Le site du parti de l'In-nocence

Décoloniser l'imaginaire

Envoyé par Michel Le Floch 
Yamina Benguigui, réalisatrice et adjointe au maire de Paris
"Aucun Etat n'a échappé aux outils de mesure de la diversité ethnique"
LE MONDE | 12.03.09 |


Vous êtes à l'initiative d'un colloque, "Décolonisons les imaginaires. Dépasser nos héritages pour combattre les discriminations raciales", organisé par la Mairie de Paris en partenariat avec Le Monde jeudi 12 mars. En quoi nos imaginaires sont-ils "colonisés" ?


Comme beaucoup de notions dans l'inconscient collectif, la notion de race a pénétré nos imaginaires qui restent imbibés de préjugés raciaux, grouillent de stéréotypes. Toute notre histoire coloniale a charrié du mépris, de la relégation. Il ne s'agit aucunement de racisme frontal, mais bien de préjugés hérités du colonialisme, enfouis au plus profond de notre mémoire. Cet apartheid invisible, insidieux, gangrène depuis des décennies notre société.

Il faut s'attaquer frontalement aux discriminations raciales, et ne plus avoir peur de les nommer, car c'est bien de cela dont il s'agit [sic] [encore une qui n'a pas lu Les délicatesses (NDLR)]. Aujourd'hui la diversité de la société française est enracinée, et on ne peut pas continuer à mettre de côté toute une composante de la société.


Estimez-vous, comme Yazid Sabeg, commissaire à la diversité, que pour avancer dans la lutte contre les discriminations il faut que la France se dote d'outils de mesure de la diversité ?


Les statistiques ethniques... on les utilise depuis des décennies sans les nommer. Elles sont appliquées, consciemment ou inconsciemment, pour reléguer, stigmatiser, exclure en fonction du nom, de la couleur de peau, de l'adresse, au vu et au su de la République. Lorsqu'un apprenti boulanger a toutes les peines du monde à trouver un stage pour valider son diplôme et que le seul employeur qui finit par bien vouloir l'accueillir est noir comme lui, on peut se demander qui accule au communautarisme. Ce sont bien les préjugés raciaux...

Aucun Etat confronté à sa diversité ethnique n'a échappé aux outils de mesure. La France est cependant dans une position singulière, bloquée par l'article 1 de sa Constitution, rappelé encore récemment par Simone Veil et le Conseil constitutionnel. Les outils sont à inventer.


Quelles sont vos propositions pour lutter contre les discriminations raciales ?


Je milite pour que les députés parisiens, toutes tendances confondues, déposent une proposition de loi afin d'inscrire dans les critères d'attribution des marchés publics, des obligations quantifiées en matière de lutte contre les discriminations. Quand on touche aux marchés publics, on devient fort. Sur Paris, nous allons renouveler désormais deux fois par an le "Forum de la diversité et du premier emploi" que nous avons déjà organisé pour mettre en contact jeunes des quartiers et entreprises. Ce qui manque cruellement aux jeunes, c'est le réseau et le premier contact, comme l'a montré mon film Le Plafond de verre.

Nous allons aussi mettre en place un dispositif pour favoriser l'accès des jeunes issus des quartiers aux grandes écoles d'ingénieurs et d'art de la ville (école Boulle, école Estienne...), en faisant appel à des bénévoles pour les préparer et les mettre à niveau sur la culture générale et qu'ils puissent ainsi passer les concours, comme je dis, "à hauteur d'homme".

Enfin, nous allons engager un "plan d'action pour l'égalité dans l'emploi" afin que des agents de la ville issus de la diversité et cantonnés à des emplois de catégorie C puissent connaître une progression de carrière : nous nous engageons à former ainsi 800 cadres. Nous allons aussi travailler sur les modes de recrutement et veiller à ce que la constitution des jurys soit représentative de la diversité.



Propos recueillis par Laetitia Van Eeckhout
C'est fatigant, à la fin. J'aimerais faire avec cette dame une expérience que j'ai plusieurs fois tentée : lui demander de raconter précisément les circonstances dans lesquelles elle-même a été victime de ces préjugés raciaux, stéréotypes grouillants, de ce mépris, de cette relégation, de ces discriminations raciales, de cet apartheid insidieux qui gangrène depuis des décennies notre société et qu'elle dénonce avec un absolu aplomb et une totale absence de doute.

