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Emeute noire à Ferguson

Envoyé par André Page 
29 décembre 2014, 05:13   Le retour des criquets stridulants
» Cher Alain, j'approuve totalement ce que vous écrivez, à quoi il faudrait ajouter ceci : il n'y a pas d'adaptation phylogénétique de l'humain à un supposé "environnement", lequel se modifie trop rapidement de toute façon, plus rapidement en tout cas que ne l'autorise le rythme des mutations génétiques supposées permettre l'évolution génétique de l'espèce. Sapiens adapte l'environnement à ce qu'il ressent comme besoins, lesquels sont sociaux, et en retour la société humaine lui est le moyen d'opérer cette adaptation.

Ça, Francis, je n'en mettrais pas ma main au feu : il doit y avoir une adaptation à deux temps : celle, structurelle, sur le plus long terme, phylogénétique, qui "sélectionne" par la force des choses les mieux survivants, si je puis dire, qui transmettent donc leur hérédité à leurs descendants, alors que les autres ne vivent tout simplement pas assez longtemps pour se reproduire ; et une adaptation "fine", ponctuelle, presque individuelle, au cas par cas, dont l'outil est une formidable faculté d'improvisation et de ressource capable de se représenter des séries d'options comportementales possibles face au danger environnemental immédiat, outil qu'on nomme "intelligence".

Vous rappelez-vous l'avènement de l'ère des criquets à ailes plates, alors que les criquets stridulants avaient tout simplement disparu, par pression environnementale ? Autre exemple qui me vient immédiatement à l'esprit, mais il doit y en avoir une foultitude : il a été démontré, je crois, que la peste noire a effectivement laissé une trace génétique définie dans le génome des survivants, que vous et moi portons vraisemblablement, comme tous les descendants des populations ayant été exposées au bacille et qui ont survécu, et qui accélère certain mécanisme de défense immunitaire.


» Nulle part, dans le réel, dans le discours et l'action sur et dans le réel, il n'est question d'adapter une nature humaine qui serait ductile à un environnement fixe. L'histoire de Sapiens, être mobile mais fixé sur son socle génétique, n'a jamais été celle-là : elle a toujours été et demeure l'exact inverse de cela.

Preuve du formidable succès du moyen d'adaptation rapide, l'intelligence, qui est devenue si performante qu'elle en est presque arrivée à transformer l'adaptation à l'environnement en adaptation de l'environnement à elle-même : je ne plaisante qu'à peine, c'est, au terme d'un long processus, censément l'arraisonnement de la nature...
Citation
Alain Eytan


Ça, Francis, je n'en mettrais pas ma main au feu : il doit y avoir une adaptation à deux temps : celle, structurelle, sur le plus long terme, phylogénétique, qui "sélectionne" par la force des choses les mieux survivants, si je puis dire, qui transmettent donc leur hérédité à leurs descendants, alors que les autres ne vivent tout simplement pas assez longtemps pour se reproduire ; et une adaptation "fine", ponctuelle, presque individuelle, au cas par cas, dont l'outil est une formidable faculté d'improvisation et de ressource capable de se représenter des séries d'options comportementales possibles face au danger environnemental immédiat, outil qu'on nomme "intelligence".

Qu'en termes galants ces choses-là sont dites. Contre l'universalité de la communauté scientifique, M. Marche conteste radicalement et expressément la théorie de la sélection naturelle.
Qu'il ait raison, "vous n'en mettriez pas [votre] main au feu"...
"Il doit y avoir" ce que que les savants affirme et que M. Marche conteste...
Et vous finissez par l'expression de votre accord avec lui sur un point sur lequel vous n'êtes d'ailleurs pas d'accord (enfin je l'espère pour vous) car M. Marche affirme là que ce qui est vrai est l'inverse exact de la théorie : la nature génétique de l'homme est fixe, son passé n'est que l'adaptation individuelle et collective à un environnement changeant - comme si, depuis trois millions d'années la nature génétique de Homo n'avait pas évolué sous l'effet de cette sélection naturelle dont M. Marche conteste l'existence.
29 décembre 2014, 11:47   Re : Tchou tchou
Citation
Alain Eytan
» au niveau quantique. Au niveau non quantique, il y a quelque chose qui s'appelle la réduction du train d'ondes

Le train d'ondes ?? où va-t-il ?

Excellente remarque. La réduction du paquet d'ondes. J'ai corrigé.

Citation
Alain Eytan
une dernière remarque : s'il est question de "constitution structurelle" de l'organisme, elle inclut la morphologie et l'organisation générale du cerveau, déterminés par le bagage génétique de l'espèce ; les différences spécifiques à l'intérieur de l'espèce relatives au "mode d'organisation et d’assemblage" que j’évoquai concernent l'organisation fine du cerveau, la plasticité neuronale entre autres, et c'est à ce niveau qu'intervient la non predictibilité chaotique.
Il est extraordinaire qu'on ait besoin de préciser la chose, tout de même ; vous ne lisez même pas, André, ce qu'on vous écrit.

Je vous lis, Alain, je vous lis.
Vous m'accordez maintenant qu'avec un Adn de chimpanzé on ne peut pas faire un cerveau d'homme.
J'en suis fort aise.
Mais vous vous rabattez maintenant implicitement sur la théorie, pour les humains, du "tout environnement". A partir de l'Adn, rien ne pourrait être prédit, sinon que ce sera un humain.
Théorie qui ne tient pas debout, et radicalement démentie par un milliard d'observations.
Par exemple : pour ce qui est des traits mentaux, deux jumeaux monozygotes se ressemblent plus que deux frères, qui se ressemblent plus que deux enfants adoptés par un même couple, etc.
Personne ne nie le hasard, le chaos, l'environnement, etc., dans la formation du cerveau et de la personne : il n'y a pas que le génotype.
Mais, pour que la sélection naturelle joue sur la partie du génotype relative aux traits mentaux, il suffit qu'il y ait une certaine corrélation entre cette partie du génotype et les traits mentaux : ce qui est le cas, sans nul doute. Si on avait remplacé le génotype d'Einstein par le mien, cet individu (Page-Einstein) n'aurait pas découvert la théorie de la Relativité. Je ne peux pas prouver cela ? Non, mais vous ne prouvez pas prouver le contraire, et c'est infiniment probable et plausible. Le nier commence à devenir aussi difficile que ça devenait difficile de nier l'Evolution des espèces en, disons, 1880, ou de nier la théorie copernicienne après Kepler, Galilée et Newton,
29 décembre 2014, 12:56   Re : Emeute noire à Ferguson
Ça, Francis, je n'en mettrais pas ma main au feu : il doit y avoir une adaptation à deux temps : celle, structurelle, sur le plus long terme, phylogénétique, qui "sélectionne" par la force des choses les mieux survivants, si je puis dire, qui transmettent donc leur hérédité à leurs descendants, alors que les autres ne vivent tout simplement pas assez longtemps pour se reproduire ;

