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Steiner le Méchant

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 18:19   Steiner le Méchant
Le grand critique littéraire Assouline s'empare d'un méchant !

« Le mot de trop de George Steiner

C’était il y a peu à Cambridge (Angleterre). Le professeur George Steiner, essayiste, critique, théoricien de la traduction, expert en littérature comparée et docteur honoris causa d’un grand nombre d’universités de par le monde, recevait ès qualités, à son domicile, Juan Cruz, l’envoyé spécial du quotidien madrilène El Pais, pour un long entretien comme il les aime. A l’image de ses conférences. Tous azimuts. Et il le fut effectivement, débordant largement le cadre de son dernier opus Les livres que je n’ai pas écrits qui vient de paraître en Espagne en castillan et en catalan.

Ils ont donc parlé de la tristesse et du pessimisme selon Beckett, de sexualité, de Heidegger, Grass, Roth et Rushdie. Et même de la recherche du public pour des formes littéraires expérimentales : ainsi de la prédominance littéraire, sur le plan du style, selon Steiner, des livres d’histoire, de sociologie, d’économie et des biographies ; ce qui lui fait dire, notamment, que “la prose de Lévi-Strauss est meilleure que celle de n’importe quel romancier français”.Pourquoi pas, même si cela fleure bon le goût des formules et l’esprit de provocation dont il est coutumier. Dans son élan, il juge aussi qu’Harry Potter détourne la jeunesse de la lecture des classiques et qu’on ne peut écrire de littérature importante avec un traitement de textes. Bref, du Steiner pur jus. Jusqu’à ce passage :

“Il est facile de s’asseoir ici, dans cette maison, et de dire : “Le racisme, c’est horrible, non ? ” Mais posez -moi même la même question si je devais vivre dans une maison voisine d’une famille jamaïquaine de six enfants qui écoute du reggae et du rock and roll toute la journée ! Posez-moi la même question si un expert immobilier venait m’apprendre que la valeur de ma maison s’était effondrée depuis qu’une famille jamaïquaine avait emménagé à côté ! Demandez-moi la même chose à ce moment-là ! “

On dirait du Chirac entre deux Coronas : l’arôme du mouton dans l’escalier remplacé par la musique de sauvages. Vrai ou faux, bon sens ou pas, on attend autre chose d’un intellectuel de ce calibre qu’un réflexion échappée du café du commerce, non ? On s’en doute, la presse de langue anglaise s’en est saisie et s’est aussitôt enflammée. »
07 septembre 2008, 18:34   Re : Steiner le Méchant
Pauvre Steiner, à son âge il aurait dû se garder de s'aventurer sur un terrain aussi glissant.

Autant dire qu'il va le payer cher, très cher ...
07 septembre 2008, 18:41   Re : Steiner le Méchant
Finalement, être raciste c'est oser dire qu'on aspire au calme de temps en temps.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 18:46   Assoupline le Gentil
Vous croyez ? Je n'en suis pas sûr.

Pour revenir à la réflexion elle-même, la réaction d'Assouline est tellement symptomatique… « Vrai ou faux, bon sens ou pas, on attend autre chose d’un intellectuel de ce calibre qu’un réflexion échappée du café du commerce, non ? »

La question n'est donc pas de savoir si Steiner dit vrai ou pas, la question, la seule question (et le bon Assouline est là pour la poser (et pour poser que c'est la seule question qui vaille d'être posée)) est de savoir si Steiner dit bien ou pas. Le "café du commerce" étant le lieu (si l'on suit le raisonnement de Pierre Assouline) d'où s'échappent (on les comprend !) des réflexions qui n'ont que le pauvre et vulgaire mérite de pouvoir (éventuellement) être vraies.
07 septembre 2008, 18:48   Re : Steiner le Méchant
Je crois que Steiner est vraiment au-delà ce ces propos de caniveau. Je me souviens d'une émission de Pivot où il s'était "aventuré" du côté des régimes totalitaires, sans se soucier du politiquement correct, et sans que sa santé semble en souffrir...
07 septembre 2008, 18:52   Re : Steiner le Méchant
Oui, Boris, le cas d'Assouline est de plus en plus clair... Quel sinistre vendeur de soupe...
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 18:56   Café du Commerce
Pendant ce temps, les bondieusards du Café du Commerce médiatique font le Ramadan.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 19:00   Où est le problème ?
Je suis surpris (enfin, surpris, c'est une façon de parler) de lire ici et là que les propos de George Steiner seraient sans intérêt, sans intérêt autre que de révéler la bêtise et la malhonnêteté du journaliste français. Quel mépris, dans ce jugement sans appel des propos "de café du commerce" de l'intellectuel ! Les penseurs dignes de ce nom n'ont pas ce genre de soucis, eux ! Je trouve au contraire plutôt réconfortant, et même émouvant, que quelqu'un qui n'a évidemment aucun intérêt à parler de ça le fasse sans se soucier des conséquences que son propos pourrait entraîner, en se mettant un instant à la place de ceux qui souffrent de ces nuisances-là, bien réelles, elles.
07 septembre 2008, 19:25   Re : Steiner le Méchant
Eh bien, je viens de réserver le livre, qui est en stock chez mon libraire.
Merci Boris.
07 septembre 2008, 19:38   Re : Steiner le Méchant
"A son âge", dit Rogemi. Eh bien mais justement, à son âge ! Car l'un des rares avantages qu'offre la vieillesse (encore que Steiner ne soit pas si vieux que ça...), c'est la possibilité de se libérer du carcan bien-pensant, pour ceux qui n'y auraient pas songé auparavant, ou ne l'auraient pas osé; c'est pouvoir brûler ses vaisseaux, enfin...
07 septembre 2008, 20:15   Re : Steiner le Méchant
Citation
(encore que Steiner ne soit pas si vieux que ça...),

Il est né en 1929 cher Francmoineau.

Un homme de la classe de G. Steiner ne peut, ne doit en aucun cas être traité comme le fait Assouline dans son billet.

Un Steiner vaut 100 Assouline.

J'ai vraiment beaucoup de difficultés à retenir ma colère mais on vit vraiment dans un monde d'une médiocrité abyssale.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 20:18   Steiner le très très méchant
« (…) et qu’on ne peut écrire de littérature importante avec un traitement de textes. »

Personne ne relève ça ?
07 septembre 2008, 20:18   Re : Steiner le Méchant
» Un Steiner vaut 100 Assouline.

Pas amateur.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 20:20   Re : Steiner le Méchant
Pas compris.
07 septembre 2008, 20:22   Re : Steiner le Méchant
Le taux de ce change ne m'intéresse pas : je ne donnerais pas un centième, ni un millième de Steiner pour tout Assouline...
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 20:24   Devises
Ah oui, d'accord, moi pareil. Monnaie de singe…
07 septembre 2008, 21:34   Re : Steiner le Méchant
Eh les gars vous divaguez ou quoi ?

