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Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
21 mars 2008, 19:52   Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Madame,

C'est avec allégresse - sentiment devenu si rare aujourd'hui - que j'apprends ce soir, par les médias, que votre mort n'a sans doute pas été naturelle.

Ainsi donc, Madame, à l'heure ultime, il s'est trouvé un homme ou une femme qui, avec courage et avec compassion - la vraie compassion, celle qui pousse à agir et non à discourir face à la souffrance - est venu, discrètement, vous apporter la délivrance que vous réclamiez avec persévérance depuis des semaines, sans être entendue.

Comme vous Madame, je crois que les lois doivent être respectées et que la liberté individuelle doit céder le pas face à des intérêt publics collectifs plus importants. Mais, il n'existe pas d'intérêt public qui justifie que ne soit pas respectée la volonté d'une personne, librement, clairement et à réitérée reprises exprimée, d'en finir avec sa propre vie devenue un enfer. En bonne Française aimant son pays et soucieuse de légalité, vous avez tenté de le faire comprendre à des magistrats qui n'ont pas voulu ou n'ont pas pu accueillir votre demande, vous condamnant ainsi à la perspective d'une lente et douloureuse agonie.

C'est alors que vous avez décidé de déroger à une loi injuste et de partir paisiblement comme vous le souhaitiez. Honneur à vous, honneur à celui ou à celle qui est venu vous aider à franchir le gué. Certes, et ce fut sans doute votre dernière tristesse, pour ne pas compromettre cet homme ou cette femme de courage et de compassion, pour ne pas compromettre vos proches, c'est seule que vous avez dû partir.

Et maintenant, soyez en certaine, ces autorités qui n'ont pas voulu répondre à votre appel, vont s'agiter et dépenser sans compter les deniers de l'Etat afin de rechercher cet homme ou cette femme qui vous a porté secours. Comprenez leur colère, les gens de justice détestent Antigone !

Mais vous êtes hors d'atteinte, Madame et vous avez gagné votre combat. Laissez donc la police faire la police, les croquants faire les croquants et les censeurs pérorer sans fin. Vous ne pouvez les entendre, vos amis, connus et inconnus qui ont approuvé votre combat, non plus. Car l'éclat de votre rire victorieux fracasse l'insipide bavardage de vos adversaires.

Dormez paisiblement Madame,votre bel exemple demeurera et, un jour, ce droit que l'on vous a refusé, chacun pourra l'exercer s'il le veut, dans ce vieux et beau pays de France que vous aimiez, qui est le vôtre et dont la terre millénaire va vous accueillir aussitôt que les magistrats consentiront à vous laissez en paix.

Michel Rossinelli
« (...) En bonne Française aimant sans pays (...) »
Utilisateur anonyme
21 mars 2008, 20:30   Eclat de votre rire victorieux ?...
"l'éclat de votre rire victorieux fracasse l'insipide bavardage de vos adversaires."

A mon avis, le point vraiment critique est atteint ici. Car un sentiment supérieur de la forme (forme qui n'est en rien séparable d'une éthique) devrait guider non seulement dans le choix des termes, mais surtout dans leur emploi raisonnable en de certaines situations.
Utilisateur anonyme
21 mars 2008, 20:44   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Merci cher (ou chère ?) Vayadaveen. la faute de frappe est corrigée.
Quant à vous, cher M. Wagner : oui, c'est un point de vue. Vous avez le droit de ne pas apprécier ce style hyperbolique, sans doute fruit de l'allégresse.
Utilisateur anonyme
21 mars 2008, 20:49   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
"Vous avez le droit de ne pas apprécier ce style hyperbolique"

Hyperbolique, et indécent (devriez-vous ajouter).
Utilisateur anonyme
21 mars 2008, 21:07   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
"Je suis l'imbécile des cendres bien froides mais qui croit à un tison quelque part survivant."
René Char (A une sérénité crispée)
Cher Corto,
Si j’apprécie beaucoup votre hommage à Madame Sébire, je ne peux, pour ma part considérer qu’elle ait remporté une quelconque victoire. En effet, ce fait pénible a une toute autre résonnance en Belgique où le parallèle se fait entre deux décès ayant eu lieu le même jour. Le sien et celui d’Hugo Claus. Et dans mon journal tout à l’heure j’avais le cœur serré en contemplant les deux photos côte à côte, sous un titre commun : « Deux fins de vie, deux éthiques ».
Au-dessus de la photo de la Française, pauvre femme défigurée présentant sa photo, rayonnante, « d’avant » : « Une mort secrète et mystérieuse, entourée de gêne et de débats »
Au-dessus de celle, débordante d’énergie et d’impertinence de regard de l’écrivain : « Une mort lucide, décidée, sereine et belle ».

