Citation
Pierre Hergat
@Henri Bès , @Trystan Dee
Il y a une petite question qui m'est venue à l'esprit en vous lisant, celle de la parenté entre l'Iran et l'Afghanistan, ces deux pays sont un peu, me semble-t-il , comme la Gaule cisalpine et la Gaule transalpine. Après tout, on y parle le farsi dans les deux, et si je ne me trompe pas, ils se confondent au niveau des populations.
(J'ai le souvenir d'une lecture où, chez les sumériens, donc, sur le chatt el arab, l'Occident (mot d'origine sumérienne) indiquait les monts du Liban et l'Orient (autre mot d'origine sumérienne) indiquait les contre-forts de l'Himalaya. Donc, en outre, les limites de l'univers sumérien, ce qui inclut l'Afghanistan.
La Perse deviendrait alors l'Iran plus l'Afghanistan.
Du reste, c'est un peu ce que semble indiquer cette carte:
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fr.wikipedia.org]
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Votre belle carte de l'empire achéménide reflète un "sentiment géographique" impérial très tardif, par rapport aux origines sumériennes. La parenté est indéniable entre Afghans et Persans, et d'ailleurs ils ont longtemps été réunis sous la même autorité politique, jusqu'à la conversion des uns, au XVI°s, au chiisme, et le maintien des autres dans le sunnisme. Avant même l'arrivée en ces contrées des peuples parlant les langues indo-iraniennes, les Sumériens faisaient commerce de lapis-lazuli avec l'actuel Afghanistan. Mais cela remonte aux troisième et au second millénaires avant notre ère.
Les appellations géographiques sont variables en sumérien et akkadien (les deux langues vont ensemble, au moins à l'écrit). Dans un texte, j'ai trouvé cette analyse du nom Elam (l'actuel plateau iranien, qui deviendrait la Perse, dont la capitale était Suse, au nord-est de Sumer) : le sumérologue expliquant le texte, J. L. Hayes, dit que ce nom était probablement d'origine élamite ; il s'écrit avec le signe /nim/ qui peut vouloir dire "haut". Traduit en akkadien sémitique, cela donne /elû/, dérivé de la racine sémitique de même sens, d'où Elam, le haut pays par rapport à la Mésopotamie. Ce même signe /nim/ en sumérien veut dire prisonnier de guerre et esclave. On peut aussi inscrire à l'intérieur le signe /kur/, montagne, pour avoir le mot sumérien "esclave" (
ir-3).
Pour ce qui est de l'est sumérien, on n'a pas -- je crois -- de connaissances sûres. Les Sumériens ont commercé avec les cités de l'Indus, mais aussi avec les pays de la péninsule arabique : chaque espace a un nom particulier, Dilmun, Meluhha, Magan etc, sans qu'on sache exactement lequel désigne quoi. Ces noms apparaissent pour désigner un produit rare et cher, venu par bateau. L'Himalaya me semble un peu loin, mais on le trouve en remontant l'Indus. Ils l'ont peut-être fait.
L'ouest, dans leur géographie mentale, est un ethnonyme : /Mar-tu/ le désert habité par les Amorrites, barbares hostiles. C'est, dans leur représentation, le pays du soleil couchant, celui auquel on tourne le dos car on se situe dans l'espace face au soleil levant. Il est associé à l'après, à l'avenir, négativement connotés.
Le Nord proche est Akkad, le pays de Babylone, en sumérien /ki-uri/ et personne ne sait avec certitude ce que ça veut dire. J'ignore quelles sont les autres appellations du Nord, bien que le premier état d'Uruk ait étendu ses liens commerciaux jusqu'au Liban. Ce nom est sémitique et dérive d'une racine qui veut dire "blanc". Il n'est donc pas sumérien.
On rencontre plus de vocabulaire géographique en akkadien, aux grandes époques de la diplomatie orientale (d'Aménophis III jusqu'à Ramsès II) et surtout à celle de l'empire assyrien, au VIII°s. Dans le lexique des inscriptions d'Assurbanipal que j'ai sous les yeux (VII°s) on n'utilise plus le sumérien que pour les déterminatifs (comme les clés chinoises) et l'on emploie des noms "nouveaux" (non attestés dans la tradition) pour évoquer les espaces conquis : Labnâna, le Liban, Luddu, la Lydie, Sâmerina, Samarie, etc ...Mais on voit bien qu'entre les cités-états sumériennes, ou l'époque d'Ur III en -2000, et l'empire assyrien en -700, l'échelle des représentations, des relations politiques et commerciales, et donc la langue, ont changé.
Ayant l'avantage de l'ancienneté et d'un certain mystère, le sumérien est souvent cité comme origine imaginaire de certains mots.