaissance, les savoirs, et en conséquence l'école, dans la mesure où celle-ci a pour objectif de diffuser la connaissance ou de la rendre accessible à tous les élèves. L'égalité, de même, a sans doute une force argumentative massue (c'est très efficace pour faire taire l'adversaire ou pour le discréditer), mais elle est d'une autre nature et d'un autre ordre que ceux dont relèvent les connaissances et l'école... Sur ce point, Renaud Camus a été très clair, en rappelant que l'inégalité était consubstantielle à la culture et à la connaissance.

Il en va de même des "catégories". On peut penser avec des catégories, c'est même fort utile; mais les catégories n'ont aucune existence dans la réalité des choses. Saisir le réel, faire des constats, dire le monde avec des catégories, comme le fait M. Merle, à l'imitation des sociologues, c'est se condamner à rien voir du réel et donc à n'y comprendre rien.

On ne fera avancer nos positions ou nos analyses qu'en récusant les mots, notions, concepts des discours dominants et en imposant, dans les débats, nos mots, notions, concepts : en bref, en obligeant nos adversaires à venir sur notre terrain. Les stratèges le savent : combattre l'adversaire sur le terrain que l'on a choisi et ne jamais lui laisser le choix des armes.
Merci pour cette belle intervention. Elle m'incite à proposer ici cette réflexion :


Rhétorique du stigmate

Quelques traits et chausse-trapes de la novlangue post-moderne



— Libérons la parole

Le système de pouvoir en place a des ressorts matériels ; mais sa solidité à long terme dépend d'un travail sur les consciences, car il n'y a de servitude durable que volontaire. Or cette maîtrise des représentations dépend notamment d'un contrôle du langage. Pour une part essentielle, notre asservissement ou notre liberté se jouent dans une bataille de mots, et dans les "mythologies" qu'ils instituent. Aussi est-il crucial, si l'on veut fonder une véritable résistance politique, de percevoir et dévoiler les pièges de la "novlangue" qui nous aliène. Les notions de stigmatisation et de discrimination sont parmi les plus efficaces et les plus signifiantes de ces armes. Nous commençons donc avec elles un "dictionnaire des idées reçues" de notre temps, quitte à relever au passage quelques autres joyaux de la bien-pensance, objets de travaux futurs. Les italiques de ce texte sont autant de croix sur les arbres malades de la langue.


— Racisme policier, violence scolaire

Pour avoir voulu justifier la pratique des contrôles d'identité de la police, accusée de racisme, en indiquant une corrélation entre origine ethnique et délinquance, Éric Zemmour a été condamné par la justice. En stigmatisant ou discriminant ainsi certaines communautés, il est devenu pour toute la caste médiatico-politique l'incarnation du Mal qui menace l'unité républicaine et le vivre-ensemble. Qu'un ancien ministre de l'Intérieur, Jean-Pierre Chevènement, confirme à son procès que "plus de 50% des infractions constatées sont imputables à des jeunes dont le patronyme est de consonance africaine ou maghrébine" importe peu aux yeux de ces censeurs. Il est interdit, parce qu'irresponsable, de relever cet aspect là du réel ; et il serait criminel de prétendre agir en fonction de ce constat. Par une incohérence typique de cette magistrature morale, la même corrélation peut très bien être relevée tous les jours par les bien-pensants, dans leurs reportages, éditoriaux et manifestes (c'est tout un). Il sera même très bien vu d'insister sans cesse sur elle à tout propos : il suffira que ce soit pour critiquer le cynisme de l'État ou le racisme des Français qui conduisent nos concitoyen-ennes issu-e-s de l'immigration à la misère économique et à ses malheureuses conséquences en termes d'incivilités.

À l'école, ce qui est mal, c'est d'infliger aux mauvaises copies de mauvaises notes, ou de prétendre sanctionner les comportements perturbateurs. Si tel ou tel ne travaille pas ou empêche les autres de le faire, s'il insulte ou moleste son professeur, c'est là le signe d'un mal-être, d'un appel au secours, et il convient d'y répondre par le pardon des offenses. Il est ainsi quasiment impossible aujourd'hui d'exclure un élève dont le comportement perturbateur prive ses camarades de l'instruction ; presque utopique aussi d'envisager d'empêcher de passer dans la classe supérieure celui qui ne travaille pas et n'apprend rien. Les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres se sont employés à dégrader l'institution et le statut de "maître". Les réformes successives, de droite comme de gauche, ont institutionnalisé l'impuissance de l'école face aux revendications des élèves et des familles. À la moindre velléité de soutenir la dignité de l'institution et de lui permettre d'accomplir sa tâche, les belles âmes qui gèrent l'éducation nationale interviennent. Elles expliquent aux professeurs stagiaires, tableaux statistiques et menaces de non-titularisation à l'appui, que le redoublement et les exclusions engendrent discriminations et échec scolaire. Il ne leur viendrait pas à l'idée que ces décisions puissent déjà être l'effet d'un échec ; et la distinction entre causalité et corrélation leur paraît sans doute un dangereux archaïsme. Déjà, la mauvaise note ou la simple observation stigmatisent ces jeunes en souffrance et cette humiliation est la cause de leurs difficultés d'intégration : vous allez bousiller sa vie, à ce gamin ! Comment voulez-vous, en outre, qu'ils respectent une institution dont ils ne se sentent pas aimés ? — Si par surcroît de félonie, il se trouve que les mauvais résultats et les réprimandes concernent davantage les élèves de certaines communautés, il ne faudra pas s'étonner des révoltes citoyennes qui mettront à sac les représentants de ce racisme institutionnalisé. Ainsi l'éducation nationale vogue imparablement vers le modèle idéal des réformateurs : l'école des fans. Encore cette dernière admettait-elle la valeur du désormais sacrilège, car discriminant, travail à la maison.


— La novlangue mise en pièces

Ces deux exemples pourraient être rejoints par de nombreux autres, mais ils permettent déjà d'apercevoir que le discours de la stigmatisation constitue une rhétorique clef-en-main, capable en tout domaine de disqualifier l'interlocuteur contrariant. Essayons de livrer une première analyse des principes et du fonctionnement de cette arme absolue de langage.

1. Les bons et les méchants.
La caractéristique fondamentale du discours sur la stigmatisation, c'est qu'il vous place dans la position du bon, et votre adversaire dans celle du méchant. Le stigmate est la marque d'infamie imprimée aux esclaves ; c'est aussi le résultat du traitement inique réservé au Christ, au plus juste et doux et au meilleur des hommes, par les bourreaux de l'Empire Romain. Bien sûr, la dernière et la plus horrible de ces marques d'infamie est l'étoile jaune des Juifs promis à l'extermination. Dénoncer la stigmatisation, c'est se donner le beau rôle, et le plus confortable, qu'aiment tant nos bien-pensants : celui du résistant contre la tyrannie, quand la tyrannie n'est plus là.

2. L'idéologie pure.
Ou bien la tyrannie serait-elle encore-là ? Sans doute, nous dit-on puisque le ventre est encore fécond, etc. Nous touchons ici une deuxième propriété du discours de la stigmatisation : c'est une vision du monde purement idéologique, délirante, qui ne se laisse affecter en rien par le réel. Pour ramener l'adversaire au Mal absolu, on pratiquera les déformations et les inversions nécessaires, on tordra les mots et l'histoire tant qu'il faudra. Un contrôle d'identité dans un État de droit sera la preuve du fascisme d'un État raciste. L'École républicaine, en offrant la même instruction à tous, n'aura pour but que d'humilier et d'exclure les enfants des classes défavorisées.

