N'est-ce pas très exactement ce que Hidalgo et Juilliard ont fait pour Paris en décembre 2015 ?
On massacre en masse le 13 novembre, le 17 décembre ces deux-là font savoir
urbi et orbi que Paris
est une fête ! et qu'il faut s'y précipiter pour s'y divertir. Je ne sais pas si les autorités d'occupation et de collaboration 1940-1944, entre deux exécutions au Mont-Valérien, avaient été capables de pareil cynisme.
Entre temps le gouverneur militaire de la Capitale avait fait savoir lors d'une audition d'enquête que les militaires (ceux qui restèrent l'arme au pied à dix mètres du théâtre de la tuerie pendant que les islamistes s'amusaient avec leur kalachnikov)
ne sont tout de même pas là pour défendre des civils. Ce qui était, rappelons-le, l'argument de l'amiral Darlan pendant les années d'occupation et de guerre : la flotte est trop précieuse pour qu'on la mobilise dans des combats. La flotte est faite pour être préservée, les fusils-mitrailleurs de nos soldats en faction sur les boulevards, pour être astiqués et s'épargner toute surchauffe inutile. La doctrine du militaire collabo est celle-là : épargner son arme, se préserver, se carapater et regarder ailleurs quand il y a de l'action.
Ce général "gouverneur militaire de Paris", se nomme Bruno Le Ray, voici ce qu'il a déclaré :
"... Un militaire n'a pas pour vocation d'intervenir dans une zone qui n'est pas en guerre... Il est impensable de mettre des soldats en danger dans l'espoir hypothétique de sauver d'autres personnes... "
Ce qui fait le motif de la plainte déposée par une trentaine de familles de victimes, pour "non-assistance à personne en danger".
"Gouverneur militaire de Paris" était un titre sous le Consulat, et c'est sous l'autorité de ce fonctionnaire -- toujours ces maudites répétitions-coïncidences -- que le 21 mars 1804, on exécuta le duc d'Enghien après un procès d'une séance tenue à 1 heure du matin au château de Vincennes, et avant d'inventer, pour la première fois sans doute, que "Paris est une fête" (comme le rapporte Chateaubriand). Pour la première fois parce que je crois qu'au lendemain de la Saint-Barthélémy, on n'avait pas osé. Les temps étaient moins barbares.
France festive, France collabo, pays de la servilité volontaire, ennemi de lui-même, pris dans l'inlassable cycle de la fête cynique et de l'amour compassionnel pour ses bourreaux.
Bonne fête de la musique, tas de veaux !