Il ne s'agit pas de monnaie d'échange ou de singe mais d'une périphrase pour exprimer mon dédain.
Utilisateur anonyme
07 septembre 2008, 21:45   Re : Steiner le Méchant
Pas d'souci Rogemi, le message était au rendez-vous !
07 septembre 2008, 23:08   Re : Steiner le Méchant
Je me souviens des dialogues entre Pierre Boutang et Georges Steiner sur la 7: je trouve que ce dernier avait une certaine ouverture d'esprit devant l'auteur du meilleur livre consacré à Maurras. Donc Steiner n'est pas un dégonflé. Rien à voir avec Assouline, négociant opportuniste et auteur d'accusations poussives auto- éditées.
07 septembre 2008, 23:11   Re : Steiner le Méchant
Je suis en total désaccord avec le forum au sujet d'Assouline, dont je prise le jugement littéraire (il y a des exceptions, évidemment).
07 septembre 2008, 23:15   Re : Steiner le Méchant
Il n'était pas question de jugement littéraire mais de jugement politique : Assouline écrit en grand inquisiteur chargé de débusquer les atteintes à la bonne pensée.
08 septembre 2008, 00:00   Re : Steiner le Méchant
Citation
Je me souviens des dialogues entre Pierre Boutang et Georges Steiner sur la 7:

Ils avaient l'un pour l'autre une grande admiration.

Ils ont même publié ensemble un livre. Dialogues: sur le mythe d'Antigone, sur le sacrifice d'Abraham
08 septembre 2008, 00:21   Re : Steiner le Méchant
Exact. Un grand moment de télévision; ça existe.
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 11:10   Re : Steiner le Méchant
Je suis tout de même étonné, Cher Bruno Chaouat, qu'un Assouline puisse avoir des jugements littéraires intéressants, quand on voit la manière dont il écrit, qui correspond bien mieux à ce qu'écrit Marcel Meyer un peu plus haut.
08 septembre 2008, 11:11   Re : Steiner le Méchant
G. Steiner est un grand monsieur auquel un Assouline n'arrive pas à la cheville. Il n'a jamais pratiqué, pas plus que lévi-Strauss, la langue de bois et je crois même me souvenir de l'avoir entendu dire que " Les deux étendards " de Rebatet était un des plus grands livres de la litérature française ! Fallait oser !
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 11:15   Re : Steiner le Méchant
À propos de Steiner.

Et aussi
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 13:53   Re : Steiner le Méchant
" je crois même me souvenir de l'avoir entendu dire que " Les deux étendards " de Rebatet était un des plus grands livres de la litérature française !"


Oui, chère Cassandre, les "Deux étendards", ça !, c'est quelque chose... (Mais chuuut !!!, c'est promis, pas un mot sur cet écrivain...)


Et Lévi-Strauss, lui, vénérait Wagner...
08 septembre 2008, 14:16   Re : Steiner le Méchant
Si, justement, son Histoire de la musique est aussi très bonne.
08 septembre 2008, 14:19   Loyola
Bien cher Monsieur,

Je ne vois pas quel mal il y a à souligner que Rebatet fut un grand écrivain (je n'irais quand même pas jusqu'à dire que les "Deux étendards", qui sont un excellent roman, soient un des plus grand livres de la littérature française, mais c'est une question de goût) de même que Jacques Chardonne.

Chardonne, fort apprécié de François Mitterrand, reçut d'un lecteur insoupçonnable en matière de collaboration la lettre suivante :


Cher Maître, vos "Propos comme ça" m'enchantent. J'admire l'ampleur et la désinvolture de votre pensée. Je goûte votre style pur et sans accessoire.
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 14:38   Aux truffes
Rebatet et ses deux étendards, très bonne recette, en effet, Jmarc. J'ai remplacé le porc par du mouton, bien névidemment.
08 septembre 2008, 15:46   Maintenance Express
Il faudrait que Marcel Meyer veuille bien descendre dans la cave pour voir si quelque chose n'a pas pété dans la machinerie de ce forum. J'ai l'impression de formidables courts-circuits. Ainsi, à la suite de je ne sais quel cataclysme électronique, on pourrait comprendre que Bruno Chaouat, tenez-vous bien, serait un admirateur de... Pierre Assouline.
08 septembre 2008, 17:11   Re : Steiner le Méchant
Oh, cher hôte, "admirateur" est un sarcasme excessif. Je ne comprends pas le lynchage d'Assouline sur le forum. Assouline n'est peut-être pas un pourfendeur de la doxa, je vous le concède, je n'ai pas lu ses romans ni ses biographies, mais il me paraît un journaliste littéraire éclectique. Je ne vois pas non plus pourquoi le blog qu'il vient de consacrer à Steiner devrait susciter qu'on le compare à Steiner. Ainsi, si j'écris, moi qui suis bien moins qu'Assouline dans le monde des lettres, une critique d'un grand philosophe, d'un grand écrivain, on dira : mais qui est ce Bruno Chaouat, en regard de ce grand écrivain ? Dès lors, les lecteurs, les critiques, devraient tout simplement disparaître sous terre. Pourquoi ne pas reconnaître que Steiner tenait, dans cet entretien, des propos de café du commerce, inattendus pour un intellectuel de ce calibre, et surtout pour un Juif diasporique qui fait la morale aux Juifs particularistes et sionistes ?
08 septembre 2008, 17:49   Re : Steiner le Méchant
Citation
inattendus pour un intellectuel de ce calibre, et surtout pour un Juif diasporique qui fait la morale aux Juifs particularistes et sionistes ?

Apparemment il semble que ces propos aient été, une fois de plus, extraits de leur contexte en vue de porter préjudice à G. Steiner. Il faudrait faire preuve d'un minimum de prudence et de juger sur pièces.

Bon cela a déjà été dit sur ce forum des dizaines de fois. En effet des réactions épidermiques à des billets publiés sur la blogosphére sont en général prématurées.
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 19:01   Re : Steiner le Méchant
Cher Bruno Chaouat, permettez-moi de vous faire un léger reproche : vous avancez, la poitrine à nue, il faut le reconnaître, avec tout de même quelques approximations en main. On a parfois l'impression que vous ne lisez les messages qui sont déposés ici qu'avec un demi-œil transatlantique qui les parcourt de très haut. Dites-nous, par exemple, quelles sont les qualités (intellectuelles, journalistiques, littéraires, politiques, diplomatiques, humaines) que vous accordez vous-même à Pierre Assouline, nous sommes tout ouïe. Il en a sans doute, bien qu'il prenne grand soin de les dissimuler. (Nous l'avons entre autre subi pendant deux (trois ?) saisons, le matin sur France-Culture, et là non plus, on ne peut pas dire qu'il nous ait ébloui de son art radiophonique.)

