La Preuve par la musique

Qu'on me pardonne cet accès intempestif de gaieté formidable, mais je ne pouvais m'empêcher de partager avec vous ce moment de profonde jubilation.

Comment peut-on ainsi donner en spectacle son incompétence ?

Mystère…

Eh bien moi je trouve qu'il se débrouille drôlement bien ! Le problème, c'est qu'il manque cruellement d'originalité : des centaines d'enfants de cinq ans font la même chose dès qu'ils entendent de la “musique classique”.

Plaisanterie à part, ou bien il fait cela pour se moquer ostensiblement de cette musique et de ce qu'elle représente, ou bien — hypothèse plus vraisemblable peut-être — il est en train de devenir fou. Ces deux hypothèses, bien sûr, ne sont nullement incompatibles.

C'est la forme trépidante du gâtisme.

Ceci dit (oui, je sais), dans un forum où la langue tient une telle place, il est intéressant de voir une aussi parlante illustration du verbe exécuter dans le sens "Attali exécute une symphonie de Mozart".

Il disait n'importe quoi depuis des décennies. Le voilà qui commence à faire de même.

Citation
Jean-Marc du Masnau
Ceci dit (oui, je sais), dans un forum où la langue tient une telle place, il est intéressant de voir une aussi parlante illustration du verbe exécuter dans le sens "Attali exécute une symphonie de Mozart".

(J'ai le 'lol' qui me démange, là.)

Ce que Jacques Attali conduit là à la perfection, c'est la partition du faux-travail, telle qu'elle est interprétée quotidiennement par d'innombrables salariés dans toute sorte de "secteurs d'activité", et tout particulièrement parmi "l'encadrement". Il en est le chef d'orchestre.

"Depuis l'an 2000, il dirige l'Orchestre universitaire de Grenoble, ouvert aux étudiants et musiciens amateurs de tous niveaux, sous la direction de Patrick Souillot, dans des pièces diverses : une symphonie de Benda, des concertos pour violon de Bach, une messe de Mozart, l'Adagio de Barber, le double concerto pour violon et piano de Mendelssohn, et Lieders de Strauss. Il a dirigé en 2012 l'orchestre Musiques en Seine dans l'ouverture du Barbier de Séville, et l'orchestre Lamoureux lors d'une soirée de gala à Paris pour le Technion, partageant le pupitre avec son ami, le généticien Daniel Cohen. Il a aussi dirigé la Sinfonietta de Lausanne en août 2012 et le concerto en sol de Ravel avec l'Orchestre symphonique de Jérusalem à Jérusalem en octobre 2012, puis avec l'orchestre symphonique à Shanghai fin 2013, puis d'autres orchestres à Bondy et bientôt à Londres.
Avec Patrick Souillot, il crée en 2012 une structure nationale sur le modèle de La Fabrique Opéra Grenoble, dans de nombreuses villes du monde qui permet de coordonner la production d'opéras coopératifs."

Je n'en reviens pas qu'un tel massacre ait pu se produire plus d'une fois sans que les musiciens ne menacent de poser leur démission. Comme dit une commentatrice : "Bravo à l'orchestre !!!"

Attali dirigeant l'orchestre universitaire de Grenoble... le Gratin dauphinois, en quelques sorte...


Bientôt Attali chorégraphe créant le "Lac des singes".

Non, moi je ne dis pas "bravo à l'orchestre". Ils auraient dû décliner la proposition.

Une question : comment un orchestre fait-il pour jouer dans de telles conditions sans perdre complètement pied ?

J'imagine que personne n'a osé dire à ce grand monsieur qu'il n'était pas Klemperer.

Pour répondre à M. du Masnau, ils font semblant de le regarder et suivent le premier violon (mais vous aurez sans doute noté que, même dans ce répertoire ultra-rebattu qu'ils connaissent par cœur, ils parviennent en plusieurs endroits à perdre pied, justement, ce qui en dit long sur la capacité de nuisance du Klemperer de Prisunic qui ne s'occupe de toute manière pas d'eux, sauf lorsqu'il s'agit de donner le change à son public). En même temps, il ne faut pas sous-estimer la propension des musiciens d'orchestre à se délecter de la grosse blague bien épaisse. S'ils sont payés, et bien, en plus, on peut leur faire tout avaler, même s'ils n'en pensent pas moins…

Mais il faut tout de même dire que le résultat proprement cataclysmique qu'on entend lors de ce concert tient autant à l'incompétence superlative (à ce niveau-là, on hésite à parler d'incompétence…) du chef qu'à la mauvaise volonté de principe des musiciens qui, s'ils le voulaient, pourraient jouer dix fois mieux, même avec le pitre qui leur fait face.

