Le site du parti de l'In-nocence

Un "Dessous des cartes "compliqué

Envoyé par Aline 
18 février 2008, 18:15   Un "Dessous des cartes "compliqué
« Suivez bien, c'est très compliqué». Il paraît que c’est ainsi que Jean-Christophe Victor commence son « Dessous des cartes » mardi sur Arte dans une soirée Thema consacrée à la Belgique intitulée « Recherche Belgique désespérément ». C’est en direct d’Arte Belgique, place Flagey. Pour expliquer la Belgique aux Français (dit le programme), il y aura un documentaire, - un voyage de Bruxelles à Ostende et d’Anvers à Charleroi - et un débat avec, paraît-il, différentes personnalités venues d’Europe. Je n’en sais guère plus.
Mais si l’on vous dit que la Belgique éclate… n’en croyez rien ! Je fonde cette mise en garde sur une citation de Madame, la princesse palatine, que me rapportait dernièrement un ami français : « Krakende wagens gaan lang ». (Charrettes grinçantes vont longtemps ) !
"Mais si l’on vous dit que la Belgique éclate… n’en croyez rien ! ".
Je pense, chère Aline, que l'éclatement du Royaume est inéluctable. Que cet éclatement était inscrit dans l'ADN, dans le logiciel (comme dirait Ségolène Royal) même de cet Etat artificiel, crée par la diplomatie anglaise afin de contrer son ennemi héréditaire français sur le continent. La Belgique éclatera car elle n'a jamais su former une nation. Il y a trois semaines, ARTE a diffusé un beau documentaire sur le retour du roi Léopold sur le trône après la Seconde Guerre mondiale. La Belgique était déjà aux bords de la guerre civile, coupée en deux par le clivage entre Wallons et Flamands. A l'époque, André Renard, un des chefs de la FGTB en Wallonie, dirigeant de la grève générale de ces années puis de 1961, personnalité attachante au demeurant, menaçait d'en appeler à l'armée française en cas d'intervention de l'armée belge. L'éclatement de la Fédération yougoslave, qui pourtant associait des populations infiniment plus proches sur le plan ethnique et linguistique, démontre que l'on ne peut obliger des peuples, qui ne le souhaitent plus, à vivre ensemble. Je reviens de Bratislava. La Slovaquie et la Tchéquie ont su divorcer dans la paix et une relative sérénité. Elles constituent à mon sens un modèle pour la Belgique de demain.
19 février 2008, 17:37   Re : éloge de l'inconfort
« Je pense, chère Aline, que l'éclatement du Royaume est inéluctable ».

Je pense, cher Michel, que ce sera dans très longtemps, et contre le souhait de la majorité de la population : quand les dirigeants de notre république « particratique » seront allés au bout de leur folie suicidaire. Et qu’il n’y aura que des perdants ! L’incertitude c’est l’importance de la perte dans les 3 régions.


« La Belgique éclatera car elle n'a jamais su former une nation.
(…)
L'éclatement de la Fédération yougoslave, qui pourtant associait des populations infiniment plus proches sur le plan ethnique et linguistique, démontre que l'on ne peut obliger des peuples, qui ne le souhaitent plus, à vivre ensemble »

Il m’est difficile en un seul post, d’aller fouiller plus loin que la Gaule Belgique pour exposer les origines ethniques de nos deux communautés. Ce qui est sûr, c’est que c’est une curiosité ethnique que l’assemblage de ces Flamands, les plus latins des Germains et de ces Wallons, les plus germains des Latins. Mais s’ils ont mêlé leurs sangs durant des siècles, et l'ont versé dans toutes les guerres menées par l’Europe et sous tous leurs drapeaux (et sans jamais pouvoir s’enorgueillir des victoires des uns et des autres), ils ne se sont jamais battus entre eux.


