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Trahison des clercs

Envoyé par Bruno Chaouat 
31 mars 2012, 04:36   Trahison des clercs
Lire ceci me désespère :

[www.lemonde.fr]
Utilisateur anonyme
31 mars 2012, 07:29   Re : Trahison des clercs
Citation
Bruno Chaouat
Lire ceci me désespère :

[www.lemonde.fr]

Moi pas, j'ai trop l'habitude de constater que le trahison est un mode de fonctionnement chez les "clercs".
31 mars 2012, 09:23   Re : Trahison des clercs
Il y a un problème de style, surtout... Il est triste de voir qu'à partir de Kant, nombre de philosophes ont sombré dans la lourdeur et la prétention.
Il est amusant de noter une certaine corrélation entre les pensées fumeuses et les styles lourds et vaseux, comme celui de la plupart des post-modernes, heideggériens et autres philosophes mainstreams qui en imposent par leurs concepts ébouriffants et peu rigoureux. Ah oui, Badiou... prof remarquable, écrivain confus. Il est facile de tromper les gens lors de conférences, et il est intéressant de voir que l'écrit, lui, ne ment pas.
Avec la crise des subprimes et ses conséquences incontrôlables, le monde stupéfait a découvert...


Pas possible ! C’est une copie de philo d’un élève de Terminale.
31 mars 2012, 10:15   Re : Trahison des clercs
Les terroristes arabes qui en 2001 ont détourné quatre avions pour les précipiter e. a. dans les tours du WWC étaient tous les fils d'une certaine bourgeoisie cossue qui pouvait se permettre de les envoyer étudier en Allemagne où ils ont été très bien recus et même aimés et respectés par leurs professeurs.

Après l'éffondrement des tours une des professeurs interviewés fut peinée de devoir raconter que lors de la remise de son diplôme à Mohammed Atta celui-ci avait refusé de lui serrer la main.

Ce brave Stiegler avait la prétention de renouveller la critique des conditions existantes mais il reste strictement cantonné dans le convenu.

A propos de Badiou qui m'est venu tout de suite à l'esprit en lisant le texte de Stiegler je remets en ligne un extrait tiré d'un livre d'Etienne Barilier qui critique de manière acerbe un article d’Alain Badiou paru dans le Monde en date du 23 février 2004 se rapportant à la loi sur le voile.

Titre de l’article : Derrière la loi foulardière, la peur

Dans ce texte Alain Badiou ne traite pas moins de 32 points et E. Barilier en choisit seulement deux pour la simplicité de la démonstration.

E. Bariier tient à noter que A. Badiou est dans ce texte du début à la fin méprisant et cette attitude est à son avis exemplaire de cette autocritique dévoyée qui rend aveugle à autrui comme à soi-même.

Je cite :

[…]
Point1 : le foulard n’a aucunement le sens qu’on lui prétend donner. A vrai dire il n’en a aucun. La foulard est la « particularité insignifiante » de « quelques filles ». Insignifiante est à prendre au sens fort : porter foulard ne change pas plus le rapport à la liberté que de « faire des mathématiques en culotte de cheval jaune » ne change la valeur d’un théorème. D’ailleurs, opposer la République au communautarisme est une foutaise. Les coutumes, vestimentaires ou non, n’ont aucune importance, aucun poids, aucun sens : « se prosterner à toute heure devant des dieux fatigués » (car Allah est mort, comme tous les dieux ; il a « e longue date déclaré forfait », voilà qui n’a ni plus ni moins d’importance que de porter minijupe ou turban, ou s’entre-photographier tout le temps à la mode japonaise. Et puis, à tout prendre, mieux vaut un « idéalisme, même de pacotille », mieux vaut « l’ascétisme volontaire » du foulard que la misère, la bassesse et la culpabilité occidentales.