Une éditorialiste, dans le même journal, dans un billet qui en fait, visait tout autre chose que l’euthanasie, faisait cette réflexion :
(…) « Mais mercredi soir, la vie nous a ramenés à la réalité, au travers de la mort de deux personnages que rien pourtant n'aurait dû réunir. L’un, Hugo Claus, intellectuel de renom, atteint de la maladie d'Alzheimer. L'autre, Chantal Sébire, inconnue jusqu'alors, victime d'une très rare tumeur au visage. Leur différence ? Fondamentale. Hugo Claus a choisi et revendiqué sa mort par euthanasie, après une semaine passée à dire adieu à ses proches dans une profonde sérénité et un intense hymne à la vie. Chantal Sébire est morte seule, honteusement, dans le désespoir suscité par cette fin qu'elle souhaitait mais qui lui avait été refusée. Le fait que l'un a pu réaliser ce qui a été interdit à l'autre tient uniquement à l'action politique. Si Hugo Claus a pu décider de l'issue de son parcours sans devoir se cacher, c'est en effet parce qu'un gouvernement a rédigé une loi organisant la fin de vie dans notre pays. Les oppositions restent aujourd'hui réelles à l'euthanasie. Mais des hommes politiques belges, réunis dans une coalition laïque, ont pris leurs responsabilités, après un débat démocratique. (…)

Et quand on se dit qu’à présent, le corps de cette malheureuse est livrée aux légistes et que l’on va s’acharner à présent sur les « coupables » qui l’ont aidée, c’est la nausée qui vous envahit. Et l’on se dit que vraiment, oui, les hommes sont tous égaux mais que certains sont plus égaux que d’autres…
Il devrait y avoir une loi dans ce pays, contre l'apologie du suicide, comme il y en a une contre l'apologie de la haine et du meurtre, le suicide étant largement une maladie contagieuse qui frappe les plus faibles.

Quand le lis le mot "allégresse" accolé à un sujet pareil, le bômi me prend, comme disait la Sévigné.
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 08:54   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Vous avez raison, évidemment, chère Aline, en faisant la comparaison entre ces deux morts et en refusant de parler de victoire pour ce qui est de la fin de vie de Mme Sébire. Mais si j'ai employé ce terme, c'est en pensant au fait que sa volonté d'être assistée pour quitter cette vie sans plus de souffrance a pu s'accomplir et que son exemple douloureux pourrait bien conduire à une modification de la législation française. Quant au rire, c'est celui de son âme enfin libérée et apaisée. Les boudhistes disent que les sentiments qui nous habitent au moment de notre mort sont très importants car ils déterminent largement les conditions de notre renaissance. Si cela est vrai, j'imagine Mme Sébire sereine et apaisée, se dirigeant vers une nouvelle réincarnation....
Nous y venons: vous déclarez en substance vouloir une modification de loi conforme à des choix spirituels et croyances religieuses (en l'occurrence bouddhiques) après avoir vertement rappelé aux catholiques que "la loi doit être pour tous et pas seulement pour les croyants".

Si je vous suis bien, vous répondez dans votre message à Aline que la sérénité acquise dans et par le suicide ouvrirait la Voie à l'âme libérée. Et vous voudriez nous changer la loi de la République en vous fondant sur de telles salades ?
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 09:11   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
"Quant au rire, c'est celui de son âme enfin libérée et apaisée. Les boudhistes disent que les sentiments qui nous habitent au moment de notre mort sont très importants car ils déterminent largement les conditions de notre renaissance. Si cela est vrai, j'imagine Mme Sébire sereine et apaisée, se dirigeant vers une nouvelle réincarnation...."


Puisque vous appelez le bouddhisme à la rescousse il serait plus juste de parler de sourire, certainement pas de rire.