« Que cet éclatement était inscrit dans l'ADN, dans le logiciel (comme dirait Ségolène Royal) même de cet Etat artificiel, crée par la diplomatie anglaise afin de contrer son ennemi héréditaire français sur le continent »

Oui et non. Dans les journées de septembre en 1830, TOUS les belges de toutes les provinces, de toutes les classes sociales se sont unis ; des renforts de volontaires sont venus de toutes les villes (même de Liège et à Bruges, on s’est battu à mains nues contre les Hollandais). Il fallait jeter dehors les Hollandais honnis… pour mieux se disputer « en famille ».


Il y a trois semaines, ARTE a diffusé un beau documentaire sur le retour du roi Léopold sur le trône après la Seconde Guerre mondiale. La Belgique était déjà aux bords de la guerre civile, coupée en deux par le clivage entre Wallons et Flamands. A l'époque, André Renard, un des chefs de la FGTB en Wallonie, dirigeant de la grève générale de ces années puis de 1961, personnalité attachante au demeurant, menaçait d'en appeler à l'armée française en cas d'intervention de l'armée belge.

Oui, remarquable reportage. Mais lesdites armées n’ont pas eu à intervenir, Léopold III a abdiqué et les années Baudouin furent prospères. Même si les querelles picrocholines ne se sont pas apaisées. Mais là, vous avez raison, la blessure n’est pas refermée. Et pour certains, elle peut mener très loin.

« La Slovaquie et la Tchéquie ont su divorcer dans la paix et une relative sérénité. Elles constituent à mon sens un modèle pour la Belgique de demain. »

Peut-on vous demander ce que vous ferez de Bruxelles ?


Mais vous savez, cher Michel et ce que je vais vous dire heurte la "raison raisonnante " d’un Français. Vivre dans un pays "provisoire ", " fantasmé " comme on dit aussi de plus en plus, n’est sans doute pas confortable mais n’est pas désagréable tout compte fait. Le pragmatique se réfugie dans le quotidien, les autres dans l’imaginaire et c’est tonique pour nos artistes. Vous avez vécu en Belgique : n’avez-vous pas remarqué ce mélange de fatalisme et de scepticisme (oserai-je parler de sagesse ?)? Plus rien n’impressionne le Belge apparemment, pas même la longue alerte au terrorisme de décembre qui ne l’a pas plus affecté que ça et à laquelle d’ailleurs il n’a pas vraiment cru. Depuis que cette crise dure, depuis le 10 juin dernier, les gens vivent normalement, tout fonctionne, peu de grèves, pas de foules en colère dans les rues (contrairement à la France, si je puis me permettre). C’est à se demander si un gouvernement est vraiment nécessaire...
[/size]
19 février 2008, 20:54   Re : Un état artficiel?
Voici un extrait d'un bon article à mon avis) paru dans Le monde du 19 janvier:

La Belgique va rouvrir un débat sur son fédéralisme et ses institutions. Comment analysez-vous la longue crise qu'a connue ce pays ? La mésentente entre Flamands et francophones a-t-elle des implications pour l'Europe ?

Par les problèmes qui y sont posés, ce pays apparaît comme une Union européenne en miniature. D'abord, je suis pantois d'entendre qu'il s'agirait d'un Etat "récent et artificiel". A 177 ans, il n'est certes pas très ancien, mais les provinces qui composent la Belgique d'aujourd'hui forment un ensemble depuis le XIVe siècle, et ses frontières ont été dessinées au XVIIe. Ce pays a acquis son intégralité, en tant que Pays-Bas espagnols d'abord, Pays-Bas autrichiens ensuite. Il a donc un enracinement historique profond. L'Union européenne aussi est "jeune" : officiellement, elle n'a que 50 ans, mais ses racines sont, elles aussi, profondes et très anciennes.

