La langue

Grammaire : désormais, le COD ne sera abordé en classe qu'à partir de la 5e


Mais qu'on se rassure, à la rescousse Le Monde arrive: [progresser-orthographe.lemonde.fr]

Il y a sept ou huit ans, quand j'enseignais en Mathématiques Spéciales dans un “grand lycée parisien”, je devais rappeler à mes futurs polytechniciens, normaliens, centraliens, etc. ce qu'était exactement une... préposition. Ils avaient comme un doute.

Pour ce qui est de l'enseignement primaire et secondaire, il est toujours savoureux — et tristement grotesque — de voir émerger, dans le chaos final de l'effondrement, des termes techniques habituellement réservés aux universitaires spécialistes de linguistique. C'était déjà le cas il y a quelques années avec la fonction perlocutoire de langage, qui figurait expressément au programme des collèges et avait un peu fait parler d'elle. (Imaginez-vous expliquer, dans quelque classe de ZEP ultra-violente, ce qu'est la fonction perlocutoire du langage.) Mais enfin, c'est un grand classique du pédagogisme : plus le Désastre avance, plus on le maquille, de façon dérisoire, au moyen de concepts et autres termes techniques censés prouver non seulement que tout va bien, mais aussi que bientôt tout ira au mieux. « Encore un effort, camarades, nous sommes au milieu du gué », telle pourrait être la devise du pédagogo.

Votre enfant ne sait pas écrire deux lignes sans faire de fautes ? Ne vous inquiétez pas, de toute façon l'orthographe c'est pour les ânes, et puis il y a mieux à faire, par exemple {insérer là quelque chose de pompeux issu du jargon universitaire, si possible avec cette morgue infinie qui caractérise l'actuelle ministre de l'Education Nationale}.

Il y a sept ou huit ans, quand j'enseignais en Mathématiques Spéciales dans un “grand lycée parisien”, je devais rappeler à mes futurs polytechniciens, normaliens, centraliens, etc. ce qu'était exactement une... préposition. Ils avaient comme un doute.

Ha, c'est parce qu'on ne sait pas ce qu'est et ce que veut dire "sur" qu'on l'utilise abusivement et n'importe comment ? (Cette préposition semble d'ailleurs avoir eu la peau de toutes les autres.)

Mais qu'on se rassure, à la rescousse Le Monde arrive: [progresser-orthographe.lemonde.fr]


J'adore: "Note : service disponible actuellement en version Bêta."

La dictature conjointe de sur et en est en effet terrible (« J'enseigne en collège sur Grigny. »)

Bein quoi il est où est l'problème ? L’école ne remplit-elle plus son rôle ? Du point de vue de l’idéologie dominante, elle le remplit au contraire parfaitement ! La réflexion constitue une entrave à la consommation, qui exige des individus sans repères, il est donc absolument nécessaire que les individus soient dissuadés de réfléchir, tout comme il est nécessaire que l’enseignement de l’histoire ne les pousse plus à s’identifier au passé national. Et l’école s’y emploie à merveille, fabriquant à la chaîne des enfants à la fois informes et prodigieusement conformes, c’est-à-dire des narcissiques immatures.

L'école, en devenant folle, en enseignant et en se comportant criminellement comme elle le fait, laisse proliférer des parle-êtres (Lacan) monstrueux qui produisent déjà une socialité et des rapports monstrueux, sataniques, infectés. Dans le tram, j'entends une adolescente, hilare, agressive, dire entre deux coups d’œil à l'écran de son smartphone et à voix très très haute (non pas pour que tout le monde entende, mais précisément comme si tout le monde n'était pas là) à un copain de classe: "Euh... toi on dit que t'as une tête de pédé alors... T'es trop sale en fait." Le copain réagit lui-même en mugissant insultes et rires. Il n'est pas vexé et nombre de passagers rient aussi de bon cœur!

C'est toute la scène sociale qui est vermoulue par cette dégringolade dans l'escalier sans rampe qui nous ramène à l'état sauvage.

« L'école, en devenant folle, en enseignant et en se comportant criminellement comme elle le fait »

C'est encore, je crois, donner trop de pouvoir à une Ecole devenue de nos jours une institution essentiellement passive et collaborationniste. L'Ecole vient après la famille, la société ; elle n'en peut mais, et ne fait que s'adapter au fait qu'en Occident, depuis une vingtaine d'années, ceux qu'on appelait naguère les cas sociaux sont en train de devenir, démographiquement, la norme.
Qu'est-ce qu'un établissement scolaire, de nos jours, sinon un lieu qui doit accueillir, chaque jour, et de façon très concrète, des tarés dont les parents sont eux-mêmes tarés ?

Y voir flotter des lambeaux de grammaire énonciativiste, c'est touchant, sublime, et superbemement dérisoire.

Citation
Trystan Dee
Imaginez-vous expliquer, dans quelque classe de ZEP ultra-violente, ce qu'est la fonction perlocutoire du langage

Faites-le de façon ludique et interactive. Racontez l'histoire édifiante du Père Locutoire et de la Mère Locutoire qui, étant de “cultures” différentes, sont en butte à l'incompréhension langagière et au racisme syntactique de leurs familles respectives, totalement fermées au conjuguer-ensemble. Tout finira par s'arranger lorsqu'ils auront l'idée de faire venir du bled, pour prôner à tous la tolérance orthographique, leur cousin, le Père Formatif.