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Soumission, de Michel Houellebecq

Envoyé par André Page 
J'ai lu le livre (il a trois cent pages, et se lit en trois heures peut-être).
Je n'aime pas lire une critique d'un roman avant de l'avoir lu, si bien que j'engage ceux qui comptent lire le roman à ne pas lire ce qui suit (s'ils partagent cette répugnance).

Je suis quelqu'un qui - à tort ou à raison - a trouvé les romans de Houellebecq extrêmement inégaux.
1. Les particules élémentaires : prodigieux, passionnant, libérateur, surexcitant.
2. Extension du domaine de la lutte : estimable.
3. Plateforme, La carte et le territoire : lisibles, avec des faiblesses patentes.
4. La possibilité d'une île : nullissime, nauséabond d'idiotie, exécrable. bébête.

Je range Soumission dans la catégorie 3.

Le héros, François, universitaire spécialiste de Huysmans, est assez bien campé par cette cette spécialité, qui le démarque de personnages récurrents chez H. De plus, sans être un joyeux drille, il n'est pas dépressif, et s'intéresse aux bons alcools et à la nourriture. Tout ça lui donne une certaine consistance : on n'a pas l'impression d'un simple porte-parole de l'auteur, ni d'une pure et simple réutilisation d'un personnage d'un roman précédent.

Hélas, il commence par perdre son père, puis c'est sa mère, et il éprouve pour eux les mêmes sentiments que les précédents personnages de Houellebecq, ici vraiment trop répétitif.

Le livre, il me semble, souffre significativement d'être sur les idées à la mode un peu partout, on a l'impression que Houellebecq a trouvé son sujet dans Valeurs actuelles, et que sa cible est C dans l'air. Cela fait un roman dont on peut facilement parler dans un dîner en ville, et qui y est même incontournable. Je doute un peu de sa force et de sa pérennité.

C'est un roman, je dirais, hyper-Fn.
"Le véritable agenda de l'UMP, comme celui du PS, c'est la disparition de la France, son intégration dans un ensemble fédéral européen. Ses électeurs, évidemment, n'approuvent pas cet objectif". (propos tenus par un personnage, mais qui semble avoir raison - auxquels les faits donnent raison quant à l'alliance UMP-PS qu'il prévoit).
Et ces deux formations politiques se révèlent d'accord aussi sur l'islamisation.

Intellectuellement, le livre m'apparaît avoir trois faiblesses essentielles :
1° Il nous demande de croire possible que le candidat d'un parti islamiste parvienne au second tour de la présidentielle de 2022.
2° Il nous demande de croire que la victoire d'un parti islamiste entraînerait une généralisation de la polygamie (les Français convertis à l'islam - professeurs d'université par exemple - prennent plusieurs épouses d'origine musulmane). Or la polygamie ne subsiste que dans les sociétés musulmanes arriérées. Les sociétés musulmanes un peu modernes - même l'Iran, qui est une dictature islamiste - ont abandonné la polygamie.
En d'autres termes : l'islamisme, dans une société modernisée, n'a pas pour projet la diffusion de la polygamie. Les jeunes Iraniennes font des études, n'ont pas plus d'enfants que les Européennes, travaillent, et ne supporteraient pas la polygamie (et d'ailleurs, elles supportent de moins en moins le régime islamiste).
3° Il nous demande de croire possible que la victoire d'un parti islamiste en France entraînerait l'entrée dans l'Union européenne de la Turquie, des pays du Maghreb, du Liban et de l'Egypte (ce qui ferait combien de dizaines de millions d'immigrants turcs et arabes ? Cinquante millions ? Soixante-dix millions ? Cent millions ? (pages 198 et 211)).

Par ailleurs, le récit contient une énorme invraisemblance - assez inutile d'ailleurs. Le jour de l'élection présidentielle, plus une radio française ne fonctionne, plus une télé non plus. Pendant cette interruption le héros ne sait rien : il ne tourne pas le bouton pour capter une chaîne étrangère, il ne va pas sur internet pour apprendre ce que dit le monde du silence des ondes françaises, il ne passe pas un coup de téléphone à l'étranger. Le soir, cependant, à la télé, il y a BBC news en anglais - mais comme il ne comprend pas l'anglais...
Puis tout se rétablit, sans qu'une explication soit donnée de l'interruption.
Autre invraisemblance : le deuxième tour de la présidentielle est annulé - "car le code électoral était formel : il suffisait que les résultats d'un seul bureau de vote, dans toute la France, soient rendus indisponibles, pour que l'élection entière soit invalidée". En réalité, c'est au Conseil constitutionnel d'apprécier si les irrégularités sont suffisantes pour entraîner l'annulation d'un scrutin, présidentiel ou autre.

La doctrine du héros, en matière de femmes, est à peu près ceci.
Les femmes cessent beaucoup plus vite d'être désirables que les hommes (apparemment, le héros n'a pas entendu parler de la chirurgie esthétique), donc aucun mariage ne peut tenir. De plus, les Occidentales doivent concilier le travail et la vie familiale et érotique avec leur mari, ce qui est épuisant et acrobatique - impossible.
La polygamie avec des musulmanes est donc la solution : jeune homme, via une marieuse tu épouses une fille de quinze ans, quand elle aura vieilli tu en épouseras une autre (de quinze ans), et tu reconvertiras la première en cuisinière. Ça fonctionne d'autant mieux que les musulmanes traditionnelles sont puériles, et que, si en public elles sont vêtues de façon non excitante, elles savent porter des dessous affriolants.
Certes, ça ne peut marcher que pour la minorité nantie de la population, mais c'est déjà ça (cela dit, le livre pourrait soutenir que presque tous les Occidentaux sont nantis par rapport aux musulmanes du Sahel, de l'Egypte, et même, dans une certaine mesure, du Maghreb : en filigrane on peut imaginer l'utopie d'une généralisation de la polygamie à toute la population française de souche, convertie, par importation massive de musulmanes d'Afrique).

Le centre de gravité de l'interrogation politique/civilisationnelle, chez Houellebecq, me paraît être : comment tirer des femmes séduisantes (donc jeunes) quand on n'est soi-même pas séduisant (notamment parce qu'on est vieux, ou parce qu'on ne donne pas aux femmes l'amour qu'elles demandent) ?
Réponse dans Extension, dans Carte et territoire : c'est impossible, on est donc condamné.
Dans Plateforme : le tourisme sexuel.
Dans L'enlèvement de Michel Houellebecq (film) : le rapport tarifé avec une prostituée occasionnelle (maghrébine).
Les Particules étaient un peu en dehors de cette problématique (elles mettaient en scène plutôt la misère affective, et c'est à elle qu'elles cherchaient remède - par le dépassement de l'humanité).
Dans Soumission, Houellebecq joue avec l'idée de la polygamie avec des musulmanes importées (sans trop y croire beaucoup, je pense), tout en évoquant aussi la possibilité du rapport tarifé avec la prostituée occasionnelle.

Encore un livre de Houellebecq qui ne plaira pas tellement aux femmes...

Le scènes de sexe - interminables dans La carte et le territoire - sont peu nombreuses et assez brèves. La satisfaction qu'éprouve le héros ne semble pas très crédible, et est très convenue... (moment érotique à quarante-deux ans avec sa maîtresse habituelle (qu'il n'a pas vue depuis un certain temps il est vrai) : "...les vagues de plaisir déferlaient et balayaient ma conscience, je tenais à peine sur mes jambes, j'étais à deux doigts de m'évanouir. Juste avant d'exploser dans un hurlement, j'eus la force de supplier : "Arrête... Arrête..."
J'avais à peine reconnu ma voix - déformée, presque inaudible.")
Les prostituées que le héros fréquente, il les pratique y compris par l'orifice que les femmes ont en commun avec les hommes, ce qui étonne un peu.
Houellebecq mentionne qu'il s'est documenté sur la vie des universitaires auprès de Mme Novak-Lechevalier, maître de conférence à Paris X Nanterre.
La carrière du héros cependant m'étonne. Né en 1978 (il a quarante-quatre ans en 2022), il devient universitaire sans avoir fait Normale Sup ni, apparemment, avoir passé l'agrégation, et semble devenir directement maître de conférence (à Paris III). Il devient ensuite professeur dans cette même université, où il effectue donc toute sa carrière.

Le trait le plus déplaisant dans les livres de Houellebecq est ici absent : la volonté de faire scandale. Dans Carte et Territoire, c'était l'apparition de Karl Lagerfeld à côté du narrateur, lequel Lagerfeld était montré s'empiffrant grossièrement. Dans Plateforme, c'était la prostituée thaïlandaise parlant des Japonais comme de maniaques à la sexualité incompréhensible. Dans Les Particules, c'était de ne pas avoir changé le nom du centre de vacances, dans l'espoir évident (et réussi) de susciter la protestation de ses responsables.
Ici, rien de tel : la provocation d'être pro-Fn suffit, je suppose...

Il me semble qu'on s'intéresse assez peu au héros et à son devenir.

L'action est censée se passer en 2022. Mais, à part le président du parti politique musulman, toutes les figures publiques qui sont évoquées sont déjà là maintenant, que ce soit dans la politique ou les médias : Bayrou, Hollande, Valls, Philippot, Marine Le Pen, Christophe Barbier (l'Express), Yves Thréard (le Figaro), Pujadas, etc. (sans oublier Renaud Camus !), et l'on trouve même UMP (alors que le nom va disparaître incessamment) et Jean-François Copé (alors qu'il me semble qu'il est fini comme dirigeant politique), Front National (alors qu'il semble peu probable que le nom soit encore là dans huit ans - on parle de Rassemblement blond marion) et Libération (alors que ce journal est plus ou moins mourant). Cela rend la lecture facile, mais contribue un peu au sentiment qu'on n'a pas tout à fait affaire à un roman (cette critique, je l'ai trouvée formulée aussi dans Le Monde d'aujourd'hui).

Y contribue aussi le fait qu'à certains moments on a l'impression que tel ou tel personnage discoureur parle comme Houellebecq écrit. Par exemple, un flic de la DGSI (page 146) : "...l'Education nationale... Les choses seront moins difficiles pour l'UMP, qui est proche de la désintégration, et qui n'a jamais accordé la moindre importance à l'éducation, le concept lui est même presque étranger". Page 152 : "Ce qui est extraordinaire chez Bayrou, ce qui le rend irremplaçable, c'est qu'il est parfaitement stupide, son projet politique s'est toujours limité à son propre désir d'accéder par n'importe quels moyens à la "magistrature suprême". il n'a jamais eu, ni même feint d'avoir la moindre idée personnelle ; à ce point, c'est tout de même assez rare. Ça en fait l'homme politique idéal pour incarner la notion d'humanisme".

Mots ou réalités inconnus de moi avant la lecture : ZZ Top, Nick Drake, show-off ("bourgeoisie show-off"), reps, Meetic, Justin Bridou, subsonique (qui est employé au sens de : juste en dessous de la vitesse du son), lenticulaire, oblat, Bat Ye'or, circumambulation, Hanswurst,
Houellebecq écrit gageure (et non gajure, comme le propose la réforme - largement inappliquée - de l'orthographe) et met après-midi au féminin (il le fait deux fois, donc ce n'est pas une inadvertance) - ce n'est pas ce qui est recommandé mais l'usage hésite.
Pas trop de mots anglais, pas de fautes d'orthographe (deux erreurs de casse : "Moyen âge", deux fois ; et "Meursault" pour "meursault" (il s'agit du vin)), une parenthèse assez mal placée (page 52), pas d'abus d'italiques (le procédé est essentiellement concentré sur quelques pages : en pages 183 et 184 on trouve "J'étais dans la force de l'âge", "cette zone sombre...où le pronostic vital, comme on dit, est ...engagé", "il fallait compter une dizaine d'années... avant qu'on ne me qualifie d'encore jeune", "il fallait compter quelques semaines avant qu'elle ne m'annonce... qu'elle avait rencontré quelqu'un", "j'étais dans la force de l'âge, comme j'ai dit").

Au total : un roman ultra-facile à lire, peu ambitieux. clairement inscrit dans la mouvance Fn.
Sur ce dernier point, on peut dire : comme celle-ci est exclue des médias (écrits comme audiovisuels), elle ne trouve d'aliments que dans des livres (Zemmour, Houellebecq), auxquels il est logique qu'elle fasse un triomphe.

