J'ai revu il y a peu
Le boucher de Chabrol, avec Jean Yanne. Le cinéma, dans l'écrasante majorité de ses productions, montre pour moi ses limites, comme art, dans le fait qu'avec le temps, son aspect
documentaire prend fatalement le dessus et qu'au final c'est toujours
La sortie des usines Lumière qu'on finit par regarder. C'est aussi, peut-être, qui sait, sa force : en venir à pouvoir rendre digne d'intérêt à peu près n'importe quoi (je ne dis pas cela pour Chabrol.)
Il m'a par exemple été presque impossible de suivre un film comme
Le boucher sans être impérieusement détourné de l'action même, du jeu des acteurs, de la mise en scène, par une curiosité toute documentaire à l'endroit du bourg où est tourné le film, ses rues, sa population, le rythme de vie qu'en laisse transparaître les nécessités de l'intrigue, laquelle a perdu beaucoup de son intérêt à mes yeux, est devenue presque anecdotique, comparée à la boutique du boucher et ses clientes, aux gendarmes, à la noce campagnarde, aux écoliers, aux promenades en forêt. Quarante ans seulement nous séparent de ces mœurs et de ces décors, qui semblent une éternité.
On serait presque incrédule à l'écoute du texte que, dans une scène, l'institutrice dicte à ses écoliers qui se préparent au certificat d'études (il y a peut-être un moyen de dénicher cet extrait...) C'est un passage de Balzac qui, il faut bien l'admettre, serait aujourd'hui très largement inintelligible à des enfants de cet âge (et même, j'en ai peur, à bon nombre d'étudiants.) C'est comme ça.