3. Le devoir d'ignorance.
Le troisième trait de ce système d'accusation découle immédiatement du précédent : puisque le réel pourrait remettre en cause les positions de ce jeu de rôle où l'on sait d'avance qui sont les bons et les méchants, il existe un impératif catégorique d'ignorance. Ne pas voir ce qui du réel est malséant, s'empêcher de penser tout ce qui pourrait heurter l'idéologie officielle : cette auto-censure est un devoir citoyen. C'est la prise de pouvoir de la morale — et quelle morale ! — sur la vérité. Celui qui ose voir le tabou, qui ose le décrire, ou pis, agir en fonction, doit se sentir moralement coupable ; il le sera sinon juridiquement. Malheur à celui qui, après un dérapage, ne se laisse pas mener bien vite à résipiscence par l'exposition en place publique et le harcèlement bien-pensant. Il sera, pour le coup, marqué d'infâmie médiatique, juridique, si possible sociale et économique : des associations subventionnées y pourvoient. Le système expose d'ailleurs en toute bonne conscience son hostilité envers la pensée. Cette "provocation à la discrimination" qui permet de condamner Zemmour est une excellente définition de la philosophie, de la raison ou de l'esprit critique. "Discriminer" c'est "discerner", choisir rationnellement en fonction d'un "critère". Ces termes proviennent du grec krinein, désignant l'exercice du jugement libre et réfléchi. Mais de la plus noble des activités humaines, aujourd'hui comme au temps de Socrate, on fait un crime.

4. La chasse gardée de la représentation du monde.
Que le réel soit tabou ne signifie pas qu'il ne sera jamais évoqué : mais il le sera selon les rites appropriés, par les grands prêtres de l'idéologie établie — du présentateur vedette qui a ses opinions aux sociologues, philosophes, et autres intellectuels organiques d'État — parce qu'ils sauront toujours le conduire à une nouvelle consécration du dogme. Leur tâche consiste à nous faire oublier la logique et à nous empêcher de voir ce que nous voyons. Nous ayant fait perdre le sens et les sens, ils leur substitueront une représentation inversée du réel, conforme à l'idéologie. À grand renfort d'études sophistiquées, ils démontreront sur demande que la délinquance baisse et que son augmentation repose sur l'absence d'une politique de la ville, qu'à l'école le niveau monte et que sa baisse justifie toujours davantage de nouvelles réformes, qu'il n'y a pas d'augmentation de l'immigration et que cette augmentation est une chance pour la France, que la surdélinquance des immigrés n'existe pas et qu'elle est due au racisme des Français, etc...

5. L'irresponsabilité des bons, c'est-à-dire des délinquants.
Les enquêtes des sociologues, les prescriptions des réformateurs de l'École, les avis des commissions des droits partent d'un même principe absolu d'innocence. Le mal que font les délinquants n'est pas un mal, c'est une saine preuve de vitalité ; mais de plus, ce mal n'est pas de leur fait. Ils sont les victimes d'une société injuste, qui les enferme dans un rôle et les exclut. Cette culture de l'excuse, en même temps que cette imperméabilité au principe de contradiction, provient en droite ligne des exploits des sophistes et rhéteurs de l'Antiquité. L'Éloge d'Hélène de Gorgias, qui présente la belle cause de la guerre de Troie comme victime, au choix, des hommes, du destin, de la persuasion ou de ses désirs, est le modèle universel d'analyse et de revendication de nos défenseurs des droits de l'homme. Ils présentent ainsi les objets de leur compassion comme de pures mécaniques incapables de toute décision libre et rationnelle. Que pour les affranchir de toute justice ils les ramènent au statut d'animal ou d'objet, conformément aux pires des racismes qu'ils prétendent combattre, cela ne les effleure pas.

6. La culpabilité des méchants, c'est-à-dire des honnêtes gens.
Les méchants, ce sont ceux qui osent désirer des conditions de vie et de travail décentes et prétendent demander aux jeunes sensibles des banlieues, ou aux gamins plein de fougue des écoles, de respecter règlements et lois, la tranquillité ou la vie d'autrui. Depuis leurs quartiers bourgeois et leurs chaires subventionnées nos autorisés de parole se plaisent à renverser l'acte d'accusation : les bons élèves et les travailleurs paisibles sont la cause de la stigmatisation des autres ; leur souffrance est imaginaire et leur plainte immorale, rance, nauséabonde. Les mêmes trésors d'ingéniosité sophistique qui sont déployés par les belles âmes pour innocenter les délinquants servent à noircir le petit peuple qui tient, de façon tout à fait réactionnaire sinon fasciste, à garder une morale, et ne parvient pas à saisir le sens que les sociologues de la banlieue et pédagogues donnent au mot progrès. C'est un honneur de représenter ce peuple ridiculisé par les médias et écarté du pouvoir pour son archaïque sens des principes.

7. L'État grand méchant.
Il y a toutefois, au-delà des coupables ordinaires, une source absolue de l'injustice faite aux délinquants. Ce pelé, ce galeux d'où venait tout le mal, c'est l'État. Il tient ce rôle du parfait méchant, dont dépend le succès des meilleurs scénarios. Il y a là une vulgate gauchiste et chrétienne, qui n'a certes compris ni Marx ni Matthieu. Si les délinquants, les réprouvés, sont les agneaux dont il faut consacrer l'irresponsabilité, inversement l'institution est le Mal. Elle aura beau faire amende honorable et déverser à flot continu ses subventions sur les sensibles et les résistants, ce ne sera que prétexte à nouveaux mépris, nouveaux crachats.

8. L'institution émasculée.
La rhétorique de la stigmatisation n'interdit pas seulement aux individus de voir, mais à l'État de faire. Le discours agité par des associations militantes est devenu le droit. Les réformes établissent chaque jour un peu plus ce monde idyllique dans lequel les forces de l'ordre ne peuvent employer la force ni rétablir l'ordre, ni les professeurs professer. Les circulaires et les lois, en dernier recours les chartes et cours de justice européennes organisent l'apraxie des institutions et de leurs représentants. On applique une conception hémiplégique des droits de l'homme, qu'on sacralise abstraitement en oubliant la somme de devoirs et de volonté qui seule peut leur donner sens. La Justice et l'Éducation accablent sans cesse l'institution et ses représentants de nouveaux devoirs, munissent toujours ceux qui s'y opposent de nouvelles prérogatives. On organise ainsi pratiquement l'impunité des délinquants et des petits caïds et, à l'école comme à la ville, on sacralise les revendications et prédations particulières au détriment du bien commun. La police ne peut plus guère vérifier une identité, ni l'école un travail ; les représentants de l'institution, insultés et agressés, sont sommés par l'institution de tendre l'autre joue. Malheur pourtant à celui qui prétendrait changer cela : c'est un dangereux extrêmiste. Aussitôt les médias bien-pensants poussent des cris d'orfraie, se décrètent remparts de la liberté et appellent à la résistance contre le fascisme.

9. L'État grande maman.
L'État semble donc la seule menace contre la liberté. Il faut cependant remarquer qu'on prend bien garde de rejeter absolument ce grand Satan, car il est bien utile. Là encore, on sait faire fi de la logique au nom de l'intérêt. On organise l'omniprésence de la sphère publique, en même temps que son impotence. Plus précisément : on lui accorde tous les pouvoirs nécessaires — pour se mettre au service des intérêts particuliers. Jamais il n'y a eu autant de lois, de directives, de normes ; jamais moins de sens du bien commun. Dans le monde éthéré de la gouvernance, il n'y a pas de principe national ou moral : seulement le règne des lobbies, des opinions, des communautés. Cela peut certes organiser le plus strict contrôle des individus, de leurs actes et de leurs consciences ; mais c'est par un principe maternel, enveloppant. La logique horizontale des besoins et des passions de la société civile n'est pas moins contraignante que l'autorité verticale, paternelle, de l'État. Mais celui-ci a fait son temps, du moins sous sa forme classique, souveraine. Pour obtenir sa grâce, ce grand coupable de l'histoire doit servir et cajoler ses différents princes, répondre à leurs petits caprices ou à leurs grosses colères, proposer ses services, ses médiations, ses consolations (sonnantes et trébuchantes). De ce statut ancillaire, il est dit qu'il ne sortira pas, nous dit-on, sous peine de revenir au totalitarisme et aux heures les plus sombres de notre histoire. Cette histoire, on en veut plutôt la fin, et on l'obtient par la déconstruction du principe étatique et national.

