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De l'urgence d'être réactionnaire

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
31 décembre 2011, 10:22   De l'urgence d'être réactionnaire
(Message supprimé à la demande de son auteur)
L'article sur le politiquement correct est particulièrement excellent !
Très bon article en effet. Voir sur le sujet de la "démocratie télévisuelle" l'ouvrage de Neil Postman : Se distraire à en mourir, écrit en 1985 et réédité récemment aux éditions Pluriel.
La contribution de ce M. Hude dont je n'avais jamais entendu parlé, m'aide grandement. Merci aux philosophes qui m'offrent une clairière dans le brouillard. Qu'ils ne tardent pas à revenir car le brouillard, lui, toujours, revient. Accessoirement, merci à Didier. Je souhaite que ce dernier, arpentant les longues plaines du désœuvrement  — pour ne pas dire de l'oisiveté — a au moins fait l'effort de dresser une sentinelle veillant sur ce site Magistro qui semble proposer régulièrement des perles.
01 janvier 2012, 22:07   Chapeaux de roues
Non seulement le brouillard revient, cher Eric, mais en plus on peut le tenir pour constitutif du déroulement et de l'existence même de ce qu'il brouille ; je me plonge toujours avec un plaisir renouvelé dans ces étonnantes notes du Tel quel de Valéry :


« Le monde continue ; et la vie, et l'esprit, à cause de la résistance que nous opposent les choses difficiles à connaître. À peine tout serait déchiffré, que tout s’évanouirait, et l'univers percé à jour ne serait pas plus possible qu'une escroquerie dévoilée ou un tour de prestidigitation dont on connaîtrait le secret. »


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(« La nécessité pragmatique de sortir de cet état force la démocratie postmoderne à imposer certaines valeurs, autoritairement, et en les présentant comme des croyances absolues, parce qu’elle y voit des conditions de la paix. Mais ces croyances absolues sont tellement illogiques dans ce contexte, que la réflexion à leur sujet leur serait fatale. »

Il y a quelque chose qui me semble captieux dans cet argument, qui met tout à plat sur le même plan : tout système de pensée n’acquiert de sens que dans un cadre de référence qui en constitue les conditions de possibilité. Même les systèmes formels les plus rigoureux doivent admettre un certain nombre de postulats de base, d'axiomes que l'on tient pour acquis, pour qu'un discours cohérent puisse exister. Or ces postulats ne sont jamais justifiables en soi, et soumis aux mêmes procédés de validation que ce qu'ils rendent possible.
L'exemple le plus courant à cet égard est la raison elle-même : on se sert de certaines règles logiques pour démontrer quelque chose, mais il serait absurde de vouloir démontrer ces mêmes règles, qui constituent de ce fait les règles de la pensée qui sont admises comme telles, sans lesquelles il n'y aurait pas de pensée du tout. Ne se situant pas sur le même plan que les opérations qu'elles rendent possibles, elles doivent être soigneusement distinguées du niveau de pertinence qui est celui du champ d'application de la raison, sans quoi on tombe fatalement dans l'imbroglio des paradoxes caractéristiques de l'auto-référencement. C'est pourquoi elles ne peuvent être ni logiques ni illogiques, ni contredites ou absolument validées. L'impératif de cette distinction par laquelle ces méta-règles doivent être tenues à l'écart et en aucun cas elles-mêmes sujettes à ce qu'elles énoncent, Russel l'a très simplement formulé dans sa Théorie des Types : « Tout ce qui contient le tout d'un collection ne peut en aucun cas être membre de cette collection. »