"comment un orchestre fait-il pour jouer dans de telles conditions sans perdre complètement pied ?

Il fait comme une entreprise après le passage d'un cabinet de "consulting".

Oui, j'ai noté des flottements mais qu'ils arrivent à surmonter. Pour ma part, j'aime bien le répertoire rebattu car, justement, il est beaucoup joué, et d'infinies façons. Essayer de comprendre pourquoi l'un a procédé d'une façon, tel autre de telle autre est fort intéressant.

Au fait, cher Chastagnac, regardez-vous parfois de la musique ? Je veux dire par là, grâce à YouTube et malgré un son médiocre, voir comment, par exemple, un grand violoniste joue ? Je pense a Heifetz jouant Brahms.

Attali dirigeant Attila...

J'ai du mal à savoir si votre question est sérieuse, M. du Masnau.

La vidéo en question ayant été retirée (peut-être les commentaires qui lui faisaient suite ont-ils été trop sarcastiques pour la bonne âme qui l'avait déposée ?), je me permets d'en remettre une autre, encore bien pire.

Pas du tout, je me suis mal fait comprendre : je pensais à ces petites videos où on voit un grand interprète disparu jouer ces morceaux qu'on a si souvent entendus.

Considérez celle-ci :

[www.youtube.com]

Je ne me lasse pas de regarder le jeu d'Heifetz, d'admirer sa dextérité...

Heifetz dans la plénitude de sa maturité, quel bonheur...

Je suis au demeurant persuadé, cher Chastagnac, que si l'impression ressentie au concert tient évidemment à la supériorité du son direct sur tout enregistrement elle est aussi due au fait qu'on peut voir l'orchestre, voir comme on voit dans la vie, pas sur un écran.

Extraordinaire ! Je connaissais déjà L'Attaque du requin à deux têtes, mais là, ça dépasse tout ! On a vraiment l'impression qu'on lui a adjoint un second chef pour mieux souligner ses ridicules, si besoin était. Un peu comme un charbonnier qui se rendrait chez la manucure et lui demanderait de lui laisser un doigt en l'état, pour le contraste.

Au fond, ce genre de pitrerie n'est-elle pas typique de celui qui s'ennuie dans la vie ?

Je ne crois pas. Il se pense chef d'orchestre. Vous seriez surpris du nombre de gens qui veulent être aimés pour un talent qu'ils n'ont pas, alors qu'ils ont un réel talent par ailleurs.

Oui, j'en regarde énormément et j'en suis très curieux. Les documents vidéos qu'on trouve sur Internet, au même titre que les DVD du commerce, sont une mine inépuisable de plaisir et de connaissances pour l'amateur de musique.

Attitude typique de celui qui croit que tout le monde peut tout faire avec un peu de volonté (et quelques relations dans son cas), que tout est possible dans ce monde ouvert et sans limites, qu'il n'y a pas de nature ou de talent naturel, pas de génie, pas de prédestination. La devise de ce genre d'homme est "Pourquoi pas ?"

"Attitude typique de celui qui croit que tout le monde peut tout faire (...)"

En effet. Et cependant, il ne choisit pas n'importe quoi. Devant un large public, il ne s'aventure pas à faire croire qu'il joue d'un instrument, il ne commet pas de recueils de haïku, ne s'engage pas dans l'ébénisterie, que sais-je ? non, il choisit de diriger. Est-ce un hasard ou l'indice que c'est bien la seule activité qu'à tous égards il est aussi loisible que commode de singer ouvertement, sans le recours à un nègre ou tout autre entourloupe ?

J.A. se prend pour ce que les Anglo-saxons appellent un Renaissance Man ("Homme de la Renaissance"), soit un type merveilleusement génial qui sait tout faire, peut tout faire et le fait, dont le modèle originel, dans l'imaginaire populaire, serait Vinci.

Le bonhomme n'a aucune sorte d'humour, comme tous petits porteurs de complet veston sortis du mitterrandisme. Cette génération, celle des "conseillers" de Mitterrand, se distingue par sa prétention directe, sans détour aucun, sans une once d'autodérision, à l'omniscience et à l'omnipotence. Cette séquence musicale montre que le syndrome peut devenir pathologique.