10. Politique du suicide.
Le paradoxe, et la tragédie politique de notre temps, est que l'État lui-même organise sa propre destitution et vassalisation. Il rémunère ou subventionne les professeurs, éditorialistes et militants de la bien-pensance qui le calomnient nuit et jour du haut de leur magistère moral auto-proclamé. Il entérine dans le droit les présupposés gauchistes et victimaires qui le privent de toute capacité d'action. Sous le contrôle des gardes rouges de la stigmatisation, l'École ni la Justice ne peuvent fonctionner. Mais rien ne peut en fait subsister du contrat social ni de la politique : si évaluer un travail ou un comportement est par nature illégitime, violent, élitiste, raciste, il ne reste qu'à laisser les individus à leurs propres évaluations irresponsables. Ce relativisme intégral organise la pire société qui soit, si l’on peut encore appeler société cet état de nature où se heurtent à l'infini les pulsions et les intérêts de chacun. Que l'État se saborde ainsi lui-même paraît à peine croyable, mais force est de constater en lui cette tératologique haine de soi. La politique de l'État actuel n'échappe au néant de volonté que pour devenir volonté de néant. Il sait abandonner la mollesse qui le fait mépriser par les délinquants de tous ordres ; mais ce qu'il est capable de faire appliquer sans faille, ni discussion, ce sont les dogmes européistes, mondialistes et économistes qui organisent sa disparition. Ainsi les seuls principes qui nous gouvernent encore sérieusement, au-delà de l'agitation orwellienne des télécrans, perpétuent l'auto-abolition de la sphère étatique.

11. La résistance du réel.
Il est surprenant, dans la situation actuelle, que certains jeunes des territoires perdus de la république — sinon de la république tout entière perdue — continuent à respecter le bien commun et se lèvent pour aller travailler, au lieu de récriminer, toucher les allocations et vivre de la délinquance. De même, il est réconfortant que des élèves étudient encore scrupuleusement à l'école, mais on se demande bien pour quelle raison : l'institution s'interdit de les valoriser ; elle accorde plutôt une priorité absolue à ceux qui se consacrent à moquer et empêcher leur labeur. Ces restes archaïques d'une époque révolue, qu'on les pardonne aux réformateurs de la Justice et de l'Éducation : ils n'en sont certes pas responsables. Et voilà pourquoi il faudra de nouvelles réformes... — Ou bien, peut-être : voilà pourquoi le parti de la réforme nihiliste ne peut l'emporter. Malgré sa poigne étreignant depuis plus d'une génération désormais le corps social, il ne peut que s'emporter chaque jour de plus en plus violemment contre les relents archaïques de principes maudits. L'idée hérétique selon laquelle on doit valoriser les bons comportements et sanctionner les mauvais, aussi fétide et moisie soit-elle, persiste étrangement. Quelques décennies de progrès n'ont pas entièrement éradiqué des reins ni des cœurs populaires ces principes moraux millénaires, à la grande rage de nos précheurs cathodico-numériques. Leur posture de supériorité absolue sur tous les temps et les peuples est en fait le signe de leur solitude. Malgré toute leur puissance et malgré tous leurs ravages, leurs imprécations sont dérisoires : le faux ne peut que se détruire lui-même ou se briser contre le réel.


— L'impasse relativiste

"Tu ne jugeras pas." Voilà l'alpha et l'omega de notre société post-moderne. Ce commandement généreux a ses lettres de noblesse comme principe fondateur des plus belles pages des sciences humaines, des meilleures inspirations religieuses, des sentiments humains les plus nobles. Mais prétendre fonder entièrement à partir de lui une civilisation bien-pensante, c’est s’interdire à la fois l’accès au bien et à la pensée, et se nier en tant que civilisation.

On ne doit pas condamner un homme à cause de sa couleur de peau ou de son origine sociale, est-il sans cesse proclamé. Oui-da, on ne doit pas juger de façon irrationnelle, nous en sommes bien d'accord. Cependant, qui ne l'est aujourd'hui en France ? Et c'est cet État républicain tant honni qui le garantit. Mais bien sûr, il ne s'agit pas de cela : en faisant semblant de se tromper de lieu ou d'époque, en prétendant s'indigner des préjugés racistes des penseurs les plus droits ou des politiques liberticides de notre État bonasse, nos bien-pensants ne visent pas les seuls sophismes d'un racisme de caricature, mais la possibilité même de l'évaluation morale ou politique.

La logique n'étant pas leur fort, ou plutôt sa corruption étant leur petit faible, ils confondent allègrement proposition contraire et contradictoire. De ce qu’on ne doit pas condamner à cause d’une origine, ils concluent doctement qu’une origine préserve de tout jugement. Et toute origine, toute particularité, pourra justifier d’une telle immunité : ethnique, sociale, sexuelle, etc... — à l’exception du détestable Français moyen.

Mais aucune civilisation ne peut se passer durablement d'un rapport au vrai et au faux, au mal et au bien. Cette capacité à juger est bien plutôt ce qui la constitue en tant que civilisation. Le relativisme forcené qu'on prétend nous imposer est mortifère : on le voit bien dans la haine de soi, la volonté d'en finir avec toute souveraineté et toute puissance, le désir de repentance et de honte qui animent les discours et la politique de nos élites. Mais pour nos experts de la gouvernance, il ne s'agit nullement d'être relativistes avec conséquence ; car si les jugements sont interdits et criminels, c'est à l'exception du leur, qui est la loi et les prophètes. A-t-on jamais autant pourchassé les pensées déviantes que dans cette époque relativiste, au nom même de l'abolition de tout jugement ?


— Le moment politique

La rhétorique de la stigmatisation a une grande utilité pour les défenseurs du système. Elle leur permet d'immobiliser l'adversaire par la terreur : chaque fois qu'il prétend lever un coin du voile de l'idéologie, il est disqualifié comme raciste, ennemi des faibles, bourreau des déshérités. Mais cette arme de langage va bien au delà d'une astuce d'orateur : elle exprime le tabou du jugement.

C’est une histoire de balancier : la génération 68 a tant voulu lutter contre les restrictions, parfois réelles, que l’ancienne société imposaient à la liberté individuelle, qu’elle a consacré les paralogismes qui détruisent en son fondement la possibilité du jugement moral et de l’action politique. C’est en promettant de destituer ces dogmes relativistes, en critiquant la culture de l’excuse, en faisant droit à la victime et non plus seulement au délinquant, que les discours de Guaino ont fait élire le précédent président en 2007. Ces discours, attendus et entendus, avaient suscité un réel espoir populaire. Mais une fois qu’ils ont tenu leur rôle, on ne s’en est plus soucié : cet hommage du vice à la vertu n’était dû qu'à notre apparat démocratique. L’élection passée, on se remit à servir les intérêts de l’élite mondialisée et des groupes de pression communautaires. Et les cyniques-libéraux donnèrent la main aux benêts-libertaires pour continuer de détruire la souveraineté nationale et la faculté de juger.

L’interdit du jugement qui est à la base de nos sociétés post-modernes les conduit nécessairement à leur fin. Que ce soit non pour le pire mais pour le meilleur, que la perte du post-modernisme n’entraîne pas avec elle une civilisation millénaire mais laisse place à de nouvelles aurores, voilà notre tâche politique. Contre le relativisme qui sacralise les caprices de l’individu et du groupe communautaire, l'utilité et la vertu nous commandent d’une même voix de défendre et illustrer les idées du Juste et du Bien, en un mot de la politique. Les principes mêmes de la réflexion morale, qui ont été honorés par tous les siècles avant d’être bafoués par nos prétendues élites, vivent encore dans la plupart des cœurs populaires. Par leur majorité, ils peuvent nous conduire au pouvoir ; par leur vérité, ils sauveront la France.
Que Julien Fleury soit remercié de cette belle et bonne synthèse, et pour la mesure d'optimisme que renferment ses conclusions.
J'ai pour ma part trouvé le débat de fort bonne qualité. Il permettait notamment à l'auditeur de comprendre les enjeux, et il me semble que les positions ont été, des deux côtés, très clairement affichées.