Sous l'angle d'attaque de M. Hude, on ne voit pas pourquoi ce qui est vrai et nécessaire concernant un système rationnel ne le serait pas, à fortiori, de méta-valeurs fondant un système de croyances : ce qui rend possible l'exercice de la démocratie n'est pas redevable du même type de justification que ce qui a lieu à l'intérieur du cadre institué par lui.
Autrement dit, s'il y a exercice d'un certain relativisme à l’intérieur d'un cadre de pensée donné, ce même relativisme ne peut se porter sur l'ensemble des réquisits fondamentaux en garantissant l'usage, par souci élémentaire de cohérence justement. C'est la contradiction dénoncée entre deux termes appartenant à des niveaux d'intégration différents et incompatibles qui est apparente, et semble relever d'un paralogisme. )
Tiens ! Vous faites revenir à ma mémoire, cher Alain, que j'ai dû lire ce livre lorsque j'étais étudiant (du temps où les animaux parlaient). Je crois même qu'il était en collection Idées et que la couverture devait être à dominante verte avec des moirures marron. Que me reste-t-il de cette lointaine lecture ? Rien que je puisse formuler...
À vous lire, cher Alain, il me semble que quelque chose qui a à voir avec ce que vous dites, m'avait effleuré l'esprit sans que je puisse pousser l'analyse. Une mise sur le même plan, une soumission à la même logique de propositions d'ordre différents. Ce qui ne me paraît pas ôter grand chose à la pertinence globale de cette communication.
Plein veau et doré à l'or fin de la Pléiade pour moi, cher Eric, tout le recueil des pensées de labo tenant en un seul volume et commençant de fulgurante façon par l’immarcescible Teste, se rengorgeant tel un paon étalant ses moirures : La bêtise n'est pas mon fort.
Eh bé...
Mais la pertinence de cette communication ne tient-elle pas avant tout à la contradiction y dénoncée ? Si les objets de cette dénonciation ne peuvent entretenir entre eux un rapport permettant une telle contradiction, quelque chose de cette pertinence ne s'en émousse-t-il pas ?
Quelque chose,si, peut-être bien. Que l'année qui vient vous garde en bonne santé et vous offre autant de tranquillité qu'il se peut, cher Alain. Que la nuit vous soit douce.
Merci Eric ; La tranquillité certes, mais un peu d'excitation, et de nerveux galops de temps en temps, ce sera très bien aussi... Je vous souhaite les mêmes choses, et plus encore.

(J'ai un peu modifié l'ordre des éléments dans la phrase, parce que "les nerveux galops" etc., euh, c'était à moi que je les souhaitais...)
Bon, si vous commencez l'année en évoquant Valéry, c'est plutôt bien parti...
(By the way, quelqu'un sait-il où (et si) l'on peut se procurer les fac-similés de ses Cahiers ? J'en avais tenu un exemplaire entre mes mains, jadis, et qui m'avait ébloui, à la fois comme lecteur et comme fétichiste.)
L'édition du CNRS est assez rare. Il faut être patient... et mettre de l'argent de côté.
Je me contente des Pléiades. Je crois qu'il y a des publications en cours ou des projets.

Le site
Je vous remercie cher Marc, le site que vous indiquez est très intéressant. Cependant il ne permet d'avoir accès qu'au texte lui-même (ce qui est déjà beaucoup !) — Je faisais allusion, pour ma part, à un fac-similé qui offrait une reproduction exacte des pages manuscrites de ces cahiers, avec la si belle graphie valéryenne et les mystères et qualités y afférents...
L'édition en fac-simile est celle du CNRS

Livres rares
Je me contente des Pléiades.

LOL.
Entre la révocation de l'édit de Nantes et le politiquement correct, la voie libérale serait un pluralisme « tempéré par une morale commune sérieuse » et un « pouvoir légitime ».

La difficulté d'établir un pluralisme « tempéré par une morale commune sérieuse » et un « pouvoir légitime » ne serait pas insurmontable si les modernes se contentaient de dire qu'il est vrai qu'il n'y a pas de vérité : il suffirait de pointer le paradoxe, et pour rétablir l'idée de vérité, de souligner et développer la première proposition, « il est vrai que ». Seulement, les modernes énoncent qu'au regard de la seule vérité qu'ils reconnaissent, celle des sciences confirmées par les réussites techniques, il n'est pas d'autre vérité concevable, aucune "morale commune sérieuse", donc, ni aucun "pouvoir légitime".
« Sous l'angle d'attaque de M. Hude, on ne voit pas pourquoi ce qui est vrai et nécessaire concernant un système rationnel ne le serait pas, à fortiori, de méta-valeurs fondant un système de croyances : ce qui rend possible l'exercice de la démocratie n'est pas redevable du même type de justification que ce qui a lieu à l'intérieur du cadre institué par lui.
Autrement dit, s'il y a exercice d'un certain relativisme à l’intérieur d'un cadre de pensée donné, ce même relativisme ne peut se porter sur l'ensemble des réquisits fondamentaux en garantissant l'usage, par souci élémentaire de cohérence justement. C'est la contradiction dénoncée entre deux termes appartenant à des niveaux d'intégration différents et incompatibles qui est apparente, et semble relever d'un paralogisme. ) » Alain Eytan.