Moi je veux bien mais veuillez considérer la chose d'un peu près. Le mécanisme que vous décrivez est idéal pour abattre l'espèce dans un milieu impondérable. Tout simplement parce que "la sélection par la force des choses des mieux survivants" est une catastrophe pour "les mieux survivants" s'ils doivent leur survie à la force de choses dont le cours est susceptible de s'inverser presque du jour au lendemain, d'une saison à l'autre. Celui qui doit la vie à un état de fait ou un "cours des choses" non maîtrisé et imprévisible devra sa mort au prochain virage dudit "cours des choses" (bouleversement climatique, catastrophe tellurique, etc.). L'espèce, dans ce que vous nommez "ce premier temps", ne peut survivre précisément parce que les variations du cours des choses procède par élimination aléatoire de classes d'individus en son sein. Je m'explique : si un facteur f du milieu a pour incidence l'élimination de la classe d'individus N-p où N représente la population et p les individus "adaptés" à f; puis qu'intervienne un autre facteur que nous nommerons g qui a pour effet d'éliminer la classe N-q où q représente les individus "adaptés" à g, nous aurons, au bout de x événements environnementaux défavorables à la somme des sous-classes de N la disparition de l'espèce. Vous me suivez ?

Il faut donc dès l'abord, dès ce que Page nomme bizarrement la préhistoire (alors qu'il devrait nommer cela antéhistoire comme le fait par exemple Pierre Chaunu qu'il cite à l'occasion, mais passons), soit ce temps praxique où Sapiens n'organisait point encore de sépultures, une action sélective de ce dernier sur l'environnement, qu'il devait, dès ce moment, prendre pour objet de son agir. L'organisation sociale lui fut le premier outil pour ce faire, les autres outils (ceux que vous faites entrer dans la catégorie des "adaptations fines, y compris individuelles), découlent de celui-là.

Concernant le reste : vous le savez, on peut jouer avec mille métaphores animales, toutes plus amusantes et éclairantes les unes que les autres, mais il demeure que les criquets ne sont pas des hommes, et qu'ils ne furent jamais non plus leurs cousins.
29 décembre 2014, 23:50   Re : Emeute noire à Ferguson
Monsieur Marche,

Vous êtes, décidément, extraordinairement, peu éducable.
On vous montre que vous faites une faute fondamentale dans la compréhension de la théorie darwinienne, universellement admise sur ce point.
On vous montre quelle est la faute que vous commettez. On vous donne, si je puis dire, un cours particulier. On vous donne des exemples. Même votre ami ou allié Alain Eytan vous lâche et vous explique - avec la plus grande prudence - que vous avez tort.
Rien n'y fait. Vous reprenez dans la même veine avec les mêmes arguments (amphigouri en plus), tout en engageant une petite guerilla verbale avec moi (bizarrement j'appelle préhistoire ce que tout le monde excepté Pierre Chaunu appelle préhistoire - comme c'est curieux comme c'est étrange, mais passons).
Etes-vous vraiment si buté dans votre erreur ? Si irrémédiablement perdu pour la rationalité ? Vous allez passer votre vie sans avoir compris la théorie darwinienne ? Mais qu'est-ce que ça vous apporte, nom d'un chien, d'être dans l'erreur ?
Ecoutez, je vais vous donner un moyen de progresser.
Expliquez-nous dans un billet prochain pourquoi le cou de la girafe s'est allongé.
Et pourquoi le cerveau de Homo a triplé de volume.
Et vous verrez que vous serez sur l'explication générale, darwinienne, et ne serez plus sur vos erreurs.
Et puis cessez vos agressions continuelles. Vous y trouvez tellement de plaisir ? Je ne vous appelle pas Marche, qu'avez-vous donc à m'appeler Page ?
"Il faut donc dès l'abord, dès ce que Page nomme bizarrement la préhistoire (alors qu'il devrait nommer cela antéhistoire comme le fait par exemple Pierre Chaunu qu'il cite à l'occasion, mais passons)..." Vous trouvez que ce ton et ce passons vous honore ? Vous trouvez qu'ils servent ce forum ?
30 décembre 2014, 19:58   Re : Emeute noire à Ferguson
Pierre Chaunu dans son Histoire et Décadence, s'appuyant sur les travaux Gabriel Camps, auteur d'un Manuel de recherches préhistoriques, retrace les étapes de l'hominisation:

p. 127
Les quarante mille ans qui nous séparent de la première tombe, les trois millions d'années qui nous séparent du premier outil n'occupent qu'une gouttelette de temps cosmique.[...]
A partir des ramapithéciens, plusieurs embranchements ; l'australopithecus se divise en deux branches. L'australopithèque robuste (trois à cinq millions d'années, 500/550 cm3, 1,5 m, rapport masse du corps/masse du cerveau, R = 90, ce bipède végétarien au caractère fortement simiesque n'est pas de la famille. De la famille, sans aucun doute, l'australopithèque gracile, plus âgé (six millions d'années, 1,10 m/1,20 m, 20 à 30 kg, 430/460 cm3 et rapport corps/cerveau favorable, R = 50 seulement). Cet omnivore connaît les outils.
L'homo habilis est un perturbateur, suivant la belle expression de Gabriel Camps ; il est peut-être aussi ancien qe l'australopithèque, les spécialistes hésitent. Certains lui ont attribué bien au-delà de trois millions d'années, jusqu'à sept millions. Ce gaillard (30-50 kg, 1,2/1,4 m, 500 à 800 cm3, R=60) n'est pas très doué. Totalement bipède, il a façonné des outils, certains sont attestés il y a trois millions d'années.
Les choses se mettent en mouvement avec les homines erecti (peut-être plus d'un million d'années (750 à 1250 cm3, 1,4 à 1,8 m, 40 à 80 kg, R=65). Ils constituent la famille des archanthropes, ils occupent progressivement l'Ancien Monde au pléistocène moyen (sept cent mille à cent vingt mille ans). L'archanthrope maîtrise le feu. Et le feu qui permet la cuisson marque une étape importante. La nourriture cuite réduit 'appareil masticatoire, qui favorise le développement cérébral et facilite l'assimilation des aliments.
Reste, pour l'homme achevé, un très court laps de temps : pour les deux cousins ennemis, Sapiens neandertalensis et Sapiens sapiens, deux cent mille ans au plus, quarante mille ans au moins.
Cette évolution, du point de vue d'un homme du XXe siècle, est, bien évidemment, une croissance et un progrès. Gabriel Camps nous l'expliquera.
Mais cette croissance s'accompagne d'une homogénéisation. Entre les deux cent mille ans et les quarante mille ans qui marquent le départ de l'homme achevé, nos préférences vont à la chronologie courte des quarante mille ans. Parce que nous n'avons pas, à ce jour, trace certaine de tombes intentionnelles plus anciennes. Notre date de naissance est là : la tombe intentionnelle est notre fiche d'état civil. Nous sommes nés entre --- 200000 et ---40000 ans. Avec la grosse tête et le rapport 45 entre la masse du corps et celle du cerveau. Et surtout avec cette conscience qui nous replie sur nous-mêmes, sous le regard de la mort qui vient.

