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Chinois expatriés

Envoyé par Henri Rebeyrol 
20 avril 2008, 20:37   Chinois expatriés
Des travailleurs immigrés dont les journalistes supposent qu'ils sont chinois (ils sont peut-être français par jus soli), des étudiants chinois, peut-être même des diplomates, qui ont exprimé publiquement à Paris, à Londres, à Berlin, etc. leur réprobation contre la France et les Français, la GB, les Etats-Unis, les accusant d'arrogance, de vouloir saboter les JO, de manquer de respect envers l'Autre, de faire preuve de xénophobie ou d'antisinisme non justifié, etc., voilà qui fait mauvais effet ou désordre. Les journalistes du service public et de TF 1 ont trouvé la parade : ils les ont qualifiés de "Chinois expatriés" ou "d'expatriés chinois". S'ils avaient été arabes ou noirs ou turcs, ils auraient été des travailleurs immigrés ou migrants ou immigrés ou Français de la deuxième génération. Les Algériens, où qu'ils vivent à l'étranger, ne sont jamais des expatriés, les Marocains ou les Maliens non plus : ils sont éternellement des immigrés, même s'ils font du tourisme en France.
La désignation "expatriés" est réservée aux Occidentaux - aux Français en particulier - qui s'installent à l'étranger - en Afrique surtout ou dans les anciennes colonies. Il y a un siècle, ils auraient été des "colons". Ils sont des expatriés : l'euphémisme vaut dans la bonne pensée journalistique et militante pour "agents du néocolonialisme".
Désigner des travailleurs ou des étudiants non occidentaux établis en France comme "expatriés", cela n'a jamais encore été fait : c'est donc une première linguistique. On en comprend les raisons : c'est une façon simple de disqualifier ces manifestants en suggérant qu'ils défendent leurs seuls privilèges.
20 avril 2008, 21:00   Expatriés
Bien cher JGL,

Ayant été moi-même expatrié, je trouve votre remarque très juste. Sournoisement, les journalistes opposent les "bons immigrés" (traduisez qui apporteront à la France des couleurs chatoyantes en restant ici) et les "mauvais expatriés".

Il faudrait, dans tout le discours sur l'immigration, bien distinguer ce qui est "expatriation" de ce qui est "immigration".

Je pense qu'au fil de ce forum personne ne reprochera à des étrangers de venir étudier si c'est dans le but de repartir.
21 avril 2008, 06:15   Re : Chinois expatriés
L'expatrié ne participe pas à l'économie locale, en principe: s'il est étudiant boursier de son pays, diplomate ou agent des services de propagande et autres services spéciaux, il est rémunéré par son pays et ne fait que dépenser à l'étranger l'argent que ce dernier lui remet avant de le rappeler en fin de mission.

L'immigré est un "recruté local" qui, outre qu'il tire sa rémunération de la masse monétaire nationale, en tant qu'agent économique local, contribue au Trésor et en retire des prestations sociales. Accessoirement, il pompe des allocations familiales pour sa/ses famille(s) restées chez lui.

Il y a des deux chez les Chinois: diaspora de gens nés sur place et à ce titre agents économiques locaux d'une part, et d'autre part les "agents de Pékin", qui émargent aux affaires étrangères de leur pays et ont à charge d'organiser les "manifestations spontanées" où est dénoncée "l'arrogance" de la France vis à vis de leur pays.

L'usage du terme "expatrié" par la télévision de service public est un usage politique, qui tend à faire accréditer la thèse, très plausible après tout, que ces manifestations sont télécommandées et prises en main par des agents des services chinois.

On voit mal en effet le petit boutiquier chinois du 13e, ne serait-ce parce qu'il a besoin de retenir une clientèle locale, aller manifester contre les Français, et pas davantage la couturière travaillant au noir en appartement car en situation irrégulière en France.
21 avril 2008, 10:42   Re : Chinois expatriés
Sans mettre en cause l'analyse de JGL ni, bien entendu, l'emploi idéologique du mot qu'il dénonce, mon sentiment linguistique me fait entendre dans "expatrié" un coup du sort, une situation qui perdure, et dont on n'est pas ordinairement responsable, sauf à en être blâmé. Les citations du TLF aussi bien que du Littré vont, je crois, en ce sens. L'on ne quitte pas sa patrie sans douleur ni grave motif, semble dire la veille langue. L'emploi du mot pour une mission temporaire à l'étranger n'est-il pas abusif ?
21 avril 2008, 15:43   Re : Chinois expatriés
Cher Bernard, vous entendez dans "expatrié" l'expatriation, terme qui n'existe pas en langue internationale. Il y a deux types de contrat de travail, de mission, d'existence outre-mer : le contrat "expat" et le contrat "recruté local". Le contrat expat est un CDD, avec parachute dans l'institution ou le groupe au retour (qui souvent, continue de verser à l'intéressé son salaire de base dans l'entreprise, comme s'il n'était jamais parti) et prise en charge de son "détachement" (frais d'installation, du/de la conjoint(e), des mioches, et "congés dans les foyers" tous les deux ans). Le Quai d'Orsay, l'éduc nac., le groupe Carrefour, ont ainsi leurs expats, qui ne sont en rien des expatriés, qui ne connaîtront jamais l'expatriation et son gouffre d'incertitudes, son retour au pays aléatoire, impossible, la dissolution d'identité, la désappartenance.

L'immigré en France est un curieux animal, assez singulier (dans le monde, on le désigne comme le "French-Arab", spécialiste de la fraude à la carte de crédit) qui jouit des deux pays, vient et va comme il lui plaît, encaisse des dividendes sociaux des deux côtés de la Méditerranée, n'appartient nulle part, fait son beurre de tout, trahit tout le monde, mène des doubles comptabilités, revendique ses droits ici et là, touche deux smics, deux RMI, cinq allocs, plusieurs vies.

L'expatriation véritable, abyssale, l'extraction des racines, la sortie de soi, est une condition assez peu enviable, sans avenir véritable; bien peu la connaissent, et ceux-là généralement le temps d'un épisode de vie assez bref, soit qu'ils en sortent, soit qu'ils en meurent ou s'évanouissent sans que personne ne sachent exactement où ni comment.
21 avril 2008, 17:54   Re : Chinois expatriés
Les hellénistes qui ont fui les conquêtes musulmanes et ont enrichi de leur savoir les cours carolingiennes étaient donc des "expatriés"...
22 avril 2008, 02:06   Re : Chinois expatriés
Si vous voulez. Il arrive cependant le plus souvent que les "expatriés" n'enrichissent personne de leur savoir, si ce n'est eux-mêmes en acquérant ledit, mais que, perdant dans l'expatriation les moyens et d'en assurer la diffusion auprès de leurs compatriotes, personne n'en sache rien, ce qui revient à un enrichissement nul.
22 avril 2008, 08:25   Re : Chinois expatriés
Ah oui, certes, mais celle des hellénistes et aristotéliciens fuyant la fermeture idéologique islamiste et se réfugiant à la cour de Charlemagne, je voulais la placer !

Je suis en train de lire le livre de Gouguenheim, dont nous avons parlé ici-même, et que je recommande à tous. (Le titre du livre, Aristote au Mont Saint-Michel est évidemment une synecdoque, et ne représente qu'un des cinq chapitres du livre, le reste exemplifiant à souhait les racines grecques de l'Europe chrétienne (sous-titre)...)
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