Le site du parti de l'In-nocence

Rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Paris Vème

Envoyé par Thierry Noroit 
Vendredi 22 juin 2012, 22h35
à Julie d'H.

Sortant de chez toi, j'ai cru à une manifestation politique tant une foule compacte se pressait rue Geoffroy-Saint-Hilaire. Je me trompais : ce n'était pas une manifestation politique ou syndicale, c'était la sortie de la messe, je veux dire : la sortie de la mosquée. Cette foule compacte qui envahissait les trottoirs m'a vivement impressionné, car cela fait au moins cinquante ans qu'on ne voit plus à Paris autant de gens jeunes, dynamiques, sortant d'une église où ils ont assisté à un office religieux. Que l'islam soit, en France, la religion de l'avenir, c'est pour moi depuis longtemps une évidence, et aujourd'hui ce spectacle m'en a convaincu.


Gabriel Matzneff, Les Nouveaux émiles de Gab la Rafale, Editions Léo Scheer, 2014, p. 167-168.
Utilisateur anonyme
08 octobre 2015, 11:26   Re : Rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Paris Vème
Le problème, c'est que comparé (je sais, il ne faut pas comparer) à Renaud Camus ou à Richard Millet, Gabriel Matzneff aura toujours ce p'tit côté "écrivain pour midinettes". Comment dire ? C'est trop léger, la pensée est trop courte, son régime trop faible, quant à la syntaxe, elle ne tient pas assez fermement sur ses pattes. En clair il lui manque ce "petit quelque chose" qui fait toute la différence.
Et c'est dédicacé à une certaine Julie d'H

Heureuse Julie, qui a dû éprouver de la joie et de l'émotion jusqu'au spasme de se voir ainsi honorée de ces six lignes d'une prose incomparable, qui traversera les siècles, et à côté de laquelle celle de Chateaubriand dans René a tout du devoir d'élève de CM2 en difficulté, même si l'élève en question saurait cependant écrire
j'ai cru à une manifestation politique tant était compacte la foule qui se pressait...
C'est pas grave, mais je ne comprends pas bien comment une religion d'opprimés, d'humiliés, de victimes d'à peu près tout, peut-être dynamique (si on est cohérent, on reconnaîtra qu'une telle religion ne peut qu'être réactionnaire et agressive). C'est comme cet autre mythe de la peur des immigrés et de l'islamisation: ce dernier phénomène me révolte au moins autant qu'il m'épouvante.
A mon avis on peut très bien être à la fois :

- dynamique
- cohérent
- et réactionnaire

C'est du reste ce que nous devrions être nous-mêmes, pour espérer contrer les différentes formes de remplacement.
A moins que le titre de l'ouvrage "..nouveaux émiles" (??) n'institue cette "Julie d'H." dans les habits de la Julie de la Nouvelle Héloïse" ? Ces romanciers français vous sont d'un compliqué ...!
L'ouvrage de Gabriel Matzneff n'est qu'un recueil, assez paresseux, d'e-mails (qu'il rebaptise "émiles") adressés à divers interlocuteurs. La rencontre entre Julie et Emile est fortuite et ne doit pas nous engager sur une piste rousseauiste.

La comparaison, cher Pascal Mavrakis, entre les trois écrivains que vous citez est en effet des plus périlleuse. Très indépendants tout trois (et c'est encore peu dire), ils ne seraient peut-être pas ravis d'être comparés ou même seulement rapprochés. S'ils s'estiment mutuellement, il me semble qu'il s'agit d'une estime distante et d'ailleurs superficielle. Ils se connaissent mal.

Pour preuve, à la lecture du même petit livre de Matzneff, on trouve cet extrait d'e-mail (pardon : émile) surprenant, p. 124 :

Mardi 20 décembre 2011, 11h46, à Patrice L.