Or voici que quelque chose se produit qu'on laisse trop souvent à l'écart. Oui, l'antéhistoire est un progrès et une croissance. Cependant cette croissance est loin d'être rectiligne. Les derniers Néandertaliens disparaissent il y a quarante mille à trente-six mille ans. Pendant les six millions d'années de l'hominisation, le futur destin de l'homme semble se jouer sur plusieurs tableaux. Nous avons vu l'australopithèque gracile et l'homo habilis en concurrence et ce combat de géants s'achève presque sous nos yeux avec la disparition de notre cousin de Néandertal. Un des traits lourds de l'Histoire m'apparaît être, dans le dernier millénaire, le désenclavement planétaire et le brassage culturel. Le processus d'homogénéisation a traversé notre longue antéhistoire.
Notre assise biologique se resserre. Je n'évoquerai pas une fois encore la disparition des dernières conduites instinctives innées [traitées dans l'ouvrage Histoire et Foi, P. Chaunu]. Le progrès de la culture était à ce prix. En revanche, je suis plus sensible à l'arrêt, semble-t-il, des mutations cérébrales. Notre gros cerveau a entre deux cent mille et quarante mille ans. L'interdit de l'inceste et, partant, la large exogamie de l'espèce ne favoriseraient guère la propagation de nouvelles mutations.


Que lit-on dans ce passage ? Rien sur la prétendue "sélection naturelle" par processus d'élimination bien sûr. Mais on y lit en revanche que la maîtrise du feu, et la division des tâches (l'un alimente le feu, pendant que l'autre sommeille, puis l'un ira ramasser du bois quand l'autre tisonnera, etc.) et la coopération sociale qu'elle impose marquent une étape importante. ON Y NOTE EGALEMENT QUE LE MANIEMENT ET LE FACONNAGE DES OUTILS SONT COMMUNS A HOMO HABILIS DONT LE RATIO CORPS/CERVEAU EST SEULEMENT DE R=60 ET A L'AUTRALOPITHEQUE GRACILE DONT R=50 (RATIO FAVORABLE), CE QUI SIGNIFIE EN CLAIR QUE LA TAILLE DU CERVEAU N'EST PAS CORRELABLE DIRECTEMENT AU MANIEMENT ET AU FACONNAGE DES OUTILS, LESQUELS, CONTRAIREMENT AU MYTHE PROPAGE SUPRA PAR M. PAGE, NE FONT DONC PAS, "GROSSIR LE CERVEAU".

On y lit en outre que le processus d'homogénéisation (une forme d'entropie) s'explique par "le désenclavement planétaire et le brassage culturel", qui eut pour effet de lisser les paramètres anthropomorphiques de l'homme moderne en une poignée de groupes humains (que certains appelleront "races") et par conséquent que les phénotypes observables sont le fruit non pas d'une soustraction comme le veut la vision simpliste et erronée d'une "sélection naturelle" mais bien d'une addition/égalisation des types par "brassage". Si "l'assise biologique se resserre" ce n'est donc nullement sous l'effet d'une amputation de ses éléments "les moins adaptés à l'environnement". Pas de vision édennique de l'hominisation toutefois, laquelle fut émaillée de génocides dont furent victimes, semble-t-il, l'australopithèque gracile et les Néanderthaliens.

p.131 [Chaunu cite A. Leroi-Gourhan, La Préhistoire.]:
Tous les préhistoriens semblent d'accord pour saluer socialisation poussée et plus grande stabilité de l'habitat : "Communautés bien structurées évoluant chacune selon une forte tradition dans les territoires de chasse bien définis"; "ce qui caractérise le paléolithique supérieur, c'est le développement des structures d'habitation".

Ce qui signifie en clair que la construction d'habitats plus stables et mieux structurés est décisive pour cette période, et qu'il convient de l'interpréter non point comme une "adaptation à l'environnement" mais bien comme adaptation de l'environnement à la société des hominiens.

Donc le paléolithique supérieur constitue une période extrêmement ambiguë et peut-être la plus importante de notre histoire (le passage de l'anté à la préhistoire). Conscient du temps, doué d'un sens religieux et d'un sens artistique poussé, l'hominien a basculé, il est devenu un homme. Il a aussi prodigieusement muté, il s'est inventé en nombre. Or cette société d'hommes nombreux vit comme les hominiens ses ancêtres. Survolant l'ensemble du paléolithique (inférieur et moyen d'une part, supérieur d'autre part), Jean Guilaine [auteur de La France d'avant la France] note avec raison : "une définition d'ordre économique peut servir de dénominateur commun pour situer cette longue phase..." : l'homme au cours de ces millénaires (l'homme et ses ancêtres) "n'a jamais produit sa nourriture". Il est toujours resté un prédateur : "la collecte des végétaux, la chasse, la pêche ont été ses seuls moyens de subsistance".
Voilà le point entre la longue antéhistoire et la première préhistoire mais à la fin de la période de la prédation et de -- 30000 à --- 40000 je vois une ultime mutation : une mutation de l'habitat, du foyer et dans l'armement et la technique du chasseur.


Donc, pour P. Chaunu et les auteurs qu'il cite, qui sont tous des autorités dans la discipline, point de "compétition pour la survie" mais bien une organisation sociale croissante doublée d'une expansion démographique qui s'affirment, d'une part, et d'autre part la stabilisation de l'habitat, autrement dit l'action sur l'environnement, laquelle accompagne et soutient cette chaîne de mutations que constitue l'hominisation.
Ce n'est qu'à partir du néolithique que le nombril de l'homme est devenu ce qu'il est. Totalement ignorée des paléontologues, cette ultime évolution de l'homo sapiens n'en a pas moins entraîné la formidable expansion démographique de l’espèce.

Entre le quatrième et troisième millénaire, la population passe en effet de quinze à cent cinquante millions d'individus. Comment expliquer un tel phénomène ? D'une seule voix, les savants l’attribuent à la découverte de l'agriculture qui, selon eux, aurait stabilisé l'espèce humaine et facilité sa prolifération. Rêverie commode.

