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André Gide et l'antisémitisme célinien.

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 09:49   André Gide et l'antisémitisme célinien.
André Gide, loin de toute condamnation morale, explique dans un court article le génie célinien, même et surtout dans "Bagatelles pour un Massacre"... extrait :



"Céline excelle dans l'invective. Il l'accroche à n'importe quoi. La juiverie n'est ici qu'un prétexte. Un prétexte qu'il a choisi le plus épais possible, le plus trivial, le plus reconnu, celui qui se moque le plus volontiers des nuances, qui permet les jugements les plus sommaires, les exagérations les plus énormes, le moindre souci de l'équité, le plus intempérant laisser-aller de la plume. Et Céline n'est jamis meilleur que lorsqu'il est le moins mesuré. C'est un créateur. Il parle des Juifs, dans "Bagatelles", tout comme il parlait, dans "Mort à crédit", des asticos que sa force évocatrice venait de créer..."

André Gide : "Les Juifs, Céline et Maritain", 1er avril 1938, "L'Esprit NRF", ed. Gallimard, p. 1158.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 17:43   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Tout de même, tout de même, Alexis nous manque beaucoup.
Assez étrangement, je ne suis pas loin de partager l'analyse de Gide. Je me demande même si, parfois, Céline croit lui même ce qu'il dit.

En revanche, je trouve la comparaison avec les "asticos (?)" malheureuse.

Quant à Maritain, je ne vois pas le rapport...
L'article est repris dans les "Cahiers de l'Herne". Une nouvelle impression vient de voir le jour (deux volumes en un). Je trouve le texte de Gide intelligent. Meilleur que les tentatives d'explication de Dominique de Roux que j'approuve cependant. Un dossier est paru récemment en dvd: le témoignage de Lucette Almanzor est profond et sensible. Celine est le contraire d'un salaud; Proust et Céline dominent le XXème siècle. Il y a des phrases dans la "Recherche" qu'on ne relève jamais comme "Bloch, ce youpin brenneux...". Est-ce que Proust est antisémite ?
Monsieur Florentin, il me semble que pour que votre citation de Proust ait quelque pertinence, il faudrait savoir quel personnage prononce ces mots et dans quelle circonstance. La Recherche étant un roman, je ne crois pas qu'on puisse attribuer à son auteur la pleine responsabilité de ce que disent ses personnages. En tout cas, pas systématiquement.
Si tout cela visait à faire entendre que Céline n'était pas réellement antisémite, ou que son antisémitisme n'était au fond que de la littérature - un peu comme celui de Brasillach en quelque sorte, cela serait s'engager dans une entreprise aussi scélérate qu'imbécile, et absolument inacceptable ici.

Il me paraît évident que Gide n'a pas pu penser ainsi après la guerre. Quant à Proust, ce serait en effet intéressant de voir la citation dans son contexte.
C'est vrai, le narrateur n'est pas l'auteur, il n'est pas l'interprète du moi profond de l'auteur. C'était pour dire que Proust n'avait pas peur des mots, tout comme Bloy, Tailhade, Barbey d'Aurevilly, etc.
Mais la phrase en question est-elle du narrateur ou de l'un de ses personnages ?
Il m'étonnerait énormément qu'elle soit du narrateur...
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:35   Mais mais mais…
Mais enfin, je rêve ou quoi, personne ne s'est jamais dit, un peu, que Proust était, légèrement, quelquefois, en quelque manière, antisémite, en lisant la Recherche ???
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:38   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"Si tout cela visait à faire entendre que Céline n'était pas réellement antisémite, ou que son antisémitisme n'était au fond que de la littérature"


Bien sûr que non, cher M. Meyer. Je trouvais seulement ce passage intéressant et beau à la fois.
08 juillet 2008, 20:40   Littérature
Bien cher Marcel,

Je ne crois pas que quiconque ait dit que Céline n'était pas antisémite. Dire que Céline fut antisémite, c'est évident.

En revanche, pour ce qui est des pamphlets, on doit sérieusement s'interroger sur leur caractère délirant, ils sont exagérés au-delà du vertige.

Je ne souhaite vraiment pas mettre des extraits en ligne. Je joins en revanche, à titre purement de citation, un autre extrait de "Bagatelles" qui montre le ton général, que vous pourrez juger par vous-même.


"J’aurais voulu être, moi, le Roi, tu vois, d’un immense, puissant Royaume... Et puis que tous mes sujets, tu m’entends, tous ! sans aucune espèce d’exception, ils m’auraient tous hai à la mort ! Ils n’auraient pensé qu’à cela... me faire la peau... me résoudre... semaine et dimanche... ça les aurait réveillés en sursaut, une idée pareille... Ils auraient ourdi, comploté sans interruption contre mes jours... Chaque fois que je serais sorti de mon château magnifique, dans mon carrosse de grand gala... il me serait tombé sur la gueule quelque chose comme affreuses bombes ! Des pluies ! Mon ami, des averses ! Des déluges des plus terribles grenades !... des "fulminants" de tous calibres... Je n’aurais jamais survécu que par miracle... par l’effet de tout un subtil agencement, de tout un concours de prodigieuses circonstances... J’aurais été de mon côté royal plus fumier encore si possible que tous mes sujets à la fois... absolument sans pitié... sans parole... sans merci... J’aurais gouverné cette masse haineuse encore plus haineusement et absolument solitaire ! Par la menace, les exécutions, l’outrage et le défi perpétuel !... A l’abri de ma formidable citadelle, j’aurais imaginé sans répit d’autres insultes, d’autres forfaitures, d’autres outrages ! Encore ! Toujours plus abominables ! Pour navrer mes odieux sujets ! D’autres moyens de me rendre toujours plus abject, plus démoniaque, plus implacable ! Plus impopulaire ! Ainsi je les aurais définitivement fascinés. Jamais je n’aurais eu un de ces gestes de clémence, de faveur, d’abandon qui vous discréditent un tyran mieux que cent mille pendaisons. Je n’aurais pendu, moi, que les tendres, les compréhensifs, les pitoyables... les évangéliques... les bienfaisants de tous poils... J’aurais organisé d’immenses concours de rosiers et de rosières... pour les fouetter tous et toutes ensuite à mort... devant toute la populace... Je me serais parjuré sans cesse, sans limite, sans répit... sauf pour infliger à mes sujets d’autres vexations... les opprimer, les saccager davantage, dans tous les sens et façons. Haine pour haine ! et sans limite !... ma devise royale. J’aurais vécu tout seul, campé sur les revenus de mon immense Trésor, retranché dans mes carrosses de grand gala... Je les aurais tenu, mes abominables sujets, angoissés, haletants, attentifs à mes moindres gestes, toujours aux aguets, sous le coup d’une nouvelle iniquité, et cela pendant toute la durée de mon règne. Jamais un seul jour ne se serait passé sans quelque horrible déni de justice, quelque atroce méfait royal... l’écartèlement d’un juste, l’ébouillantage d’un innocent... Ah ! ce peuple ignoble ! le vois-tu ? Toujours fébrile, délirant de fragiles, fugaces espoirs de me réduire très prochainement en bouillie, en pâtée sanglante sous les débris de mon magnifique carrosse ? Mon règne aurait été de cette façon, j’en suis certain, exceptionnellement réussi, le plus heureux en vérité de tous les règnes, de toute l’Histoire – sans guerre, sans révolution, sans famine, sans banqueroute. Ces calamités n’affligent en effet les peuples que parce qu’elles sont très longtemps à l’avance désirées, amenées, préméditées, pensées, mijotées, par toute la rumination des masses... l’oisiveté sadique, ruineuse des peuples. Mes sujets surhaineux n’auraient jamais eu le temps, eux, de penser à ces sottises, à ces catastrophes ! Je les aurais bien trop occupés par mes inépuisables trouvailles, mes infernales vacheries !... Ils se seraient bien trop passionnés sur la meilleure, prompte manière, la plus effroyable, de me réduire en caillots, en marmelade de viscères. J’aurais fait, moi leur monarque, l’accord de toutes les haines de mon Royaume, je les aurais centralisées, magnétisées, fanatisées sur ma propre royale personne. Voici le seul moyen royal, Ferdinand, de véritablement régner ! Gouverner ! Ah ! Ferdinand ! Ma vie eût été alors autre chose ! Une destinée merveilleusement utile... tandis qu’à présent, tu vois, je parle... je me gaspille comme je peux..."




Le pamphlet en cause, et le texte de Gide, sont de 1938, ce point est essentiel. Il faut donc juger et le pamplhet, et l'opinion de Gide dans une optique d'avant-guerre. Après guerre, Céline lui-même renia ses pamphlets.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:41   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Il est exceptionnel que Proust parle en son nom dans "A la recherche... ", et les rares fois c'est comme par distraction. Il fait dire des horreurs à de Charlus par exemple contre les juifs, ce qui ne l'engage pas personnellement, bien entendu ! Bloch, juif, notamment anti-dreyfusard par pur opportunisme, changera de discours tout au long du roman. Paul Morand passe pour anti-sémite, alors que tout le monde, américains, grecs, allemands, noirs, russes etc. sont éreintés par sa critique acérée et libre. Arrêtons la chasse aux sorcières s'il vous plaît !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:43   Match nul
"Ah ! Si les antisémites nous délivraient de nos Juifs, quel débarras. Ou bien les Juifs de nos antisémites."