Le lecteur idéal, me semble-t-il : masculin, dans la mouvance Fn, pas dénué de culture (il en faut un peu pour s'identifier à un héros professeur de littérature spécialiste de Huysmans), intellectuellement aussi limité que possible, sans ambition quant à l'amour. Mais évidemment le livre peut plaire à qui n'est pas caractérisé par ces cinq traits.
Entretien de Houellebecq dans l'Obs.
"Je ne sais pas au juste ce que craignent les droites extrêmes"[ =Je suis tellement peu dans la mouvance Fn que je ne sais même pas ce qu'ils pensent ]... ce qui est décrit dans ce livre : la constitution d'une grande puissance islamique occidentale et méditerranéenne, modérée [ la polygamie avec mariage arrangé des filles de quinze ans avec les riches et les puissants, une politique modérée ? La Sorbonne devenue une université islamique, où ne peuvent enseigner que des musulmans, l'entrée dans l'Union européenne de la Turquie, des pays du Maghreb et de l'Egypte (avec, à la clé, cinquante millions ou cent millions d'immigrants turcs et arabes...), une politique modérée ? ]...Cette politique d'alliance avec les pays arabes n'aurait pas forcément déplu à de Gaulle [ "alliance" ? Grotesque ].
"Il n'est quasiment pas question d'immigration dans mon livre [ Tu parles ]. L'immigration est un léger coup d'accélérateur , mais l'islamisation se produit de l'intérieur [ n'importe quoi ].
"... puissant retour du religieux. Un courant d'idées né avec le protestantisme, qui a connu son apogée au siècle des Lumières, et produit la Révolution, est en train de mourir. Tout cela n'aura été qu'une parenthèse dans l'histoire humaine. Aujourd'hui, l'athéisme est mort, la laïcité est morte, la République est morte." [ Pseudo-vaticinations d'un vrai pitre ]

Le but de tout ça, transparent : Houellebecq a écrit un livre qui se situe dans la mouvance Fn, mais ne veut pas le reconnaître...
Mais pourquoi aller à ce but en proférant de telles idioties ?
Difficile à dire...
On a l'impression qu'il y a chez Houellebecq maintenant une sorte de passion à exhiber sa déchéance physique, à susciter quelque chose entre pitié et dégoût. Peut-être éprouve-t-il une sorte de satisfaction aussi à jouer à l'idiot, au prophète minable ?

Quoi que vaille son livre (et j'éprouve toujours de la difficulté à juger de la valeur d'un roman) il vaut beaucoup mieux que ces superlatives idioties.
Dans le Monde des livres daté de vendredi, deux pages sur Soumission, et trois articles.

Marc Weitzmann parle très peu de la qualité du livre. Ceci cependant : "le plus faible de son auteur". "Le problème de ce nouveau livre n'est pas seulement que certaines phrases sentent la flemme d'écriture [ je ne l'ai pas vraiment remarqué ]. Il est dans la paresseuse désinvolture avec laquelle H. traite son propos. Non seulement les conséquences internationales de la situation qu'il décrit sont traités en quelques paragraphes d'une naïveté gênante..."

De même, Jean Birnbaum parle à peine de la qualité du livre. Ceci cependant : "..peu importe que son roman soit littérairement de facture assez médiocre...".

Au contraire, le troisième larron, Emmanuel Carrère : "Par ailleurs, et Dieu sait que j'aime Huxley et Orwell, c'est un romancier plus puissant qu'eux". "Livre... d'une extraordinaire consistance romanesque... des pages magnifiques sur Huysmans... sur les écrivains catholiques de la fin du XIXème, sur la littérature en général". "Le sommet du livre est la conversation du héros avec un séduisant personnage... converti à l'islam" (Je viens de relire ce sommet, que je ne trouve pas du tout sommital. Le converti essaie de convaincre que Dieu existe, puisque Newton croyait en Dieu, et que "l'argument du "Dieu horloger", que Voltaire jugeait irréfutable, est resté tout aussi fort qu'au XVIIIème siècle" (certainement pas : depuis Darwin, cet argument est beaucoup moins fort qu'avant... Par ailleurs, passer du Grand Horloger à un Dieu personnel et sauveur n'est pas si facile ; et passer de ce Dieu à ce qui s'est exprimé par la bouche de Mahomet n'est pas si évident non plus...). Le converti expose ensuite comment il a ressenti que l'Europe avait péri quand un bar d'un hôtel bruxellois de style Art nouveau a fermé ses portes - j'ai trouvé ça meilleur que le passage avec Newton et Voltaire, je n'en ai néanmoins pas trépigné d'excitation).
Suivent des considérations de Carrère sur la tragédie de l'Occident et sur un salut possible. Le comble de l'idiotie ou de l'aberration de ces considérations étant à mes yeux : "le monde antique, entre le Ier et le IVème siècle, s'est senti gravement menacé par une religion orientale, intolérante, fanatique, dont les valeurs étaient entièrement opposées aux siennes. Les meilleurs esprits redoutaient quelque chose comme un "grand remplacement". Or ce "grand remplacement", ce métissage contre-nature de l'esprit de raison gréco-romain et de l'étrange superstition judéo-chrétienne a bel et bien eu lieu. Et ce qui en est résulté, c'est cette chose pas si nulle qu'on appelle civilisation européenne... Il est possible que l'islam soit, à plus ou moins long terme, non pas le désastre, mais l'avenir de l'Europe, comme le christianisme a été l'avenir de l'Antiquité".
Fin de l'article : "C'est de cela que parle Houellebecq, il ne parle jamais d'autre chose, il est pratiquement le seul à en parler ainsi... et c'est pour cela que ,nous le lisons tous, médusés."
Bref, Carrère n'évoque pas Dostoïevski, mais c'est tout comme...

Il est extraordinaire de voir à quel point les opinions de gens pourtant lettrés peuvent différer sur un auteur...
Il est permis d'accorder plus de crédit à un homme de lettres comme Emmanuel Carrère qu'à des journalistes comme les deux que vous citez, dont l'un, Marc Weitzmann, doit beaucoup jalouser Houellebecq (ils ont commencé ensemble aux Inrockuptibles, l'un est resté obscur, l'autre non).

Quant à vous, si je puis me permettre, votre critique est excellente car vous semblez avoir une grande familiarité avec les écrits de cet auteur, que vous n'aviez peut-être pas avec ceux de Zemmour, et aucune animosité envers lui. D'ailleurs les écrits de Zemmour ne forment pas une oeuvre, ceux de Houellebecq, oui, évidemment, oeuvre où il y a des hauts et des bas, avec les Particules élémentaires tout en haut, bien entendu.

Je n'ai fait que commencer Soumission. L'histoire littéraire retiendra que la date de parution du livre est un chef-d'oeuvre à soi seule. Un livre ne peut-être dissocié des circonstances qui l'entourent. Houellebecq est un véritable sorcier qui non seulement bénéficie de l'esprit du temps mais encore le crée, le malaxe, pour donner l'éclairage idoine à ses écrits. Il y a là un mystère et un miracle. Plateforme, déjà...

Pour vous suivre dans l'examen microscopique des textes, j'ai noté que le titre de la thèse soutenue en 2007 Joris-Karl Huysmans, ou la sortie du tunnel constituait une invraisemblance car un tel sous-titre je ne crois vraiment pas qu'on le trouverait sur une thèse soutenue à Paris-IV. C'est plutôt le sous-titre d'un essai, d'une biographie romancée.

La manière de ponctuer de l'auteur ne paraît pas toujours très orthodoxe. Voyez dès la première page : ... mais la plupart n'en prennent pas, ou pas immédiatement conscience, ... alors que la deuxième virgule devrait se situer entre immédiatement et conscience.
Je vous souhaite d'apprécier le livre plus que je ne l'ai fait.
Bonne et heureuse lecture, donc !

Très belles observations (le titre fait évidemment penser à H.P. Lovecraft, Contre le mode, contre la vie, première oeuvre non poétique de Houellebecq, qui se laisse lire).
Vous avez raison à ceci près que H. n'a pas mal placé la virgule, il l'a omise.
"mais la plupart n'en prennent pas, ou pas immédiatement, conscience, hypnotisés par le désir d'argent, ou peut-être de consommation chez les plus primitifs, ceux qui ont développé..."
Il me semble que cette omission est un choix admissible : on lit très bien, sans confusion.

A noter, un procédé intéressant de Houellebecq. Au lieu de dire qu'il faisait beau ou qu'il pleuvait, le narrateur sort ce qui est un quasi-bulletin météo : "Une dépression venue des Açores venait d'aborder la France, il y avait quelque chose de légèrement humide et printanier dans l'air, comme une douceur louche. L"année dernière encore, dans de telles conditions météorologiques, on aurait vu apparaître les premières jupes courtes. Après l'avenue de Choisy je continuai avenue des Gobelins, puis rue Monge".
C'est évidemment qu'il écoute la météo à la radio ou la voit à la télé, et qu'il pense le climat, au lieu simplement de le constater, mais ceci n'est dit nulle part et reste implicite...

Je viens de relire largement Soumission. Je continue de ne pas y trouver les "phrases qui sentent la paresse d'écriture" vues par Weitzmann.
Une phrase d'écriture discutable : [dans la rue, les femmes en jupes ou robes ont disparu]. "La détection des cuisses de femmes, la projection mentale reconstituant la chatte à leur intersection, processus dont le pouvoir d'excitation est directement proportionnel à la longueur des jambes dénudées..."
Certes, H. veut dire la longueur de la nudité de la jambe, la longueur de la partie dénudée des jambes, la longueur de l'espace dénudé des jambes, et il me semble qu'une de ces expressions serait meilleure, mais la phrase me paraît défendable, en tout cas elle ne me paraît pas pendable.
A mon vis c'est de l'ironie très houellbecquienne.
Oui, vous avez raison, le narrateur écoute la météo, et en plus il y fait référence avec ironie. Contre qui, cette ironie ? Contre lui-même, contre nous tous, il prend sur les humains le point de vue des satellites, plus généralement le point de vue de la science : il se regarde s'agiter et les regarde s'agiter.
J'ai lu Soumission et je me demande si MM Weitzmann, Birnbaum et autres (cf. les tartines dans la presse) ont lu le même livre que moi ou même s'ils ont lu ce livre ou même s'ils sont capables, tout journalistes qu'ils sont, de lire un livre d'écrivain ou même s'ils ont lu au cours de leur vie un seul livre d'écrivain, c'est-à-dire non pas à partir des innombrables a priori de journalistes frottés de sociologie et blindés d'idéologie, mais avec la liberté d'esprit et le "coeur intelligent" qu'exige le commerce que l'on peut entretenir avec les oeuvres. En bref, ces "critiques" ne révèlent rien d'autre que leur bêtise ou leur paresse ou leur incompabilité congénitale à lire avec empathie ou bienveillance un livre.
Birnbaum ne parle à peu près pas de la qualité du roman : il ne se pose que la question de savoir si celui-ci est politiquement correct, et il répond par la négative - à juste titre selon moi. Considérer un roman du seul point de vue de sa position politique est un point de vue très partiel, mais pas illégitime.

Weitzmann, c'est un peu pareil, quoique son article se veuille plus théoricien. En fait, je l'ai trouvé obscur. Comme de toute façon son sujet - la correction politique de Houllebecq - ne m'intéresse pas, j'ai assumé avec équanimité cette mienne incompréhension.

J'ai découvert l'article d'un journal que je trouve particulièrement faible et même méprisable - Marianne - et je le trouve excellent, cet article. Il a lu le roman souvent plus attentivement que moi quant à l'aspect politique, et comme moi il en critique les invraisemblances. Par ailleurs, il décrit les relations de la critique et des biens-pensants à l'égard de Houellebecq : il sont embarrassés de découvrir que Soumission n'est pas dans leur camp. Certains minimisent, d'autres le reconnaissent franchement.
[www.marianne.net]
Citation
Henri Rebeyrol
J'ai lu Soumission et je me demande si MM Weitzmann, Birnbaum et autres (cf. les tartines dans la presse) ont lu le même livre que moi ou même s'ils ont lu ce livre ou même s'ils sont capables, tout journalistes qu'ils sont, de lire un livre d'écrivain ou même s'ils ont lu au cours de leur vie un seul livre d'écrivain, c'est-à-dire non pas à partir des innombrables a priori de journalistes frottés de sociologie et blindés d'idéologie, mais avec la liberté d'esprit et le "coeur intelligent" qu'exige le commerce que l'on peut entretenir avec les oeuvres. En bref, ces "critiques" ne révèlent rien d'autre que leur bêtise ou leur paresse ou leur incompabilité congénitale à lire avec empathie ou bienveillance un livre.

