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Communiqué n° 656, lundi 19 mai 2008 : Sur la dérive "mille-collinisante" de la télévision française

Le parti de l’In-nocence s'indigne de la diffusion sur France2 d'un téléfilm, "Le septième juré", qui montre, de manière tout-à-fait arbitraire, les notables "de souche" d'une localité quelconque tous complices afin de faire passer pour coupable d'un meurtre un homme en raison de son origine maghrébine. Que le film soit censé se passer en 62 à la fin de la guerre d'Algérie ne peut, dans le climat actuel, qu'être considéré par les spectateurs issus de l'immigration maghrèbine que comme le rappel d'une France éternellement raciste. Le parti de L'In-nocence s'indigne d'autant plus que, aujourd'hui, dans la plupart des cités à populations originaires du Maghreb, ce sont, au contraire, les témoignages disculpant les personnes appartenant à ces populations qui ont tendance à devenir la règle sous peine de représailles contre ceux qui contreviendraient à celle-ci.

Le parti de l’In-nocence s'inquiète de voir se multiplier à la télévision des représentations de la réalités à ce point faussées qu'elles relèvent plus du lavage de cerveau que de l'art ou de l'information ; et qui, par leur incitation à haïr toujours plus la population "de souche", finissent par jouer le rôle qu'a joué au Rwanda la sinistre radio dite des "milles collines " avec le risque, à terme, des mêmes horribles conséquences.
Utilisateur anonyme
18 mai 2008, 21:35   un "Dupont Lajoie" bis ?
Qui est l'auteur de ce téléfilm ? Yves Boisset ?

Plus sérieusement, cela va encore renforcer la victimisation de certains. Mais que voulez-vous, c'est dans l'ère du temps. A la francophilie et la xénophobie lepéniste, a répondu pendant presque trente ans, en toute impunité, la francophobie et la xénophilie gauchiste. Les uns ont défendu les "de souche" contre les immigrés, les autres, les immigrés contre les "de souche". Deux pièces d'un puzzle s'assemblant à la perfection, telles une organisation syndicale et une organisation patronale défendant l'une et l'autre, sans objectivité aucune, les intérêts d'une catégorie de la population contre les intérêts d’un autre groupe. Malheureusement, la pièce du puzzle "antiracisme" a été considérée comme étant de facto positive, alors qu'elle n'était pas plus objective que la pièce "racisme". Ce téléfilm ne fait que refléter le lavage de cerveau entamé perfidement depuis le début des années quatre-vingt.
Pour compléter ma réflexion, imaginons maintenant le même genre de téléfilm dans l'autre sens : une histoire mettant en scène des "noirs" ou des "arabes" ayant tous et pendant tout le film une attitude raciste envers des "blancs". Cela provoquerait un scandale : "c'est un téléfilm raciste" nous dirait-on du côté des associations anti-racistes. Dans l'autre sens(comme c'est le cas dans le téléfilm "Le septième juré"), au contraire, c'est encouragé et c'est même considéré comme une merveilleuse dénonciation du racisme par les gentils justiciers anti-racistes. Cherchez l'erreur ...
"une histoire mettant en scène des "noirs" ou des "arabes" ayant tous et pendant tout le film une attitude raciste envers des "blancs". Cela provoquerait un scandale : "

Oui, c'est vrai, et il faudrait à chaque fois renverser la logique du discours antiraciste : remplacer les "de souche" par les "cpf", et inversement. Epuisant...
La différence entre xénophobie et racisme est souvent extrêmement mince car la première pour s'épanouir a souvent besoin de s'appuyer sur le second. Je reviens à mon exemple camarguais. Les ouvriers français qui menèrent la chasse à l'homme italien, briseur de grève, à la fin du XIXe siècle dans les marais salants n'avaient probablement pas lu Gobineau et ne pensaient certainement pas que l'ethnie étrusque était génétiquement inférieure à la race celto-latine. Ils croyaient défendre leur grève. Cependant, il est raisonnable de penser que le caractère violent de cette défense a été renforcée par des préjugés, des stéréotypes, à l'époque les Italiens étaient "fourbes", "sales", "voleurs", "dévots", que l'on peut qualifier légitimement de "racistes".
M. Petit-Détour, chez qui ont sent le spécialiste du "mouvement ouvrier", a-t-il lu "Beau Masque" de Roger Vaillant ? A-t-il lu le roman de Marcel Aymé "La Rue sans nom" ?