M. Merle et Renaud Camus se sont tous deux comportés comme des personnes civilisées, capables d'écouter ce que disait l'autre et, pardonnez-moi, ayant une hauteur de vue suffisante pour ne pas s'arrêter aux point sémantiques que vous évoquez. Je m'attendais à bien pire de M. Merle, qui m'a fort agréablement surpris.

Vos remarques, cher Henri Rebeyrol, sont sans doute fondées mais elles me font penser à cette attitude de la gauche qui, par exemple, ne veut pas parler de "coût du travail". Quand un mot, une expression est universellement compris, pourquoi le réfuter et ne pas l'utiliser ? auriez-vous préféré à cet échange au fond qui est resté courtois une guerre de tranchées sémantique ?

On peut, par exemple, débattre de la notion de favorisé/défavorisé. De mon point de vue, un enfant qui naît dans une famille monoparentale avec une mère chômeuse et de milieu populaire me semble effectivement défavorisé par rapport à l'enfant qui naît dans une famille d'universitaires. Notez aussi que la notion d'héritiers et d'in-héritiers suppose, par définition, qu'il y a quelque chose à hériter, et donc a priori une inégalité.
Après réflexion, cher Henri Rebeyrol, je ne trouve pas mieux que le terme "favorisé", peut-être le terme "privilégié" dans le sens de la quatrième de couverture des Inhéritiers :

Si l’objectif poursuivi est l’égalité à tout prix, et l’assurance donnée à la majorité de la population que tout est fait pour qu’elle ne soit lésée en rien, culturellement, qu’elle ne subit aucune discrimination intellectuelle, que ses valeurs et ses goûts sont bien mis sur le même plan que ceux de la défunte “classe cultivée”, alors il faut dépouiller de leur privilège les privilégiés de la culture, déshériter les héritiers, défavoriser les favorisés pour les mettre à égalité avec les défavorisés.

Il me semble que M. Merle et Renaud Camus partagent une même analyse mais ont en revanche des objectifs radicalement différents : pour Renaud Camus, la mise en valeur des notions de hiérarchie ; pour Pierre Merle, l'égalité à tout prix.

Notons que Pierre Merle est un héritier, justement, et qu'il n'a pas dilapidé l'héritage de Robert Merle.
Nous ne faisons pas les mêmes analyses. Peu importe. Quant au cheveu du "coût du travail" tombé dans la soupe, je ne vois pas le rapport qu'il peut avoir avec la question soulevée.

Les amis du désastre essaient toujours de défendre le désastre dont ils sont en partie responsables en arguant que le niveau monte, que la culture progresse, que la thèse du désastre est un mirage, etc. A chaque fois, ils nous opposent un seul et même fait : une leçon de haute culture et très ambitieuse qui aurait été dispensée dans tel ou tel collège, école, lycée - toujours en "banlieue". Meyrieu, c'était les leçons de mythologie grecque qu'il dispensait à des élèves "éhabis" de cinquième. Hier, c'était une leçon de mythologie comparée - le déluge dans la Bible, dans le Coran et chez Ovide - dispensée à une classe de quatrième ou de cinquième d'un collège de ZEP. Ces exemples, ce sont les marronniers des désastrophiles et des "acteurs "du désastre. Il y a vingt-trois ou vingt-quatre ans, ma fille, qui était en CE2, dans une "école d'application", où étaient censés se former les stagiaires de l'IUFM, a reçu une seule leçon d'histoire en une année, dispensée par un maître formateur et en présence de stagiaires IUFM. Le sujet était "les trois ordres de la société féodale". Aucune des notions du sujet n'a été expliquée. Ce qui était demandé aux élèves de sept ou huit ans, c'était d'analyser un tableau d'histoire (tableau du XIXe siècle) montrant dans la cour d'un roi capétien des représentants des trois ordres, immédiatement reconnaissables à leur signe d'ordre, de commenter un texte de Suger sur les trois ordres de la société féodale et d'étudier le texte d'un historien ou anthropologue moderne sur la tripartition fonctionnelle dans l'idéologie indo-européenne. Des leçons de ce type, sans aucune préparation, sont à l'image de ce qu'est l'enseignement du désastre : les rudiments ne sont pas enseignés ou s'ils le sont, c'est comme des informations diffusées à la télévision : on en parle, mais personne ne s'exerce à les maîtriser. Les "rudiments" ne sont pas des ornements qui permettent de briller dans les salons, mais c'est ce qui est nécessaire à l'apprentissage d'un ou de plusieurs savoirs. En revanche, pour jeter de la poudre aux yeux ou pour épater la galerie, le proviseur, l'inspecteur d'académie, le formateur IUFM, lle journaliste local, le didacticien spécialiste de transversalité, quelques parents, etc. le "maître" se fait plaisir en dispensant une ou deux leçons sur le déluge, sur les mythes grecs, tels que les analyse Vernant ou Vidal-Naquet, sur la tripartition fonctionnelle, sur un poète "maudit" du XVe siècle, etc. dont les élèves ne retiendront rien et auxquelles ils n'entendront rien. La mythologie comparée, cela ne s'improvise pas en une heure, même à l'EPHE.
Je suis entièrement d'accord avec Henri Rebeyrol.
Depuis 70 l'enseignement ne vise plus à instruire les élèves mais à épater le journal local afin qu'il produise un article flatteur sur le collège untel. Il y va de la bonne réputation du collège en question et par conséquent de sa direction. Pour cela les directeurs encouragent de façon plus ou moins explicite les professeurs à dispenser un enseignement qui plaise aux médias fait au petit bonheur de toute une pacotille d'idées à la mode, celles-là mêmes que propagent , comme par hasard, les médias.
Pour M. Rebeyrol :

La remarque concernant le "coût du travail" m'est venue à l'esprit car sur les sites de l'ultra-gauche on appelle à abandonner cette notion (à savoir que le travail aurait un coût, pour eux il n'a qu'une valeur), c'est du même ordre d'idées que les notions de favorisé/défavorisé.

Pour Cassandre :

Je ne pense pas que ce soit l'objet du débat avec M. Rebeyrol. Celui-ci nous parlait du langage, pas de la nocité des IUFM, dont nous somme tous convaincus. Il me semble que Renaud Camus a raison d'employer les "mots de l'adversaire", cela permet aussi de démonter les théories contraires.
Cher Du Masnau c'est à cela que je réagissais :

En revanche, pour jeter de la poudre aux yeux ou pour épater la galerie, le proviseur, l'inspecteur d'académie, le formateur IUFM, lle journaliste local, le didacticien spécialiste de transversalité, quelques parents, etc. le "maître" se fait plaisir en dispensant une ou deux leçons sur le déluge, sur les mythes grecs, tels que les analyse Vernant ou Vidal-Naquet, sur la tripartition fonctionnelle, sur un poète "maudit" du XVe siècle, etc. dont les élèves ne retiendront rien et auxquelles ils n'entendront rien. La mythologie comparée, cela ne s'improvise pas en une heure, même à l'EPHE. "
Hier, c'était une leçon de mythologie comparée - le déluge dans la Bible, dans le Coran et chez Ovide - dispensée à une classe de quatrième ou de cinquième d'un collège de ZEP. Ces exemples, ce sont les marronniers des désastrophiles et des "acteurs "du désastre.

