Le site du parti de l'In-nocence

Jacques Soustelle et la décolonisation

Envoyé par André Page 
Je lis la Lettre ouverte aux vaincus de la décolonisation, de Jacques Soustelle (1972).
La décolonisation dont il y est question est celle de l’Algérie et de l’Afrique noire (il n’est pour ainsi dire pas question du reste de l’AFN et de l’Egypte, ni de l’Asie). Les « vaincus » sont les populations des pays décolonisés : En Algérie, Européens, Juifs et musulmans, ailleurs, les autochtones.
Soustelle dit à juste titre que la colonisation c’était la paix, l’ordre et le progrès, et que ce qui lui a succédé c’est la régression, la ruine, la barbarie et souvent la guerre. Il dénonce les décolonisés qui prétendent le contraire, et les Occidentaux qui tolèrent leurs élucubrations ineptes ou fanatiques.

Cela dit, le livre laisse énormément à désirer : Soustelle n’explique pas pourquoi il est tout seul (ou presque) à s’opposer jusque au bout à la décolonisation (tout seul avec Salazar).
Il incrimine vaguement l’esprit de décadence, le racisme (de ceux qui ne veulent pas être les égaux des Noirs ou des Arabes), l’égoïsme, et l’esprit de lucre du grand capital (qui veut exploiter les mines du Zaïre sans avoir à payer pour la promotion de la population de ce pays).

Evidemment, c’est très court (et c’est même largement faux).
D’abord, Soustelle tait le fait que les colonisés, en gros, souhaitaient la décolonisation (par exemple, les Noirs d’Afrique du Sud sont évidemment plus pauvres que si le régime blanc avait continué, mais ils votent pour l’ANC, pas pour les partis blancs).
Et la suite de la réponse est évidemment à chercher du côté de l’esprit de la démocratie moderne : elle postule l’égale capacité politique de tous les hommes. Alors, si les habitants de tel pays veulent l’indépendance, ils y ont droit.

Quelles leçons tirer du livre de Soustelle ?
Diverses.
En voici une que j’en tire.
Il y a quarante ans, la science était racialiste (par exemple, le volume Anthropologie de la Pléiade (1970)). Il y a encore vingt ans, Mégret et son épouse ont tenu des propos racialistes. Maintenant, ceux-ci sont entièrement tabous, même au Fn, et même sur ce site du Parti de l’In-nocence.
Ce n’est évidemment pas que la science a réfuté le racialisme (bien au contraire : elle le confirme chaque jour). C’est que l’expression publique du racialisme est contraire à l’esprit démocratique. Quand une société démocratique est ethniquement homogène (comme la France d’il y a cinquante ans), l’expression publique du racialisme est encore possible, ensuite cela cesse à peu près complètement.
Quel rapport avec Soustelle ? Ceci : l'esprit démocratique est une très puissante chose. Quand, sur un point, on va contre une tendance de l'esprit démocratique, on a la vie dure, sauf si l'on est adapté à la condition de grand minoritaire.

Et, personnellement, j'en tire une autre leçon. Je trouve que la position de Renaud Camus souffre de la même faiblesse que celle de Soustelle : il ne comprend pas l'origine de la position de ses adversaires (et l'origine de sa relative solitude). Leur attitude lui est un incompréhensible scandale. Ils lui semblent monstrueux (il ne voit pas que ses adversaires immigrationnistes sont inspirés partiellement par la compassion démocratique, la bonté : il ne voit pas qu'il y a une légitimité à leur attitude).
Personnellement, j'ai toujours admiré la posture d'un Raymond Aron, tentant de comprendre ses adversaires et de leur rendre justice.
C'est une position qui donne de meilleures chances de convaincre. Et, à défaut, elle procure des satisfactions d'intelligence. Je suis vaincu mais je sais pourquoi.
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