A chaque fois que je l'ai tentée, avec il est vrai des personnes de la bonne foi desquelles je ne doutais pas et qui avaient plutôt réussi dans la vie, la réponse a été qu'elles-mêmes n'en avaient pas souffert, sauf une fois ou deux sur un point précis : les contrôles de police fréquents (mais qui se comprennent pour des raisons évidentes).

Je note par ailleurs que d'après Mme Benguigui, cet horrible état de fait existe dans notre société depuis des décennies. Quand on dit des décennies on ne veut pas dire des siècles, n'est-ce pas ? Or, l'époque coloniale qui a d'après elle créé tout cela a pris fin il y a un demi-siècle. Cette incohérence chronologique est curieuse. Ne voudrait-elle pas par hasard dire sans l'avouer que toute cette horreur est le résultat non de la colonisation mais de l'immigration de masse ?
12 mars 2009, 16:24   Re : Décoloniser l'imaginaire
"Nous allons aussi mettre en place un dispositif pour favoriser l'accès des jeunes issus des quartiers aux grandes écoles d'ingénieurs et d'art de la ville (école Boulle, école Estienne...),"

Passer du caillassage à la marqueterie, c'est fort!
Aujourd'hui la diversité de la société française est enracinée

Nous venons d'assister à la naissance en direct légèrement différé de la diversité de souche.
J'allais relever la même phrase que vous, Francmoineau. Dire que la diversité est de souche, n'est-ce pas penser que la France n'a jamais existé avant les années 1970 ?
Ces gens qui se sont farouchement opposés aux quotas d'immigration et qui, sautant du jour au lendemain dans la comptabilité des mélanotypés et des noms exotiques, entendent désormais imposer des quotas ethniques dans le recrutement professionnel et l'accès aux formations spécialisés, donnent en s'autorisant pareille incohérence des signes clairs qu'ils sont détenteurs d'un pouvoir sans contrôle, pour lequel la morale politique n'a plus cours: quand un délire changeant et fantasmatique, des "visions de la société" articulées sur des harangues, suffisent à fonder des décisions et orientations politiques graves, dont les conséquences ne peuvent être qu'irréversibles, nous y sommes, le pouvoir est libre, sans retenue, sans vergogne.
» donnent en s'autorisant pareille incohérence des signes clairs qu'ils sont détenteurs d'un pouvoir sans contrôle

