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Communiqué n° 673 : Sur la télévision de service public

Le parti de l'In-nocence voit pleinement confirmées les craintes qu'il avait exprimées au moment de l'annonce de la suppression de la publicité sur la télévision de service public : mesure qu'au demeurant il approuve quant au fond mais qu'à juste titre il avait jugée mal préparée, sauf quant aux avantages qu'elle ménageait cyniquement à la télévision privée et aux intérêts financiers proches du pouvoir.

Le parti de l'In-nocence, maintenant que la mesure a été annoncée et prise, demande qu'on s'y tienne et ne voit pas d'autre solution, pour la rendre exécutable, qu'une augmentation de la redevance.

Le parti de l'In-nocence exprime sa plus totale opposition à l'introduction d'une deuxième coupure publicitaire dans la diffusion des films et des émissions longues sur la télévision privée : ce nouveau cadeau aux financiers amis de la présidence de la République, ne révélant que trop les véritables motifs de la mesure précédente, serait une insulte aux "créateurs" — qu'ils méritent ou non ce beau titre — et ne manquerait pas d'accélérer encore l'imbécilisation générale en cours.

Le parti de l'In-nocence, enfin, considère comme de la plus extrême urgence, à titre de sauvetage d'espèces menacées, la satisfaction de sa demande ancienne et répétée de création d'une chaîne de télévision véritablement culturelle, exclusivement consacrée à l'art, à la littérature, au théâtre, à la musique, au cinéma d'art et d'essai, à la connaissance en général et à la vie de l'esprit.
Utilisateur anonyme
03 juin 2008, 22:56   Re : Communiqué n° 673 : Sur la télévision de service public
Il est une occasion ou le parti de l'In-nocence m'a toujours paru perdre de vue le trait d'union conceptuel de son intitulé et s'accointer à une presque attendrissante naïveté, c'est dans le brame après une "chaîne de télévision culturelle".

La littérature en particulier sera toujours absolument incompatible avec l'audio-visuel en général et la télévision en particulier.

Je vois venir d'ici ces indécrottables Perses-d'Eschyle télévisés qui se tiennent prêts depuis quarante ou cinquante ans dans les coulisses des conversations et surgissent dès qu'on les sonne, figurer un des exemples d'une télévision culturelle (Ils se sont adjoints peu à peu l'inénarrable Bernard Pivot, qui a tant fait pour la littérature et voilà qu'il faut regretter Apostrophes, une émission qui a détraqué en profondeur et la lecture et le commerce des livres.)

A supposer que la télévision eût connu son Age d'or, il ne fut le fruit que d'une circonstance matérielle : le peu d'heures d'antenne des débuts, pas de télévision le matin, rien la nuit (ce qui, au passage, indique clairement le seul moyen de tirer un intérêt quelconque de cet instrument, c'est-à-dire par la limitation de la programmation à deux ou trois heures par jour. Personnellement, c'est la seule mesure qui me semble adaptée.)
Utilisateur anonyme
03 juin 2008, 23:11   Re : Communiqué n° 673 : Sur la télévision de service public
Je suis plutôt de votre avis, mais tout de même : les entretiens de Pivot avec Yourcenar, Jouhandeau, Nabokov, Soljenitsyne ; ou Céline parlant de D'un château l'autre avec Dumayet dans Lectures pour tous, je suis bien content que cela existe...
Utilisateur anonyme
03 juin 2008, 23:12   Aooooouuuuuuuuuh !
Je suis tout près d'être entièrement d'accord avec Orimont Bolacre.
Utilisateur anonyme
03 juin 2008, 23:43   Re : Communiqué n° 673 : Sur la télévision de service public
"(...) les entretiens de Pivot avec Yourcenar, Jouhandeau, Nabokov, Soljenitsyne ; ou Céline parlant de D'un château l'autre avec Dumayet dans Lectures pour tous, je suis bien content que cela existe..."