Vous me parlez de Renaud Camus, mais l'ami Renaud est un passionné d'informatique (il écrit son journal intime directement sur l'ordinateur!!!), il jongle avec aisance avec le web, et en outre il s'occupe de son oeuvre à plein temps, il la défend bec et ongles, il a un réseau de soutiens, au lieu que moi c'est l'exact contraire : je n'ai aucun goût pour internet et, par ailleurs, j'écris mes livres, je les publie, punto e basta. Je suis incapable de faire ma propre promotion, de m'occuper de l'intendance.


Probable que Renaud Camus écrirait la même chose de Gabriel Matzneff !
Passez-moi le service des Réclamations, s’il vous plaît.
Service des réclamations ? Disparu, remplacé, remplacé !

C'était la France d'avant.
Autant demander le 22 à Asnières.
Et quand on pense qu'il y a des gens qui disent se lasser de Fernand Raynaud. Je ne sais pas comment ils font.

La France et ce qui devait, ou aurait dû, déjà s'appeler la préférence étrangère :
[www.ina.fr]

Un sketch de F. Raynaud comme celui-là vaut trois ou quatre volumes de Matzneff : plus percutant, plus riche, plus fouillé, plus profond et mieux écrit.
Un sketch de F. Raynaud comme celui-là vaut trois ou quatre volumes de Matzneff : plus percutant, plus riche, plus fouillé, plus profond et mieux écrit

Entièrement d'accord. C'était un génie dont les textes peuvent être lus et se caractérisent par une magnifique sobriété et une précision diabolique. - Qui eût cru qu'on exalterait un jour Fernand Raynaud sur le forum du PI ?
Utilisateur anonyme
08 octobre 2015, 15:46   Re : Rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Paris Vème
Euh... j'ai quelque chose de Guy Bedos... non, rien.
Blaise Pascal, Fernand Raynaud, Laure Adler, Michel Charasse, moi — downhill all the way.
08 octobre 2015, 16:36   De la certitude
« Que l'islam soit, en France, la religion de l'avenir, c'est pour moi depuis longtemps une évidence, et aujourd'hui ce spectacle m'en a convaincu. »

C'est quand même faire preuve d'un remarquable souci de probité intellectuelle, de devoir encore être convaincu de ce qu'on tient depuis longtemps pour une évidence.
Cher Alain Eytan, comme je le disais plus haut, le livre de Gabriel Matzneff d'où j'ai extrait ce passage est en fait un recueil d'e-mails (ou "émiles") non retouchés qui peuvent présenter des approximations ou imperfections de "premier jet". Ici, la formulation est en effet redondante. Cela dit un philosophe comme vous peut certainement concevoir que la force de l'évidence n'emporte pas toujours - et pas directement - la conviction. La preuve, comme le dit si bien le français, il faut se rendre à l'évidence. Non sans y résister longtemps - parfois.
Utilisateur anonyme
08 octobre 2015, 17:18   Re : Rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Paris Vème
No more "émiles" !!!! Please...
Cela dit, j'aime beaucoup Matzneff, et ai lu certains de ses journaux avec une sorte de gourmandise envieuse (Ivre de vin... m'avait en revanche paru un peu trop démonstratif et répétitif, presque didactique, dans le genre, ce qui est un comble — pas assez léger, justement !).
Quand j'habitais rue de l'Abbé-de-l'Epée, jadis, nous nous croisions souvent, et échangeâmes ma foi des regards courtois et intéressés.


» Comment dire ? C'est trop léger

Apolitique, vous voulez dire, résolument et seulement jouisseur et nombrileux ? Vous en avez de bonnes, Pascal !
...et mon cher Thierry, si vous pouviez nous donner quelques exemples de ces subtiles dispositions d'esprit, où vous teniez pour des évidences des choses dont vous n'étiez pas convaincu, du moins quand vous-même étiez seul, cela pourra m'être instructif, je vous en saurai gré, je dis ça par sincère curiosité intellectuelle...
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