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18 décembre 2017, 00:21   L’excuse d’humanité
J’avais une dizaine d’années quand je passais quotidiennement par la station du métro Convention. Chaque fois, je voyais à l’entrée de la bouche un homme barbu qui me paraissait vieux mais qui n’avait peut-être que la cinquantaine. Il tentait de vendre à la criée un indicateur des rues de Paris (comme on faisait à l’époque) qui comprenait aussi, disait-il, des adresses utiles, comme des bons restaurants, et dont il avait un seul exemplaire en main. À force de le voir, je me suis enhardi jusqu’à lui parler. Il m’a appris qu’il dormait là, dans le métro, sans doute par la bienveillance du chef de station. Mais que si le métro les hébergeait, lui et sa compagnie, il ne les nourrissait pas, bien sûr. Il vendait son guide quatre cents (anciens) francs et n’entendait pas me lâcher. Je lui objectais que je n’avais que la moitié de cette somme. Et bien que je fut vêtu presque aussi pauvrement que lui, je devais lui paraître riche de posséder autant d’argent. Je comprenais son désespoir et je lui cédais mes 200 francs, en lui laissant son guide inutile pour moi. J’avais rencontré la vraie pauvreté, celle qui vous tenaille le ventre.

Une dizaine d’années plus tard, quand je commençais à penser politique, j’aurais mis ma tête à couper que notre société avancée allait régler ce problème. Pauvre de moi ! Je n’aurais plus de tête... Non seulement le problème n’a pas été réglé, mais il a été aggravé. Eh oui ! Quand, dans les années 70, les centres psychiatriques ont été fermés – la terminologie officielle dit “abolis” – où se sont retrouvés les malades ? Il ne faut pas être grand clerc pour deviner qu’ils se sont retrouvés pour la plupart sur le trottoir, là où ils ne coûtaient rien. C’est ainsi qu’il y a en France une population à peu près stable d’environ 150 000 sans-abri qui ont une espérance de vie de 50 ans. Or selon une étude qui me paraît très vraisemblable cette population comprendrait 70% de malades mentaux et 30% de cas graves. On retrouve là les gens dont on s’est débarrassé parce qu’ils coûtaient trop cher. Pourtant c’étaient de gens qui avaient peut-être travaillé un temps et contribué à la richesse nationale. Et s’ils n’avaient jamais été capables de le faire, certains avaient peut-être un grand-père mort à Verdun qui leur avaient beaucoup manqué dans leur vie. En tout cas ils étaient des membres de la communauté nationale et engageaient notre responsabilité morale. Il est intéressant de noter que venant de cette population orthodoxe les faits de violence sont rarissimes. Ces gens sont résignés. Nous avons d’un côté des malades mentaux non-violents et qui font pendant à une nouvelle population hétérodoxe de gens parfois très violents qui, comme nous le montrent les faits-divers, sont considérés puis traités médicalement comme des malades mentaux – en vertu d’un paradoxe historique complet. Car si le phénomène endogène subit une omerta quasi-totale, le même phénomène mais exogène provoque une agitation permanente. Il est constamment martelé, à tous les niveaux, que si, à tous ceux qui déferlent chez nous en rangs serrés, sous des prétextes divers, nous ne fournissions pas un toit et un revenu nous perdrions notre humanité... On ne peut pas perdre ce que l’on n’a pas ! Il faut donc trouver à ce grand mouvement d’acceptation une autre explication.
18 décembre 2017, 01:15   Re : L’excuse d’humanité
Le parallèle est saisissant.
18 décembre 2017, 12:36   Re : L’excuse d’humanité
Gérard Collomb:
- 50.000 étrangers logés à l'hôtel et quelquefois certains étrangers sont logés à l'hôtel depuis 15 ans.
 
21 décembre 2017, 11:16   Re : L’excuse d’humanité
« Vivre dans un certain siècle et s’apercevoir qu’on était mieux fait pour un autre, cela ne doit pas désespérer, car ce malheur n’est point sans quelque remède. Nous atteignons par magie l’époque où nous ne nous sommes pas trouvés matériellement ; nous la saisissons par son art. Être cultivé, cela ne signifie pas autre chose que d’avoir le choix entre tous les moments de l’humanité et d’aller, à notre gré, de l’un à l’autre, comme un archipel, un navire heureux se promène d’île en île. Toute haute vie a ses évasions sereines. »
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