Mes propres recherches dans ce domaine m'ont conduit à la certitude que nos lointains et distingués ancêtres ne coupaient ni ne ligaturaient le cordon ombilical. Celui-ci se détachait de lui-même quelques jours après la naissance, laissant paraître, en lieu et place de l'opaque repli de chair nommé nombril, une membrane translucide qui durcissait peu à peu jusqu'à présenter l'aspect d'une lentille de verre, espèce de troisième œil élégamment niché au beau milieu des abdomens antédiluviens et renvoyant la lumière du jour au travers d’une riche pilosité.

Mais pour la partie femelle de l'humanité d'alors, cette ombilicale lentille n'était autre qu'un étonnant judas, œil-de-bœuf à l'usage très exclusif des fœtus de ce temps-là, assez favorisés pour se permettre, avant de naître, de jeter un regard curieux sur le monde extérieur. Or, il s'avère que d’une telle observation résultait fort peu souvent le goût d'aventurer une naissance et quantité de futurs nouveau-nés préféraient s'en tenir là. La plupart d’entre eux s'éteignaient ainsi dans le ventre maternel, sans souffrance, bien au chaud, avec des rictus d'opiomanes, méditatifs jusqu'à l’évaporation, spectateurs absents d'un monde auquel ils ne voulaient pas se mêler.

La stagnation démographique semblait ainsi irrémédiable. C'était sans compter avec la détermination des hommes-nés-quand-même, redoutables aventuriers dont l'énergie, depuis, ne s'est pas démentie. Et ils firent si bien qu'ils inventèrent le nombril, ligaturèrent le cordon avant la formation de la divulgatrice autant que dissuasive membrane, plongeant le fœtus dans une obscurité propice à l'envie d'en sortir. C'est à ces individus déterminés à faire nombre qu'il faut attribuer la croissance de l'humanité, et à rien d'autre. Alors, quand on vient me parler d'agriculture et d'outils...
Après avoir condamné "la paléontologie française", "les biologistes" et la théorie de la sélection naturelle (de Darwin, me permets-je de le rappeler), M. Marche se sent un peu seul et entreprend de nous prouver qu'il a raison par de longues citations en bleu vif de Pierre Chaunu, qui évidemment ne prouvent nullement ce qu'il veut prouver, comme tout un chacun peut s'en rendre compte - et ces citations eussent-elles été en vert pomme ou en rouge sang que le résultat eût été le même.
Cher Rothomago, comme toujours c'est superbe !
Cher Page, c'est que nous avons ici l'habitude des mauvais coucheurs. Francis en est un, entre autres plus ou moins assagis, mais tous les mauvais coucheurs ne sont pas Francis et nous pardonnons beaucoup à ceux comme lui qui, même si l'on est en total désaccord avec ce qu'ils écrivent, ont souvent des fulgurances stimulantes pour la réflexion.
Hormis les habituels et insupportables besogneux arrivistes, qui serait assez fou pour quitter volontairement un si doux ventre rond ?


Ces autoportraits de Renaud Camus sont parfois surprenants...
02 janvier 2015, 15:50   Re : Emeute noire à Ferguson
Une question.

Les billets depuis le 30 décembre à 22h09 jusqu'au 02 janvier à 04h03 ont eu, comme sujet indiqué, "Vieille histoire de derrière les fagots", les précédents et les suivants ayant eu, comme sujet indiqué, "Emeute noire à Ferguson".

Quelque'un peut-il m'expliquer qui attribue ces noms de sujet. Un modérateur ? Qui lui même écrit sur ce forum ? R. C. ?
Quelqu'un d'autre ?
Merci.
02 janvier 2015, 17:00   Re : L'effet à contre-emploi
Citation
André Page
Une question.

Les billets depuis le 30 décembre à 22h09 jusqu'au 02 janvier à 04h03 ont eu, comme sujet indiqué, "Vieille histoire de derrière les fagots", les précédents et les suivants ayant eu, comme sujet indiqué, "Emeute noire à Ferguson".

Quelque'un peut-il m'expliquer qui attribue ces noms de sujet. Un modérateur ? Qui lui même écrit sur ce forum ? R. C. ?
Quelqu'un d'autre ?
Merci.


Té en voilà une vraie question ! Je vais vous dire : c'est la Petite Souris des In-nocents qui batifole rien que pour vous épater le lard, mon bon André...
04 janvier 2015, 15:26   Re : Emeute noire à Ferguson
Soit cette déclaration de M. Page suite à mes citations de l'ouvrage de Pierre Chaunu (voir message "en bleu" supra) .

Depuis que Homo ou son ascendant immédiat a inventé l'outil, il y a trois millions d'années, le volume de son cerveau a triplé.

Pierre Chaunu nous dit tout autre chose: que homo habilis et l'"australopithèque gracile" avaient des tailles de cerveau (le ratio corps/cerveau) inégales cependant que l'un et l'autre taillaient et façonnaient des outils.

Pas de contradiction ? Il faut considérer qu'entre Chaunu et Page, c'est Page qui a raison et qui dit le vrai et que ces éléments fournis par Chaunu et des paléontologues de renom "ne prouvent rien" et n'invalident en rien les affirmations doxiques de Page sur la "sélection naturelle" maîtresse du jeu ?

Chaunu nous décrit que c'est la maîtrise du feu qui a conduit les hommes de l'antéhistoire à parachever l'hominisation à travers une collaboration et une organisation sociale que permit une explosion démographique et que, ce faisant, c'est par l'action combinée des facteurs suivants que Sapiens a émergé, à savoir :

1° la collaboration interhumaine dans une division des tâches qu'impose la conservation du feu et l'amélioration des pratiques de chasse collective ;
2° la construction d'habitats fixes soit une action sur l'environnement ;
3° une explosion démographique rendue possible par des habitats fixes qui permettaient aux femmes de mieux conduire à terme leurs grossesses.

Chaunu nous présente un parcours d'hominisation porté par un processus agrégateur et cumulatif : croissance démographique, collaboration et entraide humaine pour une action ciblée sur l'environnement (chasse efficiente, construction d'habitats) qui est tout à l'opposé du parcours sélectif et retrancheur de la cosa ditte "sélection naturelle" lequel fait toute la doxa paléontologique que défend Page. Dans cette doxa, l'environnement est l'agent actif, si l'on peut dire, et l'hominidé en ressort comme l'agi de l'environnement. Ce qui revient à dire que les travaux de Chaunu et des paléontologues qu'il cite mettent cul par-dessus tête la doxa néodarwinienne dont M.Page se fait le champion dans nos colonnes.

Et cela "ne prouve rien" ? Cela ne pèse pas dans le débat ? Cela n'est susceptible d'invalider en rien les déclamations néo-darwiniennes péremptoires de M. Page sur "la sélection naturelle" et "la survie du plus apte" qui auraient abouti à l'homme moderne ?

