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Profession : "Droit-de-l'hommiste"

Envoyé par Jean-Marc du Masnau 
Bien chers amis,

Voici la retranscription de propos du président du Senegal, auxquels je souscris tout-à-fai pour ce qui est des "organisations goulues" (je le sais, je les ai vues à l'oeuvre en Haïti) :

DAKAR (Reuters) - L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) est une institution coûteuse et inefficace qui devrait s'effacer au profit d'aides et d'investissements innovants permettant à l'Afrique de parvenir à l'autosuffisance alimentaire, estime le président sénégalais Abdoulaye Wade.


Dans un discours prononcé dimanche soir, Wade a présenté la FAO, créée en 1945 et basée à Rome, comme "un gouffre d'argent largement dépensé en fonctionnement pour très peu d'opérations efficaces sur le terrain".

Il a appelé de ses voeux un politique nouvelle fondée sur l'autosuffisance, de préférence à la charité, pour s'attaquer la crise alimentaire mondiale qui menace des millions de gens dans le monde, notamment en Afrique, le continent le moins développé.

Le chef de l'Etat sénégalais a estimé que la FAO, dirigée par son compatriote Jacques Diouf, un technocrate, devrait être remplacée par une nouvelle agence de l'Onu, le Fonds international pour le développement agricole, qui serait basée en Afrique.

Dans un discours retransmis par la radio et la télévision publiques sénégalaises, il a proposé que l'aide alimentaire traditionnelle sous forme de dons, qu'il a qualifiée "d'aumône", soit remplacée par un "investissement innovant dans l'agriculture en Afrique". Il s'agirait de mettre à la disposition des agriculteurs graines, engrais, équipement, irrigation et formation spécialisée.

Wade est un critique habituel de ce qu'il a appelle la "vaste escroquerie" de l'aide alimentaire internationale traditionnelle qui, selon lui, est gaspillée à entretenir des hauts fonctionnaires internationaux au lieu de bénéficier aux plus pauvres.

Le Sénégal est l'un des principaux bénéficiaires africains de l'aide étrangère, en même temps que l'un des plus gros importateurs de nourriture du monde par rapport à sa taille.

Il fait partie de ces pays d'Afrique de l'Ouest avec la Guinée, le Cameroun et la Mauritanie où la récente flambée mondiale des prix alimentaires et du carburant a provoqué manifestations et émeutes de la faim.

ONG "GOULUES"

Tout en se félicitant de la vague de solidarité internationale provoquée par cette flambée, Wade estime que le monde a mis trop longtemps à prendre conscience du problème et qu'il faut le repenser à fond.

"Il faut qu'on arrête ce scénario d'exploitation de la fibre altruiste des populations du Nord et du thème de la misère de celles du Sud, où des distributeurs attitrés de l'aide, ou improvisés pour les besoins de la cause, ont réussi, par un intense lobbying de haut niveau, à s'intercaler entre les ressources et les destinataires et commencent d'abord par se servir largement", a souligné Wade.

S'il a stigmatisé particulièrement la FAO, Wade a dénoncé aussi "certaines ONG, goulues et dévoreuses de ressources d'aide qui en absorberont une bonne partie au moyen de toutes sortes d'artifices, en administration, voyages et frais d'hôtel luxueux de soi-disant experts, plutôt qu'en actions".

En dépit des manifestations dans son propre pays, Wade a affirmé qu'il n'y avait pas de famine au Sénégal et qu'il n'y en aurait pas, son gouvernement dépensant plusieurs centaines de millions de dollars par an pour subventionner les prix de la nourriture et du carburant.

Le mois dernier, il a annoncé une "Grande offensive agricole pour la nourriture et l'abondance", jugée très ambitieuse par les experts, visant à multiplier par cinq la production de riz d'ici la prochaine saison afin de cesser d'importer cette denrée de base de l'alimentation sénégalaise.

Réagissant aux propos tenus par Wade, Ban Ki-moon a déclaré lundi comprendre les sentiments exprimés par le chef de l'Etat sénégalais compte tenu de la gravité de la crise alimentaire.

