Françoise Héritier vient de mourir. Partout dans les médias, sa formule célèbre, sidérante, devant laquelle la conscience nationale doit se prosterner avec gravité : l
'homme est la seule espèce dont les mâles tuent les femelles.
D'abord, les "mâles" (qui nous analysera un jour cette obsession féministe pour, coûte que coûte, animaliser l'autre sexe...) tuent d'autres mâles aussi, et même majoritairement -- la première guerre mondiale fut une tuerie d'hommes à hommes, qui épargna gracieusement les
femelles, quant on y pense ; au moins, s'agissant de cette guerre, nos féministes ne peuvent pas se peindre en "victimes du mâle blanc", c'est déjà ça.
Donc, si les hommes
tuent davantage d'hommes que de femmes, le postulat de F. Héritier apparaît d'emblée, incontestablement, comme fallacieux, un petit jeu d'esprit, un aimable arrangement avec la vérité "pour la bonne cause". En outre, l'homme peut être désigné aussi comme "seule espèce" a instaurer socialement le couple homosexuel, la famille homosexuelle, qui fait une belle place à l'homosexualité féminine, laquelle du reste fut largement plus tolérée (en Occident) que l'homosexualité masculine, celle-ci ayant été davantage réprimée. Dans l'histoire, l'inégalité homme-femme dans ce domaine étant patente au détriment de l'homme.
Si les homicides d'homme à femme (abbréviés H-F) sont en nombre inférieur dans la société aux homicides H-H, nous sommes en présence d'un effet de loupe statistique sur ce qu'il faut bien appeler "meurtres au foyer", sous-ensemble des homicides où les meurtres H-F sont statistiquement majoritaires. Ayant établi par ailleurs que les meurtres sont commis, en règle générale,
j'entends pour tous les sous-ensembles d'homicides, par un proche de la victime, la restriction du cercle des proches qu'entraîne la condition de femme au foyer cause arithmétiquement une prépondérance des meurtres H-F puisque l'homme ayant pour conjointe une femme au foyer se trouve disposer d'un cercle de connaissances, de proches et de relations sociales (de travail, etc.) plus étendu que n'est celui de sa femme, si bien que si lui perd la vie par homicide, la probabilité statistique que ce le soit par des mains extérieures au foyer est nécessairement plus grande que pour son épouse qui n'a guère que lui pour meurtrier proximal potentiel, ou plus exactement qui l'a lui pour premier meurtrier proximal potentiel.
Pour bien comprendre cela, il faut peut-être dresser une comparaison imagée qui mettra cet effet d'illusion statistique en perspective, et la pensée magique, puis théologique-doxique que le féminisme bâtit sur elle:
Supposons une société rurale d'un petit pays au climat marqué par de violents et terrifiants orages, criblé de coups de foudres meurtriers, zébrant l'atmosphère d'éclairs terrifiants qui fauchent régulièrement des vies. Des pays comme ça existent, par exemple, le Bouthan dans l'Himalaya. Imaginons que dans ce monde et cette société rurale, la répartition des tâches soit telle que les femmes soient ordinairement affectées aux travaux des champs cependant que les hommes s'occuperaient du foyer (ce type de société existe, en Afrique notamment). Qu'observerait-on alors ? Que le nombre des femmes foudroyées est cinq fois plus important que celui des hommes qui périssent sous le courroux de Zeus.
On imagine alors, dans cette société rurale, des chamans, des sorciers, des femmes à l'âme victimaire, s'accordant pour faire connaître à la population que
Zeus n'aime pas les femmes. Qu'il faut faire quelque chose contre cela, et comme il n'est pas question de rééduquer Zeus à se rendre suffisamment aimable avec les femmes pour ne pas les foudroyer dans les champs, qu'il convient d'entreprendre, de concevoir, des rites propitiatoires, des cérémonies d'invocation, des sacrifices de nouveaux-nés destinés à apaiser la fureur sadique et la détestation qu'éprouvent pour les femmes les dieux responsables des orages, leur révoltante misogynie. François Héritier fut ce chaman. La doxa féministe, qui sous-entend que les hommes sont à rééduquer au lieu d'analyser sociologiquement les phénomènes et les statistiques afin de s'appliquer à modifier la condition des femmes, notamment des femmes au foyer, est cette pensée magique, cette théologie primaire et sotte qu'on nous sert à la pelle depuis quelques années, toute orientée sur la modification des comportements, la rééducation, et la fabrique de paratonnerres-totems.