M. Page répond à mes messages pourtant techniques et documentés (les citations de Chaunu) d'un revers de main : "cela ne prouve rien" et sans se priver de dénoncer en eux un imaginaire "manque de courtoisie" à son égard. Mais où et quand a-t-il produit ici le moindre début de "preuve" susceptible d'étayer ses affirmations sur "la sélection naturelle" moteur de l'évolution ? Quels éléments concrets, documentaires et textuels nous a-t-il jamais apportés ?

On attend encore, en toute courtoisie, qu'il consente à nous les livrer.

[message modifié]
Oui, je croyais, les yeux fixés sur nos aïeux,
Que l'homme avait prouvé superbement son âme.
Aussi, lorsqu'à cette heure un Allemand proclame
Zéro, pour but final, et me dit : — Ô néant,
Salut ! — j'en fais ici l'aveu, je suis béant ;
Et quand un grave Anglais, correct, bien mis, beau linge,
Me dit : — Dieu t'a fait homme et moi je te fais singe ;
Rends-toi digne à présent d'une telle faveur ! —
Cette promotion me laisse un peu rêveur.
Victor Hugo
04 janvier 2015, 17:15   Re : Emeute noire à Ferguson
Rappelons quand même, que Pierre Chaunu, qui selon M. Page "ne prouve rien" dans cet ouvrage majeur, Histoire et décadence, qui reçut le Grand prix Goubert en 1982, fut professeur d'histoire moderne à la Sorbonne jusqu'à sa retraite. Pendant vingt-six ans d'université, il a participé a plus de quatre cents jurys de thèses et dirigé plus de quatre cents mémoires de maîtrise. En 1974, il fut co-fondateur de la Faculté Libre de Théologie Réformée d'Aix-en-Provence, devenue de nos jours Faculté de Théologie Jean Calvin, et y professa.
Il fut élu membre de l'Académie des Sciences Morales et Politiques en 1982 (section Histoire et Géographie) et son président en 1993. (source : Wikipédia).

Cet ouvrage ramasse ainsi quatre décennies de travaux et de réflexions sur l'histoire des sociétés humaines en général, occidentales en particulier.

Mais cela ne saurait impressionner M. Page, face aux certitudes de qui rien ne pèse bien lourd, et qui se satisfait d'éliminer toutes thèses opposées aux siennes en les qualifiant de "vaticinations".

Pierre Chaunu avait coutume de dire que "tout historien doit être polémiste". N'eût fait ou dit rien que cela, nous devrions déjà lui en être reconnaissants.
04 janvier 2015, 17:28   Re : Emeute noire à Ferguson
"Je voudrais dire aux nouveaux venus, si l'on me passe ce geste un peu déplacé (mais tant pis, j'ai l'habitude), qu'ils doivent être plus prudents, plus attentifs à ce qui s'est écrit ici avant qu'ils n'y arrivent, qu'on ne déboule pas dans un forum comme celui-ci en faisant le mali"
Cher Jérôme, merci à vous aussi et pour cette mise au point. Mes meilleurs voeux, à nouveau, pour la nouvelle année.

En effet, Monsieur Page et monsieur Nolain, vous avez déboulé, ainsi que le dit dit Jérôme, sur ce forum, vous vous y êtes installés comme chez vous, avez pris toute la place, mis les pieds sur la table et accaparé la parole pour critiquer avec suffisance les goûts et les opinions des maîtres de céans et de leurs habitués. Comment voudriez vous qu'on vous fît bon accueil ?
04 janvier 2015, 20:06   Re : Emeute noire à Ferguson
La troisième "ligne de force" des thèses développées par Chaunu dans cet ouvrage ressort elle aussi à un régime agrégateur dont le principe est le contraire de celui d'un filtre (celui de la "sélection naturelle") : cet autre régime agrégateur qui supporte l'évolution selon Chaunu se rapporte à la deuxième loi de la thermodynamique, soit l'entropie, qui contribua à ce qu'il nomme homogénéisation par brassage. C'est ainsi que, dans cette pensée, l'uniformité relative des phénotypes, loin d'avoir été obtenue par filtration et élimination des traits "non désirables", s'est constituée par dissolution et fusion de la diversité des traits phénotypaux originels ou préexistants.

Cette pensée est plus cohérente que la doxa néodarwinienne parce que celle-ci n'intègre aucunement le facteur d'expansion démographique. Comme j'ai tenté de l'expliquer à mes interlocuteurs supra, le régime réducteur-filtrant de ce que l'on nomme "sélection naturelle" est mortel pour l'espèce dans un environnement naturel instable. Je me permets de citer à nouveau cette démonstration purement algébrique :
Je m'explique : si un facteur f du milieu a pour incidence l'élimination de la classe d'individus N-p où N représente la population et p les individus "adaptés" à f; puis qu'intervienne un autre facteur que nous nommerons g qui a pour effet d'éliminer la classe N-q où q représente les individus "adaptés" à g, nous aurons, au bout de x événements environnementaux défavorables à la somme des sous-classes de N la disparition de l'espèce.

Mais évidemment, ayant jugé son interlocuteur "inéducable", M. Page n'est pas près de se soucier des arguments que je lui soumets. Qualifier brutalement ma personne en termes péjoratifs lui suffit pour convaincre, du moins en est-il persuadé.
05 janvier 2015, 00:56   Re : Emeute noire à Ferguson
L'Essai de prospective démographique de Pierre Chaunu, qui démontre que l'Humanité est menacée par la dépopulation, est en effet fort réjouissant : je me demande comment M. Page va pouvoir répondre à ça...
05 janvier 2015, 08:53   Re : Emeute noire à Ferguson
Les bons historiens font de piètres prospectivistes.
05 janvier 2015, 15:37   Re : Emeute noire à Ferguson
Les bons historiens font de piètres prospectivistes.

Est-ce qu'on ne peut pas en tirer quelques leçons concernant leur capacité à interpréter les faits historiques (sans remettre en cause leur compétence dans la mise au jour de ces faits)... ?
05 janvier 2015, 17:36   Re : Emeute noire à Ferguson
Epineuse question. Pour Chaunu, il y a progrès quand la transmission verticale de l'acquis culturel devient possible et celle-ci ne devient possible qu'à compter d'un certain seuil de densité démographique. Ce terme de "densité" recouvre une notion très importante dans les théories de l'information : celle-ci circule mieux en milieu dense et les chances d'une réussite de la transmission verticale en sont augmentées. Cet ouvrage offre l'intérêt de placer la décadence d'abord, la décadence biologique qui fit perdre à Sapiens sapiens et à Sapiens neanderlalensis leurs conduites innées, les derniers complexes instinctifs qui leur restaient et qui se faisant rendit possible le progrès humain, lequel en ressort comme lié à deux facteurs : la masse globale de l'information et l'efficience de la transmission.