Point 2 : parlons-en, de l’occidental. S’il prétend interdire le foulard, c’est qu’il se sent coupable d’avoir renié toute raison révolutionnaire, d’être un jouisseur qui tue les pauvres, et, pour tout dire, un capitaliste pour qui nulle étoffe ne saurait dérober au regard acheteur la marchandises féminine. »La loi sur le foulard est une loi capitaliste pure ». Et sous le capitalisme, la peur. Nous avons peur de l’islam parce que nous ne sommes plus capables de sacrifier notre vie pour une idée, contrairement à des gens comme, par exemple, Ben Laden. Cela dit, ces gens-là commettent l’erreur regrettable de mourir « sous la funèbre invocation de ce qui depuis longtemps n’existe plus » (M. badiou n’insiste pas sur le fait qu’ils tuent au passage). Allons plus loin : ces gens ont tort. Ils ne sont ni purs, ni grands. Un peu pourris, même. Qu’on se rassure, cependant, leur pourriture est notre faute : « On ne dira jamais assez que Ben Laden est une création des services américains. »

C’est parler d’or : cette vérité chomskyo-canforienne, M. Badiou, assurément, ne la répétera jamais assez. C’est le propre des dénégations que de devoir sans cesse être réitérés si l’on veut espérer s’en convaincre, si l’ont veut continuer en dépit du bon sens à cultiver l’ignorance dédaigneuse de l’autre et la haine amoureuse de soi.

Le texte de Badiou est vraiment digne d’éloge : il réussit l’exploit de vomir son mépris et sa haine de l’occident tout en tenant pour absolument vide et non advenue la religion islamique et la signification qu’elle donne au port du foulard. Les dieux sont « fatigués », Allah est mort, ce que pensent d’eux-mêmes les musulmans n’a donc aucune importance. Voilà qui permet, superbement, de renvoyer tout le monde à sa nullité : ils sont infantiles et nous sommes ignobles.

Quant à la sujétion de la femme : foutaise encore. On ne la fait pas à M. Badiou, qui a lu Foucault, et qui sait que la sexualité est « controlée » dans nos sociétés comme partout. Non, pardon : pire que partout : « Le contrôle commercial est plus constant, plus sûr, plus massif que n’a jamais pu l’être le contrôle patriarcal. » Tiens, comme on se retrouve : c’est le fameux schéma du « exactement la même chose, mais en pire », qui fait le bonheur morose de tant de nos flagellants satisfaits. S’il s’agissait seulement, par ce genre de « raisonnements », d’excuser une ignominie par une autre (du style : pourquoi supprimer l’esclavage chez autrui puisque nous avons des esclaves chez nous). Mais c’est plus fort encore : pour mieux se complaire dans la haine de soi, on recourt au plus sinistre jeu de concepts, comme si un « contrôle » diffus, hypothétique, relatif et relaché, sans autre controleur que le corps social tout entier, était comparable aux interdits religieux imposés par une caste au pouvoir ; comme si, en un mot, démocratie et théocratie n’offraient point de différence. Pourquoi supprimer le travail des esclaves, M. Badiou, puisque chez nous, l’on est esclave du travail ?

Parti pour défendre le port du foulard, ce factum ahurissant finit par nous expliquer que Ben Laden a raison, et que s’il a tort, c’est dans la seule mesure où il est notre créature. L’islam représente l’ascétisme et l’idéalisme que nous avons perdus ou bafoués – un idéalisme « de pacotille », bien sûr, et dont les signes sont insignifiants. Il est donc à la fois bon et nul ; il ne devient mauvais que dans la mesure où il est le fils de nos œuvres.

Mais laissons M. Badiou à ses fureurs et aigreurs. Jusqu’à plus amples informé, l’islam existe en soi et pour soi, son Dieu n’est pas fatigué du tout, il est dans une forme olympienne, et même davantage, et ses foulards sont puissamment signifiants. Ce n’est pas en déniant ces réalités qu’on va les abolir. De plus, on ne respecte pas autrui en méprisant le cœur même de sa pensée et le sens même qu’il donne à son existence.

Sl’on veut combattre pour l’égalité entre hommes et femmes dans l’islam, il n’y a pas d’autre chemin que de prendre cette religion au sérieux. […]


Pages 82-85 du livre « Nous autres civilisations… »
31 mars 2012, 10:48   Re : Trahison des clercs
Que reste-t-il du texte de Ziegler quand on en retire les boursouflures, les imprécisions, les trucs langagiers, le prêt-à-penser journalistique ? Rien. Quel talent d'esbroufeur !
Utilisateur anonyme
31 mars 2012, 10:50   Re : Trahison des clercs
(Message supprimé à la demande de son auteur)
31 mars 2012, 12:10   Re : Trahison des clercs
Satan whispers to ya, "Well, I don't want to bore ya,
But when ya get tired of the Miss So-and-so I got another woman for ya."