C’est d’autant plus suspect qu’il n’y a pas de déluge dans le Coran (ouvrage qui raconte par ailleurs, en adéquation avec les hallucinations de gloire si typiques du mahométisme, que Noé était un prophète de l’islam).
J'ignorais cela, cher Henri. On apprend tous les jours.
Dans la sourate 71, qui porte le nom de Noé, les méchants sont noyés puis précipités dans le feu (?). Dans la sourate 11, il y a une sorte d’inondation à cause d’un four qui déborde (?), mais cela ne noie toujours que le peuple de Noé. Je suppose que c’est ce dernier texte qu’on a mis sous le nez des collégiens, mais cela pose des problèmes sans fin, puisque ce n’est pas un déluge universel, comme dans la Bible ou chez Ovide.

Il me paraît clair qu’on n’a mis un texte du Coran sous les yeux des collégiens de ZEP que pour les flatter. On ne pouvait donner un plus mauvais exemple que cette prétendue leçon de mythologie comparée si on voulait démontrer le fait qu’on étudie toujours la culture littéraire au collège.
La sourate XXIII résume partiellement la Genèse et l'on y lit :

23 Noé, notre ministre, dit à son peuple : Servez le Seigneur. Vous n'avez point d'autre Dieu que lui. Ne le craindrez-vous donc pas?
24 Noé n'est qu'un homme comme vous, dirent les grands voués à l'infidélité : il veut dominer parmi vous. Si le ciel eût voulu nous éclairer, il nous aurait envoyé des anges. L'histoire de nos pères ne nous offre rien de semblable.
25 C'est un insensé. Enfermons-le pendant quelque temps.
26 Seigneur! s'écria Noé, protège-moi contre ceux qui m'accusent de mensonge.
27 Nous lui inspirâmes de construire un vaisseau sous nos yeux et suivant nos ordres et lorsque l'arrêt eut été prononcé et que la vengeance fut prête,
28 Nous lui dîmes: Fais entrer dans l'arche un couple de chaque espèce d'animaux et ta famille, excepté celui dont le sort est arrêté. Ne nous implore point pour les pervers. Ils vont périr dans les eaux.
29 Lorsque tu entreras dans l'arche avec ta famille, publie les louanges de Dieu qui t'a délivré des mains des méchants.
30 Lorsque vous en descendrez, adressez-lui cette prière : Seigneur, ô toi qui es le meilleur des guides, daigne bénir notre sortie!
31 Le déluge fut un signe de la puissance divine.
32 Nous établîmes sur ses ruines une autre nation.

( Je cite la traduction suivante : Mahomet Le Koran, traduit de l'arabe, accompagné de notes, précédé d'un abrégé de la vie de Mahomet par M. Savary, Classiques Garnier, 1951).
Votre verset 31 est fautif pour ne pas dire pire. Kazimirski propose : Il y a certes dans cet événement des signes évidents, et nous fîmes subir aux hommes nos épreuves.

Ailleurs dans le Coran, je pense que le mot arabe employé n’est jamais déluge, mais inondation.

De toute façon, il y a un obstacle majeur à l’idée du déluge universel selon la conception biblique, et le début de votre sourate l’illustra parfaitement (v. 1 à 19), c’est que, pour une cervelle de bédouin, la pluie est une chose qui arrive tous les quarante ans et qui donne un avant-goût du paradis (elle fait fleurir le désert). Le paradis de Mahomet est un paradis pluvieux, c’est suffisamment répété.

Je note en passant que l’histoire telle que racontée dans le Coran devient idiote puisque Noé n’a aucune raison de prendre les animaux sous prétexte qu’il y a un peu d’eau, mais qui ne noiera jamais que sa tribu. Ou alors il exploitait un parc animalier ?
Dans la version que j'utilise, celle que distribue l'IUFM (qui n'est pas trop édulcorée, contrairement au Coran de la Pléiade), le verset en question, numéroté ici 30, est traduit ainsi :

Voilà bien là des signes. Nous sommes certes Celui qui éprouve.

C'est proche de la version Kazimirski et il n'y a pas le mot "déluge". C'est très curieux car tout semble mener au récit du déluge mais cela se termine en queue de poisson si j'ose dire.

Voici tout le passage :

23. Nous envoyâmes Noé vers son peuple. Il dit : "Ô mon peuple, adorez Allah. Vous n'avez pas d'autre divinité en dehors de Lui. Ne [Le] craignez-vous pas ? ”

24. Alors les notables de son peuple qui avaient mécru dirent : “Celui-ci n'est qu'un être humain comme vous voulant se distinguer à votre détriment. Si Allah avait voulu, ce sont des Anges qu'Il aurait fait descendre. Jamais nous n'avons entendu cela chez nos ancêtres les plus reculés.

25. Ce n'est en vérité qu'un homme atteint de folie, observez-le donc durant quelque temps.

26. Il dit : “Seigneur ! Apporte-moi secours parce qu'ils me traitent de menteur”.

27. Nous lui révélâmes : “Construis l'arche sous Nos yeux et selon Notre révélation. Et quand Notre commandement viendra et que le four bouillonnera, achemine là-dedans un couple de chaque espèce, ainsi que ta famille, sauf ceux d'entre eux contre qui la parole a déjà été prononcée; et ne t'adresse pas à Moi au sujet des injustes, car ils seront fatalement noyés.

28. Et lorsque tu seras installé, toi et ceux qui sont avec toi, dans l'arche, dis : “Louange à Allah qui nous a sauvés du peuple des injustes.”

29. Et dis : “Seigneur, fais-moi débarquer d'un débarquement béni. Tu es Celui qui procure le meilleur débarquement”.

30. Voilà bien là des signes. Nous sommes certes Celui qui éprouve.
C'est proche de la version Kazimirski et il n'y a pas le mot "déluge". C'est très curieux car tout semble mener au récit du déluge mais cela se termine en queue de poisson si j'ose dire.

Tout le Coran est comme cela. C’est fait avec des bouts de l’Ancien Testament et des évangiles apocryphes, et le lecteur occidental croit toujours « reconnaître » les choses. Et puis, quand on lit bien, tout est aberrant, tout est tordu, plus rien n’a de sens, il n’y a que ce message répété jusqu’à l’hypnose : tout le monde est musulman, depuis Adam ; ceux qui s’obstinent à ne pas être musulmans seront impitoyablement châtiés ; courbez la tête et prosternez-vous. C’est, si l’on veut, le kérygme musulman.

D’où les traficotages récurrents du texte dans les traductions en langues occidentales, pour le rendre, au moins superficiellement, plus acceptable (celle que verse Johannus Marcus me semble, du reste, un excellent exemple).

D’où aussi les contorsions des exégètes musulmans. Selon que vous êtes au fond de la vallée de Swat ou dans l’aire culturelle chrétienne, on vous soutiendra que la Sainte Trinité consiste en le Père, le Fils et... la Vierge Marie (Coran s. 5, v. 116) ou bien que pas du tout, c’est une mauvaise interprétation, ce n’est pas ce que dit le texte. Ben voyons...

[Message complété]
"Tout le Coran est comme cela. C’est fait avec des bouts de l’Ancien Testament et des évangiles apocryphes, et le lecteur occidental croit toujours « reconnaître » les choses. Et puis, quand on lit bien, tout est aberrant, tout est tordu, plus rien n’a de sens, il n’y a que ce message répété jusqu’à l’hypnose : tout le monde est musulman, depuis Adam ; ceux qui s’obstinent à ne pas être musulmans seront impitoyablement châtiés ; courbez la tête et prosternez-vous. C’est, si l’on veut, le kérygme musulman. "

Très Jutse.