Cher Alexis,

Tous les écrivains que vous citez ont ce curieux point commun d'avoir été privés de télévision, pour la raison qu'elle n'existait pas, pendant toutes leurs années d'apprentissage et jusqu'à l'âge adulte. Comme c'est étrange. Qu'un Pivot ou autre ait eu la chance de recueillir leurs diresin extremis ne doit pas nous faire oublier qu'ils sont devenus ce qu'ils sont devenus précisément parce que Pivot et consors ne tenaient pas salon.

De plus, je ne suis pas spécialement content de pouvoir entendre et voir Céline, Yourcenar et les autres. Voudriez-vous entendre Marcel Proust ? Charles Baudelaire interrogé par Bernard Pivot ? Quelle monstrueuse blague ! A quelques années près, on l'a vraiment échappé belle !

Et j'ajoute que tous ces documents d'archives, toutes ces voix et ces visages désormais fossilisés mais encore présents, de cette présence spectrale qu'avait par exemple pour moi Paul Morand dans un entretien récemment produit sur ce forum, me glacent bien plus qu'ils ne me contentent. Ah pour ça, on pourra dire que l'audio-visuel nous aura régalé de preuves audibles de ce que nous avons perdu en matière de prononciation, de conversation, d'élocution, de culture que sais-je ! On ne pourra pas nier que la diction de Paul Morand, c'était bien autre chose que la parlure actuelle ! Eh bien je trouve ce phénomène, par exemple, puisqu'on parlait de phénomènes inédits, très pernicieux : tous ces morts qui continuent à parler dans les écrans et promettent de la faire indéfiniment. En définitive, ils ne nous apprennent rien, ils nous paralysent, nous privent de la très féconde ignorance du son de leurs voix, de leur parler, qui ferait peut-être qu'on essaierait de les retrouver, comme essayèrent les cénacles savants de Vérone et Mantoue de retrouver le chant antique et inventèrent l'Opéra. Nous n'aurons pas l'occasion de telles somptueuse bévue.

Ce qui rend toute Renaissance à nous autres si difficile c'est peut-être et surtout cette masse de documents, d'enregistrements, d'heures d'écoute, de témoignages lisibles, trop lisibles.
Je ne sais pas au juste si je suis entièrement d'accord avec Orimont Bolacre, mais je trouve son petit argumentaire vraiment très convaincant. Bravo! Cela donne à penser...
Je ne vois pas pour ma part en quoi la connaissance de la voix et du visage des grands écrivains nous "paralyse" en nous interdisant une quelconque Renaissance... (Ah, si : peut-être parce qu'en fixant à jamais de telles choses, on justifie leur caractère révolu en pensant qu'il serait aujourd'hui devenu vain de les imiter, que la beauté dont elles témoignent appartient au passé, etc). Qu’elle ait pour effet de nous rendre mélancoliques, c’est un fait. Il est vrai que souvent, dans notre désir de vouloir connaître à tout prix ces voix et ces visages, il entre une curiosité malsaine mais très compréhensible, qui a pour conséquence de désacraliser parfois un beau mystère, mais qui nourrit sans cesse notre imagination, quand nous succombons au désir bien naturel de nous représenter ce qu'ont vraiment été les grands hommes ; oh! certes, voir apparaître sur un écran le visage de Paul Morand ne doit pas nous interdire de lire son œuvre. Mais c’est plutôt une intimité prolongée avec celle-ci qui produit notre insatisfaction, et notre bête désir de savoir les détails insignifiants qui font que tel grand homme nous ressemble : de fait, la vision d’images mouvantes d’un grand écrivain appartenant au monde d’avant a ceci de vil qu’elle répond souvent à notre désir d’être rassurés sur la médiocrité de ses expressions et de ses préoccupations quotidiennes, pour qu’il ne nous porte pas ombrage et que l’amour de son œuvre ne soit pas la condition d’une perpétuelle humiliation de notre être (car il entre à mon avis, dans toute admiration, une part de répulsion inconsciente: on ne peut admirer le tout que parce qu'on s'amuse par ailleurs de tel petit détail ridicule).