P.J. Toulet Les trois impostures (1925)
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:44   À la chasse comme à la chasse
\¿\•¿\¿\•ı\¿•¿\•ı•ı¿\¿•ı•¿¿\ı••¿\¿\\¿•ı\•ı\•ı\•ı\¿\¿
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:54   Boris est une sorcière
Voilà qui explique tout chez ce Boris. Quand il disait transformer la mauvaise littérature en fumier pour brûler celui-ci dans son jardin, il avouait de facto son origine satanique : sus !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:57   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"Arrêtons la chasse aux sorcières s'il vous plaît !"

Qu'il soit antisémite ou pas (et il l'est) ne m'intéresse guère, d'autant qu'il existera toujours assez de ligues de vertu pour nous le rappeler.
Non, ce qui m'attire chez Céline ce sont ses dons prodigieux, une grâce d'expression comme on n'en peut trouver chez deux écrivains d'une même génération, une imagination poétique directe, instantanée, involontaire, une langueur de style puis une agilité soudaine - bref, il y a dans tout ce qu'il écrit quelque chose d'absolument féerique !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:57   Re : Littérature
Au fait, JMarc, savez-vous qu'il existe ici un mécanisme infernal qui se nomme : "Messages privés" ?
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 20:58   Re : Littérature
D'accord avec Orsoni.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:11   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Moi aussi ! Fabrice Luccini a dit des textes de Céline avec délectation au théâtre, il a fait la différence entre l'art et la morale moralisatrice qui est la vraie peste de l'esprit.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:12   Re : Gide et Céline et Maritain
Céline est glauque.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:14   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Une page plus loin André Gide écrit : "Ce n'est pas la réalité que peint Céline ; c'est l'hallucination que la réalité provoque ; et c'est par là qu'il intéresse." On pourrait presque en dire autant de l'inimitable prose marchienne... non ?
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:20   Re : Gide et Céline et Maritain
Je n'en sais rien, Corto, je n'ai jamais vu de photographies en couleurs, de lui.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:22   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Son oeuvre est glauque, Boris, et le style n'y change rien.
Oui, c'est du narrateur et pourtant Proust était dreyfusard. Il faut lire sa correspondance qui donne des clefs très précieuses. Si Proust est juif par sa mère, il est catholique de formation et, surtout fasciné par l'aristocratie, ou ce qu'il en reste, une certaine idée de la noblesse, comme Céline d'ailleurs.
Je trouve les pamphlets de Céline plutôt ennuyeux, à part "Bagatelle pour un massacre"où l'argument de ballet est franchement sublime. Je reviens à Lucette qui a des choses à dire, pas seulement avec des mots...
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:24   Corto, c'est glauque, ton agrument, là !
Et le style n'y change rien ???

Ah bon ah bon.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:29   Re : Corto, c'est glauque, ton agrument, là !
Non. et touchez pas à mon agrume, Boris.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:30   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Corto vous semblez si seul, si triste (glauque ?), depuis le départ d'Alexis...
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:30   Re : Corto, c'est glauque, ton agrument, là !
Vous n'allez pas me croire mais pour une fois je l'avais fait exprès !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:32   Solitude dans les alpages
Gaffe, Orsoni, quand Corto critiquer Céline, mieux rentrer la tête il vaut.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:33   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Oui, Orsoni, je vous tiens pour responsable du départ d'une des consciences de ce forum. Où dois-je vous envoyer mes témoins ?
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:34   La flamme.
Envoyez-les chez Francis, Corto. On y est déjà.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:36   Re : La flamme.
C'est une conjuration des ténèbres !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:38   Mais quelle belle langue !
"Mais quelle belle langue ! Il y a un plaisir trouble à se replonger dans cette prose poétique vénéneuse : "

Ainsi s'exprimait Corto à propos de Jean Genet et citait-il un extrait de Pompes funèbres qu'on pouvait trouver singulièrement "glauque" mais dont le style, cette fois, changeait tout, apparemment.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:39   Re : La flamme.
Genet oui, Céline, je n'y arrive pas. Mais, bon, je vous laisse : je dois aller lutiner mon bourgeois.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:40   Re : Mais quelle belle langue !
Hin hin hin… Je le savais bien, qu'on l'aurait, le Corto !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:44   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"Oui, Orsoni, je vous tiens pour responsable du départ d'une des consciences de ce forum"


Mais non, Alexis est si fin, si délicat aussi, que ça n'est pas un gros balourd comme moi (admirateur de Céline, de Gobineau, de... non, j'arrête) qui pourrait le froisser... c'est beaucoup plus subtil que ça. A mon avis il boude juste un peu, c'est tout.
Pour Lévinas, Céline marque la fin des Belles-Lettres, elles-mêmes indissociables de l'humanisme. Et pourtant, le même Lévinas, cinquante plus tôt (c'était vers 1935), faisait l'éloge du Voyage... Mais il est vrai que c'était avant les pamphlets, et avant même Mort à crédit, qui entame un travail de sape systématique de la langue.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:51   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Oui, la fin des Belles-Lettres, c'est glauque.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:56   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"un travail de sape systématique de la langue."

Là, cher M. Chaouat, vous y allez un peu fort !- Je dirais qu'il est un tournant, oui, un grand tournant dans la langue et l'histoire de la littérature française !, mais certainement pas qu'il sape la langue !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 21:57   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Y a certains tournants, quand tu les prends mal, tu te casses la gueule dans le platane. Parfois, c'est bien fait.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 22:02   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Corto sans Alexis, c'est vraiment glauque !...
"Tournant", cela signifierait une sorte de progrès, au sens dialectique d'un dépassement par destruction d'un état antérieur, peut-être inférieur, de la Littérature. Mais selon ce schéma, il faudrait que Céline et son style aient apporté quelque chose, qu'ils aient eu des héritiers, que la littérature française aient bénéficié de l'apport de Céline. Mais Céline est sui generi, et, pour le malheur des lettres françaises, ceux qui l'ont imité sont de piêtres écrivains : ils "font du Céline". Je pense tout haut, pardonnez-moi, et mal, qui pis est. Je veux simplement dire que soit Céline est un hapax, une bizarrerie sans héritiers, soit il a fait progresser la littérature, avancer l'art. Je pencherai pour la première hypothèse, ce qui, évidemment, ne délégitime en rien son oeuvre...
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 22:08   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Oui, il me manque. Alexis, c'est mon Amérique à moi. Tant pis s'il est trop bien pour moi. Je l'attendrai toutes les semaines.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 22:33   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Cher M. Chaouat je crois que le style même de Céline est scandaleux. Et on se demande si ce mode d'expression particulièrement vert et argotique n'est pas choisi seulement dans un but de scandale. Mais ce que Céline a à dire est trop violent, trop direct, ses conclusions sont trop brutales pour s'accomoder du français "académique", de cette langue que des siècles de littérature ont façonnée, stylisée, mais qui (il faut bien l'avouer) a perdu une grande part de sa virilité, de sa verdeur, de son pouvoir d'évocation à l'état brut. Aussi, grâce à la langue de Céline l'idée peut jaillir, bouillante, vivante, et non pas étriquée, apprivoisée, équivoque (ce qui ne m'empêche pas (surtout pas !) d'aimer passionnément le "français académique"). Mais bon, j'aime un peu trop Céline et vous ne l'aimez pas, alors...
08 juillet 2008, 22:47   Frère troispoint
Moi, comment dire... le gars Céline, quand il se lance dans le grand flot... les lames... les paquets qui s'alignent serrés l'un derrière l'autre... la toute grande bousculade, comme qui dirait la panique... tout ça haché menu... battu... servi court, souffle rauque...
Cher Pascal Orsoni,
Disons plutôt que j'ai adulé Céline, que j'étais un célinolâtre, et que j'en suis guéri... Je comprends en effet que les conditions de l'expérience, dans les premières décennies du siècle dernier, exigent une langue nouvelle (une guerre où les hommes sont pulvérisés, littéralement, on peut admettre qu'il y faut, pour en témoigner, un style atomisé). Mais très vite, cela a tourné, chez Céline, à l'idiolecte, à l'autisme, sans compter une certaine démagogie populiste, toute nue dans les pamphlets, mais encore audible dans les romans.
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 22:53   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Attention, prenez garde cher Francmoineau !, car "pour le malheur des lettres françaises, ceux qui l'ont imité sont de piêtres écrivains : ils "font du Céline." (Bruno Chaouat)
Mais c'est bien ce que j'espérais ! gagner sur les trois tableaux à la fois !
Utilisateur anonyme
08 juillet 2008, 23:05   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Presque entièrement d'accord avec votre dernier message, cher Bruno Chaouat.
Il n'est pas nécessaire de faire école, Rabelais et bien d'autres n'ont pas eu de successeurs. Au cinéma, Tati, Bresson, Resnais,etc.
Céline c'est de la musique et une vision du monde. Disons qu'il a mis la barre assez haut et que beaucoup enragent de se sentir un peu courts. Avec du temps et du travail il y aura d'autres lumières. Dites-vous, par exemple, qu'entre Racine et Chénier, un siècle, il n'y a personne.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 01:11   "Une bizarrerie sans héritiers"
Céline, selon l'hypothèse que choisit Bruno Chaouat, serait "Une bizarrerie sans héritiers". Il me semble au contraire qu'héritiers il y eût, et que trop, à ne considérer que cette affaire d'auto-fiction, pompe à livres devenue universelle et que le médecin de Meudon, dans sa rage à ne pouvoir écrire de la poésie, a mise en route, au très grand regret de certains lecteurs.