Il est évident que l'auteur du Coran a copieusement pompé au petit bonheur l'Ancien et le Nouveau Testament qu'il a grossièrement adapté à la mentalité bédouine, tout en accusant, lui, le plagiaire, les juifs et les chrétiens d'avoir falsifié leurs écritures lesquelles, sinon, auraient prohétisé l'avènement de l'islam !!! Le résultat est ce fatras indigeste d'où surnage la haine de tout ce qui n'est pas musulman . Comme on voit, dès le tout début cette religion prospère sur ce répugnant mélange de mensonge éhonté, de vanité et de terreur imposée aux réclacitrants qui ne cessera de s'imposer comme sa marque de fabrique.

(message modifié)
Vous n'y allez pas de main morte, chère Cassandre... Bref, le Coran, ce serait une reprise (commentaire d'un mien ami qui l'avait lu en entier et avait conclu, impressionné, que "ça a de la gueule")...
Et " Mein Kampf", ça avait de la gueule ?

Le fameuse poésie dont les musulmans créditent le Coran concerne à tout casser quelques sourates mekkoises ( comme par hasard ? ) soit moins de cent pages sur 500. avec le plus souvent quelques lignes à peine par page.Elle s'exprime par un rythme incantatoire qui ne manque pas, en effet, d'une certaine force (sorte de "rap", en somme, de l'époque ).
La perfection de la langue arabe dont on le crédite aussi, est elle-même sujette à caution : les spécialistes non musulmans de cette langue s'accordent à y déceler de nombreuses lourdeurs, fautes de syntaxes et autres.
Mais ce quicaractérise le texte, outre son incohérence, ses sauts du coq à l'âne, son aspect brouillon, c'est le manque absolu de la moindre profondeur, de la moindre originalité de pensée. Impossible d'y distinguer une seule formule frappante pour l'esprit comme il y en a tant le Nouveau Testament. Pas un seul évènement qui nourrisse et stimule l'imagination et la réflexion comme il y en tant dans l'Ancien.
Je suis d’accord avec Cassandre. Ce qui frappe le lecteur, et même le simple curieux qui ouvre le Coran, c’est son absence de profondeur. Il n’y a vraiment rien d’autre que les traficotages intertextuels et les menaces plus ou moins véhémentes.

Même remarque pour les interprétations « théologiques » par les fameux docteurs de la loi islamique. Un lecteur de culture chrétienne reste incrédule devant la simplicité de cette prétendue théologie, rendue encore plus frappante par la pompe et le pédantisme avec lesquels on déploie les fameuses « interprétations » ou la fameuse « jurisprudence islamique ».
Je prends un seul exemple, parce qu’il m’avait beaucoup amusé la première fois que j’ai lu le Coran, c’est celui des Sept Dormants d’Éphèse. Endormis sous la persécution de Dèce, les sept chrétiens enfermés dans une caverne ne se réveillent que sous Théodose, soit un sommeil de 168 ans à peu près. Dans le Coran (sourate 18 La Caverne), on nous explique naturellement que ce sont des musulmans. On ne sait pas combien ils sont. Par contre ils sont venus avec leur chien. Comme c’est manifestement idiot (ils ne sont menacés par rien, on ne sait pas pourquoi ils sont dans la caverne, on ne sait pas pourquoi Dieu les endort et les conserve), le texte coranique sombre à cet endroit dans la polémique la plus imbécile et explique qu’il ne faut pas chercher s’ils sont cinq plus le chien ou sept plus le chien, et surtout, le texte fait défense d’interroger des chrétiens (ou des juifs, d’ailleurs) sur cet épineux sujet. On a nettement l’impression que l’auteur de ce passage a eu quelques débats avec des chrétiens sur le sujet des Sept Dormants, desquels il n’est pas sorti vainqueur.

Tout cela est pour dire que l’affaire s’associe à un point de « théologie musulmane » des plus fondamentaux, qui est le caractère « inimitable » du Coran. En gros, le Coran éblouit l’esprit par sa perfection et toute imitation se décèle immédiatement par sa maladresse. Dans l’affaire d’Éphèse, c’est donc la version originale, la version chrétienne, qui est censée être une imitation de l’incohérente version coranique, et le fait que les chrétiens connaissent le nombre exact des Dormants est par conséquent dénoncé avec une particulière véhémence (seul Dieu connaît leur nombre).
J'ai un peu de mal à croire qu'un livre qui inspire depuis 1500 ans des hommes de l'Andalousie à la Chine soit un "traficotage maladroit", de plus "sans aucune profondeur".
Il me semble que pour arriver à quelque chose il vaudrait mieux quand même prendre au sérieux son défi et en voir la puissance, non ?
Si ce n'est que billevisées et carambouilles, il faut en informer Brague, Corbin et toute la bande.

Plus vraisemblablement, l'islam représente un rapport au monde et au divin cohérent, qui oblige à une réponse globale - qu'en général nous n'avons pas, c'est tout le problème. Qui est le pot de terre et qui est le pot de fer ?

En revanche il y a quelque chose qui m'étonne, la plupart des musulmans (de base) avec lesquels j'ai échangé ne semblent n'avoir jamais ouvert les Evangiles. Quand je les interrogeais là-dessus, ils délégitimaient par avance la simple démarche "d'aller voir ailleurs". Cela c'est troublant, cette fermeture d'esprit assumée.
"Cela c'est troublant, cette fermeture d'esprit assumée."

Au fait, depuis combien de temps ?
Il me semble que pour arriver à quelque chose il vaudrait mieux quand même prendre au sérieux son défi et en voir la puissance, non ?

Mais cher ami, cette puissance est toute négative. Il n’y a rien à examiner, il n’y a rien à comprendre, la « théologie » considérée consiste uniquement en une glorification du messager et de son message, inimitable, insurpassable, incontestable sous peine de mort, etc.

Et semblablement il n’y a aucune possibilité de progrès social, politique, économique, etc., l’ordre islamique est immuable, avec son despotisme, sa relation à la violence, sa misogynie (l’unique point sur lequel les Occidentaux osent se rebiffer un peu).

Cette puissance négative est impressionnante, elle est en train de conquérir l’Europe, pratiquement sans coup férir.
(D'un autre côté, la fermeture d'esprit n'est-elle pas très fréquente dans tous les groupes ? Si ce n'était pas le cas, nous habiterions un autre monde.)
Cher Anton, il y aurait beaucoup à dire sur votre message.

Si Lénine, Staline, Mao ou Hitler avaient vécu au 7ème siècle, ils seraient passés pour des messagers de Dieu et leur idéologie considérée comme un enseignement divin durerait encore de nos jours, surtout si les "apostats" avaient été menacés de mort comme c'est le cas dans l'islam. Mieux : la mafia dure depuis un siècle et sa "philosophie" n'est visiblement pas prêt de disparaître. Or si Al capone avait vécu au 7ème siècle et justifié sa conception des rapports humains par l'inspiration divine, il eût été une sorte de Mahomet. C'est d'ailleurs, je crois, à un parrain mafieux que Salman Rushdie avait comparé le prophète, de façon allusive, dans son livre " les versets sataniques" (que je confesse ne pas avoir lu) et Lévi-Strauss, quant à lui, compare l'islam une religion de corps de gardes, ce qui va un peu dans le même sens.
L'islam n'existe, en effet, que pour permettre à une communauté à vocation dominatrice d'exercer sa domination aux dépens des autres. Si l'on veut en avoir une idée exacte, rien ne vaut de se référer au film de Scorcese " Les affranchis". D'après le "héros" du film, l'humanité se divise en deux: d'un côté les "caves" et de l'autre les "affranchis". Les caves ce sont les besogneux qui gagnent leur vie en travaillant et en respectant les lois, autrement dit : des minables, des gonzesses . Les affranchis, en revanche, auxquels se flatte d'appartenir le héros, sont des êtres supérieurs, au-dessus des lois, qui ne vivent pas de leur travail mais du travail des "caves" qu'ils terrorisnent et rackettent, bref de vrais mecs. Moyennant quoi, ils exigent sans cesse des premiers, le "respect" et pleurnichent, entre deux menaces d'éventrement ou de bain à l'acide pour les soi disant récalcitrants, qu'on les en prive injustement (c'est montré de façon irrésistiblement comique dans le film). Qui ne voit les similitudes avec la RATP jusque dans le vocabulaire qui concerne nos "cpf" : respect, caïd, "protection " des minorités, laquelle est du même genre que celle du mac "souteneur" à sa "potétégée ", la pute : elle le fait vivre et reçoit des torgnoles et des menaces de mort si elle ne file pas doux ?
Pourquoi une telle religion dure et s'étend ? D'une part, comme je l'ai dit, parce qu'elle est née à une époque où son "inventeur" pouvait passer pour messager de Dieu, mais aussi pour une autre raison : Elle joue cyniquement sur les plus mauvais instincts de l'homme, ses deux principaux ressorts étant: la haine de l'Autre et la vanité. D'ailleurs ce n'est pas pour rien que les musulmans sont passés maître, par exemple, dans l'art de flatter autrui, ce que le vulgum pecus plus perspicace que les élites a depuis longtemps épinglé sou le terme de "salamalecs". Ce sont des orfèvres en la matière et pour cause. Ils reniflent à un kilomètre le vaniteux, leur semblable, et le mettent vite fait dans leur poche. Je soupçonne que bien des complaisances à l'égard de l'islam sont le fruit de la vanité flattée.
Ajoutez à cela, la mysoginie radicale, la cruauté implacable et vous avez tous les ingrédients d'un système mafieux.