M. Hude explique comment le Politiquement Correct exclut l'usage de la raison de son système de croyance. Le PC, en cela, constitue bien une exception et ne peut être rangé au nombre des civilisations véritables dont M. Hude donne un exemple en évoquant « un libéralisme différant de l'«état de nature ».

Que l'axiome soit indémontrable ne signifie pas qu'il ne soit pas « normé par la vérité ». Au contraire, la vérité de l'axiome impose son évidence à qui le comprend. Ce n'est pas le cas des notions première du PC qui ne sont pas définies : la tolérance, certes, mais quelle tolérance ? Le pluralisme, certes, mais quel pluralisme ? La tolérance et le pluralisme PC ne présentent aucune évidence et, incompréhensibles, interdisent donc d'user de ces principes confus avec raison.

La pertinence des axiomes se vérifie par la cohérence des propositions qui s'en déduisent. M. Hude observe que les axiomes du PC imposent l'incohérence des propositions comme la règle. Les exemples abondent. Madame Kocziusco Morizet défendait, l'autre soir, la Diversitude, en ces termes : je n'imagine pas une société où tout le monde serait comme moi. Elle confondait là, et personne ne s'en offusqua, l'individu et la société (une société homogène n'est pas un agrégat de clones), l'individu essentiel et l'exemplaire d'une collection (deux personnes ne seront jamais deux clones au sens où l'entend Alcmène Kocziusco Morizet).

Les propositions se déduisant de l'axiome ne le contredisent pas. M. Hude constate que des propositions relativistes se déduisent d'axiomes absolutistes.
08 janvier 2012, 04:04   Petits colimaçons
» M. Hude explique comment le Politiquement Correct exclut l'usage de la raison de son système de croyance

Je ne trouve pas, cher Pierre Henri (je vous demande par avance pardon pour l'aspect un peu tortueux de la phrase qui suit, mais si on s'accroche un peu on y arrive !) : M. Hude prétend expliquer pourquoi il serait impossible d'être tolérant au sein d'une société sans pouvoir révoquer en doute le principe selon lequel tout objet de cette tolérance devra impérativement être astreint au respect de cette tolérance comme fondement permettant l’exercice même d'icelle, ce que ne pouvant faire (la révocation en doute), on se retrouverait alors dans un état de contradiction tel que l'exercice même de la raison serait compromis ou impossible.
À mon sens, il fait là captieusement usage de la raison pour condamner un état de fait irrationnel (entendez par là : qui ne peut être exprimé par des procédés strictement rationnels) qui non seulement n'est pas incompatible avec la raison, mais en constitue même une condition.
Voulez-vous que je vous dise, il me semble que Régis Debray, pour une fois, a bien résumé la chose : « Il est rationnel qu'il y ait de l'irrationnel dans les groupes, car s'il n'y en avait pas, il n'y aurait pas de groupe. »
Le seul moyen de préserver cette irrationalité fondatrice et nécessaire sans tomber dans la contradiction est de respecter scrupuleusement les niveaux de langage et de pertinence, ce qu'à mon avis M. Hude ne fait pas, et de ne pas mélanger valeur et méta-valeur : c'est en ne respectant pas les limitations inhérentes à l'exercice de la raison qu'on crée des contradictions qui n'existent pas.
Accessoirement, ce n'est pas non plus une nouvelle mirobolante qu'il n'y ait pas de raison sociale sans irrationnalité ni de sociétés sans mythes (lesquels constituent les "absolus" dont il parle).


» Que l'axiome soit indémontrable ne signifie pas qu'il ne soit pas « normé par la vérité ». Au contraire, la vérité de l'axiome impose son évidence à qui le comprend

Je ne vois pas exactement comment ce qui constitue la norme de la vérité, pour reprendre vos termes, pourrait être à son tour "normé" par cette vérité, à moins de vouloir dire que cela soit normé par soi-même, en conséquence de quoi l'on retrouverait, fâcheusement réintroduit par la petite porte de derrière, l'absolu qu'on avait claironné avoir vaillamment chassé par la grande (c'est d'ailleurs tout à fait à propos, et ne vous rappelle-t-il pas le titre d'une toile de Dali ?). Je ne vois pas non plus comment comprendre et concilier ce qui suit (l'évidence de la compréhension de la vérité de l'axiome) avec le fait qu'il est toujours possible de construire des systèmes cohérents à partir de formules initiales (les axiomes) qui soient incompatibles entre elles, ce qui nous placerait alors face à une multitude de "vérités évidentes" contradictoires...