Krzysztof Pomian, historien, conseiller scientifique du Musée de l'Europe à Bruxelles

("En Belgique, c'est l'Europe qui se joue")
19 février 2008, 20:59   Suite
Krzysztof Pomian, historien, conseiller scientifique du Musée de l'Europe à Bruxelles

"En Belgique, c'est l'Europe qui se joue"
LE MONDE | 19.01.08 | 12h19 • Mis à jour le 19.01.08 | 14h24
(J.-P. Stoobants)

La Belgique va rouvrir un débat sur son fédéralisme et ses institutions. Comment analysez-vous la longue crise qu'a connue ce pays ? La mésentente entre Flamands et francophones a-t-elle des implications pour l'Europe ?

Par les problèmes qui y sont posés, ce pays apparaît comme une Union européenne en miniature. D'abord, je suis pantois d'entendre qu'il s'agirait d'un Etat "récent et artificiel". A 177 ans, il n'est certes pas très ancien, mais les provinces qui composent la Belgique d'aujourd'hui forment un ensemble depuis le XIVe siècle, et ses frontières ont été dessinées au XVIIe. Ce pays a acquis son intégralité, en tant que Pays-Bas espagnols d'abord, Pays-Bas autrichiens ensuite. Il a donc un enracinement historique profond. L'Union européenne aussi est "jeune" : officiellement, elle n'a que 50 ans, mais ses racines sont, elles aussi, profondes et très anciennes.

Deuxième dimension : la question des langues et du multilinguisme, hélas essentielle dans la vie belge, est tout aussi centrale dans la vie européenne. Nous assistons partout à un conflit entre une langue mondiale, l'anglais comme langue de services, et une langue régionale, ou nationale, à l'échelle d'une petite nation. En ce sens, les déboires linguistiques de la Belgique ne sont pas séparables du contexte européen, et peuvent même être interprétés comme une mise en garde à l'Union : ne pas tenir compte de la question linguistique, privilégier partout l'anglais comme elle le fait, pour des raisons de rationalité, est idiot et peut avoir des conséquences politiques majeures. Je compare cela à l'attitude de la bourgeoisie francophone belge au début de l'existence du pays : convaincue de parler une langue mondiale à l'époque, elle a méprisé le néerlandais. On en voit aujourd'hui les conséquences.
La troisième dimension du caractère européen que revêt le problème belge, c'est simplement la position géographique de cet Etat. Il est au coeur de la ceinture urbaine européenne, vaste ensemble dont les racines remontent au Moyen Age, épine dorsale du continent. Une séparation comme celle de la République tchèque et de la Slovaquie a été douloureuse mais acceptable. Une fracture de la Belgique rendrait l'Europe tétraplégique : ce pays est l'un des éléments par lesquels "tient" l'ensemble européen. Rappelons aussi que la reconnaissance de l'indépendance de la Belgique, en 1830, a découlé d'un engagement fort de la France, de l'Allemagne et de l'Angleterre, cette dernière y voyant une protection contre les menaces des deux autres. Aujourd'hui encore, la centralité belge est un fait majeur, dont le symbole est que Bruxelles est devenue la capitale de l'Europe.

Que la Belgique soit le point de croisement des cultures romane et germanique vous semble-t-il déterminant ?

Bien sûr. La Belgique a rayonné sur l'Europe et a été au coeur de l'histoire artistique du continent. Au XVIIe siècle, avec Rubens et son entourage, du XIXe siècle à aujourd'hui avec son courant symboliste, James Ensor, puis René Magritte ou Marcel Broodthaers, les architectes Van de Velde et Horta, les poètes Verhaeren et Rodenbach, etc. Bruxelles fut un lieu d'enseignement et d'accueil pour de nombreux jeunes d'Europe centrale avant la première guerre mondiale. La Belgique, dans ce qu'elle avait de meilleur, était bien un pays multiculturel, et la richesse de sa culture vient du fait qu'elle est un lieu de rencontre.

Diriez-vous qu'il existe une "identité belge", ce dont doutent beaucoup d'habitants de ce pays ?

