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"Doit-on faire la guerre contre une idéologie ?" (Commissaire Molotov)

Envoyé par Francis Marche 
Une grande question actuelle, que certains se posent avec raison, est la suivante: faut-il, après l'avoir dénoncée comme mauvaise et maligne, faire la guerre à une idéologie qui arme des tueurs et justifie des destructions, s'affirme l'ennemie des libertés et des droits que nous respectons, lesquels font l'armature de la Civilisation ? Les assassins qui s'en revendiquent agiraient-ils autrement, ou au contraire tout semblablement, si leurs conditions de vie étaient améliorées, si des perspectives d'un progrès matériel de leur état leur étaient offertes pour de bon ? Abandonneraient-ils alors leurs intentions criminelles ou destructrices et se détourneraient-ils de l'idéologie menaçante qui les sous-tend pour adhérer aux valeurs fondamentales de la civilisation capable de pourvoir à leurs besoins ? Doit-on partir en guerre, prendre les armes, parce qu'une idéologie s'érige contre nous et vous vise à travers ce qui symbolise notre civilisation (la démocratie, la pluralité d'opinion) y compris lorsqu'elle nous met en mire avec des armes de guerre ? Quel est le meilleur, ou le seul moyen de faire la guerre à la guerre que nous déclare l'idéologie ? Et in fine faut-il abandonner l'Afghanistan aux tueurs, lapideurs, et propagateurs de la Charia ou au contraire leur faire la guerre comme suppôts d'une idéologie, soit, au fond, comme l'on faisait autrefois des guerres de religion ?

A cette question pour épreuve de philosophie du bac, un homme au patronyme célèbre, Vyacheslav Mikhailovich Molotov (1890-1986), Commissaire du peuple aux Affaires étrangères, apporta une réponse sans appel, c'était le 31 octobre 1939 à une réunion du Conseil suprême de l'URSS:

Le gouvernement anglais a annoncé que le but de la guerre contre l'Allemagne n'était rien de plus ni rien de moins que "la destruction de l'hitlérisme". Cela veut dire que les Anglais et les Français ont déclaré une sorte de guerre idéologique à l'Allemagne, qui rappelle les guerres de religion de l'ancien temps... Absolument rien ne justifie une guerre de ce genre. On peut admettre ou refuser l'idéologie hitlérienne, comme n'importe quel autre système idéologique. C'est une affaire d'opinion publique. Mais il faut que tout le monde comprenne qu'on ne détruit pas une idéologie par la force, qu'on ne la supprime pas par une guerre. Il est donc non seulement insensé, mais criminel de faire cette guerre pour "la destruction de l'hitlérisme", sous le masque de la lutte pour la "démocratie".

Moins de deux ans plus tard, le 22 juin 1941, Molotov vit plus de 3,9 millions de soldats de "l'idéologie qui n'est affaire que d'opinion publique" (dans le cadre de la laïcité ajouteraient nos naïfs modernes) envahir son pays, qu'ils ne devaient quitter qu'au prix d'une guerre qui devait faire plusieurs centaines de milliers de tués quand les soviétiques comprirent mais un peu tard que "l'idéologie doit être détruite par la force".

Citation extraite de Le Yogi et le Commissaire, recueil d'essais d'Arthur Koestler paru en 1946
Cela rejoint les reflexions de Bernard Lewis sur le terme de Global War On Terror (GWOT) popularisé par GW Bush. Lewis a vu dans ce "slogan" une incapacité à définir clairement l'ennemi, c'est-à-dire l'idéologie, à l'origine de ce terrorisme.

Islam and the West: A Conversation with Bernard Lewis
MR. LEWIS: Regarding the war against terror, I am familiar with this slogan. I feel that while we are indeed engaged in a war against terror, it is inadequate and even misleading. If Churchill had informed the country in 1940, we are engaged in a war against bomber aircraft and submarines, that would have been an accurate statement but not a very helpful one. To say we are engaged in a war against terror is of the same order. Terror is a tactic. It's a method of waging war. It is not a cause, it is not an adversary, it is not anything that one can identify as an opponent, and I think we need to be more specific in fighting a war. It's useful to know who the enemy is. I think you would agree.
Contre-exemple : le Soviétisme, qui a été détruit par des moyens idéologiques (Soljenitsyne, Koestler, Kundera...).
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