C'est exactement ça. Le livre qu'ils évoquent n'a aucun rapport avec the actual book. Le livre qu'ils évoquent n'existe que dans leur tête.
Je n'ai pas encore lui le livre mais je suis surpris d'apprendre que Houellebecq "nous demande [sérieusement] de croire que la victoire d'un parti islamiste entraînerait [en France] une généralisation de la polygamie". Ne fait-il pas plutôt de la polygamie un bénéfice secondaire intelligemment proposé aux Français, peuple de chauds lapins, par les conquérants islamistes? Du point de vue de ces derniers, la conversion des mâles français à l'islam ne s'obtiendrait-elle pas d'autant plus facilement qu'elle déboucherait sur un accès facilité et augmenté au plaisir sexuel?
Utilisateur anonyme
09 janvier 2015, 21:43   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
« Le livre qu'ils évoquent n'existe que dans leur tête. » Comme tous les livres.
Citation
Pierre Jean Comolli
Je n'ai pas encore lui le livre mais je suis surpris d'apprendre que Houellebecq "nous demande [sérieusement] de croire que la victoire d'un parti islamiste entraînerait [en France] une généralisation de la polygamie". Ne fait-il pas plutôt de la polygamie un bénéfice secondaire intelligemment proposé aux Français, peuple de chauds lapins, par les conquérants islamistes? Du point de vue de ces derniers, la conversion des mâles français à l'islam ne s'obtiendrait-elle pas d'autant plus facilement qu'elle déboucherait sur un accès facilité et augmenté au plaisir sexuel?

Si, il fait de la polygamie un bénéfice de la conversion, au profit des Français convertis.
Cette instauration n'en reste pas moins hautement invraisemblable. Les Français qui voudront de ce bénéfice seront peu nombreux (ne serait-ce que parce qu'on ne voit pas très bien l'avantage par rapport aux concubinages successifs, ou aux mariages successifs, éventuellement relevés de libertinage), et ceux qui n'en voudront pas seront très nombreux - il y aura d'abord toutes les femmes ayant grandi en France, y compris les musulmanes de souche : ça fait déjà la moitié de l'électorat.

Sur la polygamie, cette parenthèse (je repends ici le psychologue évolutionniste Robert Wright : L'animal moral (1994).
La monogamie traditionnelle (je veux dire, sans divorce) est le régime le plus égalitaire pour les hommes : même le plus déshérité des hommes sur le marché matrimonial a une femme.
La polygamie est inégalitaire pour les hommes, de même que la liberté de moeurs actuelle (monogamie avec divorce, ou concubinage) : certains hommes se retrouvent sans femme (et cela fournissait le thème intellectuel et le titre d'Extension du domaine de la lutte : "extension", car auparavant les hommes luttaient seulement pour avoir la femme de plus haute valeur sur le marché matrimonial, mais personne ne pouvait en avoir plusieurs ; avec les les moeurs actuelles, c'est foutu pour certains hommes (dans Extension, Tisserand, d'une laideur épouvantable ; dans les Particules, Bruno, gros et rendu maladroit avec les femmes par la frustration). Ce n'est probablement pas tout à fait un hasard si l'Occident, grande région la plus monogame du monde (seule grande région du monde où la monogamie est immémoriale), est aussi la région de la démocratie (ceci n'est pas dans Wright : extrapolation personnelle).
Ayant à choisir entre instituer une société de polygamie ou une société de monogamie, la majorité des hommes regardera la monogamie comme de son intérêt.
Au contraire, toutes choses égales par ailleurs, une majorité des femmes votera pour la polygamie : chaque femme a un mari, et certaines ont la liberté d'être disons, demi-épouses de Mitterrand plutôt qu'épouses d'un demi-Mitterrand.
La polygamie successive (le régime actuel) est le régime le plus défavorable à la majorité des femmes.
Cela dit, le régime actuel correspond aux valeurs de notre société parce qu'il est formellement égalitaire entre les sexes (un homme ne peut pas épouser deux femmes), et qu'il est libéral (on peut divorcer).

Je clarifie ma position sur Soumission.
Contrairement aux critiques pc, je ne demande que ça, lire de bons livres hostiles à l'immigration, notamment musulmane.
Le livre de Zemmour, comme celui de Houellebecq, est dans mon camp (en tout cas sur ce point).
Il se trouve qu'ils ne m'apparaissent pas comme bons. Je le regrette et le déplore, même si, disons, le politique en moi se réjouit de leur succès.
Le livre de Houllebecq, il ne m'apparaît pas comme bon un peu parce que je trouve que ce n'est pas assez un roman ; et aussi parce qu'il est à dormir debout. Ce qui m'apparaît le meilleur, c'est la partie non politique, la solitude du héros, sa mélancolie, le ton qu'il emploie.
[Tourisme dans le Sud-Ouest] "...et le soir tombait lorque je repris la direction de Martel. Les hommes de Cro-Magnon chassaient le mammouth et le renne ; ceux d'aujourd'hui avaient le choix entre un Auchan et un Leclerc, tous deux situés à Souillac." C'est quand même un écrivain, Houellebecq ! Il a un ton, une voix.
Citation
Pierre Jean Comolli
Je n'ai pas encore lui le livre mais je suis surpris d'apprendre que Houellebecq "nous demande [sérieusement] de croire que la victoire d'un parti islamiste entraînerait [en France] une généralisation de la polygamie". Ne fait-il pas plutôt de la polygamie un bénéfice secondaire intelligemment proposé aux Français, peuple de chauds lapins, par les conquérants islamistes? Du point de vue de ces derniers, la conversion des mâles français à l'islam ne s'obtiendrait-elle pas d'autant plus facilement qu'elle déboucherait sur un accès facilité et augmenté au plaisir sexuel?

Oui, c'est à peu près ça.

Un des personnages dispose d'une très jeune et très jolie femme, pour le sexe, et d'un femme plus mure, pour l'intendance, qui lui prépare d'excellents plats. Le héros, invité et courtisé par le personnage en question, est impressionné.
Le livre de Zemmour comme, celui de Houellebecq, sont dans mon camp.

Ca c'est de la ponctuation les enfants ! Prenez-en de la graine.
"Il est possible que l'islam soit, à plus ou moins long terme, non pas le désastre, mais l'avenir de l'Europe, comme le christianisme a été l'avenir de l'Antiquité".

Oh ! Le joli musulman modéré que voilà, déjà frétillant à l'idée de s'aplatir mystiquement devant un tapis de prière cosy en poils de chèvres du Balouchistan avant d'aller passer la soirée sur 72vierges.porn.

Décidément, une frange de la haute bourgeoisie a toujours eu une appétence presque animale pour la trahison enrobée de fausse humilité, comme un instinct de survie qui dirige ses mains vers ce qu'elle croit être le bon côté du manche. Si le livre de Houellebecq (que je n'ai pas encore lu) n'avait qu'un mérite, ce serait celui de faire tomber ce genre de masque.
Décidément, Rothomago a décidé de se le faire, le Carrère. Ma foi, sur ce coup-là je dois dire que je le comprends un peu.
Expliquer cette position d'Emmanuel Carrère par un goût chez lui de la trahison, goût qui serait chez lui grand bourgeois, me paraît erroné.
Carrère me paraît plutôt comme un invétéré "chercheur de Dieu". Il est incurablement non rationaliste ; dans son dernier livre, il prétend que quand, profondément, on ne s'aime pas, on développe un cancer. Il a beau être devenu athée, dès qu'il entend parler d'une foi ayant des perspectives, il perd la boule d'excitation et d'enthousiasme.
Par ailleurs, fils d'une femme elle-même fille d'un monsieur Zourabichvili et d'une demoiselle von Pelken, tous deux sujets du tsar russe, et, je pense, de religion orthodoxe, élevé Français et catholique, ayant beaucoup pratiqué le yoga, c'est un homme naturellement habitué à envisager les conversions, même les plus improbables.
La sexualité masculine ne trouve pas forcément son compte dans l'islam, il suffit, d'ailleurs, de voir à quel point les occidentales font saliver les musulmans même quand ils sont polygames. D'abord les musulmanes jeunes et jolies sont comme la plupart des femmes elles n'ont aucune envie d'épouser un mari moche et vieux. Elles ne le font que contraintes et forcées par leurs parents. Ensuite le bon musulman se doit de forniquer sans que sa femme soit nue. L'érotisme en est pour ses frais et l'acte, vite expédié, n'est guère "gratifiant", ni pour la femme ni pour le mari. De plus, l'obssession de la virilité est telle, en islam, qu'elle finit par engendrer l'impuissance et provoquer ce qu'un musulman redoute le plus : la panne sexuelle qu'il attribue alors non à une défaillance de sa part mais à celui ou celle qui lui a jeté un sort et qui l'a "attaché" autrement dit qui lui a noué l'aiguillette. Il dépensera alors des fortunes en marabouts pour qu'ils la lui dénoue. D'ailleurs, le mâle musulman se doit d'avoir une nombreuse progéniture afin de prouver, croit-il, à la galerie, sa puissance virile. Enfin le flirt lui est interdit puisque les femmes doivent se tenir à l'écart des hommes tant qu'elles ne sont pas mariée et il leur faut débourser l'argent de la dote ce qui retarde considérablement pour les hommes peu fortunés la date des épousailles. En fait, contrairement aux clichés véhiculés, l'islam n' engendre que frustation et misère sexuelles. C'est pourquoi tant de musulmans sont attirés par le djihad : afin de gagner le boxon éternel aux 72 vierges qu'est le paradis d'Allah.
Le passage de la monogamie ou de la règle sociétale monogamique actuelle à la polygamie ne se résume pas à multiplier les épouses comme les pains dans les Evangiles. Il faut compter avec le passage de la belle-mère singulier aux belles-mères pluriel. La phase de transition entre les deux régimes supposera de contraindre toute une génération de belles-mères à cohabiter pour la première fois dans l'histoire de l'Occident dans un schéma à plusieurs homologues...

Et si certains hommes trouvent difficile la vie de couple c'est qu'ils ne se font pas la moindre idée de ce que peut être la vie avec trois épouses ou plus. La vie conjugale dans ces conditions se prend à ressembler à celle d'un chef d'entreprise de 200 employés qui serait sur le pont 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Finis le bricolage, l'étude, le loisir, la pensée vagabonde, le farniente et même le libertinage. L'homme à plusieurs femmes "à gérer" et à autant de belles-mères sur le dos ressemble à celle d'un dompteur de tigres, comme dans les cirques d'autrefois, qui n'a plus le temps pour rien d'autre qu'oeuvrer à sa propre survie et au maintien de son panache pour la galerie, à moins qu'il n'ait à sa disposition un bataillon d'eunuques pour l'assister et lui agiter les éventails, ce qui ne paraît pas concevable dans nos banlieues et nos campagnes miséreuses.

La polygamie chez les pauvres et les chiches offre une vision fidèle de l'enfer sur terre. La monogamie dut être inventée sous nos cieux et nos latitudes pour permettre aux modestes de vivre heureux quand même. Ce fut un stratagème heureux et fécond, qui en libérant l'esprit des hommes bien mariés leur permit désormais de se consacrer à tout le reste : la science, l'invention technique, la philosophie (mais pas la poésie, réservée aux célibataires).
Francis,

Connaissez-vous la blague attribuée aux mormons ?


Question : quelle est la peine maximale pour la bigamie ?

Réponse : avoir deux belles-mères.
Citation
André Page

Hélas, il commence par perdre son père, puis c'est sa mère

En fait, c'est l'ordre inverse. La mère d'abord (page 174-175 ; cela commence par : "La troisième lettre, par contre, me réservait une surprise", et finit par : "...et je me demandai ce qu'avait pu devenir son bouledogue français (SPA, euthanasie directe ?).", le père ensuite (pp. 188-194, visite à la veuve : "mon existence l'obligeait à me concéder la part qui m'était réservée - 50% quand même, puisque j'étais enfant unique. Dans ces conditions, on pouvait difficilement s'attendre à ce qu'elle éprouve des sentiments très chaleureux à mon égard ; elle se comportait toutefois raisonnablement bien, m'adressait la parole sans gêne excessive." ; cela finit par : "Chez cet homme âgé, ordinaire, elle avait su, la première, trouver quelque chose à aimer.")

