"23 septembre 1940
Si demain l’Angleterre s’effondre, si demain l’Europe est pour vingt ans, cinquante ans, pour un siècle, germanisée ? Et non pas germanisée au vieux sens qu’on pouvait encore, il y a vingt ans, donner à ce mot. Et non pas même caporalisée. Car la discipline militaire a ses limites. Demain peut-être l’Europe ne sera plus qu’une machine à fabriquer du produit chimique et de l’homme « synthétique »."
Léon Werth –
Déposition – Journal 1940-1944
Fort heureusement, les nazis ont perdu...
(Je découvre ce
Journal, réédité en 1992 par Viviane Hamy, et en conseille vivement la lecture à ceux qui ne le connaîtraient pas. Il fourmille de traits acérés et d'observations qui me semblent restituer à merveille la vie en France, en zone libre, pendant l'Occupation, et ne manque pas d'évoquer par ci par là, notre époque. On y trouve par exemple l'omniprésence de "théories du complot" (qui ne sont évidemment pas nommées ainsi), pour expliquer, entre autres, la débâcle de mai 1940. On y voit clairement comment le totalitarisme ne peut se passer de niaiseries (de "momeries"). ("Un certain Lousteau parle à la jeunesse lyonnaise. [...] Ce Lousteau s'applique à définir la condition prolétarienne. Cela, il n'y a pas vingt ans, eût sonné subversif. Le marxisme de Vichy est filtré à travers la comtesse de Ségur.")