Le message, si message il y a, de l'islam, est, décourageant, pour ne pas dire désespérant, le suivant : la haine et la vanité marchent bien mieux que la modestie et l'amour.
Quelque chose me dit que quelqu'un comme Rémi Brague, en privé, ne doit pas être loin de penser la même chose. Quant à Corbin, avec tout le respect qu'on lui doit, tant pis pour lui !
Merci Cassandre.
"Pourquoi une telle religion dure et s'étend ?"
Et continue de s'étendre en des lieux surprenants : je viens d'apprendre ce matin que Bristol, oui Bristol, est tombée. Décidément, nous vivons de sombres temps. Une bonne nouvelle toutefois : il semblerait que Bouteflika aille mieux.
Il me semble intéressant d'analyser l'islam d'un point de vue métaphysique. Son point de départ me paraît être (cf. Schuon) un rapport à Dieu, d'où tout découle. Dieu a édicté des règles et les humains seraient là pour vivre selon ce mode d'emploi correct, tel m'apparaît sa formule ; s'ils ne le font pas, leur société se dérègle et en plus ils seront punis dans l'au-delà.
A cette vision métaphysique, cohérente et forte, il y a la réponse chrétienne ! Dieu veut que les humains soient libres, Il ne propose aucun "mode d'emploi" ni aucunes régles sinon "aimes et fais ce que veux".
C'est le Dieu des théologies du Process ou le Dieu de Bergson, pour lequel l'univers est constante évolution et nouveauté, et dans lequel la liberté humaine est bienvenue.
Il me semble que c'est à partir de cette position métaphysique que l'on peut répliquer à l'islam - ou au nom de l'athéisme, mais l'athéisme ne tient pas vraiment la route (cf. le nouvel ouvrage de Frédéric Guillaud "Dieu existe", aux éditions du Cerf, qui remet au travail les preuves de l'existence de Dieu après avoir critiqué Kant :
[www.editionsducerf.fr] ).
Cher Anton, l'approche métaphysique ne contredit pas la mienne, bien au contraire. Allah veut des croyants entièrement soumis à sa loi avec pour rétribution de leur soumission les biens des infidèles sur terre en plus d'un impôt spécifique qu'ils doivent versé aux musulmans sous peine de mort et un boxon de luxe au paradis, comme le parrain mafieux veut un gang entièrement soumis à sa volonté avec pour rétribution de sa soumission le partage de l'argent braqué ou racketé au "caves" sous peine de mort et des putes de luxe offertes aux "méritants" par le patron.
» Il me semble que c'est à partir de cette position métaphysique que l'on peut répliquer à l'islam

Je ne vois pas, pour ma part, ce qu'on pourrait "répliquer" à l'islam, en fait... Il ne s'agit certainement pas d'être en mesure d'estimer quelle religion serait la "meilleure", ou la moins "conne", éventuellement, cela n'aurait guère de sens.
Pour reprendre l'approche "métaphysique", peut-être pourrait-on dire que l'islam, par l’impératif de la soumission inéluctable à des règles du jeu absolument transcendantes, laisse la part la plus grande à l'inconcevable (Dieu, l'Infigurable, pratiquement le Commandeur) dans le concevable (la vie, le temporel) ; cela implique aussi, pardon d'être si rapide et peut-être vaguement analogique, une plus grande "proximité" avec la mort, la présence de la mort dans la vie, et son irruption de plus en plus pressante dans les affaires humaines, comme irrémédiable faisant place nette dans l'indécision, l'indétermination et la confusion des vivants.
C'est peut-être la raison, également, de la gêne qui peut être éprouvée à voir la "radicale impossibilité" (Heidegger à propos de la mort) mêlée de façon si délibérée à la résolution de problèmes qui n'ont trait qu'à la possibilité de la vie la plus souhaitable pour nous, et la plus humaine.
Il n'y a rien à répliquer à l'islam, en effet, parce que l'islam ne nous parle pas, et s'il en est ainsi, c'est parce que l'islam ne parle pas à ce qui n'est pas lui. Ce qui n'est pas lui est indigne de lui. Cette impossibilité de lui donner la réplique n'est pas de notre fait, nous n'avons pas à "nous creuser la cervelle" au sujet de cette impossibilité : sa cause n'est point à rechercher en nous ou dans notre fait; elle loge en ce regard sur nous; face à qui ne vous reconnaît point comme son interlocuteur, quelle absurde vanité que de vouloir trouver la bonne réplique !

Situation hamletienne: être ou de pas être face au "mur de l'exclusion". Ce que l'autre a fait, ce qu'il envisage de faire, vous exclut comme acteur : l'objet est sans parole face au sujet. Le dhimmi se tait, ou s'il parle, ce sera pour le faire à l'unisson du maître. Que doit faire Hamlet, en effet, quand sa présence dans le jeu de l'Histoire est transparente, elle-même fantômatique, comme notre civilisation qui nous est devenue transparente comme l'air ? Hamlet est central dans toute cette affaire: il est le fils déshérité, et, de son vivant, tout autant fantôme et flottant que le fantôme de son père assassiné lui apparaissant sur les remparts. Situation de l'entre-deux, du "que faire" d'Hamlet qui ne fait rien et remet son action, sa réparation et sa vengeance au cours incertain et providentiel des choses. Simuler la folie, agir comme un fou, comme un Dominique Venner pour attirer sur soi l'interrogation des vivants... et l'attention de la Providence.