Que trouve-t-on dans ces récits qui ont pour théâtre le "monde ouvrier", celui de la forge, de la mine, dans la Bresse industrielle, dans les corons, loin des grands centres urbains, dans les campagnes de l'Ain (Vaillant) ou du Doubs (Aymé) brutalement industrialisées ? On trouve des ouvriers Italiens haïs par leurs collègues bourguignons. Pourquoi haïs ? Parce que l'Italien, chose intolérable, avait de la manière avec les dames, au bal du samedi soir, et savait, à coup de regards, par l'art maîtrisé, intensément discret, de se présenter, de se tenir seul, dans un coin, par la suggestion trouble, les convaincre très vite de passer à l'essentiel.

Voilà le danger étranger. L'étrangère séduit l'autochtone, on le sait bien, mais l'étranger itou, quand il est Italien, ravit les femmes du bourg de son seul regard. D'où la haine, le pogrome, contre celui qui accède aux femmes par le seul fait d'exister - haine contre celui qui d'avoir franchi la frontière, transgresse toutes les frontières.

C'était ainsi, dans le monde ouvrier d'alors, et sans avoir rien étudié de ce qui s'est passé à Aigues-Mortes 1884 l'on devine qu'il n'en fut pas autrement: la concurrence pour le beau sexe faisait se lever les mâles autochtones contre l'Italien, le Ravisseur des coeurs. La femme a plus de prix que le sel, que le salaire. Le salaire, dans ce monde là, de toute façon, c'était la femme: reliser 325000 francs de Vaillant et vous ne me contredirez pas. Vous comprendrez: le grand paradoxe du monde ouvrier français, qui est fondamentalement un monde provincial, un monde de l'ancien monde, est que ce monde sans foi ni loi était resté un monde courtois où le prix, la conquête suprême, restait la femme. Dans ce monde là, le grand transgresseur était l'Italien (pas l'Espagnol, pas le Polonais), mais bien le Transalpin, bourreau des coeurs dès son arrivée.

Aucun "racisme" donc, certes pas, et même bien au contraire, une fascination et un meurtre mimétique: l'Italien avait tout du Français mais, chose intolérable et révoltante: en mieux !
Je n'ai pas lu ces deux romans cher Francis. Votre hypothèse est intéressante et comporte probablement sa part de justesse même si, à Aigues-Mortes, il ne s'agissait pas de concurrence pour l'accès aux femmes mais de concurrence sur le marché du travail : les macaronis étant accusés par l'ouvrier français de faire baisser les salaires et de briser les grèves. Je vous surprendrai peut-être en vous disant que votre intervention me rappelle furieusement une hypothèse formulée par Emmanuel Todd dans Le destin des immigrés pour expliquer le "racisme' des Gaulois à l'égard des Maghrébins. Eh bien Todd l'expliquait aussi par la question de l'accès aux femmes. En l'occurrence, ce qui était reproché à Mohamed n'était pas de distancer Jean sur le terrain de la séduction mais de soustraire ses femelles en les voilant, en les enfermant (c'est -à-dire en respectant les lois de l'endogamie). En les soustrayant donc à la concupiscence gauloise. Une sorte de concurrence déloyale en quelque sorte. "Drôle" de "racisme" donc.
Je vous voyais venir Petit-Détour, avec votre Emmanuel, j'ai donc pris soin de vous rappeler que l'Italien n'était pas différent du Français dans la concurrence, il n'était pas une sorte d'Arabe : l'Italien voulait, faisait tout ce que voulait et faisait le Français en matière de conquête féminine: il ne voilait pas, ne violait pas, ne brutalisait pas, ne proposait rien de particulier, mais il emportait le morceau, était obscurément mieux disant que l'autochtone; rien ne distinguait le Français du Transalpin (souvent piémontais, bilingue, donc, sans obstacle linguistique) sauf un insupportable, un occulte "plus" auprès des femmes qui invalidait tous efforts concurrents.

L'accès à l'autre sexe complique tout, toujours et partout. La sociologie s'y perd. Claudel disait : "c'est à cela que servent les femmes: invalider les plans de l'homme".
Très juste, ce que vous écrivez là, Francis, très fin psychologiquement.

Il n'y a rien qui vous rende un homme détestable comme le plaisir qu'il procure aux femmes sans effort, par exemple grâce au seul charme que lui donne son accent. On se met immédiatement à le hair, lui et tous ceux de son espèce.