Par ailleurs, j'ai écrit que H. était là vraiment trop répétitif. Mais un auteur a le droit de reprendre à peu près les mêmes personnages et les mêmes situations...
Oui, j'avais dû l'entendre. La muselière d'un cadre religieux strict est indispensable et pour tenir le poulailler en régime polygame, mormonisme ou foi mahométane intégriste constituent à cet égard des moyens a minima.

Il y a les belles-mères et il y a aussi les escadrilles de valkyries redoutables composées des belles-soeurs, jalouses de tout ce qui bouge, appuyées par les escadrons de la mort que composent les "meilleures amies de madame". Avoir une "meilleure amie de madame" dans votre vie, c'est déjà être affligé d'un ulcère à l'estomac et d'un eczéma purulent chronique, alors en avoir quatre !....
D'ailleurs, je doute que des vierges de 12,13, 14 ou 15 ans soient expertes à faire jouir un homme, surtout s'il s'agit d'un mari dont elles n'ont pas voulu. De plus quand le mari bande il ent entend profiter sur le champ de son état sans s'attarder aux préliminaires amoureux tant sa peur de la panne est grande, panne dont se moqueraient derrière son dos sa femme et toutes celles de sa famille y compris leurs amies. C'est ainsi, en prenant l'homme à son propre piège, que la gent féminine se venge de la soumission dans laquelle elle est tenue. Ce n'est pas tant le plaisir que recherche le mâle musulman mais de se rassurer sur le fait qu'il est un homme, un vrai, c'est-à-dire un être qui bande. C'est pourquoi la virginité a tant d'importance pour lui. Le jour du mariage, il ne peut prouver à la galerie qu'il est bien cet être-là que s'il brandit le linge taché de sang qui atteste qu'il a défloré sa femme, donc qu'il a bien bandé. La virginité des jeunes filles n' a rien à voir en islam avec un quelconque idéal de pureté mais tout avec cette obsession.

Combien en ai-je vu quand mon mari dirigeait l'hopital de Mostaganem, de ces pauvres gamines amenées d'urgence après leur nuit de noces, perdant leur sang en abondance pour avoir subi les assauts impatients et furieux d'un mari dans la force de l'âge, paniqué à l'idée de la panne et qui, par la suite, n'attendrait même pas que les lésions guérissent pour recommencer !

(Il m'arrive d'oublier à quel point cette religion est détestable, mais chaque fois que j'y repense, tant de détails me reviennnent à l'esprit que j'en suis accablée)


(message re-modifié)
Cassandre, un livre! un livre!
Su le caractère Fn du livre, par exemple :
p 55 : "pendant plusieurs années Le Monde, ainsi que tous les journaux de centre-gauche, c'est-à-dire en réalité tous les journaux..."
p 116 : "Je me rendais compte pourtant, et depuis des années, que l'écart croissant, devenu abyssal, entre la population et ceux qui parlaient en son nom, politiciens et journalistes, devait nécessairement conduire à quelque chose de chaotique, de violent, et d'imprévisible. La France [...] se dirigeait depuis longtemps vers la guerre civile, c'était une évidence".
p 120 :[la manifestation guidée par Marine Le Pen] "Sur de nombreux petits panneaux dissimulés dans la foule était écrit, plus simplement : "Nous sommes chez nous" - c'était devenu le slogan, à la fois explicite et dénué d'agressivité exagérée, des militants nationaux [souligné par moi] au cours de leurs rassemblements."
Je rappelle qu'au deuxième tour de la présidentielle l'Ump et le Ps appelleront à voter pour l'islamiste, et s'allieront avec son parti aux législatives suivantes, et participeront au gouvernement Bayrou qu'il nommera. Une seule force d'opposition : le Front national.

Sur le fait qu'on n'a pas l'impression que l'action se passe en 2022, mais en 2014 :
Non seulement François Hollande est toujours président de la République (par quel miracle est-il parvenu au second tour en 2017 ? Le roman ne le dit pas), mais de plus Manuel Valls est toujours premier Ministre.
Comme c'est plausible...

Une invraisemblance dans le récit : le dimanche du deuxième tour de la présidentielle, le narrateur, sur l'autoroute déserte, se rend compte qu'il lui faut de l'essence. La deuxième station est trop loin : elle est à cinquante km. Il s'arrête à la première : scène de massacre, et il ne parvient pas à se servir en essence. Il est donc contraint de quitter l'autoroute, et d'aller à Martel, située "à une dizaine de km". Ensuite, on n'entend plus parler de la question de l'essence...
Plusieurs hypothèses.
1° H. a écrit trop vite et a oublié la question de l'essence. Cela m'étonnerait beaucoup.
2° Si le narrateur trouvait de l'essence, il pourrait reprendre sa route. Par ailleurs, l'existence d'un pompiste donnerait un caractère de normalité à la situation (alors qu'il trouvera la réception de l'hôtel déserte).
Il ne trouve donc pas de station d'essence. Sa situation critique au point de vue de l'essence n'est pas mentionnée, H. espérant que le lecteur l'oublie peu à peu.
Mais c'est un défaut me semble-t-il, car le lecteur sent obscurément que quelque chose cloche.
H. aurait dû dire qqchose comme : on m'apprit qu'il y avait une station à Martel, fermée le dimanche et le lundi. J'étais donc condamné à rester à Martel.

Passage houellebecquissime :
"les plats pour micro-ondes, fiables dans leur insipidité, mais à emballage coloré et joyeux, représentaient quand même un progrès par rapport aux désolantes tribulations des héros de Huysmans ; aucune malveillance ne pouvait s'y lire, et l'impression de participer à une expérience collective décevante, mais égalitaire, pouvait ouvrir le chemin d'une résignation partielle."
"partielle" ici étant d'emploi à peu près propre à H.

Houellebecq à son meilleur :
Le narrateur, qui a entrepris de se replier dans le Sud-Ouest, puis finalement prend la décision de se replier jusqu'en en Espagne, est contraint par le manque d'essence à s'arrêter en Dordogne, où il joue au touriste.
"La région était habitée depuis les temps les plus reculés de la préhistoire, appris-je sur un panneau d'information pédagogique ; l'homme de Cro-Magnon en avait progressivement chassé l'homme de Neandertal, qui s'était replié en Espagne avant de disparaître." [=si je me replie en Espagne, est-ce que je ne vais pas disparaître ?]
Suit une page. Puis :
"le soir tombait quand je repris la direction de Martel. Les hommes de Cro-Magnon chassaient le mammouth et le renne ; ceux d'aujourd'hui avaient le choix entre un Auchan et un Leclerc, tous deux situés à Souillac.

Une amélioration.
Un trait consternant des romans précédents, c'est le caractère impeccable, parfait, de la plastique des héroïnes. Caractère tellement parfait qu'on tendait à ne même pas nous apprendre comment elles étaient : elles étaient abstraitement parfaites.
Ce trait est ici heureusement absent. On comprend que Myriam est mignonne, on ne nous inflige pas l'énoncé de sa perfection physique.
Ceci rappelle l'épisode fameux où Robinson se dévêt avant de rejoindre à la nage l'épave de son bateau, puis, arrivé à bord, se remplit les poches d'objets indispensables. Le lecteur de romans sent obscurément que quelque chose cloche, mais il sait qu'il lit un roman.
Je ne connaissais pas cette histoire de poches.
Depuis le roman réaliste du XIXIème siècle, et avec le développement de la fiction filmée, l'exigence de vraisemblance s'est beaucoup accrue.
Flaubert prenait rendez-vous avec un notaire et se renseignait sur le menu qui était celui du restaurant en 1848, Michel Tournier va faire des repérages, tel auteur fait des repérages et prend des photos...
Houellebecq lui-même soigne beaucoup les effets de réel, ce qui lui permet d'ailleurs de plausibiliser les exagérations. Exemple typique d'exagération, dans les Particules : à l'Espace du possible (alias le Lieu deu changement), il y a un atelier "Tango argentin et bouddhisme zen", alors qu'en réalité existaient deux ateliers distincts, "Tango argentin", "Bouddhisme zen", certes animés par le même homme.
(Mais chez H., ce qui est, exagéré systématiquement, c'est la débauche).

Deux points m'ont un peu étonné, quant au réalisme :
1° Le narrateur s'appelle François, prénom des plus fréquents dans la génération de H., un peu rare pour les garçons nés en 1978. Cela dit, il était encore assez souvent donné en 1978, m'apprend un guide des prénoms (les prénoms relativement classiques très populaires à l'époque étant Nicolas, Julien, Jérôme, Guillaume, Vincent).
2° Le père du narrateur, né en 1948, décédé à soixante-quatorze ans après une carrière de directeur financier chez Unilever (qui lui verse une "très bonne retraite"), n'ayant eu qu'un enfant, dont la deuxième femme, âgée de cinquante ans, "occupe un emploi à Briançon", laisse un héritage de 550 000 euros (en comptant la voiture et la collection d'armes de chasse). Autant les sommes d'argent, dans La possibilité d'une île, étaient absurdement (et vulgairement) excessives, autant ici le montant me paraît un peu limité pour un baby-boomer directeur financier. Je pense qu'évidemment il ne s'agit pas d'une erreur de Houellebecq. Peut-être a-t-il voulu rapprocher le narrateur du lecteur...
Mais si on décrivait M. Page dans un roman, serait-ce plausible ?
Je me demande surtout si la radicale transformation physique de Houellebecq, du lisse et inaperçu homme jeune se complaisant dans la morne grisaillerie et le neutre pusillanime, en quinquégénaire au look si destroy(ed), se donnant volontiers de grands airs de soulot lucide qui sait les choses, si cette transformation donc s'accompagnait d'une modification aussi notable de sa façon d'écrire et de la vision du monde qu'il proposait ?
J'en étais pour ma part resté à ceci, pardon de me citer, que j'avais écrit voilà quelques années :
« Ce n'est pas forcément "mal écrit", mais peut-être n'est-ce pas vraiment écrit non plus ; on peut s'y complaire, il y a quelque chose de l'ordre de la facilité dans ces livres, faciles à lire, une manière de morne décalque néanmoins précis d'une possible vision des choses. C'est une esthétique sans grandeur ni reliefs particuliers, de plats préparés pour célibataires et achetés dans des supérettes, de chemises à carreaux, d'épaules étroites et de maniérisme un peu étriqué mais soutenu, que la façon petitement apprêtée de porter la cigarette à ses lèvres résume bien.
Tout cela coiffé par une incontestable intelligence, et le talent de poser un monde de la plus commune mesure avec les moyens du bord, en se payant le luxe de la lucidité et même de l'analyse. »
Nabokov s'amuse souvent à relever les invraisemblances et les incohérences des romans les plus réalistes, ceux de la grande époque. Un roman, même réaliste, cherche à produire des effets, rarement à inventer un univers qui soit le reflet exact du réel (voyez la préface de Pierre et Jean de Maupassant). Plus cet univers imaginaire est vaste, plus le risque de "trous" et de contradictions est grand, comme on le sait à propos des mensonges. On peut se livrer à un jeu d'enquête littéraire, bien sûr, raisonner sur la fréquence des prénoms, le montant des fortunes, pour démasquer le procédé et les maladresses de l'auteur. Mais rabattre sans cesse la fiction romanesque sur la réalité ne me semble pas très intéressant, pas plus que les lectures politiques de Soumission : c'est, je crois, passer à côté de l'essentiel, à savoir la cohérence interne de l'oeuvre entre chacune de ses parties, et avec les autres ouvrages qui l'ont précédée. Enfin, n'oublions pas Huysmans, dont la présence illumine tout le récit, Huysmans que l'on ne peut oublier pour comprendre ce roman.
Le roman crée un univers. Face à un univers (de faits réels), quel fou irait enquêter sur la cohérence et la vraisemblance de ses menus détails ? La masse des faits non vérifiés que nous tenons pour acquis sous le grand chapiteau du consensus général (consensus que l'incohérence du réel est partie au réel) cimente l'univers. Seul le fou irait enquêter loupe en main sur la réalité d'un univers pareillement constitué. Dans le monde romanesque, c'est le contrat tacite passé entre le lecteur et l'auteur qui fait ce chapiteau et ce ciment. Tout ça est connu et enseigné depuis un demi-siècle au moins jusque dans la dernière des facultés de lettres de province.
Le réel est comme ça, indigne de la plus indigente et maladroite des fictions : on apprend que "l'émir" qui endoctrina les assassins des journalistes de Charlie Hebdo, soit le personnage à l'origine de tout le processus, s'est reconverti comme soignant urgentiste à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière où certaines victimes des massacres de la semaine ont été accueillies !