En 1981, quand Chaunu travaille à ce livre, il relève que "nous sommes entrés depuis vingt ans dans une phase où la nature de l'information commence à changer, en une phase où, les circuits étant embouteillés, la culture est moins liée à la masse qu'à la qualité et par conséquent au tri."

Il est une question métahistorique et épistémologique fondamentale qui pourrait véritablement s'apparenter à celle de la poule et de l'oeuf : la décadence est-elle préparatoire, et donc un préalable (un "prérequis" comme on dit aujourd'hui) à un progrès chronologiquement postérieur, ou bien faut-il considérer qu'elle est le prix à payer, souvent avec intérêts, pour le progrès qui s'accomplit par bonds ou ressauts, après que ce prix a été acquitté en intégralité ?.La décadence s'accompagne d'un appauvrissement des flux quantitatifs concomitant à un raffinement de la qualité de la chose léguée : le volume de l'information est évidemment lié à la masse humaine, celle que l'on atteint par communication latérale dans l'espace, celle que l'on atteint par communication verticale dans le temps.. La triple équipollence perçu par Chaunu à ce moment est donc la suivante : diminution des flux, dilution des densités démographiques en Occident en 1981 (les lois sur l'avortement en France avaient été adoptées sans opposition violente ou marquée de la société civile) et raffinement des œuvres de l'esprit.

Donc : Chaunu interprète le blocage informationnel de son temps (1981) qui privilégie par nécessité la qualité sur la quantité d'information et de savoir (à cause des "circuits embouteillés"), comme équivalent à ce qu'il appelle un siècle de Périclès qui dura dix mille ans et qui, en dix mille ans, ne totalisa pas beaucoup plus de destins que le monde en deux siècles à l'époque du miracle grec et qui fut celui du classicisme de Lascaux, un premier sommet dans l'histoire humaine. Il met en relation ces deux moments : la faible densité démographique du temps de Lascaux et celle de son temps ; le sublime des "hommes des cavernes qui furent de grands théologiens et de grands artistes" et celui de la vie de l'esprit en son temps et complète son interprétation en voyant dans l'affaiblissement démographique de son époque à la fois le signal et l'élément corroborant de sa vision.

Chaunu ignorait alors -- et les savoirs en Occident ne lui permettaient aucunement d'accéder à la connaissance qui lui faisait défaut -- qu'une décennie plus tard allait se produire la plus grande révolution des technologies de l'information de l'histoire humaine, laquelle allait radicalement bouleverser cette donne en permettant l'advenue de la communication réticulaire planétaire permanente (soit la fameuse latéralité même qui soutient, supporte, accompagne et sanctionne le retour à la densité des échanges humains et à la densité démographique, réelle et virtuelle).

L'explosion de la latéralité-quantité a donc bien eu lieu avec la venue de l'ordinateur individuel et d'internet, et cette inondation par les flux d'information s'est opérée au détriment de la qualité et du classicisme mais encore, ce bouleversement se manifesta en un moment d'explosion démographique (un malheur n'arrive jamais seul), soit tout à fait comme aurait pu l'envisager Chaunu lorsqu'il nous décrivait la phase où "les circuits étaient embouteillés" quand à cette phase ne pouvait que succéder celle que je vous décris. En clair, la configuration en laquelle nous sommes plongés aujourd'hui --- explosion démographique, explosion de la latéralité de la transmission et trivialisation des contenus transmis -- valide à contrario ses analyses et sa pensée : il se passe ce qui devait se passer dans sa vision, laquelle ne péchait dès lors que par le défaut de n'avoir su correctement projeter sur l'axe temporel -- de n'avoir point correctement daté dans le futur -- le retournement prévisible de la situation de 1981.

La poule et l'oeuf : le retour à la croissance démographique en France dans la dernière décennie du XXe siècle peut-elle est corrélée à la densité nouvelle des flux informationnels, celle-la produisit-elle celle-ci ou l'inverse? C'est ici que les relations de cause à effet perdent de leur signification pour constituer des schèmes historiaux autonomes : l'une n'est point "la cause" de l'autre mais l'une et l'autre font un tout qu'engendre le cours de l'histoire dans une dynamique complexe dont les lois furent en partie décryptées par cet auteur. De cela, nous lui devons faire crédit. De son manque à dater la vague de latéralité qui a déferlé sur nous dans la dernière décennie du siècle, nous devons le pardonner.

Chaunu était bon historien, et ses analyses restent solides, rationnelles et corroborées dans l'historiographie, mais il lui manquait, comme à ses contemporains, l'art (l'artifice) prévisionnel, soit la datation des schèmes historiaux futurs dont toutes ces analyses justes et fondées disent la nécessité logique de la survenue.
05 janvier 2015, 18:07   Re : Emeute noire à Ferguson
M. Marche a écrit (le 4 janvier) :
" M. Page répond à mes messages pourtant techniques et documentés (les citations de Chaunu) d'un revers de main : "cela ne prouve rien" [...] On attend encore, en toute courtoisie, qu'il consente à nous livrer [les éléments de réponse]."
Puis a écrit (le même jour) :
"Mais cela ne saurait impressionner M. Page, face aux certitudes de qui rien ne pèse bien lourd, et qui se satisfait d'éliminer toutes thèses opposées aux siennes en les qualifiant de "vaticinations". "
Puis a écrit (le même jour encore) : "M. Page n'est pas près de se soucier des arguments que je lui soumets."

La charte du forum stipule : "Les digressions de nature à faire perdre le fil d’une discussion sont en règle générale malvenues".
Ce fil s'intitule "Émeutes noires à Ferguson", et, plus généralement, porte sur les Noirs et l'existence hypothétiques de différences raciales.
Ceci n'a aucun rapport avec la question que vous agitez.

Pourquoi n'ouvrez-vous pas un fil sur cette question ?
Appelez-le 'L'erreur de Darwin", ou "La théorie de la sélection naturelle réfutée" ou "La théorie de la sélection naturelle contredite par l'hominisation", ou tout autre titre qui vous semblera le mieux correspondre à votre sujet ou votre projet.

Cela présentera un autre avantage : il y a quelques jours, dans un message supprimé depuis par le modérateur, après m'avoir insulté, vous m'avez spontanément promis de "m'ignorer" - ce comportement vous permettra donc de cesser d'enfreindre votre engagement.

Sur cet hypothétique fil vous serez d'ailleurs de moi ignoré ou par moi laissé tranquille : je n'ai pas envie de discuter de tout avec tout le monde, et défendre la théorie de la sélection naturelle face à un incrédule ne m'intéresse pas plus que ne m'intéresserait la défense de la théorie de la révolution de la Terre autour du Soleil ou le combat contre la phrénologie.