Vous reprenez mot pour mot les graves accusations d'Assouline qui parle de "propos de café du commerce", dont il déplore qu'ils soient tenus par le "professeur Steiner". Encore une fois, et au risque de me répéter, "Café du commerce" ou pas, ces propos, qu'en est-il ? Sont ils justes, faux, immondes, ignobles, insupportables, imbéciles, nécessaires ? Dites-nous ce que vous en pensez, car s'abriter derrière l'autorité de Pierre Assouline, ici, risque de paraître un peu juste.

Et puis : « le lynchage d'Assouline sur le forum ». On a connu pire, comme lynchage, vous ne croyez pas ? Pour un lynché (et quelle foule !), il se porte très bien, je crois, le buveur de café.
08 septembre 2008, 19:05   Re : Steiner le Méchant
Je crois aussi que la réaction d'Assouline à l'affaire Gougenheim a été la goutte d'eau...
08 septembre 2008, 19:30   Re : Steiner le Méchant
Monsieur Boris Joyce, c'est terrible, j'ai tout à coup l'impression d'être grondé par le principal du collège pour mon inattention... (je le dis sans ironie, du reste, il est étonnant de constater l'efficacité que peuvent avoir des échanges avec des interlocuteurs anonymes ou pseudonymes).
Soit : "lynchage" est trop fort. Je connais trop mal Assouline pour m'en faire l'apologiste. D'ailleurs, et à ma grande honte, je connais Steiner au moins aussi mal ! Quant à juger sur pièces, voici (s'il y avait un volontaire pour traduire le plus fidèlement possible, je lui en serais reconnaissant) ; quant à ce que personnellement j'en pense : ne s'agissant pas d'un livre mais d'un propos d'interview, je ne vois pas pourquoi il faudrait lire les oeuvres complètes de Steiner pour juger ce propos en particulier ; il est évident que, pour peu que j'entende quoi que ce soit à l'Espagnol, ce propos ne me paraît en rien pendable. Impulsif sans doute, mais je partage le jugement sur le rock et le reggae, auxquels il faudrait ajouter le rap, bien plus irritant. Mais la nocence est-elle le privilège des Jamaïcains ? Là, pour tout vous dire, je crains que bien que non, autrement, je ne serais jamais dérangé et n'aurais aucun besoin de m'intéresser au PI--je n'ai dû rencontrer qu'un ou deux Jamaïcains dans ma vie :

"Es muy fácil sentarse aquí, en esta habitación, y decir: “¡El racismo es horrible!”. Pero pregúnteme lo mismo si se traslada a vivir a la casa de al lado una familia jamaicana que tiene seis hijos y escuchan reggae y rock and roll todo el día. O cuando mi asesor venga a casa y me diga que desde que se mudó a mi lado la familia jamaicana el valor de mi propiedad ha caído en picado. ¡Pregúnteme entonces! En todos nosotros, en nuestros hijos, y por mantener nuestra comodidad, nuestra supervivencia, si rascas un poco, aparecen muchas zonas oscuras. No lo olvide. Mire el problema vasco. ¡Cuánto me equivoqué con este tema! Cuando el asunto del IRA estaba llegando a su fin, publiqué un artículo considerando que con ETA pasaría lo mismo. Y no, ETA sigue matando."
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 19:45   Sophismes à l'occident
Mais qui a dit qu'il fallait lire les œuvres complètes de George Steiner pour parler de ces propos ? Certainement pas moi, en tout cas. (J'ai même cru dire exactement le contraire.)

— La nuisance (pardon de traduire le néologisme si cher à ce forum) est-elle le privilège des Jamaïcains ??? Voilà une question sacrément questionnante, dites-moi !!!

— Le rap est-il oui ou non plus nuisantif que le reggae ???

Je sens qu'on avance, qu'on avance…
08 septembre 2008, 20:17   Contexte
Pour bien éclairer le contexte, il me semble opportun de citer la phrase suivante :

En todos nosotros, en nuestros hijos, y por mantener nuestra comodidad, nuestra supervivencia, si rascas un poco, aparecen muchas zonas oscuras. No lo olvide.


En ce qui nous concerne, nous et nos enfants, et afin de préserver nos intérêts, notre survie, si tu grattes un peu, apparaissent bien des zones obcures. A ne pas oublier.


A l'évidence, pour Steiner, le propos précédent relève des "zones obscures".

(Je suis mécontent d'avoir employé "survie" pour supervivencia, surtout après comodidad. Dans ce cadre, supervivencia évoque pour moi son autre sens, qui est delui de la rente viagère).
08 septembre 2008, 20:32   Re : Steiner le Méchant
Merci, cher Jean-Marc. Steiner me paraît particulièrement grand de ne pas projeter la peur de l'autre sur autrui--et donc de se situer par delà l'antiracisme, qui est une forme de projection raciste, dans sa forme dogmatique. Cela met les pendules à l'heure, et me permet de me prononcer, de manière plus claire sur les propos de Steiner (au fait, Monsieur Joyce, ayant choisi de signer et de ne pas me dissimuler derrière un pseudonyme, il m'arrive d'être moins direct dans mes jugements, ce qui explique l'opacité de mes premières réactions aux propos de Steiner), que je trouve d'une grande intégrité morale, ce dont ne peuvent se targuer les agents de la doxa. Je crains, au vu du texte original de l'entretien, qu'Assouline se soit en effet montré regrettablement expéditif dans son jugement.
08 septembre 2008, 20:38   Indignité
Bien cher Bruno,


Permettez-moi en outre de trouver que la phrase :

On dirait du Chirac entre deux Coronas : l’arôme du mouton dans l’escalier remplacé par la musique de sauvages.


est une véritable indignité.
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 20:38   Obscures vous-mêmes !
Mais nom d'une pipe, en quoi est-il besoin de faire surgir des zones obscures, quand nous prétendons ne pas nous faire em… par la musique des voisins ? Pour être encore plus clair, Bruno Chaouat, il ne me plairait pas beaucoup plus d'avoir une voisine qui écoute la Tétralogie à plein tuyaux toute la journée ! Il se trouve seulement qu'il arrive plus souvent, beaucoup plus souvent !, que ceux qui nous imposent leur musique et leurs mœurs et leurs goûts ne soient pas des amateurs d'opéra, que voulez-vous que j'y fasse ?
08 septembre 2008, 20:45   Zones obscures
Bien cher Boris,


J'ai traduit cette phrase car M. Assouline avait jugé bon de l'omettre, et qu'elle me paraissait nécessaire pour comprendre ce que M. Steiner avait voulu dire (et, accessoirement, pour montrer que M. Assouline avait l'effaceur facile).
Utilisateur anonyme
08 septembre 2008, 21:05   Re : Steiner le Méchant
Jmarc, vous avez eu raison de traduire cette phrase.
09 septembre 2008, 10:03   Re : Steiner le Méchant
Steiner est un homme qui pense réellement, un défricheur. L'étendue de sa culture et sa virtuosité intellectuelle m'épatent souvent. Il peut se tromper, ses idées sont parfois contestables, comme ceux qui ont tant irrité Finkielkraut, mais ce ne sont jamais des propos de café du commerce. Ici, il se demande si l'on a le droit, en tant qu'intellectuel de salon bien à l'abri des désagréments du monde réel, de condamner sans appel les réactions (réactions qu'il leur arrive d'exprimer au comptoir du Café du Commerce) de ceux qui sont, eux et leurs enfants, quotidiennement exposés à ces désagréments et il se demande ce qu'il ferait si c'était son cas. Cela me paraît inattaquable.