» Les propositions se déduisant de l'axiome ne le contredisent pas

Disons cela autrement : vous conviendrez, cher Pierre Henri, que certaines propositions initiales parfaitement cohérentes et bien construites en elles-mêmes peuvent nous mener à des apories insolubles si elle se prennent elles-mêmes pour prédicat de ce qu'elles énoncent ; c'est ce qui est arrivé à Epiménide, par exemple, et à Russel lorsqu'il s'est attelé à la rédaction de son Principia Mathematica, ce pourquoi il a formulé sa Théorie des Types censée prévenir de tels cercles foncièrement vicieux, en séparant et distinguant les niveaux de référence. C'est ce qui arrive à M. Hude, quand il veut appliquer à la Tolérance comme principe de niveau supérieur la tolérance de l'intolérance, et par là nous offre un beau bordel.
Cher Alain Eytan, enfin un peu de temps pour vous répondre. M. Hude échoue peut-être à expliquer le totalitarisme mou. Cependant, il se démarque lui-même du "raisonnement captieux" qui prétend démontrer l'impossibilité logique de la tolérance en invoquant, contre l'intolérante tolérance du politiquement correcte, une tolérance libérale véritable. Reste donc à ses lecteurs à poursuivre la critique peut-être manquée mais indispensable, celle du relativisme au nom du pluralisme et celle d'une rationalité déréglée au nom de principes clairs et distincts qui feraient leur part aux raisons du coeur.

Il est vrai que la raison est malade qui nomme contre-pouvoir le pouvoir clérical des médias, qui nomme populisme les expressions souverainistes d'un peuple qu'elle déclare souverain, qui, pour déclarer le peuple souverain, invente l'impossible intérêt général, puis continue de le déclarer souverain bien après avoir rejeté l'impossible intérêt général, qui, en toute chose, se paye de mots : libres, égaux, etc. Oui, il y a de "l'irrationnel dans les groupes" qui ont des raisons que la raison ignore, il y a même des sociétés de part en part irrationnelles, mais il n'y a pas de bonne société qui pervertisse la raison. L'empereur, fils du soleil. Voilà une formulation poétique d'un principe politique rationnel. Les mythes règlent la vie des Machigengas. On ne peut leur reprocher de mal user de la raison, ils n'en usent pas du tout. Notre ordre politique est issu des Lumières. Il est donc urgent de sauver notre raison des troubles graves où l'absurdité politique l'entraîne.

La norme d'une société n'est pas une simple convention. "L'absolu réintroduit par la petite porte de derrière" se situe au-delà de l'axiome : l'évidence et la compréhension de l'axiome supposent une subjectivité, une responsabilité, un sacrifice au fondement de la vérité de l'axiome, ceux d'Euclide ou du pouvoir légitime à l'existence duquel M. Hude subordonne un véritable pluralisme. Comment l'axiome d'une société pourrait être évident et compréhensible quand aucun pouvoir, aucun dieu, aucun mythe n'en rend compte ?

Il y a Euclide et il y a Einstein. Les propositions déduites de différents axiomes ne sont pas contradictoires en cela même qu'elles se déduisent d'axiomes différents. La notion de contradiction n'est pertinente qu'au sein d'un même axiome pour en assurer ou non la validité. La géométrie d'Einstein ne contredit nullement celle d'Euclide, toutes deux valables en leurs domaines respectifs. Le pluralisme est à clairement distinguer du relativisme (pas de vérité) et du perspectivisme (une seule vérité, plusieurs points de vue). Vous devez commencer à savoir l'espoir solitaire que je place dans la complémentarité des régimes et des ordres de réalité afin que la totalité sociale dont chacun se nourrit soit une et multiple. Je préfère cette option à la solution des penseurs libéraux de la communauté qui, renversant la formule du totalitarisme mou (pas de tolérance pour les ennemis de la tolérance) placent en haut, dans la totalité sociale, l'agnostique tolérance et en bas, dans les communautés vivantes, l'intolérant bien commun.