C'est tout à fait exact, mais je crois que le problème vient de ce qu'il n'y a guère de contre-pouvoir à ce pouvoir-là, ou si mou...
C'est pas très gentil pour le Parti, Bernard.
12 mars 2009, 17:22   Re : Décoloniser l'imaginaire
"A chaque fois que je l'ai tentée, avec il est vrai des personnes de la bonne foi desquelles je ne doutais pas et qui avaient plutôt réussi dans la vie, la réponse a été qu'elles-mêmes n'en avaient pas souffert, sauf une fois ou deux sur un point précis : les contrôles de police fréquents (mais qui se comprennent pour des raisons évidentes). "
J'ai fait , moi ausi, souvent, la même expérience et j'ai toujours eu la même réponse. J'ai même remarqué que dans la bouche des "cpf" invîtés à la télé, le racisme à leur encontre allait de soi, mais que jamais ils n'étaient capables d'en fournir la moindre preuve concrète. C'était en général l'animateur zélé qui leur tendait la perche , du genre : mais, n'est-ce-pas, les regards sur vous, dans la rue, ça a dû être terrible ? En fait ce racisme "au quotidien" des "De souche" a été pratiquement inventé de toutes pièces pour les besoins de la cause et la justification des subventions aux officines de l'antiracisme. Les Franco-français étaient si peu racistes que pendant des années les donneurs de leçons n'ont rien eu d'autre à se mettre sous la dent que ces fameux contrôles d'identité rebaptisés pour les diaboliser "contrôles au faciès" et montés en épingle comme s'il s'agissait non de mesures banalement préventives mais horriblement répressives.
De plus dans un pays qui compte des millions de méditérranéens de toutes origines, qui est capable de faire sur le seul faciès la différence entre un jeune Arabe, un jeune Corse, un jeune Provençal, un jeune Italien ou un jeune Espagnol , surtout quand ils portent tous le même "uniforme" ? Je connais bien des "de souche" , dont un neveu à moi, qu'on pourrait prendre pour des Arabes, et des Arabes qu'on pourrait prendre pour des " de souche". Or, je n'ai jamais entendu les Français d'origine corse, provençale, italienne ou espagnole se plaindre de contrôles au faciès. Cherchez l'erreur.
Le quatrième pouvoir (la presse) est défaillant dans son rôle naturel de contre-pouvoir, de critique politique des politiques; au lieu des actes et des idées, il ne s'intéresse qu'aux personnalités d'une part, aux idéologies d'autre part, et à la spéculation idéologique fantasmatique; c'est un contre-pouvoir passoire, qui flotte sur la doxa, s'en enivre et y sombre.
« Nous venons d'assister à la naissance en direct légèrement différé de la diversité de souche. »
Utilisateur anonyme
12 mars 2009, 18:23   Re : Décoloniser l'imaginaire
Les boulangers noirs sont des artisans fort appréciés pour leur flegme, celui de mon quartier ne tique même pas si on lui demande s'il a une tête de nègre. Ce n'est pas lui qui tiendrait un discours bobo-débile comme celui de cette dame. "Cet apartheid invisible, insidieux, gangrène depuis des décennies notre société" : elle est mûre pour Sainte-Anne de toute évidence (ou pour le cabinet de Ségolène Royal). S'adressera-t-elle à un chirurgien plasticien formé par un "plan d'action pour l'égalité dans l'emploi" pour son prochain lifting ?
Je suis curieux de voir comment elle va mesurer la diversité raciale sachant que la Constitution l'interdit. Cela ne semble pas la gêner...
12 mars 2009, 19:05   Kabyles
Sans oublier, bien chère Cassandre, les Kabyles qui font plus français (je veux dire d'aspect) que bien des méditerranéens de souche...
Agrippa : vous avez déjà, réellement, demandé une tête de nègre à un boulanger noir ? Alors que ce gâteau a été renommé meringue au chocolat voici déjà belle lurette ?
Utilisateur anonyme
12 mars 2009, 20:10   Re : Décoloniser l'imaginaire
Non Rogemi, je vous rassure, it's just a joke. Je ne connais pas assez bien mon boulanger noir pour risquer une blague à se faire dévorer tout cru ! C'est d'ailleurs un reproche à adresser aux boulangers africains : on est obligé de se gêner un peu avec eux. Comment leur dire : donnez-moi du pain blanc, ou un bien noir etc... ? Cela met mal à l'aise. Pourtant, je préférais le joli tête de nègre au triste meringue au chocolat. Encore un petit plaisir de perdu... Je regrette que ce mot soit si connoté (je serais même prêt à accepter la tête de leuco en échange par exemple).

Jules Verne ne pourrait plus écrire non plus : "Là, le feu fut allumé, et Nab et Pencroff, auxquels étaient naturellement dévolues les fonctions de cuisiniers, l’un en sa qualité de nègre, l’autre en sa qualité de marin, préparèrent lestement des grillades d’agoutis, auxquelles on fit largement honneur."

Ni davantage : "L’adroit orang avait été merveilleusement stylé par Nab, et on eût dit que le nègre et le singe se comprenaient quand ils causaient ensemble."
Avec des morceaux choisis pareils, on ne devrait pas s'étonner que la Halde "s'intéresse" bientôt au cas Jules Verne - après tout, certains ont bien réussi à supprimer en Angleterre des représentations du Marchand de Venise de Shakespeare pour antisémitisme caractérisé, tandis que d'autres font campagne pour "réécrire" Oliver Twist en "expurgeant" Fagin de ses traits les plus détestables (la main croche, le nez itou, etc...).