Assouline est un moustique, a pain in the neck.
09 septembre 2008, 10:33   Re : Steiner le Méchant
Jusqu'à présent je ne connaissais qu'un intellectuel qui avait eu l'honnêteté... intellectuelle et le courage de poser ouvertement ce genre de questions c'est Finkielkraut. Je suis contente de voir qu'un autre d'aussi grande envergure la pose de la même façon ; preuve que le savoir et la grande culture ne sont pas incompatibles avec le bon sens.
Bien entendu, cher Bruno Chaouat, il n'est pas nécessaire d'avoir la même envergure d'esprit que ceux que l'on analyse pour les critiquer au besoin, à condition, précisément de ne pas verser dans la mesquinerie, la bassesse et la malhonnêteté intellectuelle.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 10:46   Re : Steiner le Méchant
Je remercie Marcel Meyer et Cassandre d'avoir dit très clairement ce que je tentais maladroitement de dire depuis le début.
09 septembre 2008, 11:36   Re : Steiner le Méchant
Citation
Je remercie Marcel Meyer et Cassandre d'avoir dit très clairement ce que je tentais maladroitement de dire depuis le début.

Moi de même...
09 septembre 2008, 13:21   Re : Steiner le Méchant
Eh bien, voilà qui est résolu. Il semble y avoir consensus.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 14:00   Re : Steiner le Méchant
Consensus, oui, consensus, non. Ce qui à moi me paraît étrange, tout de même, c'est la difficulté qu'on a, à chaque fois que ce genre de discours survient dans la sphère publique, à NE PAS en faire un problème. C'est comme si, à chaque fois, il fallait rendre des comptes… pour finalement s'apercevoir, après bien des circonvolutions inutiles, qu'il n'était pas nécessaire de s'en sentir redevable.

Que ce soit Steiner, Finkielkraut, Lévi-Strauss, Camus, Lambda, Tartempion, cette parole-là est immédiatement tordue en vertu d'une loi invisible et malveillante qui empoisonne n'importe quel propos, dès lors qu'il a émis certains signes. C'est bien en cela qu'on peut malgré tout affirmer que l'on vit dans une société totalitaire et perverse.
09 septembre 2008, 14:53   Re : Steiner le Méchant
N'importe qui peut se laisser aller à une toute petite pensée raciste, une toute petite envie de prononcer de facheuses généralités sur les liens entre origine et façons d'être, lorsqu'il est à bout de nerfs, et il faut vraiment vivre dans un environnement privilégié - et surtout ne jamais en être sorti - pour croire le contraire. Steiner doit marcher sur des oeufs pour émettre un truisme psychologique.

La remarque sur le "traitement de texte" est beaucoup plus provocante, à bien y réfléchir.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 15:33   Re : Steiner le Méchant
Steiner vise à l'épanouissement total en tant qu'être humain.

Ce que ce gland ne réalise pas, c'est qu'il n'y pas d'accomplissement humain.

Même tenté, c'est pour les truies.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 15:36   Re : Steiner le Méchant
J'en rajoute pour dire que vos espoirs concernant la perpétuation de la "culture française" sont vains : nous ne sommes pas à un millénaire près après tout.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 15:45   Re : Steiner le Méchant
Olivier, à partir de quand une généralité devient-elle "fâcheuse" ? À partir de quand "une toute petite pensée" devient-elle "raciste" ?

J'imagine que lorsque vous parlez de "généralité", il s'agit de dire "LES Jamaïcains font du bruit avec leur reggae". Et tout le monde pourra effectivement trouver assez facilement DES Jamaïcains qui ne font PAS de bruit avec leur reggae (et même des Jamaïcains qui écoutent Krenek ou Mendelssohn (doucement ou à plein volume)). En quoi cela invaliderait-il la constatation concrète, précise, réelle, et malheureusement fréquente, que ceux qui se disent des choses semblables à ce que Steiner se met en bouche n'ont pas tort, qu'ils n'ont pas tort tout simplement parce que ces nuisances, ils les ont vécues ? En quoi cela rendrait-il leur plainte "un tout petit peu raciste" ? Parce qu'ils accolent une nationalité à un reproche ? Leur faudrait-il dire : "Les Humains font du bruit avec leur reggae." ? Mais alors, il faudrait aussi changer la catégorie "musicale", et dire : "Les Humains font du bruit avec leur Musique." Et puis, on pourrait continuer, pourquoi incriminer la musique ? Tous les bruits ne sont-ils pas gênants, dès lors qu'ils sont subis ? Il faudrait donc dire : "Les Humains font du bruit." Mais comme nous savons que l'expression humaine est en majeure partie faite de sons, pourquoi reprocher à ces mêmes humains de faire du bruit ? N'est-ce pas le propre de l'humain de s'exprimer ? Etc. Et, de généralité en généralité, on ne saurait même plus de quoi l'on parle. N'est-ce pas cela, la langue de bois, la political correctness, qu'on ne sache plus jamais de quoi l'on parle ?

Si George Steiner a pris cet exemple-là, c'est précisément parce que c'est un lieu commun ! C'est bien le lieu commun qui est intéressant, pour lui. Personne n'a dit, et pas grand-monde ne pense, j'imagine, que naître jamaïcain implique qu'on aime mettre de la musique en général, et du reggae en particulier, très fort, sans tenir compte de ses voisins (sinon, pourquoi n'en allait-il pas de même jadis ?). Ce que ce lieu commun dit, c'est seulement qu'en les occurrences qui sont celles que la plupart des gens connaissent, il se trouve que, la plupart du temps, en raison de circonstances et de causes qu'il serait intéressant d'étudier mais qui se révéleraient certainement complexes, et même compliquées, les Jamaïcains qu'on rencontre aujourd'hui dans la vie réelle, dans des quartiers réels, dans des villes réelles, écoutent plutôt du reggae que Xenakis, et qu'il arrive souvent qu'ils soient relativement indifférents à leur voisinage. Cela revient à… observer. On observe, par exemple, que les très jeunes enfants à vélo, dans la rue, sont dangereux (mais pas toujours !), que les voitures roulent plus vite quand elles sont plus puissantes et plus chères à l'achat que celles qui sont bon marché (mais pas toujours !), que les femmes sont moins fortes et moins lourdes que les hommes (mais pas toujours !), que les Français aiment le fromage (mais pas toujours !) et les Américains aiment le chewing-gum (mais pas toujours !), que les rousses sentent plus fort que les blondes (mais pas toujours !). Ces observations, on les fait toute la journée, et sans elles, je crois qu'on serait condamné à rester cloîtré chez soi, que le monde serait illisible.