L'islam, cette religion d'omniprésence du divin, exclut si bien les hommes qui ne sont pas en elle qu'en effet, son pouvoir de séduction, si nous ne faisons rien pour l'en empêcher, peut devenir, assez facilement, sans limites, sans plus de limites que la mort elle-même.
Je ne suis pas aussi subtil que vous, Alain Eytan et Francis Marche. J'en reste à ce qui, je crois, fonde le monde occidental : la réplique ou, si vous préférez, l'argumentation rationnelle (au sens de Socrate).
Par ailleurs il semble que le monde chrétien ne fut pas aussi convaincu d'être face à un mur dans le cas de l'islam, puisque Ramon Lulle vint à argumenter avec lui, tout comme d'autres. (St Thomas n'avait-il pas aussi objecté à l'islam ?).
Si effectivement l'occident renonce au débat, parce que les valeurs sont incommensurables, alors le monde occidental n'a plus aucun sens, plus de projet, plus rien à proposer ni à atteindre, ce n'est qu'une forme d'esthétique vidée de sens et un vague mode de vie sans fondements, il faut s'indifférer à son naufrage.
"Il n'y a rien à répliquer à l'islam, en effet, parce que l'islam ne nous parle pas, et s'il en est ainsi, c'est parce que l'islam ne parle pas à ce qui n'est pas lui. Ce qui n'est pas lui est indigne de lui. Cette impossibilité de lui donner la réplique n'est pas de notre fait, nous n'avons pas à "nous creuser la cervelle" au sujet de cette impossibilité : sa cause n'est point à rechercher en nous ou dans notre fait; elle loge en ce regard sur nous; face à qui ne vous reconnaît point comme son interlocuteur, quelle absurde vanité que de vouloir trouver la bonne réplique !"
Parfaitement Exact. D'ailleurs Bruno Etienne dans son livre " L'islam radical" rapporte ce que lui avait écrit une autorité religieuse d'Al Azhar qui lui disait en substance, je cite de mémoire : vous vous intéressez à notre religion, mais nous, nous croyons trop à la nôtre pour que la vôtre nous intéresse. Elle n'a rien à nous apprendre.
» Il n'y a rien à répliquer à l'islam, en effet, parce que l'islam ne nous parle pas

Le fait est que l'islam a justement vocation à parler à tous, absolument sans exception, et c'est aussi une façon de répondre à Loïk : il n'est pas à exclure que le fait premier de cette religion, l'injonction fondamentale de l'obéissance, et la muette irrationalité qu'implique une telle soumission d'emblée placée hors de toute justification possible et discours argumentatif, il n'est pas à exclure donc que cela parle à beaucoup de monde, plus peut-être que l'effort tatillon de tenter d'établir du sens et de la compréhension.
Le fait qu'il n'y aurait rien à penser, en vérité, et rien à dire, parle à beaucoup de gens et constitue un dénominateur assez commun... On rallie les hommes aussi bien et peut-être davantage par le vide que par le plein.
Vous jouez sur les mots, cher Alain Eytan. L'islam a en effet pour ambition de devenir la religion de tous mais elle ne nous parle pas en tant que chrétiens ou juifs ou bouddhistes ou Dieu sait quoi reconnus comme tels, seulement en tant que musulmans potentiels : pas de dialogue, seulement un monologue prosélyte.
Il est bien entendu, cher Marcel, que je n'employai pas "parler à" dans un sens dialogique...
Bref, Lulle et les autres Paléologues ont produit de l'argutie sur du vide...
C'est bizarre de prétendre d'emblée qu'il n'y a rien à dire.

L'islam s'appuie sur un certain nombre de propositions, telles que :
- Dieu existe ;
- Il s'est adressé à Mahomet ;
- le Coran est incréé...

Or on sait par ex. que l'étude du corpus et de sa formation relève du rationnel, de la science. En quoi cette étude n'aurait-elle rien à dire aux Musulmans ?
De même le contenu dogmatique de l'islam est analysable et discutable comme celui de la religion chrétienne, hindoue ou bouddhiste... Pourquoi le serait-il moins ?

Sur le fond, mettre des limites à l'exercice de la raison me semble un,e position deséspérée, et pour tout dire suicidaire. Si on croit que la raison ne peut s'exercer envers les croyances, l'histoire entière de la philosophie occidentale sombre dans une sinistre farce. On en arrive au nihilisme et effectivement il n'y a rien à défendre - que des idiomes insignifiants.
Il y a quand même quelque chose qui m'échappe dans la position de certains. On tente de défendre la civilisation ; mais si on ne croit pas en ses fondements - soit le christianisme soit la raison des Lumières - , on défend alors un décor, une sorte de pièce sans âme, un arbre coupé de ses racines... On ne peut que perdre.
Il me semble essentiel d'adhérer pleinement à l'un des projets fondateurs de cette civilisation, si on veut la prolonger, et non s'attacher à un simple souvenir de ce qui fut...
De même le contenu dogmatique de l'islam est analysable et discutable comme celui de la religion chrétienne, hindoue ou bouddhiste... Pourquoi le serait-il moins ?

Parce que le dogme du Coran incréé ou le dogme du Coran inimitable ne sont que la formulation « théologique»  de la sanctuarisation du texte. La moindre mise au point, par exemple la démonstration que c’est fait avec des bouts du Protévangile de Jacques, suscite non pas doute et débat mais seulement l’accusation de rétorsion que les chrétiens faussaires ont inventé tout un corpus pseudo-évangélique, s’étendant naturellement aux évangiles apocryphes et de facto à l’ensemble des sources scripturales.

Donc non, le contenu dogmatique de l’islam n’est pas analysable ni discutable, parce que si vous essayez, on va d’abord vous rappeler que vous êtes un faussaire, qui a en quelque sorte fondé une civilisation entière, la civilisation chrétienne, sur une fraude textuelle, fraude d’une ampleur qui paraît tout simplement inimaginable. Puis on va essayer de vous tuer.
Oui, Socrate aussi risquait d'être tué. Cela n'a pas entravé la mise en place de sa recherche.
Galilée aussi. Sans regarder l'hôte ou l'inspirateur de ce site.

En somme, toute personne qui a quelque chose à perdre est prête, in fine, à tuer (si on la pousse dans ses retranchements).
Justement, la valeur de la civilisation (de la philosophie) occidentale ne serait-elle pas celle-ci : risquer d'être tué, non pour la puissance, ou pour l'Etat, ou pour Dieu, mais pour le dévoilement des fondements de ce pour quoi les autres sont prêts à mourir - et, accessoirement, à vous tuer.

(Je ne prétends pas que cette formule est bien généralisable !).
Il n'est pas non plus impossible ou extravagant d'estimer que cela n'en vaut pas tellement la peine, tout compte fait. On s'aperçoit assez vite qu'il y a énormément de choses plus agréables, intéressantes et stimulantes à lire que le Coran ou les hadiths.
Par simple curiosité (mais je sens qu’on s’achemine vers un de ces débats inextricables à l’issue desquels on se quitte fâchés), par simple curiosité, voulez-vous nous dire, cher Loïk, de quelle façon vous avez l’intention de parler avec les outils de la raison, de la science, de l’analyse des corpus, à MM. les musulmans, dont le texte fondateur est un centon de l’Ancien Testament et d’apocryphes néo-testamentaires confectionné par un bédouin illettré qui fréquentait un moine nestorien (je n’écris pas cela de façon péjorative, j’écris cela parce que ce sont des faits), du moment que MM. les musulmans prétendent 1. que ce sont les juifs et les chrétiens qui ont truqué leurs textes, 2. qu’il existe, au ciel, gardé par des anges, une sorte de Ur-Koran mystique, dont sont extraits justement les passages vétéro et néo-testamentaires qui se retrouvent dans le Coran, 3. que tout le reste des écrits vétéro et néo-testamentaires (ce qui, donc, ne se retrouve pas directement dans le Coran) consiste en fabrications et affabulations, et 4. que, inversement, ce qui ne figure pas dans les écrits vétéro et néo-testamentaires, mais qui devrait y être (et qui a donc été coupé), disait exactement ce que dit le Coran.

D’une telle « théologie », j’ai dit qu’elle était, pour une cervelle occidentale, puérile. Mais en attendant, elle n’est pas réfutable. J’aurai beau venir avec le contenu de toutes les bibliothèques et tous les musées, en disant qu’on a une assez bonne idée de la façon dont on s’est retrouvé avec la version canonique de l’Ancien et du Nouveau Testament, MM. les musulmans me répondront que tout cela est frauduleux. L’Évangile selon S. Marc n’est pas moins frauduleux que la Lettre de Jésus-Christ sur le dimanche.
» Il y a quand même quelque chose qui m'échappe dans la position de certains. On tente de défendre la civilisation ; mais si on ne croit pas en ses fondements -

Cher Loïk, vous êtes décidément incorrigible, mais si, on y croit, justement...
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