Marguerite Duras y est ensuite allée de ses phrases. A eux deux, ils ont donné naissance à une très nombreuse parentèle d'auteurs français, unie dans des postures et des styles voisins. Il y en a qui ont pris beaucoup de la mère et un peu du père, d'autres le contraire. Celle qui dans la grande famille ressemble le plus à ses deux parents, c'est Christine Angot.
Quelque chose d'autre m'irrite, chez Céline, et c'est presqu' un peu gênant de l'avouer : c'est qu'à partir des années quarante, il n'est plus traduisible. Il se condamne à un lectorat français, car je ne vois pas qu'on puisse traduire Rigodon ou Féérie, et moins encore Guignol's Band. Evidemment, je sais bien que la poésie est intraduisible, et que la prose perd toujours à la traduction. Mais là, on passe au-delà de la difficulté de traduire, ou de la perte, ou de l'affaiblissement : comme si Céline s'adressait à un lectorat français, exclusivement français, et que chez lui, contrairement aux grands écrivains, le particulier ne désirait pas rejoindre l'universel (je répète que ce n'est pas le cas du Voyage, qui a lui une certaine portée universelle qui rayonne à partir du particulier argotique français).
Et je découvre le sujet de ce blog à l'instant, mon message antédate cette découverte :

[passouline.blog.lemonde.fr]
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 09:06   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Ah, cher B. Chaouat, traduire Céline... et ce beau geste du grand Kundera : " on a appris par exemple qu’en Tchéquie, par admiration pour Céline qui y est publié chez le même éditeur que lui, Milan Kundera a renoncé à ses droits d’auteur afin que cela serve à financer une nouvelle traduction du Voyage au bout de la nuit…”
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 10:53   Re : Céline, Muray, Lévinas : pour aller plus loin...
Intéressante analyse :

"Critiques face à Céline.
Pierre-Antoine Durand

Article paru dans la revue Mauvais Temps, n°4 (avril 1999), Éditions Syllepse.

Depuis la parution du Voyage au bout de la nuit en 1932 Louis-Ferdinand Céline n’a cessé d’être un sujet de polémiques : polémiques d’abord littéraires, puis dès 1937, politiques. Personne ne peut aujourd’hui prétendre parler de Céline « comme si de rien n’était », tant il est impossible chez lui peut-être plus que chez n’importe quel écrivain de séparer son idéologie de l’esthétique où elle trouve sa place.

Sur l’antisémitisme de Céline, chacun à sa petite idée : il ne s’agit pas ici pour nous d’élaborer une nouvelle théorie sur le sujet, mais plutôt d’analyser la façon dont on attaque ou défend Céline aujourd’hui, d’analyser — plutôt que Céline lui-même — la façon dont les critiques se sont affrontés ces derniers temps à son sujet.

Ce sont deux livres parus en 1997 qui ont relancé « l’affaire Céline », engendrant de violentes réactions parmi les critiques céliniens, à travers une série d’articles, qu’il est bon d’analyser pour comprendre la complexité et les dangers de cette « question » Céline.

C’est assez légitimement que le premier d’entre eux, Céline et l’Art de son temps1 de Michel Bounan, à été attaqué, son auteur déniant à Céline le moindre talent, sinon celui du trucage et du camouflage grâce à un style qui ne serait qu’une « vulgaire machine à décerveler »2. Pour Bounan l’antisémitisme de Céline ne servirait qu’à accompagner son engagement en faveur du patronat et contre le prolétariat. Le tout expliqué en une centaine de petites pages, guère convaincante tellement le dossier est faible.

Contre Céline3 de Jean-Pierre Martin, est lui tout à fait différent, et on peut lui prêter un peu plus sérieusement attention. Il est le fruit d’une relecture de Céline et de la critique célinienne en vue d’un livre sur l’oralité dans le roman français du 20e siècle. Martin dit avoir été « stupéfait » par cette critique, coupable selon lui dans sa quasi-totalité de « célinolâtrie ». C’est d’ailleurs plus à cette critique qu’il s’attaque dans son livre qu’à Céline lui-même. Le sous-titre de son livre D’une gêne persistante à l’égard de la fascination exercée par Louis Destouches sur papier bible indique toutefois un désaccord très net de Martin sur la place qu’on accorde à Céline dans la littérature d’aujourd’hui, cette édition « sur papier bible » de la pléiade « sacralisant » en quelque sorte l’écrivain4. Ce sous-titre a pu être interprété par certains comme une attaque directe contre Henri Godard, responsable cette édition dans « La Pléiade », que Martin ne juge pourtant pas être le plus coupable des critiques céliniens.

En effet dans son livre Céline Scandale, Henri Godard multiplie les professions de foi antifascistes, et l’on sent bien qu’il veut éviter toute « récupération » de l’œuvre de Céline par l’extrême droite :

« Ne parlons pas de ceux qui le liraient par sympathie idéologique »5. On pourrait objecter à Godard qu’il faudrait justement prendre le temps d’en parler, pour les dénoncer une fois pour toutes (ce travail revenant de droit aux admirateurs et spécialistes de Céline et non à ses « détracteurs »). Mais il est vrai que les céliniens les plus dangereux ne sont peut-être pas ceux qu’on croit, ceux dont on sait clairement qu’ils sont d’extrême droite. Ainsi, Alain de Benoist et ses amis tentant depuis plusieurs années d’intégrer le milieu de la critique célinienne sans trop de succès, tellement les origines de leur intérêt pour Céline sont notoires, dans le milieu littéraire et universitaire. Mais d’autres céliniens peuvent par des maladresses, des glissements, des ambiguïtés, volontaires ou non, coupables ou non, servir l’extrême droite.

Il serait faux de dire que Henri Godard est ambigu ou coupable, mais dans sa réponse aux « anti-céliniens »6, il fait peut-être preuve de maladresse lorsqu’il cherche à expliquer que les idées de Céline « à caractère raciste », ne sont pas ses seules ni ses principales idées :

« Elles ne représentent qu’une partie très limitée de ses idées, la plus voyante, la plus scandaleuse, et aussi contre laquelle il est le plus facile de s’indigner. En réalité, quand il écrit ses romans [...] il a comme chacun de nous à tout moment mille autres idées sur mille autres sujets. 7»

Henri Godard poursuit en énumérant quelques unes de ces autres idées de Céline (sur la campagne, la banlieue, la guerre, la nature humaine, la colonisation, la justice...). Il est aisé ici de lui rétorquer que Céline n’a pas écrit de pamphlets sur la campagne, ou contre la colonisation, et que ses idées sur la nature humaine ou la justice se trouvent aussi très développées dans les pamphlets antisémites. Mais le plus important est qu’en cherchant à minimiser ainsi l’importance de la place occupée par le racisme de Céline dans ses oeuvres, Godard – sans doute sans s’en rendre compte – tend une belle perche à ceux qui voudraient bien minimiser la gravité du racisme lui-même.

Si Godard se refuse à opérer des dichotomies entre les oeuvres de Céline, on sent qu’il veut mettre les pamphlets « à part » à cause du dégoût qu’ils inspirent. Ces pamphlets n’étant plus publiés, il sent bien que le problème vient plutôt de l’antisémitisme beaucoup plus discret, des romans, qui pour n’apparaître que par endroits, n’en sont pas moins dangereux :

« Le cas est d’autant plus complexe que ces passages, allusifs, détournés, demandent à être compris à demi-mot, c’est-à-dire n’atteignent toute leur violence que pour le lecteur le plus entré dans le style de Céline. Mieux il comprend, plus il sursaute que Céline ose encore tenir des propos de ce genre.8 »

Mais ce genre de conclusion apparaît aux yeux de Martin comme un peu hâtive. Son livre est presque entièrement consacré à débusquer ces passages. Il serait faux de dire que la critique célinienne ne s’en était jamais chargée : Philippe Muray dans son Céline, y revenait déjà en effet plusieurs fois, insistant même sur le racisme qui ouvre et clôt Rigodon le dernier livre de Céline, et dont on entend généralement peu parler. Le livre de Martin, s’il n’est pas tout à fait juste avec la critique célinienne, a au moins le mérite de rappeler que l’antisémitisme n’est pas confiné aux pamphlet (de même que comme l’ont bien montré plusieurs critiques9, les pamphlets sont aussi des oeuvres littéraires, et c’est bien ce qui les rend problématiques).

Maudit, Céline ?
Céline adopte dans ses derniers livres et les lettres de la même période une posture très défensive (dont nous verrons plus loin toutes les implications) nourrie par d’incessantes plaintes sur son pauvre sort, se jugeant être une sorte de bouc émissaire, de maudit parmi les maudits de la littérature.