On commence à deviner la distinction à faire entre pluralisme et libéralisme. Le triomphe, aux dépens du pluralisme, du relativisme (avec sa raison folle) et du totalitarisme mou (avec ses chiens de gardes et son auto-censure) doit beaucoup à l'hostilité libérale du pouvoir. L'exercice du pouvoir a été soupçonné et affaibli par division. L'individu souverain, le citoyen, est son ultime division. Il est logique que dans le temps même où l'on discréditait le pouvoir, on supprima, paradoxalement, les limites de son ressort car le citoyen se détourne aussitôt de la chose publique (pour le soin de laquelle il délègue son pouvoir) et réserve l'exercice effectif de sa souveraineté (qu'il conserve entière) à ce qui lui est étranger, à la sphère privée jusqu'au fondement spirituel de son être. Le premier mouvement (vers un pouvoir aliéné) est libéral, le second (vers un pouvoir illimité) démocratique. La formule classique du pouvoir absolu et limité est renversée. On comprend donc l'étrange cours qui peut irrésistiblement conduire le libéralisme vers l'hyper-démocratie : les personnes règlent leur vie en citoyens du logis qui font de la vie l'enjeu du pouvoir, de la technique, du calcul et du contrat. La liberté est confondue avec le droit et le choix, les idées avec les idéologies, la légitimité avec la légalité, l'esprit avec le bien-être (la carte des sectes s'allonge dans les pays de liberté économique et l'irreligion dans les pays d'économie socialiste), la totalité sociale et la somme des individus (ceux qui confondent société homogène et collection de clones se tatouent pour constituer à eux seuls leur propre tribu)... Bref, la dispersion du pouvoir hors les institutions a répandu la confusion, l'absurdité et l'intolérance soupçonneuse dans la société.
Les traditions me donnent, peut-être à tort, l'impression, sans doute simpliste, qu'elles sont à l'humanité ce que les espèces sont à la nature : des créations au petit bonheur la chance qui se perdent dans la nuit des temps et où le hasard (évènements imprévus, illusions, imaginaire et charisme de personnalités ambitieuses tombant à pic, décision arbitraires prenant, au gré des circonstances, force de lois, etc.) a compté au moins autant que les nécessités géographique et climatique. Tantôt le bricolage est réussi, tantôt il donne le sentiment d'un résultat poussif, d'un cafouillage laborieusement compliqué, à preuve, entre mille autres, la langouste et les femmes-girafes, le crocodile et les femmes infibulées, le rhinocéros et les négresses à plateau, les hippopotames et la réduction de têtes, l'anthropophagie, l'enfer promis aux mangeurs de porcs et buveurs de vin , et j'en passe Rien ne peut limiter le foisonnement sans queue ni tête de ce qui est né en dehors de toute raison, hormis celle d'exister .C'est à ce prix que la diversité existe. Mais une fois la Raison apparue, si l'on considère celle-ci, non comme un simple avatar contingent propre à la seule civilisation occidentale, mais comme un progrès de l'évolution humaine au même titre que l'apparition du pouce opposable, de la position debout, de la conscience en général et individuelle en particulier, les choses ne peuvent demeurer en l'état. C'est une fois acquise la conscience de la mort, qu'homo sapiens a été contraint de s'interroger sur la possibilité d'un au-delà, d'enterrer les cadavres, d'inventer les premières religions et avec elles les premières traditions ; et son successeur, une fois instruit par la Raison, a été tout autant contraint de passer à l'étape suivante, d'analyser, de corriger , voire , parfois, de supprimer lesdites traditions. Relativiser la Raison au motif qu'elle ne serait qu'occidentale, reviendrait, d'une part, à la dénier aux autres peuples et donc à les déprécier grandement ( il n'est que de voir la levée de boucliers contre Benoît XVI, quand on l'a soupçonné d'accuser l'islam de ne pas faire usage de la Raison) et serait, d'autre part, aussi aberrant que de vouloir relativiser la conscience . Certes il n'est pas bon d'abuser de la Raison, mais il est pire de la négliger : car contrairement à la Raison la déraison n'a pas de limites.
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