Le "racisme" ne contient souvent rien d'autre que cela, cette jalousie violente, cette défense contre la mutilation du pouvoir séducteur.
Utilisateur anonyme
19 mai 2008, 21:37   Olé !
Cet extrait, déjà présenté en ces lieux, semble faire écho presque parfait au message de Francis :


"De 1840 à 1845, le Limousin et la Creuse se trouvèrent envahis par les Espagnols, partisans de Don Carlos, expulsés de leur patrie, et internés dans ces deux départements. Les principales familles du bourg [Auzance] offrirent l’hospitalité à ces vaincus, à ces proscrits. Le dévouement et la bonté s’exaltèrent dans ces pays primitifs, encore inaccessibles à la civilisation, où les chemins de fer n’avaient point importé les idées nouvelles. Par une sensibilité romanesque, les femmes et les jeunes filles eurent à cœur de jouer le rôle de consolatrices auprès des pauvres bannis. Quelle auréole que celle de l’exil ! Tous se disaient plus ou moins nobles, et s’appelaient de noms sonores aux mâles résonances. Ils avaient un air intrépide et mélancolique, comme il sied aux défenseurs d’une cause perdue, la voix de métal, le regard de feu comme le soleil andaloux (sic). Ils étaient irrésistibles.
En peu de temps, on s’aperçut de l’accroissement de la race. Les femmes avaient rempli si consciencieusement leur tâche, que l’on citait une famille, entre autres, où la mère et les deux filles étaient devenues enceintes en même temps.
Très fière jusqu’alors d’une vertu que les Don Juans de village avouaient imprenable, la belle Annette, la mère de la petite Marie, ne sut pas résister à la contagion. Elle qui avait refusé le mariage, ne trouvant aucun parti digne d’elle, s’éprit d’un de ces proscrits dont la genthilommerie tranchait si fort auprès de la rusticité de ses anciens amoureux, et lui sacrifia cette réputation de dignité si soigneusement gardée. »

Un peu plus loin, dans ce récit (Annette s’est enfuie avec son hidalgo, il a été arrêté, elle a donné le jour à Marie, puis, demeurée seule et misérable, n’a pu que rentrer incognito dans son village, à peine le temps de confier l’enfant à sa mère avant de filer en direction de la capitale). Il est vrai qu'à Auzance, l’heure n’est plus à l’hospitalité :

« Il ne restait plus que quelques réfugiés. Pères, frères, maris, s’étaient ligués : on avait expulsé les Espagnols, en les menaçant des plus terribles vengeances s’ils ne quittaient pas le pays. Les frères d’Annette, furieux de son déshonneur, avaient été les plus enragés, jurant de la tuer si elle revenait. »

Marie Colombier - Mémoires (1898)
Voir aussi la pénétrante analyse proustienne du lien inextricable entre l'amour et l'exotisme
Je ne crois pas qu'il faille nécéssairement choisir entre toutes ces causes.
D'une manière ou d'une autre, en effet, l'étranger est toujours celui qui dérange le groupe: il pique le boulot, en faisant baisser les salaires (Aigues-Mortes); il pique les femmes, tout en voilant parfois les siennes; il est voleur, et joue facilement du couteau (reproche fréquent à l'égard des Italiens au début du XX° siècle, vous semblez l'oublier); il n'a pas la même religion, ou pas tout-à-fait (il paraît qu'on reprochait aux Polonais, dans les années 30, de pratiquer un catholicisme un peu trop intégriste).
Le pire est que tout cela est souvent vrai; mais normalement, ces reproches (et les faits qui les font naître) se tassent avec le temps (ce que l'on appelait jadis "l'assimilation") et une meilleure maîtrise des "flux migratoires".
Mais avec des médias qui, jour et nuit, crachent sur la population d'accueil en l'accusant de tous les maux (dans une belle inversion de la logique du bouc émissaire) c'est plus difficile.
Cher M. Ottavi, il est un art qui m'intéresse plus qu'aucun: celui de dégager entre les multiples causes à un phénomène (ici là haine violente et destructrice envers un groupe humain particulier) ce que les informaticiens nomment dans tout programme un tant soit peu complexe "le fichier exécutable", c'est à dire l'élément qui, à lui seul, peut suffire à lancer le programme et à le faire s'exécuter dans ses tâches d'application minimales. Dans cette perspective les fichiers "L'Italien-joue-du-couteau", "L'Italien-est-voleur", "L'italien-casse-les-prix", "L'Italien-pratique-un-catholicisme-intégriste" sont autant de plug-in à "l'exécutable" - ils aident à parfaire le programme mais en aucun cas ne suffiront à l'enclencher.
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