Le lieu commun est une observation qui n'est pas une loi, mais qui est tout de même pertinente, même si, par définition, elle est susceptible de changer radicalement dès lors que la réalité change. Parfois, c'est vrai, le lieu commun change moins vite que la réalité. Est-ce que cela le rend faux pour autant ? Les lieux communs permettent de s'y retrouver, je crois, dans le champ mouvant et accidenté du réel. Il ne faut pas leur faire dire plus qu'ils ne disent, mais pas moins non plus. Or, le politiquement correct déteste le lieu commun, il le trouve vulgaire, bourgeois, méchant, discriminant et stigmatisant. Seulement, le politiquement correct est bien plus dans la généralité que le lieu commun, il adore la généralité, le politiquement correct, il s'y complaît, puisqu'à force de prétendre ne voir que des cas singuliers il empêche de voir quoi que ce soit.
09 septembre 2008, 16:12   Re : Steiner le Méchant
" Olivier, à partir de quand une généralité devient-elle "fâcheuse" ? À partir de quand "une toute petite pensée" devient-elle "raciste" ? "

Eh bien, Boris, à partir du moment, précisément, où l'intelligence que vous, vous êtes capable de déployer en vue de relativiser et de mettre à bonne distance votre observation, cède la place dans un individu à la réduction, au système. A partir de ce moment où cet individu, quand il dit : " Les Jamaicains ", pense : " Tous les Jamaicains " et, d'une observation objective, expérimentale, il bascule dans une forme d'abstraction qui sème dès lors un soupçon automatique sur tout Jamaicain, perçu comme pollueur sonore potentiel. Son voisin devient l'emblême de son malaise. Et bien entendu je ne jette pas l'anathème sur ce " méchant ", mais il est bon de rappeler, sans tomber dans la moraline - du moins il me semble - que les pires exactions commises par un groupe sur un autre groupe ont été rendues possibles par une excroissance fantasmatique de certains détails du mode de vie, des moeurs, des goûts de l'autre.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 16:46   Re : Olivier le Méchant
Bon, me voilà ramené à mon point de départ. J'aurais mieux fait de laisser le dernier mot à Cassandre, tiens…
09 septembre 2008, 16:53   Re : Steiner le Méchant
Citation
que les pires exactions commises par un groupe sur un autre groupe ont été rendues possibles par une excroissance fantasmatique de certains détails du mode de vie, des moeurs, des goûts de l'autre.

Par cette remarque vous me surprenez, cher Olivier.

D'abord il faut dire la vérité sur le fait que les peuplades d'origine subsaharienne sont parmi celles qui ont le plus intériorisé l'emploi du lieu commun, du cliché simplificateur pour qualifier ceux qui n'appartiennent pas à leur tribu. Voir par exemple ce qui s'est passé au Rwanda entre les tutsis et les hutus ou en Afrique du Sud ces derniers mois où la chasse aux étrangers, soi-disants voleurs d'emplois, fut d'une férocité inouie.

Croire que les exactions commises à l'encontre des juifs, des tsiganes, etc... dans le contexte de l'Allemagne nazie s'expliquent pas une excroissance fantasmatique de certains détails de leur mode de vie est totalement faux. Les juifs en Allemagne n'étaient en aucune manière différents du reste de la population allemande.

Vous parlez d'abstraction mais je crois que tout l'anti-racisme est une abstraction n'ayant strictement rien à voir avec le réel. C'est un combat contre des ombres.
09 septembre 2008, 17:54   Juif et Allemagne
Je partage totalement l'opinion de Rogemi.


Que la délirante persécution des juifs se soit déclenchée en Allemagne, pays d'un peuple cultivé et évolué, d'une grande civilisation et avec une communauté juive très bien assimilée relève pour moi du mystère et pourrait faire l'objet d'une très longue discussion.

L'Allemagne n'était pas la Russie de l'ouest (j'entends par là la Russie occidentale proprement dite, l'Ukraine, la petite-Russie et la Lituanie), ni même la Pologne.
09 septembre 2008, 18:02   Re : Steiner le Méchant
Je pense avoir compris ce que vous vouliez dire, Cher Boris, malgré les apparences. Je souhaitais simplement dire que lorsque Steiner utilise le mot "raciste" ci-dessus, il entend bien quelquechose de précis, une réalité. Et je crois que si le "racisme" a une réalité, elle ne peut être que cette "excroissance" de l'imagination dont je parlais (mais en des termes assez balourds, je vous le concède). Vous dites en somme qu'observer une réalité n'est pas faire preuve de racisme, et que si les Jamaicains, etc., alors il n'y a aucune raison de ne pas le dire. Je souscris totalement à votre opinion, mais Steiner, lui, parle d'autre chose, il n'utilise pas le terme "racisme" en vain, il entend bien un jugement discriminatoire.

Et il me semble, en dépit du message de Rogemi, que ce jugement est une déformation du réel, pas une simple observation. Il nait de l'image négative que les individus se font des membres d'un groupe, d'une collectivité. Il me semble évident, s'il faut absolument prendre cet exemple, que les Allemands attribuaient aux Juifs un ensemble de caractéristiques physiques, morales, culturelles, ... sur lesquelles leur haine pouvait se focaliser.
09 septembre 2008, 18:10   Re : Steiner le Méchant
Cher Olivier, je retiens l'expression " truismes psychologiques " . Il me semble que l'époque est un vrai cimetière de ces truismes-là. Il faudrait en faire le dictionnaire nécrologique.
09 septembre 2008, 18:46   Re : Steiner le Méchant
L'anti-sémitisme allemand et slave est très ancien et l'élimination physique des juifs fut une constante revendication de la plébe.

Très tôt, dès le moyen-age les révoltes de paysans [celle par exemple soutenue par les anabaptistes de Münster] qu'on l’appelle aussi, en allemand, le Soulèvement de l’homme ordinaire (Erhebung des gemeinen Mannes), ou en français la révolte des Rustauds, exigèrent l'exclusion et la mort des juifs.

On pourrait dire qu'Hitler a réalisé le voeu le plus vivace de la populace.
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 19:23   Re : Steiner le Méchant
Cher Olivier, je reconnais bien là votre gentillesse habituelle, car, si vous prétendez comprendre ce que j'ai voulu dire, ce n'est pas mon cas, à me relire…
Utilisateur anonyme
09 septembre 2008, 19:27   Dictionnaire nécrologique des truismes psychologiques
Excellente idée, je trouve, Cassandre. On commence quand ?
09 septembre 2008, 19:30   Populace
Sur le point concernant la plèbe, vous avez raison. On trouve des comportements de ce genre en France aussi, avec les Pastoureaux.