Céline a ainsi en partie réussi à se faire passer pour un écrivain « maudit », car à lire les réactions des critiques céliniens aux livres de Bounan et Martin, on a souvent l’impression qu’un complot existe contre Céline et son oeuvre. Philippe Muray parle ainsi « d’entreprise épuratrice » venant de « scouts du bien » engagés dans une « guerre totale »10, Stéphane Zadganski voit en Martin un « flic stalino-sainte-beuvien »11. Ces deux petits livres - même si on les trouve indignes ou médiocres - n’en méritent pas tant. Ces deux livres n’ont d’ailleurs fait que porter une fois de plus les projecteur de l’actualité sur cet auteur, et donnera ses défenseurs l’occasion de s’exprimer un peu partout. Personne ne veut censurer ou empêcher quiconque de lire Céline, les vrais tentatives de censure sont beaucoup plus discrète et efficaces.

Est-il utile de rappeler que Céline figure dans les sujets d’examens, que tous ses romans sont publiés dans la Pléiade, et que nous croulons littéralement sous les volumes de sa correspondance, qui – dans le plus grand désordre éditorial – augmente d’année en année ? Mais il reste – dira-t-on sans doute – les pamphlets antisémites. La plupart des critiques céliniens plaident en effet en faveur de leur republication – ce qui est très défendable – mais ils le font comme si une conspiration existait aujourd’hui, contre ceux-ci, et plus généralement contre la diffusion des oeuvres de Céline.

Il semble utile ici de rappeler qu’à la différence d’autres auteurs, Céline n’est pas censuré, en aucune manière, sinon par lui-même et par sa veuve qui interdit la republication des pamphlets. Sans doute devine-t-elle que leur republication lui ferait perdre quelques lecteurs. Car si tout le monde aujourd’hui sait que Céline était antisémite, peu de gens ont lu ses pamphlets et savent jusqu’à quel niveau de haine et de bêtise Céline est allé.

« Les juifs, racialement, sont des monstres, des hybrides, des loupés tiraillés qui doivent disparaître. [...] Dans l’élevage humain, ce ne sont, tout bluff à part, que bâtards gangreneux, ravageurs, pourrisseurs. Le juif n’a jamais été persécuté par les aryens. Il s’est persécuté lui-même. Il est le damné des tiraillements de sa viande d’hybride.12»

Ouvrez n’importe quelle page de L’école des cadavres, vous y trouverez la même chose, incessamment martelé.

Haine, délire et antisémitisme.
Une telle obsession à été plusieurs fois appelé « délire », appellation contre laquelle s’insurge Martin. La question du délire est très complexe, envisagée par tous de manières différentes ce qui brouille les pistes. Martin s’insurge contre l’idée que Céline « débloque ». Mais si l’idée d’un Céline fou traîne dans les esprits ici ou là, conforté par des lectures trop hâtives, personne de sérieux (à part peut-être Gide, à la sortie du premier pamphlet) n’a émis cette hypothèse. Car on peut parler de délire chez Céline sans pour autant justifier par là son antisémitisme. Ainsi Gilles Deleuze (dont on peut lire toute l’œuvre comme « une introduction à la vie non-fasciste » pour reprendre les mots de Michel Foucault) voit le style d’un auteur – et en particulier celui de Céline – comme une espèce de délire, de langue délirante creusée dans la langue, qui n’est pas spécifique à l’antisémitisme13. Si le problème du délire se pose, c’est parce que les pamphlets sont stylistiquement du pur Céline.

Pour une raison toute différente, Stéphane Zadganski lie les pamphlets à un délire, ce qui lui vaut les violentes attaques de Martin. Mais Zadganski n’affirme pas que l’antisémitisme de Céline soit un délire, mais que tout antisémitisme est délirant. Hypothèse contestable certes, mais toute différente, puisqu’elle ne cherche pas à atténuer le tort de Céline. Là où il distingue le délire de Céline des autres délires antisémites, c’est lorsqu’il le considère comme « déliriant », puisque Céline y « délire en riant ». Si — des caricatures nazies aux blagues de comptoir sur l’holocauste — l’antisémitisme s’est toujours voulu très « drôle », force est de reconnaître la « spécificité » de l’antisémitisme célinien : s’il elle n’existait pas nous n’en parlerions pas plus que celui de Rebatet ou Drieu La Rochelle. C’est aussi cette spécificité qui fait son danger.

D’autres points du livre de Zadganski sont peut-être beaucoup plus litigieux notamment lorsqu’il affirme :

« On a tort par conséquent de voir de la haine dans les pamphlets de Céline. [...] la haine surtout ne crée pas, elle rogne, elle ronronne, elle ronrogne ; c’est une passion tandis que l’écriture est action ; la haine s’exhale, elle s’exalte ; lorsqu’elle se précipite elle aboutit au meurtre, souvent, au pamphlet, parfois, mais strictement jamais à la littérature. En ce sens les pamphlets n’en sont pas réellement, ce qui est d’ailleurs assez flagrant à la lecture. Ce sont plutôt des romans déguisés en pamphlets, dont les juifs seraient le thème négatif et rhapsodisé en mille diverses variations.14 »

La conclusion de ce passage nous paraît dangereuse parce qu’elle permet presque d’appuyer certain propos de Dominique de Roux qui lui, cherchait à nier que Céline ait été antisémite, même dans les pamphlets :

« Pour Céline, le mot juif n’a pas son sens habituel, il ne désigne pas un groupe ethnique ou religieux particulier : la preuve est que sous ce vocable il aurait pu loger tous les hommes. 15»

Le but est tout différent chez Zadganski, dont le livre est tout imprégné de la pensée de Lévinas, mais il intéressant de voir comme les passerelles entre d’une part, une problématique aux réponses complexes (la haine peut-elle aboutir à la création plutôt qu’à la destruction ?) et d’autre part, une négation inacceptable (qui en rappelle d’autres), sont facile à établir, d’où la prudence extrême à laquelle doit se contraindre le critique de Céline. Des précautions, il faut pourtant bien avouer que Zadganski en prend, même lorsqu’il développe des idées on ne peut plus contestable, notamment nous allons le voir, à propos du « révisionnisme » de Céline.

Immunité des romans révisionnistes.
La qualité principale du livre de Martin est de montrer dans ces romans de l’après-guerre - plutôt que l’antisémitisme de Céline qu’après tout, tout le monde soupçonne - le révisionnisme auquel il est lié. Il s’insurge contre la vision d’un Céline qui serait celui qui ait le mieux raconté son siècle. Sur ce sujet, dans sa réponse à Martin, il faut bien avouer que Godard n’est pas très convaincant. Il nie que sa vision de l’Histoire pose un réel problème.

« Avec lui la littérature parvient à se saisir de ce qui semblait devoir lui échapper, à commencer par les bombardement [...] Il est vrai que le bombardement auquel il consacre trois cents pages dans Féerie II était un bombardement allié [...] Mais quel lecteur ne sait d’avance, comme on a tant dit, « d’où parle » Céline ?16»

Pourquoi pouvons-nous parler sans exagérer de « révisionnisme » ? N’est-ce pas là une exagération rhétorique ? Si Céline choisit de décrire les horreurs des bombardement alliés dans Féerie pour autre fois II, ce n’est évidemment pas innocent : mais ces bombardements étaient bien réels. De même, Céline a sans doute des choses à nous apprendre sur ce qu’à été la fuite du gouvernement de Vichy à Sigmaringen, puisqu’il l’a accompagné. De là à dire comme Philippe Sollers que nulle part ailleurs on ne peut en avoir « une idée plus vraie »17, il y a un fossé qu’il faudrait s’abstenir de franchir. D’autant que dans le récit de cette fuite se glissent des passages qui illustrent bien la « vision de l’Histoire » de Céline :

« La haine des allemands, soit dit en passant, s’est surtout vraiment exercée contre les collaborateurs, pas tellement contre les juifs, qu’étaient si forts à Londres, New-york... [...] Je vous le dis : Nuremberg est à refaire !... »18

Certains diront peut-être qu’il s’agit là du « rire de Céline », mais force est de reconnaître là un humour un peu lourd. Dans ce genre de passages Céline se défend, il plaide, essaye de justifier son attitude injustifiable pendant la guerre, joue au persécuté, à la victime, lui qui a fuit avec les bourreaux.

Il faut citer sur cette question du révisionnisme l’analyse de Zadganski, et la citer longuement, car cette position est plus complexe et argumentée que ne peuvent le faire penser les passages tronqués que cite Martin :

« Du point de vue de l’impureté littéraire (le seul qui convienne à un écrivain), l’ épuration en effet vaut la collaboration ; tondre une femme en public pour le crime d’avoir joui en privé avec l’ennemi, quand toute la communauté vient de jouir idéologiquement quatre année d’affilée avec ce même ennemi, cela correspond éthiquement parlant, à tondre un juif, lui tatouer un numéro et l’habiller en pyjama, pour ôter toute carnation inconvertible à cette « ethnie » qui a osé faire s’incarner le verbe...