Verne va devoir revoir sa copie, on le sent.
Lisant ceci "comme beaucoup de notions dans l'inconscient collectif, la notion de race a pénétré nos imaginaires qui restent imbibés de préjugés raciaux, grouillent de stéréotypes. Toute notre histoire coloniale a charrié du mépris, de la relégation. Il ne s'agit aucunement de racisme frontal, mais bien de préjugés hérités du colonialisme, enfouis au plus profond de notre mémoire. Cet apartheid invisible, insidieux, gangrène depuis des décennies notre société.
Il faut s'attaquer frontalement aux discriminations raciales, et ne plus avoir peur de les nommer, car c'est bien de cela dont il s'agit", j'ai cru d'abord que cette dame parlait de son pays, l'Algérie, et qu'elle était près de revenir chez elle pour y lutter contre le racisme, qui est, comme chacun sait, endémique là-bas.
Savez-vous qu'en lisant son allusion à l'apprenti boulanger qui a toutes les peines du monde à trouver un stage pour valider son diplôme et que le seul employeur qui finit par bien vouloir l'accueillir est noir comme lui, je me suis dit que cela devait se passer dans une banlieue "sensible" car tous les boulangers ou presque y sont nord-africains.
Citation
Non Rogemi, je vous rassure, it's just a joke


Késako ???

Agrippa par pitié ne prenez pas vos hallucinations pour la réalité ... et rendez à César ce ...
Citation
était près de revenir chez elle pour y lutter contre le racisme, qui est, comme chacun sait, endémique là-bas.

Cher JGL,

Non seulement le racisme est endémique dans les pays arabo-musulmans mais en Afrique noir le tribalisme, le cancer de ce continent qui rend tout développement impossible, n'est rien d'autre que du racisme poussé à l'extrème.
Utilisateur anonyme
13 mars 2009, 10:46   Re : Décoloniser l'imaginaire
Jospin et les taupins
LE MONDE | 26.01.09 | 14h56 • Mis à jour le 26.01.09 | 18h34

Lorsqu'il a débarqué au lycée Louis-le-Grand, son nom, lancé lors des appels, a d'abord fait sourire. "Evidemment, ici, ce n'est pas banal de porter le prénom de Jospin", s'amuse-t-il. Jospin... Comme l'ancien premier ministre ? "Oui, mon père l'admirait beaucoup, insiste-t-il. C'était tout de même l'un des rares hommes politiques français à s'être intéressé au tiers-monde tout en refusant de se lier aux dictateurs africains !"

Evidemment, "papa" aurait pu opter pour la solution du simple "Lionel". "Mais il a pensé, remarque-t-il pince-sans-rire, que Jospin exprimerait plus clairement sa considération." Le Béninois Jospin Oussou est donc arrivé à Paris avec son drôle de prénom, il y a deux ans, en 2007. Son père était mort depuis quelques années, laissant sa mère, vendeuse sur les marchés, élever seule les quatre enfants du couple. Il n'avait jamais pris l'avion, ne connaissait rien d'autre que Cotonou, et son homonyme en France n'était déjà plus premier ministre depuis cinq ans.

Le jeune homme disposait cependant d'un plus puissant viatique : ses formidables bulletins scolaires. Des 19 sur 20 à la pelle, une mention "très bien" au bac et la réputation d'être l'un des meilleurs élèves du Bénin. Au sein des classes préparatoires - les "taupes"- du prestigieux lycée Louis-le-Grand, qui fournit chaque année une moitié des effectifs de l'Ecole polytechnique, le jeune "taupin" a néanmoins rapidement compris qu'il était loin d'être le seul à aligner de telles performances scolaires.

Mais, dans ce lycée qui vit pourtant passer, à la fin des années 1920, le poète et ancien président du Sénégal Léopold Sédar Senghor, il a aussi vite constaté qu'il était l'un des rares Africains issus d'une famille modeste à s'être taillé une place dans les têtes de classe.