Quant à votre dernier message, il porte sur une autre question encore. Là aussi, on ne peut que vous suggérer d'aller le placer à un endroit plus approprié.
05 janvier 2015, 21:48   Re : Emeute noire à Ferguson
On attend encore et toujours, M. Page, et toujours avec la même courtoisie, que vous consentiez ...
06 janvier 2015, 08:04   Re : Emeute noire à Ferguson
» Je m'explique : si un facteur f du milieu a pour incidence l'élimination de la classe d'individus N-p où N représente la population et p les individus "adaptés" à f; puis qu'intervienne un autre facteur que nous nommerons g qui a pour effet d'éliminer la classe N-q où q représente les individus "adaptés" à g, nous aurons, au bout de x événements environnementaux défavorables à la somme des sous-classes de N la disparition de l'espèce

Francis, votre présentation "algébrique" de la chose paraît un peu caricaturale : d'abord le milieu ne change pas toujours si rapidement que cela, il peut même être relativement stable pendant longtemps, ce qui ne veut pas dire que la catastrophe ne puisse vous tomber sur le coin de la figure en un tournemain, comme cela est parfois arrivé ; ensuite, et surtout, vous semblez encore penser l'adaptation de façon beaucoup trop logique, si l'on peut dire, comme "tout ou rien" : une population n'est jamais définitivement adaptée à quoi que ce soit, je crois, puisque le moteur même de la sélection naturelle est la variation héritable, autrement dit c'est la mutabilité génétique aléatoire qui constitue le garant de la possibilité qu'au sein d'une population donnée, apparemment "adaptée" à tel milieu, il y ait toujours quelques individus un peu différents qui auront la possibilité de mieux s'adapter à telle variation, et donc davantage de chances de se reproduire.

Revenons à la catastrophe et à la peste noire, qui constitue une bonne illustration de la diversité génétique salutaire toujours présente : il se trouve que lors de l'épidémie, certains individus chanceux possédaient une particularité génétique qui codait pour des protéines assurant une meilleure réponse immunitaire au bacille, ce qui leur donnait plus de chances de survie ; eh bien, les populations européennes ayant été exposées à la peste se sont reconstituées à partir de ces survivants, et ont donc transmis cette particularité à leurs descendants. C'est très simple et apparemment, à ce niveau de déterminisme, la théorie rend assez bien compte de ce qui est observé...

Peut-être d’ailleurs un peu trop simple pour ce qui concerne le processus de l'hominisation... Je serais plutôt d'accord avec vous pour conjecturer que l'homme soit un peu plus compliqué que ses gènes, même dûment "sélectionnés", bien qu'il en soit probablement, à un plan général et plus élémentaire, le produit.

Je suis tombé par hasard sur un article intéressant qui vous plaira certainement, de l'anthropologue Terrence Deacon, qui envisage ce qui demeure tout de même un mystère de façon plus fine, et émet entre autres l'hypothèse que la complexité propre à l'homme soit le résultat d'un "relâchement de la sélection", justement ; en voici l'incipit :

« Le loufoque Garner rêvait, avec d’autres, de singes domestiqués, s’approchant encore du niveau des humains. Terrence Deacon (né en 1950) avance l’idée selon laquelle le langage (et l’ensemble de notre monde symbolique) dérive d’une auto-domestication de l’humain par l’humain. Dans deux ouvrages majeurs (The Symbolic Species en 1997, et Incomplete Nature en 2011), et d’innombrables articles, Deacon a développé une hypothèse complexe et transversale, qui emprunte à l’anthropologie et aux neurosciences (que le scientifique enseigne à Berkeley), comme à la sémiotique et à la biologie, en vue d’expliquer l’émergence des propriétés de l’esprit humain jugées les plus singulières. Dans cette perspective naturaliste, l’énigme du singe parlant se résorbe par la co-évolution de l’anatomique et du symbolique.

Introduction

Il arrive qu’une complexité extrême mette le modèle de la sélection naturelle au défi d’expliquer quoi que ce soit. Depuis Darwin, l’aptitude humaine au langage est incessamment citée en exemple-type de ce cas de figure. Et ceux qui ont souligné les problèmes posés par cette faculté si spécifiquement humaine n’étaient pas tous des critiques du darwinisme. On sait l’argument avancé par Alfred Russel Wallace, co-instigateur de la théorie de la sélection naturelle, et réputé plus darwiniste que Darwin à bien des égards : selon lui, en devenant apte au langage, l’intellect humain a franchi un niveau de complexité excédant de beaucoup celui que la sélection naturelle seule aurait pu atteindre. Farouchement attaché à cette dernière pour expliquer les traits typiques d’autres espèces, Wallace n’en souligna pas moins que «  la sélection naturelle aurait tout juste permis au cerveau de l’homme primitif de surpasser celui du singe... »
06 janvier 2015, 09:01   Re : Emeute noire à Ferguson
Merci à vous Alain, de nous apporter des matériaux factuels propres à enrichir ce débat. Je n'ai pas le temps de développer une réponse exhaustive à ce billet, seulement celui de vous faire observer que la convergence génétique ainsi obtenue par soustraction de populations inadaptées à une agression émanant du milieu (un agent pathogène en circulation) est synonyme d'appauvrissement de la diversité génétique. Cette particularité génétique n'est autre qu'une cicatrice laissée sur le génome des populations concernées, la trace historique du drame observable sur le génome, et du reste, comme le note l'article, cette cicatrice est susceptible d'inflammation : Mais cet “avantage” génétique aurait sa contrepartie : en effet si ces gènes offrent la particularité de stimuler le système immunitaire en cas d’attaque, ils ont aussi la capacité d’exposer ses porteurs plus facilement aux maladies auto-immunes.

Il en résulte que "la survie du plus apte" dans cette histoire, n'est plus qu'une vue de l'esprit : la présence d'une cicatrice sur un corps (le corps génomique, la lignée germinale) ne peut être interprétée comme le signe d'une aptitude particulière, si ce n'est dans une vision orientée, biaisée par la doxa néodarwinienne.

L'essentiel à retenir de cet article sur la cicatrice laissée par la peste noire sur le génome de ces populations européennes : la relance démographique qui suivit l'événement s'en trouve être le moteur véritable de l'évolution; il faut donc, pour parvenir à une intelligence véritable de cette dernière, s'intéresser aux processus sociaux qui permirent cette relance, et ce au XIVe siècle comme au 14e millénaire avant notre ère.
06 janvier 2015, 10:54   Re : Emeute noire à Ferguson
La sélection par "réponses aux coups du sort" (le "ce qui ne vous tue pas vous renforce" de Nietzsche) vaut sans doute pour le règne végétal et en grande partie pour le règne animal et du reste, le processus logique d'élimination d'une espèce (que j'ai qualifié d'"algébrique" un peu hâtivement supra) est communément observable : l'extinction locale d'une espèce végétale ou animale endémique est à craindre si, par exemple elle subit une maladie une année, puis deux ans plus tard une sécheresse exceptionnelle suivie une ou deux années plus tard d'une autre épiphytie ou épizootie, etc.