Cela ne signifie pas qu’Uranus et Se questo è un uomo de Primo Levi traitent d’une même chose, mais que si l’éthique consiste en un sens à peser le moindre à la balance du pire (le révisionnisme fonctionne précisément selon une logique inverse, qui entend ramener le pire au moindre), alors ces événements sont éthiquement comparables. »

On sent bien ce que cette vision de l’éthique doit à Lévinas, mais elle devrait mener Zadganski à la conclusion inverse, le révisionnisme tel qu’il le définit ici étant à notre sens très exactement celui qu’on peut reprocher à Céline dans ses romans, où il cherche à amoindrir les souffrances du peuple juif, en les « comparant » aux siennes19 à amoindrir les crimes des nazis en insistant sur la violence des épurateurs, où d’autres crimes de l’Histoire. Ainsi à propos de l’extermination des Tziganes par les nazis :

« Une gitane... gitane ça je ne m’attendais pas... cette gitane venait d’où ?... les gitans devaient être supprimés d’après les décrets de Nuremberg ?... hautement contaminateurs !... crypto-asiates !... une tzigane libre et jacassante ? autant dire la guerre inutile !... l’Ordre d’Hitler, ne l’oublions pas, était tout aussi raciste que celui des noirs du Mali ou des jaunes de Hankéou...20»

Céline pèse-t-il ici le moindre à la balance du pire ? Tout le problème vient en fait de ce point de vue de « l’impureté littéraire, le seul, dit Zadganski, qui convienne à un écrivain ». Zadganski parait opérer ici une rupture entre l’écrivain, et le commun des mortels, distinguer en quelque sorte une éthique spécifique à la littérature. De même Philippe Muray plaide pour qu’on envisage les oeuvres littéraires comme « autonomes, indépendantes du contexte historique ou de certaines croyances en places.21 » C’est aussi ce que fait Henri Godard lorsqu’il distingue la morale et la littérature, donnant ainsi aux romans une sorte d’immunité littéraire. Mais cette distinction tient-elle une seconde lorsqu’un écrivain écrit dans un pamphlet « le juif doit disparaître »22, au moment même où un régime a très concrètement programmé cette « disparition » ? Peut-on dire que littérature et politique n’ont rien à voir lorsque que vingt ans après le même écrivain nous explique dans un roman que les allemands ne s’en sont finalement « pas tellement » pris aux juifs « qu’étaient si fort à Londres » ? Rappelons la définition de l’art que Céline donne dans Les Beaux Draps :

« L’art ne connaît point de patrie ! Quelle sottise ! Quel mensonge Quelle hérésie ! Quel dicton juif ! L’art n’est que Race et Patrie23 »

Comment apprécier la pureté d’un art qui ne serait que « race et patrie » ? Les romans de Céline - en particulier la trilogie où il raconte sa fuite et son emprisonnement - sont très politiques, ce qu’a sans doute un peu maladroitement essayé de montrer Martin dans son livre. Mais c’est ce que démontre beaucoup plus efficacement Philip Watts dans un article intitulé « Céline et le discours révisionniste »24, où il montre comment le discours de Céline reprend de nombreux points des argumentations des historiens négationnistes de l’après-guerre Maurice Bardèche et Paul Rassinier, qu’il a lu. Citons son propre commentaire du livre de Rassinier :

« Son livre admirable va faire gd [sic] bruit – quand même il tend à faire douter de la magique chambre à gaz ! Ça permettait tout !25 »

Ce genre d’aveux, fait – malheureusement pour les critiques céliniens – qu’on ne pourra jamais lire Céline comme si ses positions politiques étaient tolérables. Même pour ceux pour qui la littérature est « autonome », le cas Céline sera toujours embarrassant, et le citer en exemple ne sera jamais innocent26.

Sous les verrous de la critique.
Il y a un effet de verrouillage pratiqué par la critique célinienne dans son ensemble, qui fait qu’il est reproché à quiconque de parler de Céline, si ce n’est pas pour faire son apologie. Si tous les critiques admettent les problèmes posés par son oeuvre, et s’ils se vantent de ne pas vouloir « convertir » quiconque à Céline, ils ne veulent pas en entendre parler ailleurs qu’à l’intérieur d’un livre défendant Céline : si l’on n’aime pas Céline, on ne le lit pas, on en parle pas.

Mais il faut admettre cette spécificité célinienne : il ne s’agit pas d’attaquer ou de défendre cette oeuvre, mais de s’intéresser à une question à laquelle chacun essaye de répondre : comment une écriture novatrice, révolutionnaire même, peut véhiculer une idéologie réactionnaire et raciste ? Il semble que les querelles entre les critiques céliniens viennent essentiellement de ce que les uns reprochent aux autres de seulement s’intéresser à un des deux termes de cette question. Ne parlons pas du livre de Michel Bounan qui échafaude toute une théorie à partir de deux citations. Mais le livre de Jean-Pierre Martin méritait sans doute un peu mieux que les insultes que lui ont lancé Zadganski et surtout Philippe Muray. Muray pourtant, dans son livre sur Céline – s’il omettait comme les autres la question du révisionnisme – était un de ceux qui n’éludaient pas celle de l’antisémitisme et qui posait même très bien les deux erreurs commises par tant de ses collègues :

« La première consiste à se borner à une dénonciation - parfaitement nécessaire bien sûr - en négligeant ce qui a pu se passer en même temps dans la langue. La seconde, à faire l’économie du contenu de ses énoncés pour ne voir ses ébranlements formels que comme novation radicale sur la route progressiste de la révolution de la langue. Attitude qui permet d’adhérer en même temps sans le dire à une grande partie de ce qu’il faut bien appeler son « message »27. »

Il est sidérant de voir comment aujourd’hui, au lieu de répondre aux arguments de Martin, ce dont il semble avoir les moyens, Philippe Muray se lance dans plusieurs pages d’insultes et de pseudo-révolte contre une « civilisation » apparemment décadente dont Martin et Bounan – que dans son fantasme idéologique il ne cherche pas à distinguer – seraient les parfaits représentants.

« Ces littérateurs vont si bien ensemble que je les évoquerai comme ils m’apparaissent, à la façon de duettistes venant pousser leur chansonnette sur le théâtre des Droits de l’homme, où ne cessent d’être jugés et refuges les forfaits du passé, et le passé en tant que forfait.28 »

Pendant longtemps, il était impossible de lire Céline sans être soupçonné de fascisme, et sans doute a-t-on jusqu’à ces dernières année appelé « fasciste » ou même de « réactionnaire » à peu près n’importe quoi, faisant perdre à ces mots une partie de leur sens, (fournissant ainsi l’aide la plus efficace possible aux « vrais » fascistes). Mais les temps sont de ce point vue en train de changer, puisqu’il devient impossible de dire d’une idée qu’elle est réactionnaire sans être soupçonné de gauchisme aveugle, sans qu’on évoque29, les procès de Moscou, voire l’inquisition.

Nous devons à cet endroit recadrer notre commentaire dans le contexte littéraire actuel. On a pu constater ces dernières années une prolifération d’auteurs se voulant les pourfendeurs d’une pensée prétendue « unique » et tenir à l’instar de Muray un discours plutôt réactionnaire. Le succès du dernier d’entre eux (Houellebecq) aurait du révéler au grand jour un net retour des idées « bien à droite » dans la littérature contemporaine. Il semble que l’inverse se soit produit. Ces auteurs, et les journaux et les éditeurs qui les soutiennent mettent en place des effets de verrouillage comparables à ceux qu’on peut constater autour de Céline : ils annoncent le plus souvent ouvertement que leur unique dessein est d’énerver par leurs livres la gauche dite « bien-pensante ». Ainsi toute contestation de la qualité et de l’intérêt de leurs oeuvres sera désormais interprétée comme une réaction conservatrice bien-pensante, preuve d’une adhésion à la désormais mythique « pensée unique ».

Lorsqu’ils défendent Céline, Muray et Zadganski procèdent tous les deux la même manière à des échelles diverses.

Au moins, Zadganski dans sa réponse au livre de Martin, parue dans l’Infini ne se contente-t-il pas de dénoncer la pensée « politiquement-correcte » du « flic stalino-sainte-beuvien » Martin (auquel il assimile soi dit en passant tout le corps professoral30). Il répond sur le fond, rappelle ses influences, sa thèse... Mais pourquoi insiste-t-il si lourdement sur son nom de « Martin », prétendue preuve de son insignifiance ? Que viennent dans le débat les « hilarants tics nerveux » de Martin ? Si l’on voit bien que son texte cherche à tout prix à être hilarant, on peut déplorer – même si cela parait trop « politiquement-correct » aux yeux de certains – son caractère insultant. D’autant que lorsque Stéphane Zadganski s’adresse aux Temps Modernes qui l’ont mis en cause31, le ton est tout autre, plus posé et plus efficace. Dans l’Infini une phrase suffit à Zadganski pour discréditer sa très légitime volonté de se défendre :

« Il est temps d’expliquer ce qui sous-tend le despotisme bon teint appliqué à la langue qu’on a appelé politiquement correct. Il s’agit ni plus ni moins d’un racisme inconscient déchaîné et garrotté dans une camisole de bons sentiments32 ».