Cependant, il me semble que, dans l'Allemagne de 1930, la population avait un bon niveau d'instruction, et que les classes dirigeantes étaient "neutres" sur la question.

Au contraire, dans la Russie du début du siècle, les classes sociales élevées (et même le Tsar Nicolas II) étaient d'un antisémitisme foncier.

Par ailleurs, les juifs allemands me paraissaient bien assimilés alors que la très grand majorité des juifs russes était cantonnée dans la zone spéciale.
09 septembre 2008, 20:43   Re : Juif et Allemagne
J'aurais beaucoup à dire sur le sujet mais je n'ai pas le temps ce soir.
09 septembre 2008, 20:55   Dites, dites...
Allez-y Cassandre !


Je vous aurais bien tendu un nouveau fil pour demain mais, comme vous le voyez...
09 septembre 2008, 21:01   Re : Steiner le Méchant
Vraiment, Cher Boris, votre message est très clair et très convaincant. Quant à moi je suis peu inspiré aujourd'hui.
09 septembre 2008, 22:10   Re : Steiner le Méchant
Oui, le message de Boris sur les lieux communs et les généralités m'a moi aussi paru brillant. J'ajouterais, pour faire bonne mesure, que s'il est d'usage de dénoncer les stéréotypes et les clichés, de pourchasser les lieux communs, moi, je n'ai rien contre le poncif. La langue n'est-elle pas le lieu commun par excellence, précisément ? Et qu'est-ce qu'un mot, à tout prendre, sinon une idée reçue ?
Les stéréotypes sont les petites coupures de la pensée, et il est bon d'en avoir toujours un peu sur soi pour les emplettes quotidiennes, ou pour rendre la monnaie.
09 septembre 2008, 22:53   Re : Steiner le Méchant
Je suis absolument d'accord moi aussi avec Boris.
j'aurais beaucoup à dire sur le sujet, mais je n'ai pas de temps ce soir.
Je me contenterai de cet aphorisme qui, l'âge venu, me paraît d'une justesse étonnante : " un peu d'expérience éloigne des lieux communs (ou clichés, ou préjugés) ; beaucoup y ramène. "
10 septembre 2008, 10:34   Re : Steiner le Méchant
Oui, bien d'accord aussi. L'expression "lieux communs" pourrait être aisément réhabilitée si, comme le fait Francmoineau, on s'en tenait aux mots qui la composent. Mais la connotation péjorative qui lui colle au train est trop forte et sans doute vaut-il mieux parler du sens commun.

A ce sujet, on peut développer un peu l'aphorisme cité par Cassandre. Je dirai que ce qui éloigne d'abord du sens commun, plutôt qu'un peu d'expérience, c'est le sentiment de révolte devant les injustices et les imperfections du monde réel alliées aux pulsions de rébellion qui sont la source d'énergie dont tout un chacun a besoin pour quitter le nid familial ; et l'on a tôt fait de trouver et de s'approprier la culture plus ou moins sommaire qui est susceptible d'appuyer cette révolte. Aussi les demi-sels et les demi-habiles sont-ils en général anticonformistes. Davantage d'expérience, une culture plus solide et plus diversifiée, l'apaisement des poussées hormonales juvéniles, des élans du cœur davantage passés par le filtre de la raison, permettent de dépasser la présompturuse illusion de penser tout par soi-même ; le sens commun - le communis omnium consensus - apparaît alors comme le fondement de la possibilité de la vie en commun, le fondement de la société, exactement comme la syntaxe - four filer la métaphore de Fransmoineau à la manière de Renaud Camus - apparaît comme le fondement d'un rapport civilisé à l'autre.
10 septembre 2008, 11:33   Re : Steiner le Méchant
(suite)

Le fait que le sens commun soit le fondement de la vie en commun n'implique pas qu'il ait toujours raison. Sans doute le sens commun, par le fait même qu'il est commun, court-il moins le risque de se tromper que l'individu, mais ce n'est pas une garantie : chacun sait que le sens commun a longtemps considéré comme une évidence inattaquable que la terre était plate. L'humanité a donc besoin, de temps à autre, d'être secouée par des anticonformistes, des dissidents, des rebelles, des défricheurs, des aventuriers de la pensée, des révolutionnaires.