"Je peux comprendre et sympathiser avec les frustrations ressenties par nombre de dirigeants africains, y compris le président Abdoulaye Wade du Sénégal, et tout particulièrement par les populations de nombreux pays parmi les moins développés", a confié à la presse le secrétaire général de l'Onu avant une tournée en Afrique et en Europe.

Mais le diplomate sud-coréen a aussi pris la défense de la FAO qui, a-t-il fait valoir, est un acteur de premier plan dans les efforts visant à améliorer la productivité dans le domaine agricole depuis des décennies.
06 mai 2008, 07:41   Wade et la FAO
jmarc écrivait:
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> S'il a stigmatisé particulièrement la FAO, Wade a
> dénoncé aussi "certaines ONG, goulues et
> dévoreuses de ressources d'aide qui en absorberont
> une bonne partie au moyen de toutes sortes
> d'artifices, en administration, voyages et frais
> d'hôtel luxueux de soi-disant experts, plutôt
> qu'en actions".
>
> En dépit des manifestations dans son propre pays,
> Wade a affirmé qu'il n'y avait pas de famine au
> Sénégal et qu'il n'y en aurait pas, son
> gouvernement dépensant plusieurs centaines de
> millions de dollars par an pour subventionner les
> prix de la nourriture et du carburant.
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Dommage que Wade ne nous dise pas d'où lui viennent ces "plusieurs centaines de millions de dollars par an". Deux sources possibles: A/ les organisations intergouvernementales dont celles de Bretton Woods et celles du Système des Nations Unies; B/ les dictatures islamiques pétrolifères qu'il n'est pas besoin de nommer. A l'Occident, et à nous, ici, de dire de qui il est préférable que Wade continue de recevoir ces aides financières pour endiguer la famine dans son pays, personnellement, je vote A/ des deux mains.

En novembre 2007, suite à une Evaluation externe indépendante (EEI) qui a fait grand bruit, la FAO a engagé un processus de réforme et de rationalisation qui doit donner effet aux recommandations de l'EEI et corriger les vices (essentiellement bureaucratiques) répertoriés.

Ceux qui, au-delà des effets d'annonce de Wade qui semble vouloir se faire l'émule de Mugabe en Afrique, s'intéresseraient d'un peu près à ce processus de réforme (de "renaissance et croissance") de la FAO - Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture qui se veut "pôle de connaissance" (a knowledge organisation) - consulteront avec profit cette page web contenant tous les textes et résultats des travaux entrepris dans ce cadre: [www.fao.org]
J'avoue ne pas avoir tout à fait assez de courage pour plonger dans la littérature administrative onusienne. Mais vous qui semblez connaître la question, pourriez-vous nous dire ce que représente le budget de fonctionnement de la FAO par rapport à ce qu'elle distribue ? Il semble bien que tous les organismes chargés de collecter des fonds en vue de les redistribuer aient une tendance structurelle à en consommer pour eux-mêmes une part qui ne paraît guère pouvoir descendre en-dessous de 40% et qui peut facilement atteindre les 60% (dans le cas de la SACEM, ce n'est, si mes souvenirs sont bons, guère plus du tiers qui est finalement redistribué aux artistes). Tout le reste part en frais de fonctionnement (personnel, locaux et frais divers) et de promotion. Comme toujours, les bureaucraties s'occupent d'abord de se nourrir elles-mêmes, d'étendre leur territoire, de grossir leurs effectifs (le moindre petit chef ne rêve que d'une chose : engager du personnel, créer des postes pour augmenter les effectifs dont il est responnsable et, partant, sa propre importance) et de justifier leur existence. A-t-on jamais vu une administration expliquer à son autorité de tutelle que l'on pourrait envisager de réduire sa taille ? Même le ministère français de l'agriculture, à l'heure où il n'y a plus que des résidus de paysannerie et où les quatre cinquièmes des décisions qui les concernent sont prises à Bruxelles nourrit toujours quarante mille fonctionnaires. Et ne parlons même pas de celui des anciens combattants.
Bien cher Francis,

Mieux vaut en effet l'argent de l'occident que celui des islamistes !


