Communiqué n° 570 : Sur une proposition du chef de l'État

Le parti de l'In-nocence juge douloureusement extravagante la proposition du président de la République, avancée lors du discours qu'il a prononcé au dîner annuel du C.R.I.F, selon laquelle chaque enfant de CM2 — si l'on comprend bien un projet aussi étrange...— devrait connaître le nom d'un enfant mort dans les camps d'extermination nazis, ce qui établirait une sorte de "parrainage" aussi vain que morbide, sans aucune espèce de rapport, en tout état de cause, avec l'enseignement de l'histoire.

Le parti de l'In-nocence constate une fois de plus les progrès d'un confusionnisme théorique et pratique qui semble désormais concentrer ses manifestations en la personne même du chef de l'État : confusion entre enseignement de l'histoire, "devoir de mémoire", commémoration et compassion ; confusion d'autre part entre missions gouvernementales et rôle d'un président de la République.

"Douloureusement extravagante" me semble absolument parfait : hommage et respect à celui - ou celle - qui a trouvé la formule...

Oui, le sens de la formule a progressé dans les communiqués récents du PI. Mais peut-être est-ce aussi dû aux inepties qu'inventent nos gouvernants, qui permettent de se gausser plus facilement?

Cette histoire me semble une des plus extraordinaires et inattendues dérives de la cosidetta "peopolisation" des choses.

Sans pouvoir l'expliciter, je trouve comme un air commun à vouloir "parrainer" des enfants décimés et donner un état civil à ceux qui ne sont pas nés vivants (?) Tout cela est singulièrement macabre.

Oui, macabre. C'est le mot qui convient.

Le "confusionnisme théorique et pratique" est un mode classique de refonte de l'histoire par la confection mythologique. "Confusionnisme théorique et pratique" est une parole de témoin, de passant, qui assiste impuissant, comme nous tous, à l'oeuvre d'alchimistes. On fabrique avec la boue historique de la conscience de l'homme futur. Les gosses de CM2 sont de futurs grand-pères qui n'auront fait aucune guerre. Il importe donc et cependant de leur fabriquer de l'essence, celle qui jadis sortait des champs ensanglantés où périrent nos Péguy et nos Fournier dans des guerres "douloureusement extravagantes" est bien obligée en nos temps nouveaux de naître de l'oeuvre transparente et visible des mains de fabricants que la paix nous laisse tout loisir d'observer.

Sarkozy fait oeuvre de guerrier, de mythologue démiurge en action; la cruelle transparence dont cette oeuvre a à souffrir est la rançon d'une paix dont les générations empilées depuis 1945 votent la reconduction systématique pour le bien général. Sarkozy est un petit Hitler, un petit De Gaulle, un petit Clémenceau. Lesdites générations empilées sur des ruines pacifiées ne lui ayant laissé aucun choix d'agir dans la fureur et la confusion épiques, le voilà qui nous livre les ressources et les secrets de la fabrication mythologico-confusionnelle des hommes futurs en pleine clarté.

"une proposition du chef" lit-on ci-dessus. Jadis, les chefs obscurs ne proposaient pas, ne nous laissaient rien observer, ils modifiaient le monde en laissant à leur sujet le soin de se mouler au corps nouveau qu'ils leur taillaient, par caprice, pour leur bien, c'est selon.

C'est de notre position, dans cette critique, qu'il est question: l'observation de l'impuissant paisible, de l'enfant de l'impuissante Paix se goûtant critique d'une cuisine mythogénique qui se donne à voir dans une eau morte, claire et arrêtée.

"Il importe donc et cependant de leur fabriquer de l'essence", sachant qu'ils ne connaissent qu'un sens à ce mot.

Amalgamer idéologie et mythologie me semble un peu confus …

Citation

sachant qu'ils ne connaissent qu'un sens à ce mot

Allusion aux cocktails Molotov ?