Lors des réunions de parents d'élèves de Louis-le-Grand, sur le quai de la gare lors du premier voyage scolaire, ce n'est pourtant plus Jospin qui a bientôt fait sensation, mais un homme, blanc, la soixantaine, livrant ses dernières recommandations en remontant le cache-nez du garçon pour qu'il ne prenne pas froid : Odon Vallet. Cet énarque érudit, spécialiste des religions et sans enfant, est tout à la fois le parrain, le père adoptif et le bienfaiteur de Jospin et de la demi-douzaine de jeunes Africains issus de familles modestes inscrits à Louis-le-Grand.

Depuis qu'il a hérité, en 1999, de l'imposante fortune de son père (115 millions d'euros placés dans la Fondation Odon-Vallet, sous l'égide de la Fondation de France), Odon Vallet distribue chaque année des bourses à des élèves défavorisés. Il a commencé par les écoles d'art appliqué françaises (école Boulle, Arts déco, lycée de l'horlogerie ou école des Gobelins). A étendu ensuite son action au Vietnam, "un pays confucéen où les études sont une mystique", dit-il. "Mais j'avais un remords de ne rien faire pour l'Afrique."

Il a donc jeté son dévolu sur le Bénin, puis, selon les circonstances, sur les pays voisins, sélectionnant les meilleurs élèves des meilleurs lycées. Dans les cours de Louis-le-Grand, ils sont donc cinq à retrouver chaque jour Jospin. Trois autres jeunes Béninois, Irénée Salmon, Espérant Padonou et Ulysse Lawogni. Un jeune Ivoirien, Désir Koffi-Bi, dont le prénom est tout aussi inspiré par la politique française que Jospin, "mais moi, mon père avait été très marqué par un discours d'Harlem Désir au temps où celui-ci dirigeait SOS-Racisme", explique-t-il en riant. Et la seule fille parmi eux, Tatiana Tchalla, est originaire du Togo.

C'est peu dire qu'à Louis-le-Grand, où les rares élèves noirs sont souvent fils de diplomates, ce petit groupe-là se remarque. "Dans la compétition internationale qui nous oppose aux plus grandes universités américaines, nous sommes bien parvenus à faire venir des Chinois, très bons en mathématiques, reconnaît le proviseur Joël Vallat, quelques Marocains, des Libanais, des Bulgares. Mais le gros des prépas est encore très franco-français." Les six Africains ont refait une terminale à Louis-le-Grand avant de se lancer dans les classes préparatoires.

"Ce n'est pas leur niveau en mathématiques ou en physique qui posait problème, souligne Annie Vigneron, professeur de mathématiques, qui les a tous suivis en terminale. Généralement, ils sont très bons dans ces matières, leurs lycées d'origine suivant les anciens programmes français de terminale, plus poussés que ceux d'aujourd'hui. Mais ils avaient un rattrapage à accomplir en histoire, anglais et philosophie."

Il leur a aussi fallu un petit temps d'adaptation à un pays inconnu, un climat qui les frigorifie toujours, une cuisine qui les déroute souvent. "Jospin n'avait jamais tenu un couteau de sa vie, rappelle Odon Vallet, Irénée pensait devoir chanter l'hymne national chaque matin avant d'entrer en classe et Espérant a longtemps été inquiet d'avoir dû laisser sa mère, sanglotant en disant son chapelet."

Car si tous sont issus de familles où l'école était surinvestie, chacun de leurs parcours est un petit miracle. Et ils sont tous liés par cette communauté de destin. C'est Espérant, déjà boursier de la Fondation, qui a ainsi recommandé Ulysse à Odon Vallet. "J'étais sorti major du Bénin au BEPC, et j'ai longtemps été le meilleur élève de mon collège Sainte-Félicité, à Cotonou, raconte le jeune homme. Jusqu'à ce qu'Ulysse arrive, deux classes en dessous de la mienne. Là, il s'est révélé mon adversaire le plus redoutable. Chaque trimestre, j'allais le voir pour sonder si sa moyenne générale serait supérieure à la mienne. Lorsque M. Vallet m'a accepté, après que j'ai été le major du Bénin au bac, je savais déjà qui serait, deux ans plus tard, le meilleur bachelier."