Finalement je vous rejoins, Orimont Bolacre, il y a quelque chose qui s’apparente à du ressentiment dans cette volonté perpétuelle de mettre en avant, le plus souvent comme une tare destinée à nous rassurer sur notre sort en nous faisant oublier l’œuvre qui écrase, la dimension prosaïque des plus hauts génies (quoique certains, mais ils sont rares, se tirent bien de ce mauvais piège qu’on leur tend). Un document filmé a rarement pour effet de magnifier l'homme dont on parle, et que l'on fait parler.

Et puis de tels témoignages filmés, qui valent pour leur rareté, voisinent souvent avec des vidéos de la pire espèce, ce qui a pour effet de leur faire perdre leur caractère exceptionnel ou providentiel, en les assimilant au tout-venant de l'information.
Oui, j'ai souvent été moi aussi interloqué par cette promiscuité, qui tient de la cour des miracles...
Ce voisinage me paraît surtout impitoyable pour le reste. L'autre jour, après avoir regardé les vidéos dans lesquelles Paul Morand et François Mauriac parlaient de Proust, j'ai appelé celle, proposée dans la même page, où l'on voyait Michel Houellebecq interrogé par Laure Adler. J'ai tenu trente secondes et me suis enfui, horrifié autant par l'un que par l'autre. Impitoyable comparaison vous dis-je.
A mon avis, la meilleure et la plus instructive des vidéos qui concernent Proust (soit dit en tenant compte de toutes les obscènes bassesses que cet attrait pour l'insignifiance implique souvent en nous-mêmes) est celle où sa domestique nous conte, dans une langue que j'estime elle aussi admirable (ses maladresses ont parfois du génie en effet), les derniers moments de la vie du grand homme. Il y a longtemps que j'ai vu ce petit film ; mais si je me rappelle bien, cette langue n'est ni de l'argot, ni une langue qui serait "diminuée" en quelque manière : peut-être même s'agit-il là du véritable français populaire, tel que Françoise elle-même, je crois, le parle dans la Recherche.
Utilisateur anonyme
04 juin 2008, 15:28   Céleste
Je l'ai en CD-ROM. Est-ce que les CD-ROM passent encore sur nos ordinateurs modernes, Bernard ?
Utilisateur anonyme
04 juin 2008, 15:51   Re : Comme une lumière
[url=
]Céleste[/url]

(Extrait de l'émission de Roger Stéphane, [i]Portrait Souvenir[/i], 1962)
Oui, ce petit film qui montre Céleste racontant, avec des mots simples et justes, les derniers moments de Proust est remarquable et terriblement émouvant.
Utilisateur anonyme
04 juin 2008, 16:34   Re : Comme une lumière
Merci mille fois, Cher Alexis, je ne savais pas qu'on pouvait espérer trouver ça sur le Net !
04 juin 2008, 16:42   Re : Comme une lumière
C'est curieux, cela ne fonctionne pas : la mémoire-tampon se charge mais la lecture ne s'enclenche pas. Est-ce parce qu'il y a trop de demandes à la fois ? Mais alors comment la mémoire-tampon peut-elle se charger ?
Utilisateur anonyme
04 juin 2008, 16:47   La mémoire tampon
Une fin de cycle, peut-être…
Utilisateur anonyme
04 juin 2008, 20:15   Re : Communiqué n° 673 : Sur la télévision de service public
Extraordinaire !
Lui qui ne croyait pas à l'amitié, existe-t-il maintenant un homme qui a plus d'amis sincères que lui ?
Merci beaucoup !
«C'est curieux, cela ne fonctionne pas : la mémoire-tampon se charge mais la lecture ne s'enclenche pas. (...)»

Cher Marcel Meyer, je vous encourage à inscrire un site comme Force Download dans vos marque-pages.
Vous pourrez ainsi sauvegarder les films diffusés sur Youtube ou Dailymotion, au format FLV ou AVI, sur votre disque dur, et les archiver...
Il suffit de copier et coller l'adresse de la vidéo et de la coller sur la page d'accueil de Force download...
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