Les Préludes de Scriabine. Mais enfin qui est-ce qui pleure ici ? D'où proviennent ces pleurs qu'on entend percer dans les trilles et la fureur des accords plaqués ? C'est le piano qui pleure et qui ne sait pourquoi, qui pleure absolument sans raison et quand il ne le faudrait pas, pauvre fou qui ne s'était jamais attendu à ça, à ces folles caresses, appuyées, insoutenables, discourantes et dispensatrice d'une pluie de sens et de fatales injonctions :
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Ce dont Yuja Wang est le nom (phonèmes, sèmes, mantique et information prédestinale) :
王羽佳 est son nom.
王,
Wang, est le nom de famille, qui tout de suite pose
le roi, le souverain dans cet idéogramme, mais cette graphie est proche aussi de celle-ci, qui ne lui ajoute qu'un point :
玉 et qui, elle, se prononce
yu deuxième ton et qui désigne le jade impérial.
Si bien que qui entend/voit 王 (Wang) entend et voit aussi un peu de 玉 (Yu), par "connotation proximale", si l'on veut, en vertu d'une synesthésique et souterraine association
qu'établissent les sens, soit les organes de la perception. Les sens ainsi, conjoignent deux sens (roi/jade). En outre le phonème
yu rendu sous-jacent à ce
wang par cette association sémantique, appelle déjà les sons des deux syllabes du prénom qui suit :
羽佳 : Yujia
羽 est le
yu. La charge pictograhique est ici évidente : il s'agit de deux ailes, comme Chagall en attache au dos des anges. Deux grandes ailes où les plumes elles-mêmes sont figurées. On retrouve cette graphie pour tout ce qui touche de près ou de loin à l'aviation, au vol aérien. Ceci par exemple : 飛 qui se dit
fei, contient 羽 et signifie voler et sert à composer le mot avion : 飛機 (fei ji). Donc la graphie 羽
yu donne à voir des ailes, de grandes ailes d'avion gros porteur. Mais ce
fei 飛 est celui du vol rapide, qui file, rapide comme l'éclair des doigts de l'intéressée sur le clavier que ses mains survolent où comme les avions à réaction qui emportent la concertiste professionnelle partout sur la planète depuis qu'elle s'est envolée de sa Chine natale à la rencontre de son destin à l'âge de 14 ans, puis il y a autre chose : le phonème
yu renvoie à cet autre graphie homophone au
yu des grandes ailes, soit celle-ci :
瑜 où l'on retrouve, côté gauche, soit le côté de l'idéogramme où se place le déterminant sémantique (la fameuse "clé" de la sinologie fançaise d'autrefois), le 王 du nom de famille de l'intéressée. Il y a donc un écho graphique qui se donne dans l'écho phonétique (yu). Mais il y a plus encore : cette graphie homophone (
瑜 homophone de
羽) opère dans cette association phonétique un retour sémantique au jade royal connoté dans le nom Wang puisque
瑜 désigne génériquement l'admirable pureté d'un joyau, la perfection de son eau. Chez la pianiste : la perfection de son jeu, de la sonorité de ses exécutions, celle du cristal sonore qui les caractérise. En outre
瑜 sert à désigner le yoga, discipline spirituelle, discipline parfaite, diamant de toutes les disciplines :
瑜伽 et pour apothéose à cela, à la complexe poétique dont est chargée cette première syllable du prénom, le
伽 qui permet de dire et d'écrire
yoga en chinois quand on le fait précéder de
瑜 se prononce
jia, soit exactement comme la seconde syllabe du prénom de la pianiste, tant est si bien que le prénom dans son entier est homophone du terme qui désigne le yoga en chinois. La pianiste rappelle souvent l'importance de la discipline dans sa carrière. Son envol, son vol sont
disciplinés.
Enfin il y a la deuxième syllabe du prénom, le majestueux
佳 qui se prononce
jia mais que l'intéressée fait écrire
ja (en omettant le "i").
Jia se prononce
chia, avec un "ch" doux et chuinté. Que signifie ce terme ? D'abord la graphie : à l'endroit où se dresse le déterminant sémantique, il y a
la figure de l'homme, le
ren cher à Confucius, à droite, un empilement pyramidal, monumental du signe de la Terre. On se trouve face à un monument, un splendide édifice haut dressé. Cet idéogramme sert à signifier à la fois la splendeur et la nature
faste de cette beauté.
Faste au sens opposé à celui de
néfaste. On se trouve face à la déesse Athena, haute figure bienveillante, déesse protectrice et amie.
佳 est l'emblème d'une protection divine autant que de la beauté offerte avec faste.
L'artiste vit son destin inscrit dans son nom : la poétique de son nom nourrit son art, aiguille et façonne sa carrière, ou, si l'on préfère, celle-ci rétro-éclaire le nom du sujet et anime en l'llustrant le jeu poétique qu'il a déclenché.