Voilà une belle invraisemblance du réel. Les univers sont ainsi : tout ensemble incohérents et invraisemblables dans la cohérence. La cohérence de leur incohérence est invérifiable, elle n'est vérifiable ou mesurable au regard d'aucune loi connue ni maîtrisée des hommes.

[www.leparisien.fr]
L'un des frères Kaouchi fut employé par la Marie de Paris - en emploi jeune - avant de se faire mettre à la porte. Coulibali rencontra Sarkozy. Ces trois personnages furent choyés par l'Etat, par la République. Ils ont la reconnaissance expressive.
Utilisateur anonyme
11 janvier 2015, 13:19   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
« Mais si on décrivait M. Page dans un roman, serait-ce plausible ? »

La question est très sérieuse.
À mon avis.
Il faudrait y répondre en analysant les interventions de M. Page, pages après pages, paragraphes après paragraphes, dans le contexte socio-culturel et politique qui a rendu possible qu'un M. Page noircisse des pages et des pages.
C'est en tout cas mon avis. Que je pourrais développer, si cela intéresse quelqu'un.
Mais je n'en ferai pas un roman, tout de même. Non.
Jérôme, c'est pas mal, mais je crois pouvoir te dire qu'il y a dans ta prose une marge d'amélioration. Ci-dessous le corrigé

« Mais si on décrivait M. Page dans un roman, serait-ce plausible ? »

1° La question est très sérieuse.

2° À mon avis.
a) Il faudrait y répondre en analysant les interventions
de M. Page,
i) pages après pages,
ii) paragraphes après paragraphes,
b) dans le contexte socio-culturel et politique qui a rendu
possible qu'un M. Page noircisse des pages et des pages.

3° C'est en tout cas mon avis.

Que je pourrais développer, si cela, intéresse quelqu'un.
Mais, je n'en ferai pas, un roman, tout de même. Non.
» Le roman crée un univers

Justement, l’univers romanesque est créé, de toute pièce, pensé, concerté, repris, corrigé, mis en œuvre par le vecteur par excellence du sens, le langage, c'est pourquoi il est parfaitement cohérent et lisible, conçu par les mêmes facultés qui, le déchiffrant, rendent le texte intelligible, même s'il a été artificiellement et volontairement rendu inintelligible ; et si le roman crée un univers, l'univers apparaît comme parfaitement incréé, incohérent et chaotique au possible, péniblement assemblé en d'improbables "représentations" par une exigence éperdue de sens et de clarté : le réel, convenons-en, est un épouvantable chienlit, ou une trame parfaitement indéchiffrable.

Au fait, le Coran aussi, est incréé, c'est une autre caractéristique remarquable de cette religion : son texte fondateur se pose d'emblée, à l'exact opposé de la fiction, comme absolument réel.
A mon avis Soumission est un récit un peu étiré, non pas un roman. Récit parce qu'il y a peu de personnages et que la narration est on ne peut plus linéaire. C'est la première fois que Houellebecq nous donne une oeuvre de cette sorte, peut-être par étiolement de ses moyens littéraires. On est loin de la complexité et de la richesse des Particules élémentaires et même de La Carte et le territoire. Il tend vers "le petit récit parfait", il nous donnera bientôt sa Vie de Rancé. Les qualités d'humour froid houellebecquiennes de base y sont, comme la parfaite originalité du regard. Tout le reste est très appauvri, les optimistes diront "réduit à l'os".
C’est, en effet, une œuvre un peu minimaliste avec un récit linéaire et un enrobage romanesque assez peu consistant. De plus, le texte semble avoir été ficelé un peu vite et comporte quelques faiblesses d’écriture étonnantes (« Je hochai la tête avec enthousiasme, bien que la référence à l’Empire ottoman me dépasse un peu », emploi modernœud, sans queue ni tête, de l’expression « n’avoir de cesse », par exdemple). Mais enfin, il a toutes les qualités auxquelles Houellebecq nous a habitués, et puis ces trois jours de lecture durant lesquels Soumission et l’actualité ne cessaient de se télescoper et de s’enlacer étroitement au point limite de la confusion ont constitué pour moi une expérience inoubliable.
Je ne vois pas ce qui vous semble une faiblesse d'écriture dans "Je hochai la tête bien que la référence à l’Empire ottoman me dépasse un peu".
Dans l'usage actuel, "hocher la tête" veut dire la secouer, de droite à gauche ou bien de haut en bas (c'est donc le contexte qui permet de savoir si le hochement est une manifestation d'approbation ou bien de négation). On peut regretter cette ambiguïté, mais elle est un fait.
Ou alors c'est "dépasse" et non "dépassât" ? Mais ce n'est pas une faiblesse, mais un parti : comme beaucoup d'écrivains contemporains, Houellebecq n'emploie pas l'imparfait du subjonctif.
Dans "Tricks" on eût trouvé "Je branlai du chef"...
Alors il aurait fallu construire la phrase avec "m'ait été un peu obscure" ou "m'ait paru un peu bizarre" (par exemple), afin de conserver la concordance des temps. Mai peu importe.

Je voudrais ajouter à ce que j'ai écrit que les grenouilles du parti dévot qui, comme Laurent Joffrin, parlent d'islamophobie n'ont évidemment pas lu le livre car une des choses qui en font la force c'est précisément que les musulmans décrits — le nouveau président du pays et celui de la nouvelle Sorbonne — apparaissent à la fois modérés et très intelligents et que l'état du pays paraît s'améliorer après le changement de pouvoir. Au fond, un roman de propagande pour la conversion aurait pu ne pas être très différent. C'est ça qui fait la force du livre.
Dans Le Point, quatre articles sur Soumission..

1° B.-H. Lévy.
La littérature est au-delà de l'engagement partisan. Donc ceux qui voient un engagement dans ce roman ont tort.
Evidemment inepte : pour prendre deux exemples évoqués par Emmanuel Carrère, 1984 et Le meilleur des mondes défendent évidemment un point de vue politique ou idéologique.
Je suis d'accord avec les critiques pc pour dire que le livre est, sur la question de l'immigration - anti-pc en diable.

2° Eric Naulleau (journaliste littéraire).
Ce que dit de Huysmans le narrateur est très faible.
Cela me paraît possible, encore que je n'ai pas vraiment vu la démonstration de Naulleau.
H. est médiocre là comme toujours.

3° Pascal Bruckner.
Grand livre.

4° Yann Moix (prix Renaudot 2013).
Très grand livre.
Dans "Tricks" on eût trouvé "Je branlai du chef"...

Voyez Fénelon : "Branlant le dard dont il le voulait percer"

Ou Descartes : "Cette tête que je branle n'est point assoupie"

Dans des oeuvres plus récentes de Renaud Camus, on trouverait plutôt opiner.
"M'ait été"...

Marcel, vous qui êtes un Monsieur si digne...
Citation
Marcel Meyer
les musulmans décrits — le nouveau président du pays et celui de la nouvelle Sorbonne — apparaissent à la fois modérés et très intelligents et que l'état du pays paraît s'améliorer après le changement de pouvoir. Au fond, un roman de propagande pour la conversion aurait pu ne pas être très différent. C'est ça qui fait la force du livre.

Vous n'avez pas complètement tort, mais la Sorbonne convertie en université islamique ou aucune femme ni aucun non-musulman ne peut enseigner, la polygamie instituée avec noces d'un homme mûr et d'une jeune fille qui "vient d'avoir quinze ans", et l'entrée de tous les pays méditerranéens dans l'Union européenne, ce ne sont pas des politiques modérées (au contraire, ce sont des politiques tellement radicales qu'elle sont inimaginables).
Le président de la nouvelle Sorbonne est séduisant, intelligent et instruit - il n'est pas modéré.
Citation
Marcel Meyer
Je voudrais ajouter à ce que j'ai écrit que les grenouilles du parti dévot qui, comme Laurent Joffrin, parlent d'islamophobie n'ont évidemment pas lu le livre car une des choses qui en font la force c'est précisément que les musulmans décrits — le nouveau président du pays et celui de la nouvelle Sorbonne — apparaissent à la fois modérés et très intelligents et que l'état du pays paraît s'améliorer après le changement de pouvoir. Au fond, un roman de propagande pour la conversion aurait pu ne pas être très différent. C'est ça qui fait la force du livre.

En effet, l'état du pays s'améliore avec l'arrivée du parti musulman au pouvoir. Une des fonctions du roman s'illustre bien ici : donner à réfléchir sur le réel grâce aux outrances de la fiction, par un usage, peut-être parodique, de toutes les ressources verbales et narratives de la propagande. Houellebecq s'amuse, tout au long de son oeuvre, à faire s'entrechoquer entre eux divers discours figés, qu'il détache de leur contexte, de leur gravité, pour les faire danser et s'entrechoquer : discours publicitaires, météorologiques, politiques, etc ... De là vient la grande force comique de ses récits, qui contiennent des morceaux de discours graves désamarrés et devenus fous.

