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Décadence

Envoyé par Pierre Jean Comolli 
03 octobre 2022, 15:18   Décadence
Quelques signes prégnants, témoins ou activateurs, parmi d'autres de la décadence non-aperçue par Paul Veyne et autres bienheureux de la post-modernité

1. Les toilettes sèches, le crudivorisme, les anti-cancéreux octroyant un gain médian de survie de 15 jours, les messages affichés dans des pochettes plastiques dans les établissements recevant du public, le service dans les cafés et restaurants, l'Église catholique, la taille des chambres d'hôtels, l'état de la chaussée, les travailleurs manuels, les médecins et les enseignants, les matériaux de construction, les paysages, les jouets, jardins et habits pour enfants, les réseaux sociaux (sauf YouTube), les façons de parler et d'écrire, le spectacle sportif, la musique, les livres et les films (sauf de science-fiction et les documentaires scientifiques), le bruit, la vie politique, les ZAD, la vie quotidienne de 9 Français sur 10, les antidépresseurs, l'architecture, les meubles, l'inconfort ordinaire, les jeunes femmes sales chaussées d'écrase-merde, les jeunes pères et leur porte-bébé, l'uniformité arrondie des automobiles, le vin dit nature, les maisons de retraite, les tatouages, la démocratie, les syndicats, la voix, le catastrophique économique, la littérature scientifique, le collège de France, les diplomates, les paysannerie et police suicidées, les soirées, les festivals d'été, les propriétaires de chien, les conditions de transport des voyageurs, le tourisme, les micros, néons et téléviseurs dans les églises, la Suède, le Royaume-Uni et l'Allemagne.

Quelques "progrès et bonnes nouvelles" (PV), garants d'une stabilité structurelle de plus en plus loin de l'équilibre, d'où leur caractère bipolaire excitant-anxiogène

2. Les musées, les performances sportives, les supermarchés, le vin dit conventionnel, l'audio numérique, les autoroutes, la boucherie, la fabrication du fromage et du pain, l'horlogerie, les mini-séries télé, la vente en ligne de livres anciens ou épuisés, les livraisons, la préservation de la vallée de l'Ubaye, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Hongrie et la Suisse.

- Le rapport des forces plus ou moins rapides et nombreuses entre 1 et 2 permettrait a priori à tout instant de saisir, à partir d'un même modèle disproportionné, l'état physique et morale de la sphère occidentale du monde, et de conclure à sa foncière décadence.
04 octobre 2022, 09:41   Re : Décadence
Libre à chacun, au gré des productions quotidiennes qu'il saisit, de ramener ces traits ou combinaisons de traits saillants au substrat, à l'organon, à la matière première, au tenant et à l'aboutissant de la décadence : le Grand Remplacement.

Exemples
"Le spectacle sportif"/ "La démocratie" → "C'est sympa pour le vivre-ensemble [la présentation de basketteurs américains dans une salle de sport de la banlieue parisienne]". (L’Équipe du jour)

"Le jeu politique"/ "Les façons de parler et d'écrire" → «...aux gens qui instrumentalisent la lutte des femmes en Iran contre l'oppression pour insulter et disqualifier la lutte des femmes en France contre l'oppression. Ceux-là : mangez vos morts ». (Tweet de la députée LFI Danièle Obono)
04 octobre 2022, 12:39   Re : Décadence
Il n'y a pas de décadence, il y a chute vertigineuse.

Je m'en rends compte en parcourant le Quarto (un recueil d'une demi-douzaine d'ouvrages majeurs) de l'historienne Mona Ozouf. Ce recueil est paru en janvier 2015; dans sa postface, Mme Ozouf fait le point sur ce que la France est devenue, au fil d'un développement dont elle situe l'origine à la Révolution de 1789. Le fond de sa thèse, si on se risque à le résumer en quelques mots, est que par corrections de trajectoire successives, la Révolution a enfanté une République qui s'est attachée à repenser, par affinements successifs, son unité et gagner sa pérennité et sa stabilité, au travers de ce qui est présenté comme une croissance de sa civilisation, dont les étapes sont marquées par l'évolution constitutionnelle. Mme Ozouf est d'origine bretonne et elle met en exergue la douce assimilation de l'âme bretonne à l'âme française, dont elle se veut un fruit exemplaire, et timidement, conclut à la nécessité à laquelle la France se voit désormais confrontée de reconnaître, d'admettre, d'accueillir, en son sein un soupçon de "communautarisme" (elle mentionne les gays, les blacks entre autres). Cette suite d'ouvrages compose un tableau rigoureux, à l'érudition exigeante, servi par une plume, etc...