Conclusion puissante, il est vrai, d’habitude réservée aux cours d’écoles maternelles sous la forme : « c’est celui qui dit qui y est ».

Chez Muray le dénigrement du nom « Martin » tourne à l’obsession. Il enchaîne les jeux de mots douteux sur ce « Martin-précheur » et son « martinet », le tout au service d’une grande théorie qui voit la décadence de la civilisation un peu partout, et en particulier dans tout ce qui est collectif. On a l’impression de se trouver face à cette haine du « grouillement » que Muray avait si bien analysé chez Céline, vingt ans auparavant. Muray commence en effet son article par près de trois pages contre la Gay Pride, dont on cherche en vain le rapport avec Céline. Mais tous les prétextes sont bons de la part de Muray pour se déchaîner sur cette civilisation moderne qu’il exècre, et dont Muray et Bounan seraient selon lui les gardiens, les « agents d’entretien ». Pour le lecteur de son seul Céline, il y a de quoi tomber des nues. Pour celui qui connaît les pages que Muray signe régulièrement dans la Revue des Deux Mondes ou L’Atelier du Roman, il n’y a là qu’un procédé, que ce monsieur applique systématiquement à tout ce qu’il déteste. Si vous n’êtes pas d’accord, vous ne serez que des petits flics du politically correct.

Les critiques de Céline sont loins d’être tous « célinolâtres », comme l’écrit Martin, mais force est de reconnaître la propension qu’ont ces « experts » à rejeter tout ce qui parle de Céline sans faire allégeance à son « génie ». Ceci contribue à scléroser les discussions autour de son œuvre, et à servir ceux dont l’intérêt pour Céline se limite à son idéologie. La pratique de l’amalgame, et les attaques contre la prétendue décadence d’une civilisation, gardée par de prétendus « flics-staliniens » au service d’une « pensée unique », sont en effet autant d’outils régulièrement utilisés par l’extrême droite pour semer le flou dans les esprits.

Notes
1 Céline et l’Art de son temps, Paris, Allia, 1997, 3e édition corrigée et augmentée 1998, 131 pages.
2 Ibid., p. 130.
3 Contre Céline, Paris, José Corti, 1997, 186 pages.
4 Il y a d’ailleurs dans « La Pléiade » des choix de publication nettement plus contestables que celui des romans de Céline, par exemple, de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, (in Œuvres 1. Paris, Gallimard « La Pléiade »).
5 Henri Godard, Céline Scandale (1995), Paris, Gallimard, rééd. 1997 (augmentée), « Folio », p. 19.
6 D’abord publiée dans le numéro 60 de L’Infini, il s’agit de la postface de Céline Scandale, édition augmentée, Paris, Gallimard, « Folio », 1998, p. 163.
7 Henri Godard, op.cit., p. 163.
8 Ibid., p. 86-87.
9 Notamment Philippe Muray et Stéphane Zadganski, dont il sera question ici. On peut aussi consulter sur ce point « Un théoricien de la littérature » de Pierre-Edmond Robert, Magazine Littéraire, n°282, octobre 1991, p. 41-43.
10 « On purge bébé, examen d’une campagne anti-célinienne », L’Atelier du Roman, n°12, automne 1997, Éditions Les belles lettres, p. 143.
11 « Suite et fin du professeur Y », L’Infini, n°63, automne 1998, Éditions Gallimard, p. 111.
12 L’Ecole des cadavres, Paris, Denoël, 1938, p. 108.
13 Cf. Gilles Deleuze, Critique et Clinique, Paris, Éditions de Minuit, 1993, p. 9.
14 Céline Seul, Paris, Gallimard, coll. « L’infini », 1992, p. 58.
15 Dominique de Roux, La mort de Céline, Paris, Uge, « 10/18 », 1966, p. 81.
16 Henri Godard, op.cit. p. 170-171.
17 Le Débat, mai-août 1996.
18 D’un château l’autre (1957), Paris, Gallimard, rééd. « Folio », 1980, p. 165.
19 Par exemple ce passage D’un château l’autre où Céline se plaint de n’avoir pas vu le même accueil réservé à la gare aux rescapés des camps de la mort et aux collaborateurs exilés.
20 Nord, in Romans 2 (1974), Paris, Gallimard, « La Pléiade », 1990, p. 488.
21 Philippe Muray, art. cit., p. 148.
22 L’école des cadavres, op. cit., p. 109, mais la phrase est répétée un peu partout.
23 Les Beaux Draps, Paris, Nouvelles Éditions Françaises, 1941, p. 177.
24 Article extrait de Allegories of the Purge, Stanford University Press, 1998, publié dans Esprit, août-septembre 1998, n°245, p. 7-22.
25 « Lettre à Albert Paraz », Cahier Céline 6, Paris, Gallimard, 1980, p. 276, cité par Philip Watts, op. cit., p. 10.
26 Ainsi, si certains ont cru bon d’évoquer Céline à propos du deuxième roman de Michel Houellebecq, ce n’est pas à cause de son style, ou de ses références, mais bien à cause des positions réactionnaires de son auteur. C’est d’autant plus révélateur qu’il s’agit là de défenseurs de Houellebecq et non de ses détracteurs.
27 Philippe Muray, Céline, Paris, Seuil 1981, rééd. Denoël-Médiation, 1984, p. 166.
28 Philippe Muray, « On purge bébé... », op. cit., p. 146.
29 La revue Perpendiculaire a d’ailleurs récemment fait les frais de ce procédé.
30 Faut-il lui rappeler que Julia Kristeva, présente au sommaire du même numéro de L’Infini, et Henri Godard, qui a répondu à Martin dans un numéro précédent, sont tous deux d’éminents professeurs de l’Université ?
31 Cf. Bernard Simeone « Petite musique de l’infamie », Les Temps Modernes, n°597, janvier-fevrier 1998 et la réponse de Stéphane Zadganski, Les Temps Modernes, n°600, juillet-août-septembre 1998.
32 « Suite et fin du professeur Y », L’Infini, n°63, automne 1998, p. 113.
Le "Céline" de Philippe Muray est très bon. La crétinisation massive fait de gros dégats mais ne peut rien contre les génies.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 14:38   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Céline + Muray : Florentin, vous voulez vraiment nous achever Corto d'une bonne crise cardiaque ?
Au contraire, je souhaite du plaisir à tout le monde, ou presque, et j'insiste dans ce sens.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 15:06   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Corto ? Il n'est plus que l'ombre d'Alexis...
Allez, je vais creuser ma tombe : je suis en train de lire "Désaccord parfait". Philippe Muray est tellement homophobe qu'il en a des hallucinations herméneutiques : pour lui, un bon romancier (c'est toujours Balzac, car le roman commence et s'arrête à Balzac, pour Muray), c'est un type qui est très sûr de la différence sexuelle. Pas d'ambiguité : un homme est un homme, une femme est une femme, point barre. Et Sarrazine ? Et les hommes-femmes de Proust ? Non, vraiment, je crois que Muray est surestimé. Il est amusant, mais comme Pierre Desproges ou Alphonse Allais. Pourquoi veut-on qu'il soit plus profond que ces humoristes ?
La maladie l'a tué d'autant plus rapidement qu'il était dénutri.

La maladie l'a tué rapidement d'autant qu'il était dénutri.

Les puits de science que sont Francis et JGL, voient-ils une différence de sens entre ces deux phrases ?

Je n'arrive pas à trancher d'autant que plus je réfléchis moins j'y vois clair.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 16:00   Tranches fines et plus si
« Je n'arrive pas à trancher d'autant que plus je réfléchis moins j'y vois clair. »

Cassandre, nous sommes dans le même cas de figure, tous les deux. (On pose une petite question toute bête et on se retrouve avec deux sommes écrites par deux auteurs difficiles.) Et comme en plus nous aimons Philippe Muray, je me demande si l'on ne ferait pas mieux d'en finir tout de suite, d'autant qu'il fait chaud.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 16:16   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"Muray est surestimé. Il est amusant, mais comme Pierre Desproges ou Alphonse Allais. Pourquoi veut-on qu'il soit plus profond que ces humoristes ?"


Mais où est donc passé le Chaouat bathmologue... ?
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 16:21   A se tordre
"Muray est surestimé. Il est amusant, mais comme Pierre Desproges ou Alphonse Allais."

Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je remplacerai Alphonse Allais par Frédéric Dard.
Monsieur Orsoni,
Vous avez raison de me houspiller. Il me faut admettre là encore que je suis séduit par Muray et que j'écris là, un peu, "quelque part", contre la séduction qu'il exerce sur moi depuis quelques années. Mais c'est Muray lui-même qui se réfère à Desproges comme à un grand penseur (dans "Moderne contre moderne", je crois). Et je ne crois pas qu'il s'agisse d'ironie ou de second degré. De plus, l'essai "L'Empire du Bien" est mal fichu, mal écrit, bourré de coquilles, et manifeste une pathétique imitation de Céline, justement.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 16:24   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Moi, cher Orimont, c'est surtout Muray que je remplacerai... !
La maladie l'a tué d'autant plus rapidement qu'il était dénutri.
La maladie l'a tué rapidement d'autant qu'il était dénutri.