Où l'on voit que diriger, entraîne moins de dérangements :

"Pendant le dîner, nous tâchâmes de trouver le moyen d'amuser le roi [Charles IV d'Espagne] pendant les deux soirées qu'il passerait à Bordeaux, chose d'autant plus difficile qu'il ne voulait ou ne pouvait pas aller au théâtre, où l'on craignait l'effet que sa présence produirait. Je me souvins d'avoir entendu dire en Espagne qu'il aimait la musique avec passion, et que chaque soir il faisait sa partie, dans un quatuor où il jouait ou croyait jouer l'alto. Nous résolûmes donc d'organiser un petit concert instrumental. [...]
Une fois rentrée chez moi, il me revint encore dans la pensée qu'à Madrid on prétendait que, lorsque le roi faisait de la musique, il y avait toujours à côté de lui un musicien habitué à faire sa partie. En réalité, le substitut exécutait le passage, en donnant au roi l'illusion que c'était lui qui jouait. Je me promis d'user de la même supercherie, sans cependant la divulguer, par respect pour la Majesté royale déjà si éprouvée.
[...] Le soir, il y eut cercle et présentation de beaucoup de femmes que je ne connaissais pas. [...] Puis l'on rentra dans le petit salon, où la musique s'établit, le roi criant à tue-tête : "Manuelito !" C'était le nom du prince de la Paix. On donna au roi son violon ; il l'accorda lui-même, puis le quatuor commença, le truchement imaginé par moi jouant la partie du roi, dans laquelle se perdait à tous moments le pauvre prince. On passa ensuite des glaces et du chocolat, et nous allâmes nous coucher."

Marquise de la Tour du Pin Journal d'une femme de cinquante ans (1906 posth.)

Le Chef, je sais pas, mais alors Gaut(h)ier Capuçon, même sans le son...
[www.youtube.com]

« Où l'on voit que diriger, entraîne moins de dérangements »

Se saisir d'un instrument, fût-ce pour rire, c'est encore être en contact avec le bois, le sol, la terre, la matière — bref, un certain réel.
Tandis qu'Attali, lui, plane complètement. Mais n'est-ce pas cela qui, justement, caractérise au propre comme au figuré ces fameuses “élites mondialisées” (qui vivent dans l'avion et dont Attali est l'exemple le plus caricatural) : le fait de planer sans arrêt ?

Singer est l'anagramme de signer, ce n'est en effet pas un hasard si un Jacques Attali choisit cette fonction. Le Chef signe l'exécution d'une œuvre, il se l'approprie. Attali est un chef, il est né pour être un chef, ou au moins pour singer le chef, dans son cabinet de conseiller ; il s'approprie les attributs du chef, « sans aucun humour » comme le dit très justement Francis, il en prend le costume, les gestes, les mimiques, le tout sans la moindre distance qui pourrait rendre la chose supportable. S'il faisait ça "pour s'amuser", pour assouvir une envie, un désir, une passion, on pourrait évidemment lui pardonner, et même le féliciter de s'essayer à ce difficile exercice, qui apprend beaucoup à ceux qui s'y risquent, mais ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit, avec un Jacques Attali. Attali est un singe savant, peut-être très savant mais sûrement très singe. Il se place de lui-même dans une position qui invite, qui oblige à le juger sur pièce, sur ce qu'on voit et sur ce qu'on entend, alors, évidemment, le jugement ne peut pas être favorable. Mais le pire — ou le plus intéressant — est qu'en se révélant dans cet exercice, Attali éclaire en retour ses autres talents d'une lumière très crue.

Ah, certes, ce n'est pas Walter Mitty ou plutôt Danny Kay !

Eh bien oui, qu'est-ce qu'il a, Gautier Capuçon ?

J.A est cela en tout : un chef d'orchestre imaginaire, un penseur imaginaire, un futurologue imaginaire. Il dirige cet orchestre comme il se comporte dans la vie et dans les interstices du pouvoir : comme un gosse dans sa chambre, qui est tantôt "Claude François", tantôt "Georges Solti", tantôt "Jean Jaurès" avec dans la main, près de la bouche un "micro en air massif", et qui se contorsionne devant le miroir, et déclame muettement sa vision du monde et de la musique devant ses chromos de Goldorak, de Tom Cruise ou de Che Guevara. Jacques Attali n'a pas dépassé cela : le stade du miroir, qui impressionne tant les chimpanzés et les adolescents.

Je ne sais plus où l'on organise des championnats de "air guitar" : les concurrents se déguisent en joueurs de guitare rock, en épousent toutes les mimiques sur scène, jouent à jouer à merveille, sans guitare, avec pour toute guitare, l'éther, d'où le nom "air guitar". J. Attali, c'est cela, mais véritablement en tout et pour tout.

Cette séquence "musicale" le révèle, en effet.

Air Guitar Championship : la finale

[www.youtube.com]

« I don't need to say anymore… » Voilà.