Le regard

Que celui ou celle qui fréquentant ce forum depuis quatre ou cinq ans n'a pas eu ce regard posé sur la France se fasse connaître et nous jette la première pierre. C'est le regard d'Antigone et même peut-être de Marie-Madeleine à l'issue du jour fatidique qui devait être suivi du Noli Me Tangere. C'est aussi et surtout le regard d'une fille de Harki, d'une Trahie de naissance, d'une chienne aussi divine que rejetée. Ce regard est le nôtre, ou assurément aujourd'hui le mien posé sur ce qui se donne à voir en France :

Honni soit qui mal y pense.

Quel autre regard, en effet, peut-on poser sur ce qu'on apprend de la mort d'Aurélie Châtelain, pure innocente qui passait par là, massacrée par un Arabe aussi brutale que stupide? Que dira-t-on à sa fillette de 5 ans? Que c'est dans cette France-là que sa mère a trouvé la mort? Plus que jamais auparavant "on naît foutu" (Lacan) dans ce pays.

Ne vous est-il pas déjà arrivé que la folle espérance qu'il y ait quelque chose derrière un regard, une présence à saisir, achoppe lamentablement contre le vide, et que le plus expressif vers le dehors mène, involuté, vers de merveilleux, autant que libérateurs, creux d’insignifiance ?
À moi oui...

à moi aussi, mais c'en est presque une formule d'Eternel retour : le désir ou la persuasion qu'il y ait un contenu ou un sens au lieu d'un vide agit comme volonté de puissance. Et par conséquent je chois et re-chois infatigablement dans ce vide.

Le chagrin et la pitié, voilà cependant les sentiments qui se donnent à lire dans ce regard, et voilà qui me paraît incontestable.

Des nouvelles fraîches de celle qui, sur les plateaux de télévision, pleurnichait sur commande

C'est un cercle, qui sans être nécessairement vicieux, s'auto-perpétue : la violence subie est cause de mélancolie, laquelle est souvent d'essence plus féroce qu'on ne croit, qui projette à son tour de la violence et de la brutalité. La brutalité re-germe et se ré-enfante seule dans la mélancolie. Les heureux qui ne le savent pas, qui ont l'heur de n'avoir de toute leur existence connu ni violence ni mélancolie, qui sont vierges et innocents de toute violence et de toute mélancolie véritable, l'ignorent : la mélancolie n'est que la cellule dormante de la violence.

La mélancolie est un jaillissement vers l'interieur, inéprouvé par les tiers qui ne se doutent guère que ce regard couve une inversion des flux de la fontaine de violence. Bougrab est fille de harki.

« Bougrab est fille de harki. »

Cela commence un peu à bien faire, non ?
Les enfants de victimes ne sont pas automatiquement des victimes, pas davantage que les enfants de bourreaux ne sont automatiquement des bourreaux.

Le cas Bougrab est complexe : elle s'est senti trahie quand la famille de celui qu'elle croyait sien l'a jetée aux chiens. Elle-même, faut-il supposer, a dû alors se dire ce "ça commence à bien faire" qu'inspire toute répétition des configurations fatales du malheur extrême.

La violence meurtière et le sentiment, parfois légitime, parfois illusoire ou partiellement illusoire, d'avoir été trahi relancent la violence, le goût de faire connaître le malheur en l'infligeant à tout ce qui se présente à portée de main.

Les femmes violentes sont rarement pardonnables. Bougrab pourrait être une exception.

"Elle reconnait une “surcharge de travail”"

Je me demande bien en quoi peut consister une "surcharge de travail" à l'Institut français de Finlande. On leur demande de déblayer la neige ? Je rangerais volontiers tout cela dans les hystéries partagées d'une petite bande de faux-travailleurs.