Nota bene : bouddhiste, et non pas "boudhiste".
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 09:16   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
"en vous fondant sur de telles salades "

Cher Francis je crois qu'il est grand temps de jeter la salade avec le saladier... (?)
Ici, notre ami Corto fait sans doute référence au Bouddha Jovial, que les bouddhistes chinois révèrent sous le personnage de Pu-Tai ( 布袋 ) qui dans la tradition était un moine errant interprété comme Bodhisattva Maitreya et qui aurait déclaré avant de mourir:

彌勒真彌勒,化身千百億,時時示時人,時人自不識

sentence dont on trouvera la traduction dans le commentaire ci-dessous, tiré de Wikipédia. L'hilarité que l'on prête à ce personnage n'a évidemment rien à voir avec l'allégresse que pourrait procurer, selon Corto, une libération de la souffrance physique (et encore moins de l'âme !) au moment du trépas. L'interprétation courante de la gaité de Po-Tai est que ce rire est celui du contentement ressenti dans l'acte de bienveillance, ou dans le simple fait d'être bon pour autrui dans le passage ici-bas, et nullement la cynique joie de qui s'en va en ayant trouvé une voie de sortie qui déjoue la souffrance (en ajoutant, comme apparemment dans le cas de Hugo Claus, une sorte de "nique d'homme libre" à ses contemporains qui ne savent pas l'être parce qu'eux s'acharnent à vivre, à continuer de créer, de chercher des solutions à l'existence, etc.).

Le suicide, même en y mettant la pompe (Mishima, Claus et sa marketique de l'homme libre, etc.) reste un acte, sinon condamnable, du moins méprisable et très douleureux à ceux qui restent - le suicide transforme une souffrance subie avec un sentiment d'injustice en une souffrance injustement infligée aux proches. La plupart du temps, c'est ce qu'il est: il opère un injuste et délibéré transfert de souffrance sur des innocents.

"Maitreya était connu en Chine dès le IIIe siècle. Il y trouva une incarnation historique, phénomène courant dans le contexte religieux chinois, qui contribua à lui donner un aspect physique et un rôle autres que ceux que le bouddhisme lui avait jusque-là prêtés.

Sous la dynastie Liang vivait un moine errant Chan, de nom religieux Qici (契此), originaire de la préfecture de Mingzhou dans le Zhejiang. Transportant tout son nécessaire dans une besace en toile, il se distinguait par sa corpulence et un comportement loufoque et imprévisible mais bienveillant ; on lui prêtait de plus des dons de voyance exceptionnels. Il serait mort en méditation au temple Yuelinsi (嶽林寺), dans sa province d’origine, en 916, en prononçant ces mots : « Le vrai Maitreya est présent simultanément sous des milliards de formes ; il se montre constamment, mais personne ne le reconnaît. » Une légende naquit qui en faisait l’incarnation de Maitreya : on prétendit l’avoir aperçu après sa mort, des images pieuses le représentant commencèrent à circuler.

Le moine ventripotent et souriant est devenu la représentation de Maitreya la plus courante et la plus populaire en Chine. Son ventre plein et son sourire sont gages de bonheur et de prospérité, de même que son sac que l’on prétend inépuisable. Ces caractéristiques n’ont pas fait une impression favorable sur les voyageurs français du XIXe siècle, et Milefo est à l’origine du terme péjoratif « poussah » (de pusa, bodhisattva) désignant un homme gros au physique peu avenant. Le moine Qici est devenu au Japon Hotei (de Budai 布袋 « sac de toile »), un des Sept dieux du bonheur. Pour les Chinois qui ne s’intéressent pas à la théologie bouddhiste, Milefo est l'un des Dieux de la fortune."
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 12:22   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
C'est de bon goût...
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 13:15   Le Pu-Taï de Corto.
"le personnage de Pu-Tai"


Pu-Taï ? - Ah oui, ce moine rieur et plein d'allégresse... (Il aurait pu préciser ce cher Corto, quand même...)
22 mars 2008, 14:01   Re : Le Pu-Taï de Corto.
C'est que Corto, non content d'être un auteur difficile, est aussi un grand timide: il ne dit pas tout, ne fera jamais le premier pas de l'explicitation.
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 14:12   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Vous êtes bien bon cher Francis... j'y vois plutôt cette sorte de mépris qui est la marque des grands érudits, quelque chose comme "t'as qu'à t'renseigner, si tu sais pas !".
22 mars 2008, 15:02   Re : Salades psittacistes
Cher D. Wagner, sûr que lorsque nous nous interpellerons encore en oiseaux sur un fil, je ne manquerai pas d'en appeler aux psittacidés.
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 15:19   Violence psittaciste.
Chère Aline,

sachez bien qu'aucun forum n'est en mesure de supprimer toute violence (la violence psittaciste, par exemple), mais il revient à chacun de la comprimer dans les limites tolérables, au sens où de tels actes de violence resteront sporadiques (pardonnez ce ton sentencieux, ceci afin d'éviter toute forme d'ironie).
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 18:28   Re : Divagations
"Si je vous suis bien, vous répondez dans votre message à Aline que la sérénité acquise dans et par le suicide ouvrirait la Voie à l'âme libérée."