Sur la conversion, la polygamie et généralement "la question de la femme", on peut observer un thème de l'oeuvre, apparu avec l'Extension du domaine de la lutte et que l'on retrouve aussi dans Plateforme. Le retour au patriarcat opéré par l'islamisation répare la grande blessure narcissique infligée par 68 aux personnages masculins des romans de Houellebecq. Le renfermement des femmes dans le foyer réduit le domaine de la lutte libérale de tous contre tous, qui ne concernera plus le sexe ni la séduction, et permet d'établir un régime sexuel et culinaire où les mâles retrouvent la position de confort dont ils jouissaient par le passé. Voyez ce professeur d'université crasseux et négligé qui finit marié grâce à sa conversion et à une marieuse, lui qui n'aurait eu aucune chance de trouver la moindre partenaire en régime occidental de libre concurrence sexuelle.
Je viens de terminer le roman et je partage entièrement le sentiment de Marcel Meyer et la remarque d'Henri Bès. Ceux qui s'attendent à un roman du genre La Mosquée de Notre Dame en seront pour leur frais. Soumission est moins un livre sur l'islam que sur un Occident arrivé en phase terminale, vidé de lui-même, notamment parce qu'il n'a su assumer son héritage (Houellebecq écrit de belles pages sur la chrétienté médiévale). L'islam de Ben Abbès (croisement entre Chebel et Tariq Ramadan) vient remplir un vide, le vide que symbolise le héros dont la pauvre vie oscille en Porntube et Sushi.com (la restauration rapide obsède Houellebecq). Dans ce désert, il est logique finalement que l'islam s'impose, profitant à la fois de la peur d'une population française effrayée par la micro guerre civile entre les identitaires et les extrémistes musulmans, que Ben Abbès s'engage à neutraliser, en cours dans le pays ; des contradictions d'une gauche à l'antiracisme dévoyé et d'une droite soumise à l'UE que le candidat musulman s'engage à élargir en recréant l'Empire romain ; des atermoiements de catholiques émasculés et mécontents d'une société qui les insulte quotidiennement ; et des failles d'une partie des... identitaires, symbolisé par le personnage de Redeger (une sorte d'Alain de Benoist, lequel, rappelons-le lors de l'affaire de Creil déclarait préférer le voile au string) qui se rallient à un islam (Houellebecq cite Guénon) qui restaurera la Tradition et vaincra l'individualisme marchand par son holisme. La société française, telle un fruit mur, est prête à tomber dans les bras du séduisant Ben Abbès (énarque et polytechnicien). Et elle n'a peut être pas eu tort. La soumission a du bon (éloge d'Histoire d'O). Les premiers mois du nouveau régime sont en effet idylliques : la délinquance racailleuse s'effondre ; le chômage baisse (du fait du retour des femmes au foyer) ; le déficit budgétaire est résorbé (la solidarité intrafamiliale est promue en lieu et place de l'impersonnalité des allocations) ; l'enseignement revient aux méthodes traditionnelles et la Sorbonne rachetée par l'Arabie saoudite retrouve sa splendeur d'antan. Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, d'autant que l'islam met fin à l'extension du domaine de la lutte dans le domaine sexuel comme le souligne Bès. Le héros se convertit donc et tourne sans regret la page d'un Occident qui ne mérite pas, toute réflexion faite, d'être défendu compte tenu de ce qu'il est devenu. Le roman n'est en fait qu'un miroir tendu aux Européens. Un miroir qui leur dit : "qu'avez-vous fait de votre civilisation et au nom de quoi prétendez-vous vous opposer à ce qui vient ?". C'est un peu la même question que posait Muray dans son essai consacré aux attentats du 11 septembre, Djihadistes si vous saviez, dans lequel, s'adressant aux islamistes radicaux, l'écrivain leur disait que leur action était vaine et inutile car ils ne faisant que s'attaquer à des morts. Il est à craindre dès lors qu'après une critique de gauche qui n'a rien compris aux propos du roman, les attaques ne viennent d'une droite bas de plafond qui accusera Houellebecq de "collaboration".
Le titre du petit livre de Muray était, je crois bien, Chers djihadistes… (avec points de suspension inclus dans le titre).
Vous avez raison Hussard-brun-du-web.
N'ayant toujours pas eu le temps de lire Soumission, je commence néanmoins à m'en faire une idée assez précise grâce aux commentaires des uns et des autres, en particulier celui de Le Floch. Ce serait un roman "sur un Occident arrivé en phase terminale" et je veux bien le croire, la "phase terminale" étant le thème central de l'oeuvre de cet auteur. Simplement, il me semble que, depuis Les particules élémentaires et La possibilité d'une île, Houellebecq ne fait que raconter les étapes préalables à sa vision d'une phase terminale de l'espèce humaine dans son ensemble.
Hélas, Rothomago, on peut très bien lire Soumission comme proposant un remède, le seul remède, à la possible disparition de l'espèce humaine dans son ensemble. En effet, l'islamisation de la France s'opère dans son livre en douceur et par le haut (professeurs d'Université, etc). Du coup l'ordre public, les vertus familiales et une démographie florissante (!!) sont assurés. Les états d'âme des intellectuels décadents sont noyés dans une polygamie heureuse, aux bons soins de marieuses spécialisées. Chacun trouve ses chacunes, sans effort, c'est planifié. Si cela ne suffisait pas, le triplement immédiat des émoluements des professeurs de Sorbonne, qui s'étendrait de proche en proche à tout le corps enseignant, grâce à la manne saoudienne, aplanirait bien des difficultés. Dans ce contexte, je ne crois pas qu'il puisse être question de phase terminale de l'espèce humaine. Soumission est un roman curieusement optimiste. Mais Houellebecq a plus d'un tour dans son sac, chacun tirera les conclusions qu'il veut de son utopie idyllique. Il reste qu'il n'est nullement question dans ce livre de phase terminale de l'espèce humaine.
"La disparition du caractère littéraire de la lecture, que Finkielkraut, tout à fait d'accord avec moi, considère comme un trait essentiel de la crise actuelle, s'exerce au profit d'une lecture littérale, d'ailleurs presque toujours tronquée."
Corbeaux, 30 juin 2000, p.209 de l'édition "Nouvelles impressions".
"La disparition du caractère littéraire de la lecture, que Finkielkraut, tout à fait d'accord avec moi, considère comme un trait essentiel de la crise actuelle, s'exerce au profit d'une lecture littérale, d'ailleurs presque toujours tronquée."
Corbeaux, 30 juin 2000, p.209 de l'édition "Nouvelles impressions".


Je ne sais pas si cette citation de Renaud Camus, rapportée par M. Bès juste au-dessus, a un rapport avec ce que j'écrivais moi-même. Mais je dois dire que l'observation de Finkielkraut et R. Camus ne me paraît pas pertinente. Le caractère littéraire de la lecture n'a jamais existé que pour les littéraires, justement. Pour tous les autres, et même pour les littéraires dans leurs autres lectures, tout a toujours été littéral et seulement littéral. Heureusement, d'ailleurs.
Imaginez les effets sur la société d'une lecture littéraire du Code civil, d'une ordonnance de médecin, du code de la route. Ici, on fait de la politique, ou on la commente, on doit s'accommoder de la littéralité des propos tenus.
Imaginez les effets sur la société d'une lecture littéraire du Code civil, d'une ordonnance de médecin, du code de la route. Ici, on fait de la politique, ou on la commente, on doit s'accommoder de la littéralité des propos tenus.

C'est justement le grand problème de la médecine : les patients comprennent ce qu'ils veulent comprendre.
"Dans ce contexte, je ne crois pas qu'il puisse être question de phase terminale de l'espèce humaine."

Dans ce roman, c'est fort probable mais à mon avis la conception du monde de Houellebecq s'exprime dans Les particules élémentaires, roman après lequel il aurait pu mettre un terme à son travail.
Utilisateur anonyme
15 janvier 2015, 13:25   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
« Le caractère littéraire de la lecture n'a jamais existé que pour les littéraires, justement. Pour tous les autres, et même pour les littéraires dans leurs autres lectures, tout a toujours été littéral et seulement littéral. Heureusement, d'ailleurs. »

Cette phrase aurait pu être dite par Philippe Meirieu.

C'est cette façon de penser, cette façon de voir — fausse, arbitraire, et qui fait complètement fi du passé, même assez récent — qui a permis aux pédagogistes de liquider l'enseignement des Lettres à l'école, et d'ailleurs l'enseignement tout court, en affirmant qu'après tout une perception littéraire du monde n'a jamais été l'affaire que d'une poignée d'excentriques, que les “vraies gens” — vous, moi, et surtout le petit Ahmed – n'avaient pas besoin de ça, et qu'à présent on allait apprendre la langue à partir de modes d'emploi de machines à laver manuels de propagande vivre-ensembliste, dans le seul but de servir le dieu Communication.
Amen.
Thierry, vous irez au coin puis copierez dix fois : Thierry, dit le maître, est un âne.

(Thierry, qui est très bête, a copié "Thierry dit : le maître est un âne").

Un point m'intrigue dans le message de votre interlocuteur, habitué que je suis au langage des Français du peuple, qui est parfois éloigné de celui des élites mondialisées.

Donc, cher Thierry, pourriez-vous me dire, si vous avez quelques lumières à ce sujet, qui est parmi "les vraies (sic) gens" le "petit Ahmed" ? allusion à M. Merabet ? un autre sens ?
Citation
Thierry Noroit
"La disparition du caractère littéraire de la lecture, que Finkielkraut, tout à fait d'accord avec moi, considère comme un trait essentiel de la crise actuelle, s'exerce au profit d'une lecture littérale, d'ailleurs presque toujours tronquée."
Corbeaux, 30 juin 2000, p.209 de l'édition "Nouvelles impressions".

Je ne sais pas si cette citation de Renaud Camus, rapportée par M. Bès juste au-dessus, a un rapport avec ce que j'écrivais moi-même.

Pardon, j'ai oublié le nom de l'auteur de ces lignes que je citais : oui, il s'agit bien de Renaud Camus. Et non, elle n'a d'autre rapport que de voisinage avec votre propre remarque. Que la perte du sens littéraire soit un événement infime, mais heureux, surtout en politique, etc, est un sujet éloigné de mon domaine de compétence. Ces lignes du Journal de Renaud Camus me sont juste revenues en mémoire à la lecture de tout ce qui s'écrit ces temps-ci sur le roman de Michel Houellebecq : c'est un peu comme si l'on faisait du Bach de l'Offrande Musicale un fanatique de Frédéric de Prusse au motif qu'il se sert des lettres de son nom pour composer ses variations.
Henri, faites attention : vous parlez sur ce site d'un compositeur qui eut vingt enfants, ce n'est pas le lieu.

Vous souvenez-vous de la couverte du Charlie hebdo du 29 juillet 1750 ? celle où était écrit : "Il est mort, Bach" ?
Cher JMDM, vous me demandez un peu plus haut, si je comprends bien, d'interpréter une remarque de M. d'Avoudit sur un certain petit Ahmed, qui semble faire partie de son entourage.
Je ne suis pas le mieux placé pour éclaircir ce passage : demandez donc à son auteur.
Quant à moi, je demeure dans la stupéfaction ébahie, incrédule, douloureuse, d'avoir pu être comparé à Philippe Meirieu.
Il me faudra du temps pour m'y faire, pour m'en relever.
Il me semble, cependant, qu'en l'absence et l'assourdissant silence en ce forum du PI de son président (absence et silence déplorés récemment par certains intervenants), certains autres n'hésitent pas à frôler le ridicule en se posant en disciples quasi parfaits, impeccables, interprètes et pourfendeurs autorisés... mais sans l'intelligence, l'humour, l'autorité, le velouté du Maître. A qui je pense ? Mais à d'Avoudit, vous avez bien deviné.
Cher Thierry,

Comme ce monsieur parlait de vous, de lui et du petit Ahmed, je pensais que cette dernière personne était connue de vous deux. Si ce n'est pas le cas, il ne peut alors s'agir que d'un personnage public. La recherche google que j'ai menée en conséquence donne d'intéressants résultats, voyez vous-même.

Pour la comparaison avec M. Meirieu, c'est en effet terrible. Tout n'est pas possible, tout ne peut pas être dit. Je suppose qu'à la lecture de cela les fantômes de Charb, Cabu, Honoré, Tignous doivent se signer furtivement (en quelque sorte "La Débandade au septième ciel").
Quelques détails.

Le narrateur possède une automobile. C'est un peu étonnant, quand on sait que la moitié des ménages parisiens n'en possèdent pas, que le narrateur vit seul, qu'il n'a jamais eu d'enfant, qu'on apprend qu'il passe ses vacances à Paris et ne connaît pas la France (sinon par la télé), et qu'il a l'air de trouver considérables et épuisants les efforts exigés par le maintien en vie de son appartement.
Je suppose que Houellebecq est conscient de tout cela, mais qu'il avait envie d'un départ du narrateur à la fois soudain et très matinal (à cinq heures et demie du matin), et qu'il a décidé de faire l'économie d'une scène de location de voiture.
La notation : "Ma voiture démarra sans difficulté" signale évidemment que le narrateur ne s'est pas servi de l'engin depuis belle lurette.



Chez Rediger, le narrateur croise une ado (quinze ans) en jean taille basse et tee-shirt Hello Kitty. "Elle poussa un hurlement, tenta maladroitement de se couvrir le visage de ses mains, et rebroussa chemin en courant."
C'est Aïcha, la nouvelle épouse de Rediger.
Peu après, toujours chez Rediger, "une femme d'une quarantaine d'années, grassouillette et d'allure bienveillante" apporte une bouteille. " "C'est Malika, ma première épouse, dit-il une fois qu'elle fut sortie ".

1° Il est absurde que l'une des deux épouses rencontrées ne puisse pas montrer son visage, et que l'autre le puisse.
2° De fait, à son domicile, une musulmane mariée ne se voile pas et rencontre non voilée les hommes (si elle est amenée à les rencontrer).
3° Si une épouse rencontre un étranger en présence du mari, des présentations sont faites. On n'attend pas qu'elle soit sortie pour dire : "C'est unetelle, ma xième épouse".

Houellebecq, bien entendu, sait tout cela. il espère que le lecteur ne s'en rendra pas compte. Ce qui effectivement a été le cas pour moi aux premières lectures.
Utilisent la première personne :
Extension du domaine de la lutte
Plateforme
La possibilité d'une île
Soumission.

Sont à la troisième personne : Les Particules élémentaires, La Carte et le Territoire.
Explications évidentes :
Dans Les Particules, il y avait deux personnages principaux, aussi importants l'un que l'autre.
Dans La Carte et le Territoire, un des personnages est Michel Houellebecq.