Le grand frère de Désir, Ezechiel, aujourd'hui élève à l'Ecole des mines de Douai et déjà boursier de la Fondation, avait pour sa part présenté son cadet. "J'étais alors en cinquième, sourit Désir, et premier de mon école. Pendant des années, M. Vallet m'a envoyé des Harry Potter. Ah, je les ai lus et relus ! Et en terminale, j'ai su que j'étais à mon tour accepté."

Irénée projetait de s'engager dans l'armée, faute de moyens financiers, et avait déjà renoncé à décrocher une bourse. "Mon père, médecin - c'est lui qui a accouché ma mère par césarienne lorsque je suis né -, est blanc, ma mère est noire, raconte-t-il doucement. En Afrique, quand on est le fils d'un Blanc, on est considéré comme un riche, et, même si c'était loin d'être la réalité, j'étais sûr que je n'aurais pas la bourse." La veille de déposer son dossier militaire, il a tout de même rappelé Odon Vallet. "Vous êtes fou de vous engager dans l'armée, en plus comme sous-officier !", a tonné le parrain. Et Irénée a été sélectionné pour Louis-le-Grand.

Jospin croyait que, "dans notre pays où il y a tant d'injustice et de corruption, un fils de ministre (lui) passerait forcément devant le nez."

Tatiana, enfin, avait déjà quitté ses parents depuis un an pour intégrer une terminale au lycée de Dakar. C'est là que l'écrivain Jean-Christophe Rufin, ambassadeur de France au Sénégal, a remarqué ses excellents résultats au bac et, sans la connaître, a remis son dossier à Odon Vallet.

A Paris, chacun dispose, grâce à la fondation, d'un compte en banque avec un petit pécule, d'un téléphone portable et d'une chambre en internat, tout près du jardin du Luxembourg. Colles et révision tous les soirs. Partie de foot le vendredi - Irénée s'est déjà taillé une réputation de champion du lycée -, dîner chaque samedi au Bistrot Romain du boulevard du Montparnasse autour d'Odon Vallet, messe le dimanche à l'église Saint-Sulpice et, régulièrement, inspection surprise des chambres par leur "parrain". Entre eux, ses "filleuls" l'appellent très gentiment "l'adjudant". "Nous, nous sommes la première compagnie", sourit Espérant.

Bien sûr, les familles manquent. Les parents, en Afrique, se débrouillent chaque semaine pour trouver un cybercafé et lire ainsi, par courriel, des nouvelles de ces enfants qui représentent tous leurs espoirs. Les professeurs de Cotonou suivent à distance les progrès de leurs anciens élèves et ne savent plus trop s'il faut souhaiter les voir continuer en France, en Amérique, ou les retrouver diplômés en Afrique.

"On disait beaucoup, au Bénin, que la France était raciste, remarque Espérant. J'ai trouvé tout le contraire. Nous avons été magnifiquement accueillis." Des amours se sont nouées. A Noël, les uns et les autres ont été invités chez des camarades de classe. Jospin s'apprête à aller faire du ski pour la première fois. Ulysse propose chaque semaine des théories de mathématiques à ses professeurs et versifie volontiers. Espérant a découvert l'écrivain Michel Leiris. Tatiana s'enthousiasme en cours de philosophie pour la psychanalyse et Sigmund Freud. Et leur professeur Annie Vigneron a trouvé l'autre jour une petite carte postale de l'un d'entre eux, noircie d'une belle écriture, "Madame, je vous aime..."

Le 1er novembre 2007, quelques semaines après son arrivée, Jospin, n'y tenant plus, est allé rendre visite à son célèbre homonyme, en compagnie d'Odon Vallet. Lionel Jospin l'a reçu chez lui, amusé. "Cela m'a fait plaisir, pour mon père", dit le jeune homme en souriant. Depuis, il reçoit à chaque grande occasion et pour les fêtes de fin d'année un petit mot manuscrit de l'ancien premier ministre. Les lettres sont là, dans sa petite chambre parisienne, au milieu de ses cahiers.