Mais l'espèce humaine porteuse de multiples cicatrices -- nous parlons aujourd'hui de la peste noire mais le cas de la thalassémie, autre cicatrice génomique, beaucoup plus sujette aux inflammations que celle-là, évoquée sur ce forum il y a quelques années, en fournit une autre illustration --, ne périt point par ces coups et ne s'en renforce pas davantage : sa capacité d'adaptation et de "reconstitution des stocks" n'est pas celle des plantes et des criquets : elle use pour ce faire de stratégies d'altération de l'environnement, et ce depuis toujours. C'est là, et nullement dans la ductibilité supposée de son génome que gît la clé de sa survie et de sa réussite en tant qu'espèce.

Le cas de la peste noire : si l'humanité européenne n'avait rien fait, si elle s'était contentée de se comporter comme une plante, la vague d'épidémie suivante l'aurait emportée et son génome couturé de cicatrices multiples aurait fini par succomber. Pour éviter l'extinction locale, elle a fui, elle s'est protégée de mille façons, a usé de stratégies reposant sur la transmission verticale (historique) des connaissances, donc sur l'organisation sociale de cette transmission. Les grandes tragédies sanitaires ont été nombreuses dans l'histoire de l'espèce humaine qui, si elle avait été soumise au pur régime de la "sélection naturelle" comme y sont supposément soumis les plantes et les animaux, n'aurait jamais émergé et se serait encore moins imposée comme elle l'a fait.

[message légèrement modifié]
06 janvier 2015, 20:05   Re : Emeute noire à Ferguson
Vous relisant Alain, je me dis que la question qui se pose est celle d'une rationalité non précontrainte. Je m'explique:

Si l'on vous présente un homme d'âge mûr marqué de multiples cicatrices il se peut que votre premier sentiment à l'endroit de cet homme sera assimilable à cette réflexion : "voilà un homme résistant, résilient et fort, qui a traversé de nombreuses épreuves physiques".

Mais si vous entreprenez d'analyser ce sentiment, qu'y trouverez-vous ? Est-ce que ce sont les cicatrices, et donc les blessures qui ont rendu cet homme si fort à vos yeux ou bien le fait, secondaire et semi-conscient, sousjacent à votre percept qui est que cet homme aura survécu en tirant les leçons de chacune de ses blessures pour en éviter la répétition ou un cumul qui eût été fatal ?

Il faut se représenter que si le génome humain montre de telles cicatrices (peste noire, paludisme en la thalassémie, etc.) ce n'est point directement par celles-ci qu'il est fort mais en vertu d'une double force qui a) impulsa les reconstructions et reconstitutions des populations entre deux blessures d'une part et cette composante de la Force est de nature sociale; et qui b) arma l'espèce d'une sagesse suffisante pour parer une répétition des coups à intervalles trop serrés et cette composante de la Force est d'ordre cognitif et repose sur la capacité de transmission par le langage.

Voilà ce que j'entends par rationalité non-précontrainte. La rationalité contrainte masque cette analyse et la recouvre d'une doxa, laquelle, en la matière, depuis des lustres est celle du néodarwinisme et de la "sélection naturelle" qui étire le coup des girafes et teint les criquets en vert pomme.
08 janvier 2015, 07:45   Re : Emeute noire à Ferguson
» la convergence génétique ainsi obtenue par soustraction de populations inadaptées à une agression émanant du milieu (un agent pathogène en circulation) est synonyme d'appauvrissement de la diversité génétique. Cette particularité génétique n'est autre qu'une cicatrice laissée sur le génome des populations concernées, la trace historique du drame observable sur le génome, et du reste, comme le note l'article, cette cicatrice est susceptible d'inflammation : Mais cet “avantage” génétique aurait sa contrepartie : en effet si ces gènes offrent la particularité de stimuler le système immunitaire en cas d’attaque, ils ont aussi la capacité d’exposer ses porteurs plus facilement aux maladies auto-immunes.

Il en résulte que "la survie du plus apte" dans cette histoire, n'est plus qu'une vue de l'esprit : la présence d'une cicatrice sur un corps (le corps génomique, la lignée germinale) ne peut être interprétée comme le signe d'une aptitude particulière, si ce n'est dans une vision orientée, biaisée par la doxa néodarwinienne



Je ne vois pas pourquoi il y aurait là nécessairement appauvrissement : la présence de ces gènes renforçant la défense immunitaire constitue une très faible variation génotypique chez les survivants, dont les descendants seront de toute façon sujets à la même mutabilité génétique, garante en principe du maintien de cette variation héritable.
Je veux bien que vous parliez de "cicatrice", mais enfin, l'image est quand même un peu faussée : ce n'est pas l'épidémie qui a créé ces gènes, elle a seulement fortement favorisé ceux qui en étaient déjà porteurs, et qui les ont donc transmis.
Quant à la "vue de l'esprit", écoutez, Francis : je serai le dernier, voyez notamment mes interventions sur ce fil, et le texte dernièrement indiqué, à minimiser le rôle capital de la singularité humaine et de son intelligence, mais je pars du principe, hélas, que pour qu'il y ait esprit, il faut d'abord qu'il y ait un corps en état de vie ; aussi considérer la survie de celui-ci comme une simple vue de celui-là m'apparaît, à très courte vue peut-être, comme une interversion de l’ordre (désolant, je suis tout prêt à en convenir) de la précédence des choses...

Bref, on ne pourrait véritablement commencer à vivre qui si l'on aura au préalable réussi à survivre, c'est très banal à dire : et le néodarwinisme (ce n'est qu'une théorie, mais je n'en vois pas d'autre aussi bien foutue) rend assez bien compte des modalités de la survie de l'espèce (votre "rationalité contrainte") ; après, l'intelligence et la culture peuvent prendre le relais, et éventuellement rejaillir même sur ses propres conditions de possibilité.
08 janvier 2015, 10:52   Re : Emeute noire à Ferguson
Je pressentais que cette image de la cicatrice serait mal interprétée. C'est l'omniprésence même de ces gènes qui est cicatrice sur le corps germinal de l'espèce, et non leur présence dans le caryotype de tel ou tel individu qui serait de ce fait en état d'immunité naturelle contre la peste.

J'y reviendrai dans quelques heures. L'empirisme génétique est porteur d'une faille épistémologique : il saute toujours au moins une cause. Et c'est son "élégance" qui en est responsable : elle fascine et frappe de cécité, au point de faire disparaître les causes intriquées et les causes hors-champ en les masquant.
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