Je soupçonne Houellebecq, depuis qu'il vise le succès international, de choisir des titres qui n'ont quasiment pas besoin d'être traduits en anglais.
The Elementary Particles
Platform
The Possibility of an Island
The Map and the Territory
Submission
(pas encore publié en anglais).
Mon soupçon concerne particulièrement Plateforme (titre qui ne rime à rien ; il fait allusion aux centres de vacances comme à des plateformes, je suppose ; au contraire, Les particules élémentaires est un beau titre, duosémique (j'ose le néologisme) comme l'est Soumission, et La possibilité d'une île et La carte et le territoire sont des titres motivés par le contenu du roman).

Le roman vient de paraître en Allemagne et en Italie : Unterwerfung, Sottomissione.

Dans H., il y a souvent de la psychologie (je parle de la discipline).
Ici, une notation, particulièrement heureuse (à je ne sais plus quelle page) :
[qqchose comme :"j'avais de l'estime pour Cyrulinik"], "le Konrad Lorenz des humains".
Moralité : l'homme est un animal, la psychologie est une branche de l'éthologie.
Le titre anglais des Particules élémentaires est Atomised.



Et "particules élémentaires" ne se dit pas "elementary particles" en anglais, anyway, mais subatomic particle, ce qui du reste a induit le atomised.
« Mais l’essentiel de l’article était une curieuse méditation… autour de la théorie des graphes. Seule une religion, essayait de démontrer l’article, pouvait créer entre les individus une relation totale. Si nous considérons un graphe de liaison, soit des individus (des points) reliés par des relations personnelles, il est impossible de construire un graphe plan reliant entre eux l’ensemble des individus. La seule solution est de passer par un plan supérieur, contenant un point unique appelé Dieu, auquel seraient reliés l’ensemble des individus ; et reliés entre eux par cet intermédiaire.
Tout ça était bien agréable à lire, en même temps, sur le plan géométrique, la démonstration me paraissait fausse. » (p. 274).

Il y avait pas mal de science dure dans Les Particules élémentaires.
Ici, c'est le seul passage.
Voici ce que j'ai compris (je n'ai pas étudié la théorie des graphes).
En sociologie, la théorie des réseaux s'intéresse à la schématisation des relations entres les individus (c'est par exemple à elle qu'on doit l'observation selon laquelle n'importe quel humain est relié à n'importe quel autre par une chaîne de relations personnelles comprenant en moyenne sept individus). Elle utilise éventuellement la théorie mathématique des graphes : on fait notamment une matrice des relations entre les individus, sur laquelle on peu travailler. A ma connaissance, on ne fait pas de figures géométriques.
L'assertion de Rediger est d'une fausseté élémentaire.
Pour prendre un exemple : les trois sommets d'un triangle sont chacun reliés à tous les autres par les côtés du triangle. Quel que soit le nombre n de points sur un plan, on peut construire les segments les reliant (et si je ne m'abuse il y en a qqchose comme (n-1) (n/2)).
Par ailleurs, les graphes de liaison sont utilisés en mécanique, pas en sociologie.
Donc : esbroufe énorme.
Cela dit, habile : la démonstration lui paraît fausse sur le plan géométrique : il est très fort, ce littéraire qui, dans une démonstration géométrique, est capable de voir l'erreur.
Très bien écrit ? Je ne sais : alors qu'il est question de plan en géométrie, le mot "plan" est utilisé avec un autre sens dans l'expression "sur le plan géométrique" (synonymes : "d'un point de vue géométrique", "géométriquement"). Habileté de l'écriture, ou au contraire maladresse ? J'hésite. Il me semble quand même que c'est plutôt une maladresse et qu'aurait été meilleur : "la démonstration me paraissait géométriquement fausse."
Citation
Francis Marche
Le titre anglais des Particules élémentaires est Atomised.

Et "particules élémentaires" ne se dit pas "elementary particles" en anglais, anyway, mais subatomic particle, ce qui du reste a induit le atomised.

wikipedia : 1998, trans. as Atomised by Frank Wynne, 2000; published in the US as The Elementary Particles
Oui, enfin, votre affirmation selon laquelle " H a choisi des titres qui n'ont quasiment pas besoin d'être traduits en anglais" ne tient pas la route. Le choix de l'éditeur américain va contre la langue, et si cet éditeur a fait ce choix, ce n'est certes pas parce que H. l'y avait conduit délibérément.
En quoi La Possibilité d'une île est-il un titre "pré-traduit" en anglais ?

Le fait est que les traducteurs anglophones, très généralement, appliquent systématiquement des calques aux expressions françaises, que Houellebecq l'ait souhaité ou non. Il y a des causes objectives à cela, parmi lesquelles leur manque d'intimité avec les expressions idiomatiques françaises, quand ce n'est pas leur connaissance très superficielle de notre langue, ce qui s'explique à son tour par le fait qu'il est souvent attendu de ces traducteurs qu'ils sachent traduire en anglais toutes les langues latines.
pp 280-283.
Le narrateur écrit un ultime essai sur Huysmans.
"Soumettez l'homme à des impulsions érotiques... il éprouvera des désirs sexuels ; supprimez lesdites impulsions, il cessera d'éprouver ces désirs et en l'espace de quelques mois, voire de quelques semaines, il perdra jusqu'au souvenir de la sexualité. [théorie absolument fausse, hautement personnelle et qui n'est soutenue par aucun psychologue ; théorie qui contredit largement le récit du narrateur dans le reste du livre]... Le sexe n'avait jamais eu chez Huysmans l'importance qu'il [Huysmans] lui supposait ["avait supposée" ou "avait cru" auraient peut-être été meilleurs], mais en définitive la mort non plus, les angoisses existentielles n'étaient pas son fait, ce qui l'avait surtout frappé dans la célèbre crucifixion de Grünewald n'était pas la représentation de l'agonie du Christ mais bien de ses souffrances physiques, et en cela aussi Huysmans était exactement semblable aux autres hommes, leur propre mort leur est en général à peu près indifférente, leur vrai souci c'est d'échapper autant que possible à la souffrance physique". Huysmans s'est trompé sur ses goûts artistiques (il a aimé les impressionnistes et les symbolistes alors que ses propres romans se rattachent "à une tradition picturale plus ancienne, celle des maîtres flamands"), et ce à quoi vraiment il a été sensible, c'est à la cuisine. "Ce qui représentait le bonheur à ses yeux : un joyeux repas entre artistes et entre amis, un pot-au-feu avec sa sauce au raifort, accompagné d'un vin "honnête", et puis un alcool de prune et du tabac, au coin du poêle...
Je relus ma quarantaine de feuillets... il n'y avait aucun doute : c'était ce que j'avais fait de mieux ; et c'était, aussi, le meilleur texte jamais écrit sur Huysmans".
Indépendamment du caractère juste ou erroné des thèses ici soutenues concernant Huysmans, et de leur éventuelle originalité, ces thèses sont si plates et si psychologiques, si peu littérairement ambitieuses, que la dernière assertion est ridicule et inepte.
(Cela dit, le caractère ridicule et inepte de cette dernière assertion ne m'est pas apparu aux premières lectures).

(Rattacher Huysmans à la peinture flamande n'est évidemment pas une découverte :
wikipedia : "Huysmans était le descendant, par son père, d'une lignée d'artistes peintres hollandais. Certains tableaux du plus célèbre de ses ancêtres, Cornelius Huysmans, peintre à Anvers au xviie siècle, figurent aujourd’hui au Louvre. Aussi, Huysmans, qui avait modifié son prénom d’état-civil (Georges-Charles) pour adopter un prénom aux sonorités évoquant mieux ses origines hollandaises (Joris-Karl), débuta en publiant des descriptions de tableaux de peintres hollandais : « Le Bon compagnon de Frans Hals » (1875) et « Le Cellier de Pieter de Hooch » (1875)."
Dans A rebours, le héros est si féru de peinture hollandaise qu'il a effectué un voyage en Hollande (et c'est le seul voyage qu'il a fait de sa vie), ceci non pour voir les tableaux, mais pour voir le peuple, semblable, pensait-il, au peuple figuré sur les tableaux (et ce sera une grande déception)
A part ça, je ne vois pas la contradiction qu'il peut y avoir entre apprécier les impressionnistes et les symbolistes, et avoir un idéal du bonheur domestique rappelant celui de nombre de peintre hollandais ; et je ne vois pas en quoi manifester cet idéal dans ses romans rattache vraiment ceux-ci à la tradition picturale [=esthétique] des maîtres flamands).
Le narrateur est fumeur (il achète les cigarettes par cinq cartouches).
C'était une des faiblesses de Plateforme : il était évident que le narrateur était fumeur (et c'est le cas dans la version bédé), il semblait très probable que la fille qui devenait sa compagne n'était pas fumeuse, la question du tabac - si importante dans une cohabitation - n'était jamais évoquée.
En général ce couple - incroyablement peu assorti, et inégal (la femme y étant d'une valeur très supérieure à l'homme sur le marché matrimonial/sexuel) - ne tenait pas debout.
Idem pour le couple de La carte et le territoire.
Ces histoires d'amour ou ces liaisons, étant dépourvues de consistance, étaient dépourvues d'intérêt.
Ici le couple - si l'on peut parler de couple - entre le narrateur et Myriam est plausible.
Les anciennes maîtresses du narrateur - nées vers 1980 peut-on penser - s'appellent Sandra et Aurélie, prénoms effectivement fréquents pour des filles nées à cette époque.
Personnages nommés : Godefroy Lempereur, Jean-François Loiseleur, Marie-Françoise et Alain Tanneur, Robert Rediger.
Quant aux trois premiers, je pense que Houellebecq a choisi ces noms pour leur facilité à être mémorisés (puisque ce sont également des noms communs). Il y a probablement aussi un aspect médiéval (en particulier dans Loiseleur, mais aussi dans les deux autres) qui renvoie à l'évocation fréquente du Moyen Age dans le roman (et Godefroy sonne médiéval aussi) .
Rediger, plutôt rare, "renvoie à la fonction de tabellion, officier public chargé notamment de rédiger les grosses (copies certifiées conformes des actes notariés)". Finalement, de même type que les trois premiers (alors qu'à mes oreilles il sonnait germanique, comme Lustiger ou Edlinger ou Bohringer ; je suppose que la plupart des Français ne commettent pas cette erreur (von Rediger existe en allemand mais semble être une variante de von Rüdiger)).

Autres personnages nommés, beaucoup plus secondaires n'apparaissant qu'en un seul passage ou à peu près : Bastien Lacoue, Steve, Daniel Da Silva, Chantal Delouze.
Ici, des noms formés d'autres façons : s'ils s'étaient appelés Varlet, Levavasseur et Boucher, le procédé serait devenu trop voyant. Et la diversité des origines de ces noms fait oublier la non-diversité d'origine des trois autres.
1° Dans un Houellebecq, l'histoire commence petitement. Et progressivement le personnage se révèle au centre d'une mutation gigantesque et dotée d'une importance sociale extrême. Ce schéma vient du roman pour la jeunesse, me semble-t-il, encore que je ne vois pas exactement ses prototypes, et est très excitant.
Dans Les Particules le physicien Michel fait la découverte qui permet de dépasser l'humanité.
Dans Plateforme, le personnage est le compagnon et l'inspirateur d'une jeune femme qui prend un rôle stratégique dans une entreprise appelée à avoir un succès gigantesque et à entraîner une mutation culturelle.
Dans La Possibilité d'une île, le dépassement de l'humanité.
Dans La Carte et le Territoire, Jed devient un peintre d'importance mondiale.
Dans Soumission, la coinversion de l'Europe à l'islam. L'importance du narrateur dans l'événement n'est pas capitale, encore qu'il devient un ponte de la nouvelle Sorbonne, et qu'il côtoie celui qui devient e ministre des Affaires étrangères du nouveau Richelieu, et nouvel Auguste, celui-ci d'envergure comparable à Napoléon, mais un Napoléon qui aurait réussi (Mohammed Ben Abbes).

2°Autre trait qui vient du roman populaire, ou d'un roman pour adolescents, la conjuration, la secte :
Dans La possibilité d'une île, les Elohimites, dans Soumission, les identitaires.

3° Le roman, par ailleurs, est un roman d'idées, qui parle d'un sujet (plus ou moins) à la mode :
Dans Les Particules, le génie génétique ; le libertinage, l'échangisme.
Dans La Possibilité d'une île, le clonage.
Dans Plateforme, la prostitution, le tourisme sexuel ; les arts plastiques contemporains.
Dans La Carte et le Territoire, les arts plastiques contemporains, la mondialisation et ses conséquences pour l'économie française.