Chère Cassandre, je ne suis pas un puits, encore moins "de science", mais je vois une nuance entre ces deux phrases - certes ce n'est qu'une nuance entre deux expressions de la cause (l'énoncé du fait : "il est mort" est suivi de l'expression de la cause : il était mal nourri : on peut gloser le lien entre les deux phrases par "car" ou "parce que"), mais elle existe bel et bien. Je vais essayer de vous répondre.

Dans la première phrase, outre la cause que nous inférons, est exprimée une relation un peu subtile, que j'ai nommée "de proportionnalité" (si je l'ai nommée, fût-ce de façon approximative, c'est que je pense qu'il faut nommer les choses avant d'en débattre ou d'en faire une analyse) et qui consiste à établir un lien entre la rapidité avec laquelle la mort survient et l'état de dénutrition du sujet ou entre la rapidité du fait et l'intensité de la dénutrition. La rapidité de la mort est proportionnelle à la gravité de l'état de dénutrition. Autrement dit, à l'expression (implicite) de la cause (comme nous avons une expérience du monde, nous savons que la dénutrition est une cause possible de mort), une "proportion" est établie entre les qualités (rapidité d'une part, gravité ou intensité d'autre part) qui touchent deux phénomènes : mort et dénutrition.
Objectivement, dans la réalité des choses, avant toute expression du phénomène par la langue, c'est une relation que nous constatons ou que nous établissons. Qu'elle soit scientifiquement ou non aventurée importe peu.

En revanche, dans la seconde phrase, la relation entre la rapidité de la mort et l'intensité de la dénutrition n'est pas exprimée : elle n'est pas dite explicitement. Une cause est avancée pour expliquer la mort rapide : la dénutrition.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 16:33   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
(Si, si, un puits de science...)
Chère Cassandre,

Comme il est toujours plus aisé d'intervenir avant JGL qu'après lui dans ces débats, je m'empresse de le faire avant d'avoir lu son intervention pour me réserver d'y répondre éventuellement dans un second temps si je m'en vois capable et si M. Francmoineau n'y voit pas d'inconvénient:

(A) La maladie l'a tué d'autant plus rapidement qu'il était dénutri.

(B) La maladie l'a tué rapidement d'autant qu'il était dénutri.

Si je devais vous dire la différence de sens perceptible à mes yeux: il n'y en a aucune, si ce n'est que l'analyse révèle qu'en A) le "plus" modifie "rapidement", qui n'est pas modifié ainsi en B) car vous n'écrivez pas "la maladie la tué plus rapidement"; vous auriez pu écrire: "la maladie l'a tué plus rapidement qu'il était dénutri". Or vous ne le faites pas.

Les deux phrases sont faussement dissemblables. Des phrases dissemblables au sens que "d'autant que" et "d'autant plus que" peuvent être considérées comme dissemblables, seraient

A') la maladie l'a tué d'autant plus qu'il était dénutri
et
B') la maladie l'a tué d'autant qu'il était dénutri.

Comme vous le voyez, ayant nettoyé la phrase de l'adverbe "rapidement" qui faisait écran, nous retombons sur le cas que je vous exposais tantôt:

A') = la dénutrition est cause indirecte, partielle, facteur aggravant de la maladie ayant entraîné la mort

B') me pose problème. Elle ne fait pas sens: la maladie ayant été cause du trépas, ainsi qu'il est dit d'emblée, lequel est par définition absolu (une porte doit être ouverte ou fermée) on voit mal ce que la dénutrition vient fiche la-dedans si rien n'est dit de son rôle relatif. Un "autant que" sec paraît absurde ici puisque la cause de la mort est donnée en la maladie. Remplaçons "d'autant que" par "car de surcroît" et l'absurdité se révèle plus crûment encore puisque la maladie l'a déjà tué.

Ce qu'il faudrait dire, c'est qu'en sortant de la phrase, en gagnant la lexie de Barthes, nous nous libérerions de ces arguties absurdes qui échauffent les yeux et inquiètent un Francmoineau par exemple. Mais je vous soupçonne de savoir tout ça mieux que nous Cassandre et de vous en amuser autant que moi.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 18:03   Re : Inventaire nauséabond
"Philippe Muray est tellement homophobe qu'il en a des hallucinations herméneutiques" .
Donc un homophobe délirant, un antisémite délirant.
On a les idoles qu'on mérite.
C'est Alexis qui a raison.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 18:10   Re : Inventaire nauséabond
Il est extrêmement décevant de lire ça ici.
Mais "homophobe" ne portait absolument pas le moindre pathos d'indignation ou de moraline. C'est une constatation : il est dommage que son préjugé sur l'homosexualité, voire sur une certaine indécidabilité sexuelle, aveugle un tel bibliophage, qui proclame son amour de la littérature, et qui n'aura été capable que de velléité littéraire (ses romans... mieux vaut n'en pas parler). C'est tout simplement une évidence, que le sens critique, l'acuité de lecteur, de Muray est émoussée, affaiblie par sa hantise d'une société dévirilisée et maternolâtre : Muray prétend(ait) en remontrer à ses ignorants de contemporains, à brocarder leurs préjugés, et chacune de ses pages en est truffée.
La velléité littéraire ne disqualifie pas forcément ceux qu'elle frappe, Monsieur Chaouat; après tout, un Barthes n'en était-il pas lui aussi atteint, par exemple ?
Velléité mélancolique pour Barthes, sarcastique pour Muray... Je préfère celle-là à celle-ci.
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 19:47   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Préjugés, ah bon, préjugés…
Utilisateur anonyme
09 juillet 2008, 21:11   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
"Il est extrêmement décevant de lire ça ici."

Non, ça n'est pas décevant c'est seulement du Corto...
Et si on reparlait de Gouguenheim ?
Utilisateur anonyme
10 juillet 2008, 09:45   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Ah bon, pas assez intéressant, le sujet : Céline, Gide et de l'antisémitisme, Muray et l'homophobie ?
Gouguenheim s'explique

par Marc Riglet
Lire, juillet 2008




Dans Aristote au Mont-Saint-Michel, l'historien remet en cause l'idée selon laquelle le Moyen Age renoua avec la pensée grecque grâce à l'Islam. Son essai a suscité de vives critiques. Il y répond.

Où en êtes-vous de votre situation personnelle?
Sylvain Gouguenheim. La situation est difficile lorsqu'on se trouve être l'objet d'une médiatisation qu'on n'a pas cherchée. Médiatisation parfois élogieuse mais aussi excessivement négative puisque, comme vous le savez, elle a pris la forme de pétitions hostiles, ad hominem, ce qui ne me paraît pas relever du mode normal de la discussion scientifique. Il y a des choses plus faciles à vivre. Mon avenir professionnel prend la forme d'un point d'interrogation. Mon directeur a réuni un comité d'experts pour évaluer le contenu scientifique de mon livre. A la lumière de son rapport, il déterminera ce qu'il convient de faire. Heureusement que l'on se découvre, dans cette adversité, autant d'amis que d'ennemis. Donc, ça équilibre.

Quel est votre grade dans l'Université?
S.G. Je suis agrégé d'histoire. J'ai été dix ans professeur en collège et en lycée, puis je suis devenu maître de conférences à l'université de Paris-I durant onze ans, avant d'être élu comme professeur des universités à l'ENS-LSH de Lyon, il y a quatre ans.

Vous n'êtes pas normalien. Cela vous pose-t-il des problèmes?
S.G. Je ne suis pas normalien, en effet, ce qui est assez rare dans le corps professoral d'une grande école. Sans doute aux yeux de certains n'ai-je pas de légitimité à être où je suis; mais j'ai aussi au sein de cette école le soutien de plusieurs collègues, particulièrement appréciable en ce moment, ainsi que de nombreux étudiants.

Que vous inspire la liste de ceux qui ont signé la pétition contre vous?
S.G. Vu la vitesse à laquelle les deux pétitions ont été diffusées et les signatures recueillies, je ne suis pas sûr que tous les signataires aient eu le temps de lire le livre. Certains se le sont même procuré après coup auprès de mon éditeur! Par ailleurs, la grande majorité des pétitionnaires ne peuvent pas prétendre être spécialistes du sujet, ni même du Moyen Age.

Comment expliquez-vous cette sorte de coalition hostile?
S.G. Le livre remet en cause une vulgate. Dés qu'on parle de l'identité de l'Europe ou de l'Islam, même au Moyen Age, et qu'on exprime des remarques non conformes à l'air du temps, on s'expose à la polémique. Cela, c'est un élément d'ordre idéologique. Il y a, ensuite, les éléments personnels dont nous avons parlé. Et puis il y a, sans doute, des phénomènes d'enjeu de pouvoir qui n'épargnent pas les mondes académiques. Il n'a échappé à personne qu'en attaquant mon livre, on attaquait dans le même mouvement la directrice de la collection du Seuil où il est publié. Il faut savoir que pour certains historiens le fait que la prestigieuse collection de L'Univers historique soit dirigée par une philosophe est jugé insupportable (à une époque où l'on fait l'éloge de l'interdisciplinarité...). Ceux-là oublient qu'être éditrice, c'est un métier! Ajoutez-y le ressentiment qui peut naître d'un manuscrit refusé et vous avez les ingrédients ordinaires du règlement de comptes.