Cela étant, travaillant périodiquement avec quelques organisations internationales, je suis persuadé qu'il y a de très importantes économies de structure à faire, d'autant que le principe "un pays / une voix" conduit à distribuer des postes à des incompétents.

Nos amis américains se font d'ailleurs, à chaque fois, un plaisir à rappeler ces gabegies...

Si la FAO est en voie de redressement, j'en suis bien aise. Notez cependant que si on doit la redresser, c'est qu'elle n'était sûrement pas brillante.


Tout cela me fait un peu penser à l'ARC, qui, vers la fin,dépensait en publicités, frais de collecte et argent détourné, une large part de ce qu'elle recevait.
En fait,


Je préfère les coopérations bilatérales (nous en avions monté une avec Haïti, sous le contrôle de notre Cour des comptes) aux "machins onusiens".
Cher Marcel,

Il est très difficile d'estimer le rapport coût-efficacité d'ensemble pour un organisme aussi tentaculaire et diversifié que la FAO (qui assure partout des services-conseil et missions de consultance dont il est difficile de quantifier les effets immédiats). On trouve néanmoins dans le rapport de l'EEI (un pavé de 450 pages que je n'ai pas fini d'éplucher) une étude des ratios des coûts de fonctionnement (dépenses administratives) des Bureaux nationaux de la FAO par rapport aux coûts des Programmes de terrain. Les chiffres parlent d'eux-mêmes, et ils ne sont pas aussi désastreux que vous le supposez:

Les voici en valeur médiane par région: A = Dépenses admin. ; B = Dépenses des programmes de terrain

Afrique A= 31%; B= 69%
Asie 17% ; 83%
Caraïbes 50%; 50%
Europe 12%; 88%
Amérique latine 16%; 84%
Moyen Orient 18% ;82%
Pacifique 9% ;91%

Moyenne mondiale: 22%; 78%

On retiendra que le ratio moyen des dépenses administratives pa rapport au programme pour l'UNESCO a été de 12:88 en 2006.

L'EEI en tire pour recommandation que si la taille d'un programme FAO national passe en dessous d'un ratio spécifique pendant plus de trois ans, le bureau national doit être restructuré (en acceptant par exemple des accréditation multi-pays, se transformant ainsi en bureau régional ou sous-régional); des partages de bureaux avec d'autres organismes (IFIA, PAM, etc.) sont également préconisés.

En tout état de cause, l'EEI préconise que ce ratio témoin ne doive en aucun cas passer au-dessus de 1 à 3, soit 1 dollar de dépense administrative pour 3 dollars de dépenses dans les programmes de terrain.

On retiendra par ailleurs que dans les programmes bilatéraux, la fonction de vérification des comptes assurée par la Cour des comptes du pays bailleur de fonds, censée représenter le contribuable de ce pays, est assurée dans les organisations intergouvernementales comme la FAO par le Comité de vérification (l'audit interne) où siègent des représentants de gouvernements nationaux. Ce sont les pays qui, individuellement ou en comité peuvent tirer la sonnette d'alarme, en suspendant leurs contributions, etc. ainsi que le font parfois les Etats-Unis ou des pays en développement mécontents des prestations qu'on leur dispense.
Si je vous suis bien, cher Francis, il faudrait pouvoir ajouter à ces ratios les dépenses de l'administrations centrale. Ce serait sans doute intéressant. Cependant, vous avez raison, ces chiffres paraissent moins catas trophiques que je le supposais.Tant mieux.
06 mai 2008, 17:38   Caraïbes
Merci, bien cher Francis, pour ces chiffres.

Mon expérience haïtienne rentrant dans la catégorie "Caraïbes" (et ne devant sans doute pas tirer cette catégorie vers le haut), il se peut que ma vision ait été faussée.
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