On n'en a pas trop parlé dans la presse aux ordres.
Manifestations massives en Colombie pour protester contre la guérilla des FARC
LE MONDE | 05.02.08 | 09h42 • Mis à jour le 05.02.08 | 10h27
Les Colombiens sont descendus dans la rue, lundi 4 février, pour protester contre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, extrême gauche) et exiger la libération immédiate de tous leurs otages. Le slogan "non aux FARC, non aux enlèvements" a résonné dans tout le pays et à l'étranger, partout où vivent des Colombiens. Les autorités estiment à 2 millions le nombre de manifestants, un chiffre historique dans une société peu encline à l'action collective.
"Anesthésiée par des années de violence, la Colombie proteste enfin contre la barbarie", estime Carlos Hoyos, professeur d'histoire-géographie. Sa femme, institutrice, n'est pas venue, jugeant la manifestation "récupérée par le gouvernement". "La Colombie, c'est moi", proclament des T-shirts blancs. "De quel droit les FARC se disent 'de Colombie', si leur ambition est de détruire ce pays?", s'interroge Blanca Ramirez, employée dans une banque.
Sa voisine, infirmière, veut croire que "les FARC vont finir par comprendre que le monde a changé et que plus personne n'appuie l'usage de la violence". Elle est venue "pour dire aux otages qu'on ne les oublie pas". Sur la place Bolivar, 700 chaises de plastique blanc ont été disposées, en mémoire des 700 otages détenus par les FARC. Clara Rojas, l'amie d'Ingrid Betancourt libérée le 10 janvier, était dans le cortège. "Du fond du cœur, je demande aux FARC d'écouter notre message", a-t-elle déclaré.
UNE IDÉE LANCÉE SUR INTERNET
Le cri unanime de la foule contre les FARC ne masque pas les divergences. Ici, une banderole proclame "La Colombie tout entière est avec son président Alvaro Uribe". Là, des pancartes exigent un "accord humanitaire" entre le gouvernement et la guérilla. Des étudiants ont complété l'inscription de leur T-shirt : "Non aux FARC, aux paramilitaires et au terrorisme d'Etat". Un vendeur brade ses derniers drapeaux sur lesquels est écrit "Chavez Go Home". Le président vénézuélien, Hugo Chavez, est désormais perçu comme un allié des FARC par nombre de Colombiens.
Lancée il y a un mois sur Internet par des étudiants adeptes du réseau Facebook, l'idée d'une grande manifestation contre les FARC avait reçu le soutien du gouvernement. Les ambassades à l'étranger ont relayé l'appel. Les médias ont mené une campagne sans précédent. "Tous à la manifestation", titrait le quotidien El Tiempo lundi. Ministères, administrations, écoles et entreprises ont fermé leurs portes pour permettre aux employés de manifester.
Fallait-il participer à une manifestation appuyée par le gouvernement et exclusivement dirigée contre les FARC ? Le débat a été vif. Le Pôle démocratique (gauche) s'est démarqué de la manifestation, sans la condamner. Il a donc appelé à se réunir sur la place Bolivar dès 10 heures du matin, pour protester contre la politique militariste de M. Uribe et exiger une politique de paix. Les sympathisants du Pôle et les autres manifestants se sont mélangés sans heurts.
Les familles des otages ont, elles, refusé de se joindre au cortège et préféré se retrouver à l'église pour prier. Certaines ont évoqué la crainte de voir la guérilla effectuer des représailles contre leurs proches. D'autres ont dénoncé la récupération de la manifestation par un gouvernement rétif à toute négociation. "Qui va capitaliser cette manifestation ?", s'interrogeait, dimanche, Yolanda Pulecio, la mère d'Ingrid Betancourt.
Marie Delcas
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