L'hystérie, son entretien, font un gros travail, un labeur intense, une profonde et éruptive occupation. Faut pas croire : l'hystérie et la bureaucratie ne sont pas incompatibles, et le surmenage, comme la banquise ou l'iceberg, sont majoritairement une affaire interne, privée, très partiellement exposée aux regards. Faire suer son entourage à une échelle titanesque requiert des conditions d'espace exiguës, cellulaires, quasi-familiales. Les grands théâtres grecs ou shakespeariens étaient dotés de scènes minuscules, où les porteurs de messages fatidiques, les estafettes marathoniens couraient à blanc, sur place, comme des cyclistes de music-hall. L'antenne finlandaise, comme le Danemark shakespearien, se prêtent à merveille à la mise en scène et en douleur de l'infini.

L'ancienne secrétaire d'Etat de Nicolas Sarkozy refait parler d'elle... et pas en bien. Jeannette Bougrab, est en effet épinglée dans Le Canard enchaîné, paru ce mercredi. Selon le palmipède, des agents de l'Institut français de Finlande - dont elle a pris les rênes en septembre - se sont plaints par écrit au Quai d'Orsay d'un management "vécu comme brutal et aléatoire" qui a conduit certains d'entre-eux "dans une détresse psychologique et physiologique intense".

[www.lexpress.fr]

Pardon, mais cette nouvelle que des agents de la fonction publique du Quai d'Orsay, planqués dans cette administration comme des poux dans la couture du pantalon, ont été dérangés dans leur sommeil d'hypocrites bienheureux libres de tout compte à rendre, et que ce dérangement a été tel qu'ils en ont éprouvé "une détresse psychologique et physiologique intense", a quelque chose de parfaitement réjouissant qui confine au sublime.

Merci Jeannette, et reviens-nous vite pour faire de même dans les ministères parisiens où pareils "détresse" et secouage de puces sont tout ce dont une certaine France a besoin.

Francis Marche a probablement raison : une antenne culturelle française en Finlande, cela évoque de belles et puissantes images de fonctionnaires incompétents, poussiéreux et endormis.

N'empêche que cette créature de Sarkozy (au même titre que Dati, Yade ou Amara — ah, c'était le bon temps !) trimballe avec elle, où qu'elle aille, sa vanité, sa mauvaise foi, son arrogance et son arrivisme lourdingues ; et l'on conçoit aisément qu'elle réussisse à jeter ceux qui la fréquentent hors d'eux.

En même temps, pour mettre des agents dans un état de détresse psychologique et physiologique (?!) intense, il en faut pas beaucoup.

"détresse physiologique" :

Votre Excellence, depuis l'arrivée de Mme Bougrad dans nos services, plusieurs fonctionnaires se sont plaints de l'obligation nouvelle qui leur est faite d'écourter leur pause déjeuner par une note de service émise début février qui stipule que sa durée doit passér de trois heures et demie à deux heures et demie. Ce qui rajoute quatre heures de travail par semaine aux seize heures de présence hebdomadaire requises par son prédécesseur.

Certains de nos agents somatisent grave et trois d'entre eux ont été mis en arrêt maladie pour une période indéterminée par leur médecin traitant. Je crois de mon devoir de vous signaler la précarité nouvelle que cette situation inédite engendre pour le maintien du font bonctionnement de l'Antenne car, ainsi que vous l'avez constaté, le chauffage des locaux de l'agence a dû être monté d'un cran pour compenser la perte en chaleur humaine que produisait la densité des agents présents dans nos locaux qui y chauffaient leur chaise. Nos rangs éclaircis pour une durée indéterminée, c'est la goutte au nez et les doigts gourds que certains d'entre eux se virent bientôt contraints d'assurer leur service dans des conditions indignes de notre Antenne et de sa haute réputation, avant que ne fût prise la décision de bousculer le thermostat de la chaufferie avec des conséquences pour le budget de fonctionnement que nos services comptables n'ont pas achevées de calculer à cette heure.

Je vous prie de croire, Votre Excellence, à l'expression dévouée de mes sons bentiments les meilleurs.

Le Lanceur d'Alerte.

Excellent !