Janvier 2015. L'année du Bataclan, événement bascule intervenu en novembre de cette année-là.

Depuis lors, plus rien, plus RIEN de ces 1400 pages des ouvrages phares de Mme Ozouf ne recèle la moindre pertinence. Ils décrivent un processus historique qui aurait pu avoir lieu en Chine ou au Pérou il y a quinze siècles. La France de Mona Ozouf a chuté, son Etat a failli, son économie menace ruine et tout le processus historique qui semblait appelé à parfaire son identité et à l'affirmer en harmonie avec le reste du monde contemporain est brisé, est anéanti. N'est plus et semble même n'avoir jamais été.

Cette chute est elle-même une contre-révolution, une douloureuse involution, une descente en vrille qui dure depuis sept ans au moins, en se précipitant. Le pays est livré, occupé, l'espace public n'est plus car devenu infréquentable, la sécurité des citoyens dans cet espace n'est plus garantie par l'Etat. L'endettement de ce dernier, la corruption des gouvernants, l'affaissement des pouvoirs intermédiaires, la surrection du Despote qui décide à présent seul de l'engagement du pays dans des guerres extérieures, tout cela n'est en rien décadence, mais constitue un effondrement brutal, une Chute au sens biblique du terme.

Il aura fallu que je parcoure ces ouvrages dont l'auteur a fait la compilation en janvier 2015 pour le comprendre enfin.

Certains livres, qu'il convient désormais d'autopsier comme cadavres, conservent une certaine utilité: bien que morts, ils nourrissent une connivence utile avec l'intelligibilité des faits.

Mona Ozouf: De Révolution en République -- Les Chemins de la France, Quarto Gallimard, 2015
04 octobre 2022, 14:08   Re : Décadence
Paul Veyne, Mona Ozouf mais aussi le toujours fringant Edgar Morin sont-ils complaisants avec le réel actuel parce qu'ils ont enduré pire qu'aujourd'hui au cours de leur longue vie personnelle et parce qu'ils ont traversé, par l'esprit, des siècles émaillés d'horreurs et de désespoirs ?
Tout ce qui épouvante l'homme camusien en bas de chez lui est soit faux, soit de l'ordre de l'épiphénomène qu'un bref retour par le passé suffira à en annuler la nouveauté ou à en atténuer l'intensité (il y a toujours eu des bagarres, Paris était beaucoup plus sale et bruyante avant, etc.) Cette réduction contraphobique du vrai, rassurante et consolatrice, autorise, par rappels macroscopiques des malheurs d'hier, un abord bonhomme et niaisement enthousiaste de la réalité physique et morale ambiante. Quand vous avez un peu de jugeote et de clairvoyance, elle vous laisse interdits, mais elle n'est finalement rien par rapport au forcing des négationnistes à la Le Bras qui cherchent à vous crever les yeux et vous perforer les tympans. Ils n'ont pour eux que des quantités et des chiffres, mais il faut reconnaître qu'ils en font un usage diablement efficace pour assurer ceux qui ont peur et qui fantasment que la marche forcée vers les charniers de l'Occident est en fait une promenade de santé vers le bonheur et un air neuf.
Il y a désormais un côté 'homme nouveau', des accents à la Emerson, presque rimbaldiens, chez quelqu'un comme Descola. La vraie vie est ailleurs, semble-t-il nous dire ici, dans des lieux débarrassés de l'homme d'avant, blanc et cultivé, des lieux situés au carrefour imaginaire de l'Amazonie et de Notre-Dame-Des-Landes... Le monde de demain est d'ores et déjà, dans les images et les concepts, une catastrophe.
04 octobre 2022, 21:06   Re : Décadence
"L'Église catholique"/"Notre-Dame-Des-Landes" → [www.catholique95.fr]
04 octobre 2022, 22:01   Se contenter de peu
Je reste assez réservé et dubitatif sur cette notion de "décadence", en premier lieu parce qu'elle me semble très dépendante d'une série de critères axiologiques relatifs à la question de savoir "quelle est la meilleure façon de vivre la vie, et la sienne en particulier ?", critères qui peuvent varier considérablement selon les vivants concernés ;

parce que j'ai à mes heures d'inavouables envies de steak tartare, ou même de sushis, voire de frais rouleaux de printemps (crudivorisme de sauvage) ;