Si l'on aborde le fond de votre ouvrage, Aristote au Mont-Saint-Michel, peut-on dire que vous soutenez les deux thèses suivantes: premièrement, la transmission du savoir grec en Occident ne doit rien ou peu à l'Islam et, deuxièmement, l'Islam des Lumières est largement un mythe?
S.G. Sur la première thèse, je serai nuancé. D'abord, je précise que je m'adresse au grand public et non à des spécialistes car ce sont des éléments connus que je produis. Ensuite, l'idée répandue qu'entre le VIIIe et le XIIe siècle les Occidentaux n'avaient guère connaissance du savoir grec et qu'ils n'y ont eu accès que par un unique canal de transmission, l' «intermédiaire arabe», cette idée mérite d'être amendée. Sans rien inventer - car encore une fois je m'appuie sur de nombreux travaux -, je fais valoir que la filière directe de traduction des textes du savoir grec (philosophie, mathématique, physique) a été plus précoce qu'on ne le dit. En sous-évaluant cette filière directe, on surévalue l'autre et mon propos est de rééquilibrer les choses, non de promouvoir un «choc des civilisations»!

Quelqu'un comme Rémi Brague ne dit pas autre chose. J'ai noté dans son Au moyen du Moyen Age cette formule: «La Renaissance intellectuelle européenne est antérieure aux traductions de l'arabe. Celles-ci n'en sont pas la cause mais l'effet.»
S.G. En effet, la chronologie est importante. Les traductions d'Antioche ou du Mont-Saint-Michel sont réalisées avant celles de Tolède. Vu de loin, il est vrai que c'est, en gros, la même période. Mais il y a environ cinquante ans d'écart: c'est bien «avant» et non pas «après». Plus largement, et même si, comme historien, je dois me garder des métaphores, je suis sensible à cette idée de Rémi Brague selon laquelle les Européens auraient eu «soif» de retrouver la Grèce.

Vous avez lu Rémi Brague mais aussi... René Marchand, ce dont vos accusateurs vous font grief. Vous conviendrez qu'avec ces deux auteurs on ne se situe pas au même niveau d'exigence intellectuelle. Pourquoi des références si disparates?
S.G. D'abord, la référence à René Marchand c'est «une» référence sur... deux cent soixante-quinze. On me l'a en effet reprochée et je m'en suis expliqué. J'ai rencontré René Marchand car ses compétences en philologie arabe m'avaient intéressé. Nous avons eu des échanges sur des questions de traduction. J'ai tiré de son livre Mahomet, contre-enquête une phrase qui rappelait les travaux sur l'hagiographie médiévale auxquels j'avais collaboré, et qui me paraissait scientifiquement pertinente.

Au fond, vous estimez que l'Islam est moins lumineux qu'on ne le dit, tandis que le Moyen Age occidental serait moins obscur qu'on ne le croit.
S.G. Il faut cesser de mépriser le Moyen Age, en effet. Ce qui me gêne dans l'expression «Islam des Lumières», c'est que, pour le grand public du moins, elle fait penser aux Lumières du XVIIIe siècle. Or, cette analogie est anachronique. Car, s'il y a indiscutablement des sciences arabes et si le savoir grec traduit dans le monde islamique prend toute sa part dans leur éclosion, on ne trouve pas, jusqu'à plus ample informé, dans la pensée médiévale arabo-musulmane de critique rationaliste, voire athée de la religion, qui est un signe distinctif des Lumières et qui se formulera d'ailleurs six siècles plus tard.

Une des figures de cette mythologie de l' «Islam des Lumières» est la fameuse «Maison de la Sagesse», aux IXe et Xe siècles, où, si l'on en croit certains auteurs contemporains dont Mohammed Arkoun que vous citez, les trois religions monothéistes auraient su cohabiter dans une harmonie exemplaire.
S.G. C'est une idée à laquelle j'ai longtemps cru. Je l'ai même enseignée. Au sujet de cette fameuse «Maison de la Sagesse», on trouve deux thèses contradictoires. Pour certains, les califes de Bagdad auraient réuni des lettrés des trois religions dans un esprit de dialogue religieux et de recherche scientifique. Pour d'autres, c'est une fiction: ce qui était discuté dans cette Maison, c'était la grande affaire de l'Islam en cette période, celle ouverte avec le mutazilisme qui soutenait que le Coran n'était pas «incréé». C'était une querelle théologique spécifique à l'Islam à laquelle les autres religions n'ont pris aucune part.

Pourquoi est-ce si important du point de vue de l'histoire des civilisations de pouvoir accéder aux oeuvres d'Aristote?
S.G. Ce fut, momentanément, important pour la réflexion métaphysique et scientifique. Comprenons-nous bien: j'en fais un critère de distinction, non de supériorité. L'Inde ou la Chine n'ont jamais été hellénisées et nul n'envisage de contester leur grandeur. Par ailleurs, je dis dans ma conclusion que, heureusement, nous n'en sommes pas restés à Aristote. Il n'y aurait pas eu de sciences modernes si on n'en était pas sorti. Donc la question de la traduction en latin d'Aristote est celle, toute simple, des conditions d'accès au savoir grec jusqu'au XIIe siècle. Ni plus ni moins.

Pourquoi diable évoquez-vous en annexe de votre livre la personne de Sigrid Hunke dont les premiers travaux se placent sous le signe du national-socialisme et qui, après guerre, va se faire une spécialité d'apologiste de l'Islam?
S.G. Je n'ai jamais dit que Sigrid Hunke était un auteur considéré comme sérieux par les islamologues et je ne confonds pas ses élucubrations avec leurs travaux. Je voulais simplement attirer l'attention sur le fait que son livre, toujours réédité, est abondamment cité dans des ouvrages de vulgarisation, et qu'on a là un spécimen de littérature antichrétienne dont les musulmans raisonnables et éclairés se passeraient bien.

Qu'en est-il de votre présence sur le site Internet Occidentalis classé à l'extrême droite?
S.G. J'ai eu, au cours de l'écriture de mon livre, l'occasion d'en transmettre des éléments à plusieurs correspondants. L'un d'entre eux les a-t-il communiqués à d'autres personnes qui, elles, les auraient adressés au site en question? Je n'en sais rien. Quant à moi, il est évident que je n'avais aucun intérêt à faire ça. Quand on m'a appris la présence sur ce site de textes qui m'étaient attribués, j'ai pris conseil sur le parti à adopter. J'ai finalement choisi de demander au directeur du site de les enlever, ce qu'il a fait. Mes adversaires ont alors vu dans cette opération la marque d'une complicité! Vous voyez, ma situation est simple: présent sur le site, je suis coupable; absent, je suis de mèche!

Que répondez-vous à ceux qui mettent en cause votre compétence?
S.G. Que nous sommes dans un pays libre, et que j'ai le droit de faire un livre de vulgarisation. Je suis spécialiste du Moyen Age. Certes, ma spécialité c'est l'histoire du christianisme, des ordres militaires, et non l'Islam abbasside ou la philosophie. Mais j'ai travaillé sur les XIe et XIIe siècles, fait des cours sur la renaissance carolingienne, publié un livre sur l'an mil et un autre sur une abbesse savante du XIIe siècle. Cette période ne m'est pas étrangère. Bref, même si je ne suis pas un spécialiste du sujet au sens académique, j'en ai une connaissance suffisante pour proposer à la discussion des idées. Voyez-vous, cette question de la compétence est assez plastique. Par exemple, je n'ai rien publié sur Byzance mais, depuis deux ans, à Normale sup' Lyon, j'ai fait un cours d'agrégation sur «Byzance, économie et société, VIIIe-XIe siècle», et personne ne s'en est ému. Ainsi, cela arrange des gens que je fasse des cours sur un sujet auquel je ne «connais rien», mais cela gêne quand je fais un livre sur un sujet qui relève partiellement de ma «spécialité». La leçon est qu'il est périlleux de commettre un essai dans un domaine où les passions font bon ménage avec la science.
Aristote au Mont-Saint-Michel. Les racines grecques de l'Europe chrétienne
Sylvain Gouguenheim
SEUIL
280 pages.















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Si, si ! Bien sûr, Boris, excusez-moi pour l'ambiguïté maladroite de mon propos. Je faisais seulement référence à une autre réaction surprenante de Corto...
Utilisateur anonyme
10 juillet 2008, 10:23   Re : André Gide et l'antisémitisme célinien.
Ah mais Corto c'est Corto…
Oui, "c’est seulement du Corto" et "Corto c’est Corto "et lui, au moins, on connaît son lignage forumique (et Boris Joyce aussi et Francis Marche aussi qui ne s'en sont jamais caché. Question d’honneur sans doute…)
Je peux juste espérer, pour la souhaitable pluralité des interventions sur ce forum que Corto se montre plus "résistant "qu’Alexis (qui, à tort ou à raison nous boude en ce moment, hélas) et que Serge Filippi qui lui, a disparu pour toujours (re-hélas).
((Oui, je suis entêtée : je suis ardennaise.))
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