"J'ai enfin trouvé Aline, dans votre dernière réponse à Marcel Meyer tout ce que j'espérais depuis le début de ce fil : votre pensée sur l'art moderne, claire, loyale et nuancée, et mieux, comment vous le vivez. Vous mesurerez, à mon agressivité, le malentendu, bien plus, le gouffre qui s'est installé entre le public, dont je suis, et l'art qui lui est, je le dis cette fois sans idée de provocation, puisque maintenant je vous comprends beaucoup mieux, administré. Je vous en remercie très sincèrement, et m'en vais placer ceci dans mon ordinateur à Art, sous-dossier "Pharmacie d'urgence". Merci aussi à Marcel Meyer qui vous posait mes questions comme un autre moi-même mais tellement mieux !
"Je m’évertue depuis le début à demander la différenciation entre les fumistes et les véritables artistes (différenciation qui n’est pas toujours évidente pour qui n’a pas suivi le cours de l’histoire de l’art moderne puis contemporain)"
Si nous pouvions travailler à cela, et faire en sorte que le public, le peuple, qui se doute qu'on se fout de lui, qu'on le snobe, ne s'éloigne plus encore de ses élites, à ce sujet aussi. Et quand on parle de perte des repères....
Nous savons tous très bien à quoi aboutit un tel divorce."
Che Obi Wan, une ultime intervention sur le sujet, pour vous remercier d’abord de votre dernier message dont j’ai apprécié l’amabilité. Permettez-moi cependant encore une précision, puisque vous prisez la nuance. Ni Yves Michaud, ni moi, ni personne ne détient la vérité en la matière et chacun doit se forger son propre jugement, se faire son propre regard (ce qui ne veut pas dire que tout vaut tout). D’autant plus que l’information est à la portée de chacun désormais. Je préfère dès lors la touche d’humour de la première partie de votre message à la gravité de la seconde ! Non que je n’aime pas la gravité mais, que le « peuple » soit « victime » d’une escroquerie, je n’en crois rien. La production « post-moderniste », - excusez-moi d’insister -, n’est pas faite que de foutaise, personne n’oblige personne à s’y intéresser et, de toute façon, ni vous ni moi n’avons mission d’évangéliser les masses.
Qu’elle désoriente, c’est certain puisque les modes d’évaluation ou d’intelligibilité ont changé au cours des dernières décennies. Et Marcel Meyer et JGL, sans nécessairement les approuver l’ont bien précisé. Qu’un autre mode de présence de l'oeuvre, de nouveaux paramètres définissant par exemple les relations matériaux/espace/temps aient été pris en compte, de même que la linguistique et la philosophie nous obligent à modifier notre perception, à reconsidérer nos réflexes et nos références. Et pour être tout-à-fait claire, si mes faveurs vont aux peintres, aux matiéristes, aux contemporains plutôt qu’aux postmodernes, je ne suis pas pour autant insensible à toutes les propositions actuelles, Dieu m’en garde ! Je sais m’émouvoir devant la poésie des « machineries » raffinées d’une Rebecca Horn, ou celle, plus rude, d’un Penone. (Et je vous conseille éventuellement d’aller y voir de plus près), ou d’un Boltanski (mais ils ne sont pas les plus "pointus", d'accord). Il est de nombreuses installations qui me comblent et des vidéos qui me troublent sincèrement. Je pourrais vous dresser un « catalogue » ( !) mais son utilité serait nulle. Mes collègues praticiens-professeurs, acquis à d’autres pratiques qui, tout étayées qu’elles sont d’une solide formation de dessinateurs n’en touchent pas moins pour certaines à la « performance » ou au «
work in progress » (pardon, je ne vois pas de traduction plausible »). Et, c’est sûr, et sans que nous soyons en désaccord sur le fond des choses, ils ne vous tiendraient pas exactement le même discours que moi ; et ces discours n’en détiennent pas moins une autre facette de vérité qui donne, j’ose l’espérer une richesse à notre enseignement en le préservant de tout dogme. C’est parce que le sujet semble vous intéresser que je me suis permis de reprendre la parole et d’expliciter- au risque de lasser - ces choses qui m’importent.