J'ai vécu des années dans ce pays où je suis arrivé à 14 ans, en 1948. J'y ai appris le français et la grammaire de Grevisse, visité les musées, fréquenté les bouquinistes. Le jeune Polonais que j'étais en a tiré la conclusion que l'identité belge existait. Cette conviction s'est raffermie quand j'ai lu l'Histoire de Belgique, d'Henri Pirenne, dont il fut de bon ton d'affirmer, dans certains cercles belges, qu'elle était une "foutaise" et que, non, l'Etat et l'identité n'avaient pas de réalité. Cela dit, l'identité belge est difficile à définir. Elle relève de diverses caractéristiques, dont l'aptitude au compromis est l'une des principales.
Je connais la force du sentiment flamand, je suis en contact avec de nombreux francophones, qui clament désormais qu'ils en ont "marre" de leurs voisins du Nord, mais je pense, ou j'ose espérer, qu'il existe encore des éléments communs à ces communautés, qu'on ne vit pas impunément pendant des siècles dans la même entité territoriale, puis au sein d'un Etat, en ayant partagé la même histoire, celle du duché de Bourgogne, de la domination espagnole, de la révolution brabançonne contre les Français, de la Révolution française. Je n'imagine pas que cette histoire n'ait pas laissé de traces.

Autre interrogation à portée européenne, le fédéralisme : il semble, à première vue, avoir davantage éloigné que rapproché les communautés belges...

La Belgique, rappelons-le, fut au départ une monarchie centralisée à la française, dominée par des francophones qui ne reconnurent officiellement la langue néerlandaise que six décennies après l'indépendance du pays. Le démontage du centralisme initial et le recours à la formule fédérale ont permis que certains problèmes ne se posent pas plus tôt. C'est aux Belges de définir vers quoi ils veulent désormais aller. Je note simplement que le confédéralisme à la suisse a lui aussi ses limites : désormais, les francophones et les germanophones ne connaissent presque plus la langue de l'autre. D'où, encore une fois, l'urgence d'une réflexion européenne sur le problème linguistique.

La montée du régionalisme flamand n'a-t-elle pas, comme d'autres, été encouragée par une Europe communautaire, soucieuse d'affaiblir les Etats- nations ?