parce qu'à l'instant où j'écris cela, devant mes trois écrans (1 : LCI 2 : ce forum 3 : l'Arrêt de mort que je viens de télécharger, dans quoi je me flatte de me replonger bientôt avec la même fascination que jadis), et caressant du regard l'image synesthésique de l'excellent repas que je vais me payer tantôt au plus sombre du Kippour, ma foi, ça va, et que l'hypothèse d'un mieux-être antérieur ne laisse de me paraître abstraite, tant je tiens que les états d'esprit par quoi l'on considère les choses sont en réalité incommensurables ;

et donc, désolé, je reste jusqu'à plus ample informé sur ce que j'écrivis il y a cinq ans déjà en évoquant le regretté Serres ; mutatis mutandis, car l'abruti de service (Poutine) pourrait bien arriver à accélérer dramatiquement l'entropie constitutive de tout être au monde...


« Au fait, ai entendu récemment, lors de ces rediffusions de nuit de France-Culture, une assez longue interview de l'excellent Michel Serres, toujours aussi guilleret et érudit, où il affirmait tranquillement que nous vivions en effet une époque formidable, parce que, selon lui, c'était la première fois depuis la guerre de Troie (?) que l’Europe avait su créer un îlot chronologique plutôt paisible et prospère (ce qu'il appelle "les 70 paisibles" je crois), et que, ma foi, les menues tracasseries et très relatives violences que nous pouvions connaître étaient très peu de choses au regard des secousses sismiques de forte amplitude ayant continûment fait trembler la terre et crever les hommes par immenses poignées depuis des millénaires.
Trop énorme pour ne pas être un peu vrai, me suis-je dit...
Cela m'a fait penser à une phrase du dérélictueux "Ulysse" dans son billet relayé ici, qui m'avait semblé avoir une drôle d'allure (encore que l'assertion peu fondée selon laquelle "les grosses sucent mieux" ne fût pas mal non plus) : "pas de chemin qui permette de retrouver la tranquille assurance que donnaient les mœurs civilisées du temps d’avant l’invasion "...
Tranquille assurance ? Même dans une échelle de temps somme toute très courte ayant presque immédiatement précédé l'invasion en question, il suffit d'évaluer la tranquillité dont avaient bénéficié les Français durant la Troisième République, disons, en y adjoignant les quelques années un peu mouvementées de 39-45, pour se rendre compte que ladite assurance si tranquille en prenait un sacré coup, un coup terrible même, que l'époque avait connu de véritables cataclysmes où la notion même de "qualité de vie" perdait tout sens, et que le propos de Serres, tout grossièrement quantitatif qu'il soit, ne manquait pas aussi, dans une mesure qui reste à mesurer plus finement, d'être frappé au coin du bon sens... »
05 octobre 2022, 18:44   Re : Décadence
Décadence ou chute donc...[www.leparisien.fr]

Les romantiques montaient en haut des falaises battues par les vents pour s'y suicider dans une chute iodée, après une ultime contemplation. Aujourd'hui, les gens y montent pour prendre des selfies... (Il ne me traverserait jamais l'esprit de monter en haut des ces falaises-là, tant c'est en bas, au niveau de la mer et des galets de l'Albâtre qu'elles s'offrent à la plus belle vue ; c'est elles qu'il faut voir, pas d'elles.)
06 octobre 2022, 18:15   Re : Décadence
"L'école"/ "L'Église catholique"/"Les façons de parler" → "Je m'en bas les couilles ! wesh, tu m'enlèves ce truc !" (Une blonde enfant, pré-adolescente, très bien habillée, plaisantant avec deux copines dans l'enceinte d'un établissement catholique privé).
06 octobre 2022, 21:45   Re : Décadence
Décadence, chute, ensauvagement, régression anté-libidinale, folie groupale, you name it... Pour décrire les séismes comportementaux atroces que déclenche le GR en tant que moment physique et moral, qu'état, que tendance involutive de l'Occident, les mots ne manquent pas. Si l'un d'entre eux ne vous plaît pas, laissez-le tomber et prenez-en un autre, c'est pareil.

Oise : un lycéen de 16 ans handicapé frappé et filmé par d'autres élèves

Pornographie : les jeunes Franciliens exposés dès 10 ans
09 octobre 2022, 08:20   Re : Décadence
"Le catastrophisme économique"/"La littérature"→ [www.google.com]
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