Raphaëlle Bacqué
Utilisateur anonyme
13 mars 2009, 11:40   Re : Décoloniser l'imaginaire
De bonnes actions peuvent avoir des conséquences funestes. Odon Vallet est altruiste et écrit remarquablement bien. Son action généreuse se rapporte à celle de nombreux bienfaiteurs, catholiques ou non, qui se sont dévoués à aider leur prochain. Mais qu'avaient-il besoin d'aller chercher leur prochain si loin et de le faire venir chez nous ?!
Citation : Passer du caillassage à la marqueterie, c'est fort!
Excusez-moi, chers amis, de reprendre la balle après plusieurs rebonds, je suis débordé en ce moment. Je prie, par ailleurs, le cher Florentin, de ne pas me tenir rigueur de cette rectification : le caillassage est à l'origine de la marqueterie. La décoration et les incrustations comprenaient à l'origine des pierres précieuses, des nacres et bien d'autres minéraux. Les bronzes trouvaient là leur justification [ aucune "gratuité" dans le beau]. Ils avaient pour utilité de tenir sertis ces minéraux dont le collage (colle d'os ou de peau) montraient sa limite dans les angles.
13 mars 2009, 14:52   Re : Décoloniser l'imaginaire
Je vois, cher Eric, que vous êtes un connaisseur. Mes propos, vous l'aurez remarqué, sont toujours à double sens, parfois à triple.
Quand la colle (de peau ou d'os) est à point, la prise des pièces, des motifs en placage, se fait au marteau.
14 mars 2009, 07:38   Odon Vallet?
Odon Vallet est l'auteur d'Une autre histoire des religions, en six petits volumes superbement illustrés, publiés dans la collection "Découvertes Gallimard". On peut lire cet ouvrage avec profit, puisqu'on y trouvera tout ce qu'il faut penser dans les cercles politiquement corrects sur la question des religions. Heureusement que les belles images relèvent la platitude du propos, et la soumission de l'auteur à la doxa. Il écrit donc dans le Monde. Ainsi, non seulement Odon Vallet pense bien, mais en plus il est riche! C'est extrêmement injuste.
14 mars 2009, 08:46   Les décoloniser enfin
Lu dans le site Riposte laïque cet extrait d’une conférence qu'a prononcée Mme Wafa Sultan, en Floride : "la place des femmes dans l’islam" (2007), ce qui devrait inciter Mme Benguigui, si elle était aussi attachée qu'elle le dit à la lutte anticoloniale, à revenir dans son pays pour le décoloniser enfin.