La question des régions et des moyens d'endiguer un centralisme excessif s'est en fait posée dès la fin du XIXe siècle. Elle n'a rejoint celle de la question européenne qu'un siècle plus tard, mais, entre-temps, les problèmes avaient crû en Belgique, en Ecosse, en Catalogne, au Pays basque, etc. L'Autriche avait procédé à des réformes dans les années 1920. Réorganisée après Hitler, l'Allemagne a résolu ses difficultés en 1949, en procédant à une large dévolution des pouvoirs aux Länder. L'Italie est lentement sortie du centralisme à partir des années 1970. C'est ensuite que l'Union européenne a tenté de rééquilibrer certaines situations. Son intérêt, comme celui de la démocratie, était de promouvoir les régions. Le reproche à lui faire est d'avoir, au cours des quinze dernières années, non pas attisé les revendications, mais évité de prendre une position nette sur ces sujets.
20 février 2008, 10:36   Re : éloge de l'inconfort
Chère Aline, je vous remercie de cette longue réponse. J'ai vécu près de cinq ans à Bruxelles dans un milieu assez représentatif de la population francophone, comprenant des Belges de toutes origines, ethniques et sociales. Effectivement, j'ai pu rencontrer ce caractère "belge" que vous évoquez, fait de fatalisme et d'ironie. Cependant pour tout vous dire, ce qui m'a frappé aussi c'est la condescendance voire le mépris de beaucoup de francophones à l'égard des Flamands, les moqueries à l'égard de la langue néerlandaise (que l'on ne se donne pas la peine d'apprendre parce qu'elle serait "disgracieuse") ; l'ignorance crasse de la culture flamande ; le tout accompagné d'une sorte de complexe de supériorité morale devant ces Flamands "fascistes", "racistes" et "besogneux". Alors quand j'entends parler, dans la très médiocre émission d'hier sur Arte, de Bruxelles "métissée", j'ai envie de rire (amèrement). Si la capitale fédérale est représentative de quelque chose, c'est bien d'une sorte de développement séparé de communautés qui s'ignorent superbement (dans la paix consumériste). Entre la réislamisation des Marocains, le nationalisme flamand et l'incompétence francophone (pas seulement à Bruxelles,voir la politique clientéliste et maffieuse du PS en Wallonie), je ne vois rien qui annonce des lendemains qui chantent.
Votre argument selon lequel les crises récurrentes qui secouent la Belgique seraient la responsabilité de politiciens incompétents ne tient qu'à moitié. Ces politiciens sont au pouvoir parce que la population les soutient aussi. D'ailleurs, il n'existe pas de partis politiques s'adressant aux Belges, de partis nationaux regroupant des citoyens par delà leurs communautés d'origine. Comme en Yougoslavie après la mort de Tito, après la disparition de la Ligue des communistes, il y a des partis ne s'adressant qu'à leur communauté exclusivement. Si l'on veut sauver la Belgique, il faudrait peut-être commencer par créer un parti s'adressant à toute la population et transcendant les appartenances locales, régionales et nationales. Mais je crois qu'il est trop tard.
20 février 2008, 12:12   Re : éloge de l'inconfort
J'ajoute à ce que dit Petit-Détour qu'il y a en tout cas une solution qui ne fonctionne jamais, c'est d'imposer à quelqu'un de se plier à la culture d'un autre. L'on m'a obligé, in illo tempore, chez les jésuites à Charleroi, à apprendre le néerlandais. Je n'ai eu, si je puis exprimer un avis sincère, que de mauvais professeurs, qui venaient de Flandre (je suppose que les autres ne faisaient pas le trajet quotidien), et que nous rejetions de toutes nos fibres, alors que nous étions demandeurs d'anglais et d'allemand. La moitié de la classe était affligée d'« examens de passage » en néerlandais, ce qui gâchait nos vacances. L'allemand n'était pas enseigné. L'anglais l'était de manière ridicule, à raison d'une heure par semaine pendant deux ans. Résultat : tout le monde, sauf exception, a oublié le néerlandais comme un mauvais souvenir, d'autant plus que le destin de la plupart des élèves était de rester en Wallonie. Personnellement, je le comprends encore assez, mais je ne le parle pas, ne m'étant jamais mis en situation de devoir le faire. J'ai dû apprendre tout seul l'anglais, dont je me sers tous les jours, et j'ai appris l'allemand en deux années de Goethe Institut à Bruxelles, cours que je suivais après mes heures de travail.

Je dois à la vérité de dire que nous avons eu un excellent professeur de néerlandais en seconde (avant-dernière) année d'humanités. Un jésuite très cultivé, qui nous a fait aimer... les langues germaniques. Cette année-là, l'examen de fin d'année se passait (initiative personnelle du professeur) devant un examinateur jésuite flamand, qui (le long temps passé peut bien me permettre de mettre en sommeil ma modestie) m'a félicité pour ma connaissance de la langue...
20 février 2008, 21:12   Re : ça va pas, non?
"J'ajoute à ce que dit Petit-Détour qu'il y a en tout cas une solution qui ne fonctionne jamais, c'est d'imposer à quelqu'un de se plier à la culture d'un autre