4° Il y a par ailleurs un roman naturaliste (je veux dire social-psychologique) - pessimiste.

5° Les traits 1°, 2° et 3° sont articulés au trait 4° : ça va mal, une transformation révolutionnaire est possible et se produit. C'est à dire que l'histoire naturaliste est vue comme justifiant la mutation grandiose.
Tout ceci est particulièrement excitant - quand ça fonctionne (ça a fonctionné pour moi dans Les particules élémentaires).
Dans un Houellebecq, les lecteurs les plus naïfs pensent que le livre traite sérieusement d'un sujet (et c'est comme ça que Houellebecq parle de ses romans). Par exemple, ils pensent que Soumission évoque la possibilité que l'islam devienne dominant en France.
Ils sont naïfs car, comme j'ai essayé de le montrer, le livre est colossalement irréaliste.

Le lecteur futé voit l'irréalisme complet du scénario politique de Soumission.
Quand il apprécie le livre, comment fait-il ?
Il me semble qu'il a deux options :
. Soit il prend le scénario comme un fantasme de Houellebecq (qui, ici, essentiellement rêve de polygamie à la musulmane).
Ce parti ne me paraît pas très bon : il sacrifie une énorme partie du livre. Pourquoi Houellebecq n'écrit-il pas un roman dont le héros émigre en Arabie, se convertit et prend trois femmes, tout en vivant, disons, au Qatar (où les gens sont, je suppose, un peu moins cons qu'en Arabie) ? (Le héros serait le même que celui de Soumission; l'université du Qatar, de langues anglaise et arabe, va créer un département en langue française ; mais il faut que les enseignants soient musulmans ; s'il se convertit, énorme paie ; logement de fonction ; épouses anglophones fournies, et même une francophone égyptienne (élevée chez les Soeurs (catholiques)) ; immense notoriété dans le monde musulman (du type de celle de Garaudy) ; majordome indonésien ; évidemment, il faudra rencontrer quelques Arabes, cons et brutaux. Le héros hésite...)
. Soit il prend le scénario comme un fantasme de l'Occident (qui, ici, envisage la montée de l'islam).
Ce parti ne me paraît pas très bon non plus : sauf les imbéciles profonds, personne ne craint - ou ne désire - une généralisation chez les Européens de la conversion à l'islam suivie de l'institutionnalisation d'une polygamie de type séoudien.
17 janvier 2015, 10:58   Quand l'idée se fait geste
» 3° Le roman, par ailleurs, est un roman d'idées, qui parle d'un sujet (plus ou moins) à la mode :
Dans Les Particules, le génie génétique ; le libertinage, l'échangisme.


Plutôt d'accord avec Thomas Rothomago : la grande "idée" qui s'exprime dans ce roman (qui ne m'a pas transporté, je l'avoue) est le geste de mettre la clé sous le paillasson et de déclarer forfait, par incapacité foncière, consomption progressive des forces et étiolement discret, dans une esthétique étroite et morose de Prisunic, en baffrant des plats préparés pour célibataires.
Le sexe n'y est jamais, si je me souviens bien, superbe ou apothéotique, mais très souvent sordide et solitaire, et sert de toute façon de révélateur, quand les hommes sont sommés de faire leur preuves, de leurs incompétences : c'est une autre caractéristique du roman : la réjouissante misandrie de Houellbecq et sa relative gynophilie : les mecs sont des minus, ou littéralement des handicapés affectifs incapables d'engagement véritable et d'amour, quand leurs femmes apparaissent courageuses, entreprenantes et éperdument vitales.
Las, c'est une fausse piste, puisqu'elles finissent toutes par mourir, il achève durement ses héroïnes, Houellebecq, peut-être parce qu'il ne supporte pas leur précellence humaine manifeste.
Utilisateur anonyme
17 janvier 2015, 11:10   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
Je n'ai pas encore lu Soumission, mais quitte à écrire un roman de politique-fiction, je me dis que Houellebecq, plutôt que d'inventer ce Mohammed Ben Abbes (qui semble être davantage un nouvel Henri IV qu'un Napoléon, ai-je cru entendre dire çà et là...), aurait pu aussi bien faire de Jeannette Bougrab, carrément, la présidente de cette nouvelle France.

Cela aurait donné un tout autre roman, bien sûr, mais un roman plus intéressant peut-être dans la mesure où, plutôt que de s'aventurer dans des histoires de polygamie assez peu réalistes en effet, l'écrivain aurait pu mettre en musique les revendications féministes habituelles, et ainsi ménager une place pour notre vieil ami Festivus.

« La France, à présent réconciliée autour des valeurs traditionnelles de tolérance et de paix de l'islam européen, a su préférer à la haine une femme issue de la diversité. Qu'y a-t-il de plus beau ? »
17 janvier 2015, 12:39   Re : Quand l'idée se fait geste
Vous parlez d'un aspect du livre.
Mais le livre est par ailleurs un récit qui raconte comment un savant découvre le moyen de dépasser radicalement l'humanité par le génie génétique.
17 janvier 2015, 13:00   Re : Quand l'idée se fait geste
Pages 260-261, il y a un un passage important dont je n'ai pas parlé (ne sachant pas trop comment le prendre). ll est important car il justifie le titre.
Le convertisseur Rediger :
La soumission c'est le bonheur, c'est ce que prouve Histoire d'O. Or l'islam, c'est la soumission à Dieu. L'islam, c'est donc le bonheur.
Justifier l'islam par un célèbre récit érotique ou pornographique, récit, qui plus est, des plus pervers, il fallait le faire...
J'ai peine à croire que H. a choisi de faire parler ainsi Rediger pour le rendre plus convaincant.
Mais alors j'ai peine à comprendre pourquoi il le fait parler ainsi.

En défense de la première hypothèse (avec une concilation effectuée en direction d'autres hypothèses) :
Houellebecq et le narrateur pensent peut-être que les femmes sont des animaux qui trouvent le bonheur dans la soumission aux hommes. Et que les hommes trouvent un certaine satisfaction dans la soumission aux normes sociales.
La première idée est exprimée en se référant à Histoire d'O pour être provocant, politiquement incorrect envers le féminisme (on aurait pu l'exprimer en se référant à la femme comme créature échangeant sa soumission contre de la protection) ; il peut par ailleurs y avoir une pincée de provocation envers l'islam : ces musulmans prosternés, ils jouissent comme O prosternée devant ses maîtres... (Rediger aurait pu expliciter l'idée : du coup, le passage serait devenu assez burlesque et encore beaucoup moins crédible : La femme donne son cul à l'homme qui donne le sien à Dieu : et tout le monde est heureux. Point à la ligne. " "Anthropologiquement, la supériorité de l'islam est manifeste" aurait-il conclu en se déplaçant légèrement sur sa fesse me sembla-t-il" ". Ou alors, l'idée serait venue au narrateur, du fait de son mauvais esprit coutumier).
17 janvier 2015, 14:00   Re : Quand l'idée se fait geste
Dans L'unité de l'oeuvre de Michel Houellebecq (2013), je trouve un chapitre intitulé "Michel Houellebecq et les Arabes" (par un auteur qui se dit être "un Berbère laïc"), chapitre qui semble annoncer Soumission.
Les personnages de Houellebecq ne peuvent pas blairer les hommes arabos-musulmans.
Par contre, les femmes les tentent.
Et la polygamie musulmane est la solution pour un homme disgracié mais de bonne situation sociale.

Ceci explique évidemment l'absence des immigrés arabo-musulmans dans Soumission : ils gêneraient. Ceci, évidemment, et non je ne sais quel non-lepénisme et quelle indifférence à l'immigration revendiqués par Houellebecq ("Il n'y a pas d'immigrés dans mon livre", citation approximative).
A noter que Rediger a un majordome "vêtu d'un costume blanc à col Mao", "courtois, efficace et discret... Les démarches administratives, il devait les résoudre en un claquement de doigt". Son origine ethnique est tue mais gageons qu'il est Extrême-Oriental (Indonésien ?) et non Arabe ou Noir
(Le majordome extrême-oriental est une figure classique en littérature. Par exemple, dans Lauzier, La tête dans le sac (je cite de mémoire) : "La prochaine fois, je prendrai un majordome cambodgien. Des gens méticuleux, les Cambodgiens, il n'y a qu'à voir comment ils ont accompli leur génocide" [ou "accompli leur révolution" ?]).

Notons que François est disgracié en ceci qu'il ne donne pas aux femmes l'amour qu'elles réclament, et aussi parce que son "capital relationnel" est ultra-restreint. Mais c'est Loiseleur, le vieillard déjanté mais de haut niveau social, qui fait penser à l'écrivain Michel Houellebecq en 2015...
C'est très irritant, cette obstination quasi maniaque de Michel Houellebecq à écrire autre chose que ce que certains intervenants de ce forum souhaiteraient qu'il écrivît.
Utilisateur anonyme
17 janvier 2015, 14:25   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
Aucun souhait : juste une idée à partir d'une fiction.
Citation
Afchine Davoudi
Aucun souhait : juste une idée à partir d'une fiction.

...que vous n'avez pas lue.
C'est un peu irritant pour les autres, que vous discutiez d'une fiction - ou émettiez des idées à partir d'une fiction - que vous n'avez pas lue.
Cher André Page,

Vos analyses sont intéressantes, j'ai lu cet ouvrage et je le vois autrement. Je ne dis pas que je suis d'accord en tout avec vous mais bénéficier d'une étude poussée d'un texte qu'on a lu est toujours agréable.

Je n'avais pas noté, par exemple, l'absence des hommes arabo-musulmans dans le "paysage".
Utilisateur anonyme
17 janvier 2015, 14:43   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
« C'est très irritant, cette obstination quasi maniaque... »

« C'est un peu irritant pour les autres, de discuter d'une fiction - ou d'émettre des idées à partir d'une fiction - que vous n'avez pas lue. »

Eh bien, ça aboie, aujourd'hui.
Pardon, M. Davoudi ?
Utilisateur anonyme
17 janvier 2015, 15:06   Re : Soumission, de Michel Houellebecq
Oui, Didier Goux, et puis en plus il a le culot d'écrire des choses qui ne sont pas toujours vraisemblables ! Et puis ce style, et puis cette syntaxe, et puis… Non, vraiment, c'est pas possible.
Didier,


Prenez garde :

« C'est très irritant, cette obstination quasi maniaque... »
...
Eh bien, ça aboie, aujourd'hui.


D'ici qu'on vous dise atteint d'une franche démence, il n'y a plus qu'un pas !
Oh, vous savez, Monsieur du Masnau, ma réputation en ces lieux n'a plus grand-chose à craindre…
Myriam habite avec sa famille, Cité des Fleurs (cette cité existe réellement, dans le XVIIème arrondissement ; sauf erreur, c'est le seul lieu fréquenté par le narrateur à se trouver en dehors du Paris médiéval). "C'était la saison des jonquilles". Cette famille, cette vraie famille donne au narrateur l'envie de pleurer (d'émotion).
Les personnages de Houellebecq et lui-même affichent une certaine horreur pour les végétaux (Bruno Viard : Les tiroirs de Michel Houllebecq, 2013 - ouvrage surtout consacré à l'idéologie de Houellebecq, à son rapport aux auteurs (surtout Auguste Comte, Schopenhauer et Baudelaire) - cela dit cette horreur affichée contredit certains passages de l'oeuvre (Walter Wagner : "La tentation pastorale de Houellebecq", dans Michel Houellebecq à la Une, 2011)). De même on peut s'étonner que le narrateur sache ce que c'est qu'une jonquille et qu'il y a une saison des jonquilles.

Je dirais : l'aversion pour le végétal (aversion relative - Houellebecq n'est pas hanté par le thème - et partielle) est aussi un amour déçu (de même que les haines pour la mère et (moindre) pour le père). La cité des fleurs serait quand même le lieu du bonheur (familial), si le bonheur était possible.
La narrateur a peut-être demandé : quelles sont ces fleurs ? Et on lui a répondu : des jonquilles, et que c'en était la saison.



Ultime problème idéologique à traiter : René Guénon (pp. 274-275). Je manque un peu de lumières sur le sujet. Je vais me documenter un peu...
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