Mais, depuis des décennies, nous vivons sous le régime de la rébellion obligatoire, de la révolte érigée en nécessité ontologique permanente; nous sommes en conséquence étouffés par le conformisme le plus plat, celui de l'anticonformisme, l'académisme le plus pauvre, le moins fécond, celui de l'anti-académisme. Rien de plus urgent donc, aujourd'hui, que d'être réactionnaire.
10 septembre 2008, 12:20   Re : Steiner le Méchant
Je suis entièrement d'accord avec Boris . J'irais même plus loin en rappelant d'abord ce truisme : n'est raciste, au sens propre du terme, que de mettre les moeurs, les comportements et les croyances d'une communauté sur son patrimoine génétique, considéré, à juste raison, comme constitué ad aeternam, une fois pour toutes, c'est-à-dire non modifiable sauf rarissimes et improbables mutations génétiques. Ainsi le raciste dira que les noirs, comme les Corses, sont irrémédiablement paresseux et les juifs rapaces. Ils ont le gène de la paresse et de la rapacité dans le sang. Rien, jamais, ne pourra les changer. En revanche mettre les caractéristiques d'une communauté sur le seul façonnage culturel, toujours modifiable par la volonté ou l'éducation, n'a rien de raciste. A signaler que dans les deux cas, patrimoine génétique ou culturel, et bien que la démarche soit la même, quand le point de vue est positif on ne parle jamais de " racisme " alors qu'un point de vue négatif passera toujours pour tel, à savoir une généralisation abusive, donc hautement condamnable. Or, qu'elle soit positive ou négative, ce genre de généralisation qu'on l'appelle " lieu commun " , " idée reçue " "cliché " ou " préjugé " est logique. En effet, qui dit identité culturelle, dit forcément, par définition, comportement identiques des personnes se réclamant de cette identité sinon comment distinguerait-on ces identités les unes des autres ? Et si, dieu merci, il existe toujours des exceptions, elles ne font, comme le dit la formule, que confirmer la règle. Par conséquent, loin d'être abusif par principe, généraliser est, au contraire, non seulement parfaitement logique mais, souhaitable quand sous le nom de lieu commun, la généralisation est le fruit de milliers d'expériences faites sur des dizaines et des centaines, voire des milliers d'années, par des milliers d'anonymes. Elle seule peut, en effet, donner les quelques clés, tracer les quelques pistes qui permettent, au départ, de ne pas avancer à l'aveuglette dans le maquis humain quand on en ignore encore tout. Bien sûr, il ne s'agit que d'un savoir approximatif qui demande à être affiné, nuancé par l'expérience individuelle. La connaissance sera finalement, le résultat de l'aller et retour entre généralisation et singularisation. Autrement dit la généralisation permet de voir la forêt, la singularisation, l'arbre.
On voit, alors, qu'exprimer, sans injures ni violences, à partir de faits établis, un point de vue négatif sur telle ou telle communauté culturelle, n'est aucunement du racisme mais seulement l'expression légitime d'une opinion critique, comme est légitime d'exprimer un point de vue positif ou négatif sur les communistes, les catholiques ou les bourgeois, à partir du moment où on ne les définit pas par leurs gènes. D' ailleurs, vrai racisme ou pas, seul est à combattre absolument le comportement qui consiste à chercher à nuire concrètement, en particulier par la violence physique, à des personnes qui n'ont commis aucun délit, ne vous ont personnellement strictement rien fait de dommageable, au prétexte qu'elles appartiennent à une communauté que vous n'avez pas en sympathie, que la faute en revienne à son patrimoine génétique ou à sa culture.
Mais, répondront beaucoup, exprimer ouvertement une antipathie pour telle ou telle communauté finit par aboutir au pire. Dire que les Maghrèbins sont agressifs et frimeurs préparerait, selon eux, de futurs camps d'extermination. C'est là que je ne suis pas du tout d'accord.
Une opinion négative quelle qu'elle soit relève de la libre expression de l'esprit critique qui devrait être la règle en démocratie. Et, justement, quand une démocratie fonctionne, aucune opinion n'est dangereuse parceque, dans ce cas, elle n'est pas exclusive, qu'elle se discute, que les opinions contraires ont la possiblilité et le droit de se faire entendre. Ce n'est que lorsque la démocratie n'existe pas ou plus, que s'installe le totalitarisme idéologique, que le danger devient réel. Quand l'opinion négative sur certain groupe humain devient le seul son de cloche autorisé, objet d'une propagande colossale, haineuse et mensongère répércutée vingt-quatre heures sur vingt-quatre, trois cent soixante cinq jours par an, par tous les médias et supports culturels, alors, là, oui, mais là seulement, le risque est grand . C'est la formidable propagande totalitaire nazie qui a permis l'extermination des juifs et non le simple antisémitisme. Si ce n'était pas le cas, alors il faudrait interdire toute critique de la bourgeoisie sous prétexte que la Russie soviétique a massacré des milliers de bourgeois. Pourtant, Dieu sait qu'en occident on ne se prive pas de les critiquer. De même c'est la formidable propagande haineuse, totalitaire, de la radio des mille collines au Rwanda qui a encouragé le génocide des Tutsis qui, pourtant, selon les connaisseurs vivaient depuis des siècles pacifiquement avec les Hutus. Et c'est la formidable propagande totalitaire anti-blancs de souche européenne sévissant dans nos médias qui prépare les massacres de nos enfants ou petits enfants.
Utilisateur anonyme
10 septembre 2008, 12:36   Re : Steiner le Méchant
Merci.
10 septembre 2008, 13:04   Re : Steiner le Méchant
Citation
C'est la formidable propagande totalitaire nazie qui a permis l'extermination des juifs et non le simple antisémitisme.

Bravo pour ce post mais il ne faut pas oublier que l'Allemagne d'Hitler était aussi une dictature féroce et que la moindre déviation, la moindre remise en cause de l'idéologie d'Etat était sévérement punie.

Par exemple de 1940 à 1945 plus de 50000 soldats de la Wehrmacht on été condamnés à mort par les tribunaux militaires et au moins 22000 furent éxécutés. Le motif le plus souvent retenu fut "Wehrkraftzersetzung" cad propos ou activités démoralisant ayant pour résultat d'affaiblir la capacité de l'Allemagne à se défendre. Il s'agissait en fait de broutilles mais l'issue était mortelle.

Par comparaison le nombre des condamnations à mort décrétées par les conseils de guerre alliés (tous ensemble) ne dépassa pas 800.
10 septembre 2008, 13:24   Aspect dictatorial
Cet aspect dictatorial, très justement souligné par Rogemi, me semble absolument essentiel.

La propagande, quelle que soit sa force et son degré de sophistication, finit toujours par échouer si elle n'est pas appuyée par un outil répressif ou militaire. Pour être concret, les massacres au Rwanda ont eu lieu effectivement parce que certaines radios avaient excité les populations, mais surtout parce qu'il y a avait eu création de bandes armées spécifiques.


Pour en revenir à l'Allemagne, je me suis toujours interrogé sur l'extension exacte de l'antisémitisme dans la population sous l'ère nazie. J'ai l'impression que le tableau qu'on nous dépeint d'une population fanatique est inexact, et qu'à côté d'un bon nombre de fanatiques il y eut surtout beaucoup de gens pris au piège entre suivre ou disparaitre.

J'ai en tête les cas concrets de bon nombres de nationalistes allemands qui évitèrent l'écueil de l'antisémitisme et qui purent affirmer leur position, uniquement parce qu'ils étaient "intouchables". Je pense en particulier à Ernst von Salomon, qui participa à l'assassinat de Rathenau et dans les écrits duquel on ne trouve aucune trace d'antisémitisme, je pense aussi à Sepp Dietrich qui fut un criminel de guerre, qui était d'une fidélité de chien à Hitler mais qui ne se gêna pas pour dire ce qu'il pensait des mesures contre les juifs (je crois me souvenir qu'il rendait Himmler enragé en l'appelant "Reichsheini"). Moins connu est le cas d'Ernst-Werner Techow, seul survivant avec von Salomon des assassins de Rathenau, et qui sauva, semble-t-il, des centaines de juifs pendant l'holocauste (à vérifier).

Il me semble évident que si des personnes aussi nationalistes, aussi peu regardantes sur les moyens, eurent cette attitude, il se serait sans doute trouvé bien d'autres personnes dans le peuple pour agir de même. Il y en eut sans doute. Seulement, les gens du peuple étaient sous la botte d'un régime totalitaire et policier impitoyable.
10 septembre 2008, 14:15   Re : Steiner le Méchant
Je donne deux petits exemples pour que chacun puisse réaliser l'atmosphère irrespirable et la violence inouie qui régnaient dans l'Allemagne nazie. Dans les derniers mois précédents la défaite et alors que celle ci était chose acquise la folie ne s'arrêta pas.

Mon beau-père (décédé) racontait qu'il avait mis plus de 10 jours pour parcourir à pieds et uniquement de nuit les derniers 70 km pour arriver à la maison. Pourquoi ? parce que des bandes de SS pendaient sans jugement tout soldat érrant.