Mesdames et Messieurs, je ressens toujours le besoin de rire de moi-même pour masquer cette tristesse profondément ancrée dans mon cœur, surtout lorsque je parle des femmes dans l’islam. A présent je suis libre, mais je ne peux oublier ma nièce, mariée de force à son cousin, à l’âge de 10 ans. Lui en avait plus de 40. Son mariage était valide et légal en accord avec la charia parce que Mahomet, prophète de l’islam, épousa sa deuxième femme alors qu’elle avait 6 ans : lui en avait plus de 50. Je me souviens toujours de ma nièce revenant chez son père, le suppliant de ne pas la renvoyer chez son mari. Il lui répondait que pour l’islam il était honteux qu’une femme quitte la maison de son mari, et que Dieu la récompenserait de lui obéir. A l’âge de 25 ans, ma nièce s’est suicidée en s’immolant par le feu. Elle est morte brûlée vive, laissant 4 enfants.
En 2002, la police religieuse saoudienne empêcha des écolières de sortir d’un bâtiment en flammes, car elles n’étaient pas habillées selon les règles de l’islam. Il y avait environ 800 jeunes filles dans cette école, quand la tragédie a eu lieu. Selon la presse saoudienne, que je ne crois pas, au moins 15 filles sont mortes. Je crois le bilan bien plus lourd.
A cause de cela, et de tant d’autres tragédies humaines dont j’ai été le témoin durant les 30 premières années de ma vie, j’ai décidé de combattre l’islam. Attention, je dis bien : combattre l’islam. Pas l’islam politique, pas l’islam militant, pas l’islam radical, pas le wahhabisme, mais l’islam tout court. Je crois vraiment que l’Occident a inventé ces termes pour satisfaire au politiquement correct. En Syrie où j’ai grandi, on dit juste « islam ». L’islam n’a jamais été mal compris, l’islam est le problème.
Mais personne ne dit la vérité, personne ne regarde en face la cause du terrorisme qui est cette machine à laver le cerveau appelée islam. L’islam ne dépend pas de moi, ni d’aucun musulman, l’islam, c’est précisément ce que le prophète Mahomet a dit et fait. Pour comprendre l’islam, il faut lire la biographie de Mahomet. C’est très traumatisant, très choquant. Il a épousé sa seconde femme quand elle avait 6 ans, il en avait plus de 50.
Je reviens de France, où j’ai débattu avec une musulmane pakistanaise, ministre de la femme au Pakistan. Lorsque j’ai énoncé ces faits à l’assistance, elle a dit : « Mensonge ! Elle avait neuf ans, pas six ! » C’est comme si un policier vous arrêtait parce que vous roulez à 160 km/h, et que vous lui répondiez : « Mensonge ! Je roulais à 150, pas à 160 ! » « Elle avait neuf ans, pas six… »
Il a épousé sa seconde femme, c’était sa belle-fille. Il avait adopté ce fils, et à l’époque, [ce mariage] n’était pas accepté par la culture arabe pré-islamique, alors il a déclaré à ses fidèles : « Dieu m’a dit que l’adoption est interdite. » Et croyez-le ou non, l’adoption a alors été interdite par l’islam, rien que pour justifier son mariage avec sa belle-fille. Sa troisième femme, Sofia, était juive. Il est clairement écrit et documenté dans nos livres scolaires qu’il a attaqué sa tribu, il a tué son père, son frère, et son mari, et le jour même, il a couché avec elle.
Voila ce qu’est l’islam, il faut le savoir, il faut comprendre que l’islam est le problème. J’en ai assez de ces occidentaux qui me demandent d’adoucir mon message. J’en ai assez de ces gens qui me demandent : « Essayez-vous de changer 1,3 milliard de personnes ? » Oui, c’est ce que j’essaye de faire ! Oui ! Non seulement j’essaye, mais je les changerai !
Je veux que vous sachiez que la première des valeurs que j’ai apprises dans ce grand pays, c’est qu’on peut réaliser l’impossible si on croit en soi-même. Je ne crois pas qu’en moi-même. Je crois en des millions de femmes musulmanes comme Nonie Darwish et Ayaan Ali, et nous travaillons ensemble pour changer 1,3 milliard de musulmans. Ils doivent comprendre qu’ils ont le choix entre changer ou être écrasés.
Je vous en prie, ne laissez pas votre pensée civilisée vous empêcher de défendre votre merveilleux pays, défendez vos valeurs. S’il vous plaît, défendez votre liberté. Défendez le paradis où vous vivez. Ne tenez rien pour acquis. J’ai savouré chaque instant de ma vie en Amérique. Se promener seule dans la rue, sans se faire traiter de putain est un don du ciel pour moi. Rien que pouvoir discuter avec un voisin, sans se voir accusée d’adultère, c’est un don du ciel pour moi Pouvoir boire un café toute seule au Starbucks, c’est un don du ciel. Je vous en prie, ne tenez rien pour acquis. S’il vous plaît, défendez ce beau pays.
Mon rêve est de voir mon pays, la Syrie, aussi libre que l’Amérique, et non le contraire. Quand j’étais en Syrie, je pleurais beaucoup. Maintenant que je suis libre, je pleure encore plus, pour toutes ces femmes restées là-bas. Mon rêve est de les libérer un jour. Puisse-t-il être le rêve de toute l’humanité. Merci beaucoup. Dieu vous bénisse, Dieu bénisse l’Amérique".
14 mars 2009, 12:33   Re : Décoloniser l'imaginaire
Très émouvant.
14 mars 2009, 13:35   Re : Décoloniser l'imaginaire
Oui, trè beau.
En 2002, la police religieuse saoudienne empêcha des écolières de sortir d’un bâtiment en flammes, car elles n’étaient pas habillées selon les règles de l’islam.

Je n'avais jamais entendu parler de ce fait, qui me paraît absolument inimaginable... Quelqu'un a-t-il des lumières à ce sujet, qui viendraient confirmer ou infirmer ces dires ?
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