J’ose espérer, cher Bernard (car je ne vous reconnaîtrais pas !) que c’est par distraction que vous confondez langue et culture flamande !
Présenté de cette façon, c’est dommage, vous apportez de l’eau au moulin des remarques assez juste à mon sens de Petit-détour (avec lequel je ne suis pas d’accord en tout mais je répondrai plus tard, s’il me le permet) qui s’offusque, à juste titre, du dédain qu’éprouvent certains francophones, (pas tous, qu’il se rassure) à l’égard de la culture flamande. Il me semble qu’il faut être idiot, sourd et aveugle, totalement inculte pour réagir de la façon dont réagissent ces compatriotes qu’il décrit. Comment, en effet ne pas s’enorgueillir du fabuleux passé de la Flandre qui était « nous » aussi, je le signale, des fières villes de Gand, Bruges, Anvers et de leurs trésors, architecturaux et artistiques. J’ai fort envie de recopier ici un billet-« catalogue » qui a déclenché l’ire d’un intervenant rattachiste de l’ancien forum (qui se vantait de se f… de ce qui se passait et se pensait dans l’autre communauté). Mais je me contenterai de dire que cette Histoire de Belgique, ces écrivains de sensibilité flamande exprimée dans une langue française, qui chantaient autant les beautés du plat pays que celles plus accidentées de la douce Wallonie et qu’on apprenait encore à l’école quand j’étais enfant, ont charmé mes jeunes années. Que la Flandre « picturale et mystique », avec ses peintres et ses poètes, flamboyants ou ténébreux, ont modelé mon imaginaire comme ce n’est pas possible, ont nourri mes rêves de la façon la plus intense, les ont gorgés d’effroi et de poésie et d’une vague nostalgie inassouvie.
Et l’on voudrait – nom d’une pipe de potferdoumme ! – que je m’en laisse déposséder ???
20 février 2008, 21:49   Re : éloge de l'inconfort
Avant de répondre à Petit-Détour, je reviens tout de même un instant sur cet « inconfort » dont je parlais dans un message précédent. Pardon de dire des évidences mais la situation d’inconfort est la condition sine qua non de l’acte créateur. C’est l’état que recherche, provoque, invente l’artiste, l’écrivain, le peintre. Qui se satisferait d’une œuvre confortable ? Pour ne parler que de peinture, une œuvre qui présenterait une composition parfaitement équilibrée avec des accords de couleurs objectifs irréprochables et la technique la plus maîtrisée, ne pourrait en aucun cas prétendre à être un chef d’œuvre. Le chef d’œuvre s’élabore dans le vacillement au bord du ravin, dans le vertige entre l’abîme et les crêtes ou sur le fil du rasoir, le lieu qu’il affectionne le plus. Voilà pourquoi le fantôme de la disparition qui plane depuis si longtemps sur ce pays n’est pas pour rien dans la créativité que l’on prête à ses artistes.
(Permettez que notre radeau de la Méduse présente quelques avantages ...)
Utilisateur anonyme
20 février 2008, 22:44   Re : éloge de l'inconfort
"Car lorsque les grues sont en groupe, il y en a toujours une qui veille tandis que les autres dorment, et elles montent la garde chacune à tour de rôle. Et celle qui fait le guet, pour ne pas s'endormir, place de petites pierres sous ses pattes, afin de ne pas pouvoir trouver un équilibre stable et de ne pas s'endormir profondément."

Li bestiaires d'amours di maistre Richart de Fornival (vers 1250) (translaté en français moderne qu'a ben bouzigué d'puis lors.)
21 février 2008, 11:05   Re : éloge de l'inconfort
"Un bon coq est celui qui a du feu dans les yeux, de la fierté dans la démarche,
de la liberté dans ses mouvements, et toutes les proportions qui annoncent la force :
un coq ainsi fait, n'imprimerait pas la terreur à un lion, comme on l'a dit et écrit tant de fois,
mais il inspirera de l'amour à un grand nombre de poules ; si on veut le ménager on ne lui en laissera que douze ou quinze."


Buffon (1707-1788), Histoire naturelle des oiseaux
Seuls les utilisateurs enregistrés peuvent poster des messages dans ce forum.

Cliquer ici pour vous connecter