Quelle sottise, M. Marche.

Bien que je ne sois pas bouddhiste, je vous invite, si vous voulez sérieusement en savoir plus, à lire le Bardo-Thödol.
22 mars 2008, 18:42   Re : Divagations
Ah M. Corto, si vous pouviez avoir la bonté de tester vos théories sur vous-mêmes, j'allais dire... une bonne fois pour toutes !
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 19:15   Re : Francis, si tu t'imagines
Je me réserve, en effet, cette possibilité, le moment venu, cher M. Marche. Mais rien n'est certain. Voyez-vous, mon scénario préféré serait qu'à la fin d'un bon repas, mon coeur s'arrête de battre et que je pique du nez dans le dessert. Ou encore, plus jouissif, une fin semblable à celle du président Félix Faure., mais, certes, ma Marguerite à moi n'aurait pas tout-à-fait le même genre d'appâts !

Toutefois, pour être plaisants, ces scenarii sont un peu égoïstes. Donc, pour réussir mon dernier jour ou ma dernière nuit, je boirai si tout va bien, avec l'aide de mon amour, un délicieux armagnac au bon goût de terre, additionné de presque rien et c'est dans l'ivresse que je partirai, serein et curieux de l'avenir.

Quant à vous, je vous imagine, attaché sur votre chaise percée, baveux et pisseux, bégayant quelque chose à l'oreille de la grosse infirmière qui, forcément, sentira la transpiration et qui vous répondra :

"Que dites-vous, papi, mourir parce que vous avez 112 ans, que vous souffrez et que tous vos (rares) proches sont morts depuis des décennies ? Allons, allons, ne dites pas de bêtise. vous savez bien que c'est interdit par la loi."
Finalement, c'est ce scénario qui m'amuse le plus !
Mon vieux Corto, que vous imaginez mal !

Ceci dit tout à fait entre nous, comme ça, tout-à-trac, je vous dirai que je prèfère encore ma grosse bonne Marguerite en blouse blanche, qui sent la transpiration, qui se penche sur moi pour hurler à cinq centimètres de mes oreilles grises, démesurées et velues que le pipi c'est tout de suite que je dois le faire parce qu'elle finit à cinq heures, à votre bel amour aux yeux en amandes qui vous tend la bolée de cigüe en vous donnant rendez-vous sur Sirus non sans vous avoir glissé au préalable un exemplaire du Bardo-Thödol dans la poche du veston.

Ch'u comme ça: j'aime pas la camarde quand elle se donne des airs de vamp prosélyte.

Mais, n'ayez crainte, je me ferai sans doute assassiner avant, ce qui m'épargnera tout dilemme quant au mode dans lequel je devrais composer ma coda.
22 mars 2008, 20:13   Pied biblique
Je savais que le pied, dans la Bible, avait un autre sens.

Pourriez-vous nous confirmer que ce sont bien vos oreilles qui sont "grises, démesurées et velues" ?
22 mars 2008, 20:37   Re : Pied biblique
"Ben.... oui", , comme le chantait Léo Ferré à propos de celles de Gainsbourg dans la chanson Pépé, justement.

Les oreilles humaines croissent jusqu'à la fin. Ce qui fait ressembler les grands vieillards à des extra-terrestres. Tout petit déjà, on me l'avait fait observer.

Le pied, dans la Bible... un autre sens. Pouvez-vous préciser votre question, afin que nous puissions vous dépêcher un technicien ?
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 22:26   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Et heureusement qu'il a lu le Bardo-Thödol, parce que sans ça, il serait totalement hystérique...


.
Ouais! Le Bardo-Thödol, ça calme, moi je dis, tu le prends en décoction sur un joint, et là tu comprends... je veux dire...son nom de barbiturique, il l'a pas volé quoi!
Utilisateur anonyme
22 mars 2008, 23:10   Re : Lettre ouverte à Madame Chantal Sébire
Oui, bouddhiste malgré lui, en quelque sorte.
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