En 1945 quelques minutes avant l'arrivée des troupes américaines dans la ville où j'habite le maire en poste se porta à la rencontre des chars alliés avec un drapeau blanc pour éviter que le sang continue à couler. Il paya de sa vie cet acte de courage puisque des SS le poursuivant en voiture, le rattrapérent et l'abattirent d'une balle dans le dos.
10 septembre 2008, 15:04   Montée du nazisme
Avez-vous lu, bien cher Rogemi, "Als Gestern Heute war", qui montre de façon très "factuelle" comment la population allemande fut prise en otage par le nazisme ?
10 septembre 2008, 15:14   Re : Montée du nazisme
Je ne connais pas cet ouvrage, mais je trouve son titre extrêmement beau !
10 septembre 2008, 15:24   Re : Montée du nazisme
" il ne faut pas oublier que l'Allemagne d'Hitler était aussi une dictature féroce et que la moindre déviation, la moindre remise en cause de l'idéologie d'Etat était sévérement punie. "
" La propagande, quelle que soit sa force et son degré de sophistication, finit toujours par échouer si elle n'est pas appuyée par un outil répressif ou militaire. "
Cela va sans dire. Toutefois, la propagande idéologique ou raciste sans appareil militaire peut déboucher sur des pogroms ou la guerre civile, alors que l'appareil militaire, en l'absence de propagande, ne perpètrera pas de massacres idéologiques ou racistes.
Utilisateur anonyme
10 septembre 2008, 15:32   Re : Steiner le Méchant
« Autrement dit la généralisation permet de voir la forêt, la singularisation, l'arbre. »

J'ajouterai que si voir l'arbre est passionnant, il est souvent plus utile de commencer par voir la forêt. Et que ne voir que des arbres revient à ne plus rien voir du tout. Si l'on voit en permanence chaque trait d'un visage, on ne voit plus le visage.

La généralisation de la musique dodécaphonique dans les années 70 a mis cela en évidence. Au contraire de la musique tonale, qui privilégiait certaines notes (sept) au dépend des autres, elle a voulu les mettre toutes (les douze) sur le même plan. Le but était une plus grande richesse harmonique, le résultat a été une grisaille uniforme.
10 septembre 2008, 15:43   Re : Steiner le Méchant
Citation
Als Gestern Heute war

Non cher Jmarc mais quel en est l'auteur?
10 septembre 2008, 22:12   Re : Steiner le Méchant
Als das Kind Kind war,
wusste es nicht, dass es Kind war,
alles war ihm beseelt,
und alle Seelen waren eins.
11 septembre 2008, 00:44   Als Gestern Heute war
A vrai dire, je ne parviens pas à retrouver l'auteur.

C'est un ouvrage que j'ai lu il y a une vingtaine d'années, une monographie sur un ville moyenne de Basse-Saxe, jecrois.
11 septembre 2008, 14:45   Re : Steiner le Méchant
Merci mais le problème réside dans le fait que le nombre d'occurences est énorme et on ne sait plus où donner de la tête. Mais votre remarque sur la Basse-Saxe devrait être déterminante.
11 septembre 2008, 14:52   Re : Steiner le Méchant
Pourrait-il s'agir de ce livre ?

Als gestern heute war. Sie graben nach der Vergangenheit

Ein Domino-Buch mit besonders sorgfältig ausgewählten Geschichten und Bildern.Davon erscheinen nur 4-6 Bücher jährlich.
Autor: Div. Autoren
Erscheinungsjahr: 1976
Verlag: Deutsches Jugendschriftenwerk, Domino Verlag
Seitenzahl: 96

Il semble que cet ouvrage soit destiné à la jeunesse....
11 septembre 2008, 16:42   Livre illustré
Non, ce n'est pas cela.


Je me demande si je ne fais pas une reconstitution du titre, et si "als Gestern Heute war" était bien dans ces ordre, ou bien si ce n'était qu'un sous-titre.

J'ai cherché avec Stadt, Nazismus, Nationalsozialismus, NiederSachsen...


Je vais essayer à partir d'une bibliothèque réelle...
Bien cher Rogemi,


J'ai réussi (au prix d'un effort de recherche dans des grimoires concernant les ouvrages de mes bibliothèques qui ne sont pas en un seul lieu) à identifier la ville et l'ouvrage de référence.


La ville est Northeim, qui est bien en Basse-Saxe.

L'ouvrage de référence est :

"The Nazi Seizure of Power: The Experience of a Single German Town" de William Sheridan Allen.

De méoire, c'est au sein de ce livre que figure la référence qui permettra de retrouver les "Als Gestern..."
11 septembre 2008, 19:55   Souvenir saisissant
J'avais gardé de ce livre un souvenir saisissant : il montre comment le nazisme est soutenu au départ par une minorité, accepté ensuite par une majorité, cela dure un peu grâce à la stabilisation économique, puis la population déchante et la terreur s'installe, bien avant la guerre déjà.

Pour avoir une idée des laps de temps (je dis cela pour des liseurs moins informés de ce pays à cette période), je rappelle que la Nuit de Cristal n'eut lieu qu'en novembre 1938. Il y eut plus de cinq ans de "montée en régime" de l'appareil inhumain qu'on sait.

Dans mon idée, la nazisme fut évidemment la cause du martyre des juifs, mais aussi, et on l'oublie, l'horreur pour une large partie des Allemands dits "Aryens".
11 septembre 2008, 20:05   Brecht
Je ne sais, cher Rogémi, si vous retrouverez le texte allemand, mais je me souviens à peu près de la traduction française du "nouveau chant final" de l'Opéra de Quatre Sous, publié circa 1946, et qui s'adresse au peuple allemand, perçu comme victime du nazisme :

(traduction libre et du domaine du souvenir)



Soyez plus indulgents aux petits
Et un peu moins à tous les grands voleurs
Qui vous ont dépouillés et trahis
Vous jetant dans la guerre et l'horreur
Tous ceux qui ne parlaient que de pendre
Et implorent maintenant pardon
Etouffez-les avec les cendres
Qui restent de vos jolies maisons.
11 septembre 2008, 20:16   Brecht bis
Brecht n'est pas forcément en odeur de sainteté sur ce forum, mais je trouve ce texte parfaitement juste à propos de Göring (je reconstitue de méoire, il y a sans doute des fautes) :

Der süchtige Reichsmarschall, der Klown und Schlächter
Erst saht ihr halb Europa ihnen stibitzen
Dann saht ihr ihn in Nürnberg dafür schwitzen
Noch immer fetter da als seine Wächter.
Und auf die Frag warum hat er das gemacht
Sagt uns der Mann er tat’s für Deutschlands Ehr !
Als ob er davon fett geworden wär!
Ich möchte da das Huhn sehn, das nicht lacht!
Warum der Nazi war, ist sein privat Problem.
Nur der im Wohlstand lebt, lebt angenehm.

Ce furent des fous doublés de crapules.
Utilisateur anonyme
11 septembre 2008, 20:45   Re : Brecht bis
Vous avez une excellente méoire, Jmarc ! Je vous l'evie !
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