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Utilisateur anonyme
08 février 2008, 15:59   Sofia co(co)ppola
Le hasard m'a offert d'assister à une projection, dans le ciné-club d'un lycée, du film Marie-Antoinette de Sofia Coppola, film qui, me disais-je, pourrait toujours faire écho à ma lecture encore fraîche des Mémoires de Madame Campan.

De fait, deux ou trois anecdotes rapportées par la mémorialiste inspirent quelques scènes à ce film par ailleurs nettement simplet, à mon goût, et qui ne tient, à l'oeil, qu'à la seule condition d'être séduit par l'interprète du rôle-titre, plutôt plaisante à regarder, en effet. Mais l'ensemble m'a paru terriblement creux. C'est une suite de courts “tableaux” mis bout à bout comme autant d'illustrations d'un beau livre, qui auraient la faculté de s'animer. Les dialogues sont à peu près inexistants. La bande-son fait alterner la musique du XVIIIème siècle, dans les occasions lourdement protocolaires, et celle d'aujourd'hui sous forme, disons, de “pop rock" dès lors qu'il s'agit de représenter la joie de vivre, le plaisir pris, la vraie vie loin de l'étiquette, la fête quoi.

Ce goût pour “la fête” et ses défoulements, ses espoirs existentiels et ses buts à atteindre, c'est sans doute ce qui permet à un jeune public, que j'imagine être la “cible” de ce film, de s'identifier à cette malheureuse Marie-Antoinette. Elle est “comme eux” finalement. Quant à Louis XVI, son inconsistance n'a aucune... consistance filmique. Les scènes s'enchaînent sur le rythme du “clip” musical esthétisant. J'ai eu la curieuse impression d'avoir visionné une bande-annonce de deux heures, une bande-annonce sans film. Flagrante ambition de “ne pas prendre la tête” avec l'Histoire, ni même avec la psychologie, ni avec rien, rien ne doit “prendre la tête” du spectateur, ni la rêverie ou le doute pendant et après le film, ni la réflexion, ni rien. Ne doit rester brièvement en mémoire qu'une jolie poupée mal mariée à un drôle de type qui ne veut pas coucher avec elle, moyennant quoi elle “fait la fête”, prend un amant pour oublier, se distrait comme elle peut avec ses enfants, ses moutons ou son théâtre de poche.

Des clins d'yeux sont adressés à un public jeune. Ce sont des images très fugaces, proprement des “signaux” de reconnaissance. Au cours d'une de ces fêtes débridées on aperçoit ainsi, une seconde à peine, des jeunes femmes priser du tabac mais, parce que l'image est furtive, n'importe qui pense à un sniff de cocaïne tout comme, dans une autre séquence, on voit “tourner” une pipe entre convives que chacun identifie comme rougeoyante de haschisch. Ce sont de patelins anachronismes. Le réalisateur imagine peut-être faire du “second degré” mais “n'importe qui” ou “chacun”, c'est-à-dire, ici, les “jeunes”, croit de bonne foi que la cocaïne et le haschisch assaisonnaient naturellement toute débauche entre aristos. Si quelqu'un “sniffe” dans un film, ce ne peut être que de la cocaïne pour la simple raison que l'existence du tabac à priser est inconnue, méconnaissance dont j'ai pris conscience en bavardant après la séance avec les spectateurs. Non seulement on a immédiatement vu à quelles images je faisais allusion mais pour aussitôt en donner, et sans l'ombre d'un doute, une mauvaise interprétation : cocaïne, haschisch. Ah ! Le joli cours d'histoire de Mademoiselle Coppola !
08 février 2008, 16:36   Re : Sofia co(co)ppola
Cher Orimont, je suis d'accord avec vous. C'est déjà ce clin d'oeil au jeunisme et au soi-mêmisme mis à l'honneur par mai 68 qui m'avaient agacée, à l'époque, dans le film sur Mozart de Milos Forman : d'un côté on montrait le vieux et besogneux Saliéri et de l'autre le jeune Mozart qui n'était que facéties et n'avait nul besoin de travailler : il lui suffisait d'être lui-même.
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