Bob Dylan, "trouble in mind"
31 mars 2012, 13:22   Re : Trahison des clercs
Marie, mine de rien, vous venez de jeter une lumière fulgurante sur un aspect des choses qui m'avait échappé: le foulard, le voilement du visage des femmes, facilite leur substitutionnabilité, pour qu'enfin leur soit, comme à tout, comme aux peuples, attribuée l'indispensable interopérabilité moderne, soit leur "remplaçabilité". Les femmes, dans la polygamie, doivent être aussi remplaçables que les peuples dans la pensée technocratique moderne. Si la technocratie moderne adore l'Islam et prône l'indifférence au voilement de leur visage, c'est qu'il y a à cela des raisons systémiques très actuelles.

Greffe du visage, voile islamique : et voilà que la commode disparition/substitution des visages et l'interopérabilité des formes de l'existant, bien établies dans la sphère économique (plus d'hommes ni de femmes, seules des ressources humaines, du matériel humain interopérable, interchangeable) gagnent enfin les corps et le désir pour être signalées dans le visible.

Plus besoin d'un oreiller appliqué sur la face pour cacher les visages des femmes dans le viol à la chaîne: le voile y pourvoit. Le voile, l'indifférence au visage, pour ce sinistre Badiou, c'est un peu comme "faire des mathématiques en culotte de cheval", c'est sans signification. Ce pauvre bougre qui enseigne la philosophie n'a strictement rien compris à rien. Il doit le faire exprès, impossible autrement, qu'il se plante ainsi, toujours et systématiquement, en travers de la vérité.
31 mars 2012, 15:08   Re : Trahison des clercs
La femme voilée assume le principe de subrogation institutionnelle des corps dans la société civile (la pornographie le faisait déjà depuis des décennies dans la matrice du cinémonde). Ce faisant, ce choix, libre ou imposé, s'inscrit en légitime continuité de celui des "mères de substitution", des "mères subrogées" (surrogate mothers en anglais). Effacement progressif et linéaire de la singularité et de l'unicité du visage des choses et des êtres, dissoutes dans l'interopérabilité et le principe de l'échange standard sans reste aucun. Celui du peuple et de sa nation, gros morceau, s'accomplira sans doute en dernier, d'où l'intérêt, le besoin, de l'avoir entrepris dès aujourd'hui.

Décidément, nous retombons, à notre corps défendant, toujours sur ce même axiome partout mis en abyme, répercuté fractalement sur tout l'existant moderne: Union européenne (levée des frontières, fluidité et interopérabilité du matériel humain dans les rapports de production, etc.) et Islam, même combat !
31 mars 2012, 18:36   Re : Trahison des clercs
Greffe du visage, voile islamique : et voilà que la commode disparition/substitution des visages et l'interopérabilité des formes de l'existant, bien établies dans la sphère économique (plus d'hommes ni de femmes, seules des ressources humaines, du matériel humain interopérable, interchangeable) gagnent enfin les corps et le désir pour être signalées dans le visible.

C'est bien commode en effet.

Effacement progressif et linéaire de la singularité et de l'unicité du visage des choses et des êtres

La mort de la beauté.
Je trouve la remarque de Marie très pertinente, en fait ce foulard n'est pas une protection, il nous dit "une femme" et non "une personne".
31 mars 2012, 18:48   Re : Trahison des clercs
Il s'agit surtout d'interdire aux poètes de chanter la beauté de telle ou telle femme. Déjà dans la poésie préislamique on considérait qu'une femme dont on avait loué la beauté était souillée et donc dévalorisée. Les poètes étaient chassés à coups de pierres.
31 mars 2012, 19:01   Re : Trahison des clercs
Les terroristes arabes qui en 2001 ont détourné quatre avions pour les précipiter e. a. dans les tours du WWC étaient tous les fils d'une certaine bourgeoisie cossue qui pouvait se permettre de les envoyer étudier en Allemagne où ils ont été très bien recus et même aimés et respectés par leurs professeurs.

On ne le dira jamais assez, ne le soulignera jamais assez: les Khmers rouges étaient exactement cela: tous fils d'une certaine bourgeoisie cossue qui pouvait se permettre de les envoyer étudier en France où ils ont été très bien recus et même aimés et respectés par leurs professeurs.

Communisme et islamisme sont cousins germains à tous égards. Et du reste, Badiou est là pour attester qu'ils séduisent les mêmes dans les mêmes justification et prosternation.

Alain Badiou, ce qui est très grave, n'est pas même un imbécile, il n'est pas Laurent Mucchielli, il a lu et étudié Nietzsche, et Schopenhauer et connaît Kant, et Aristote et probablement Leibniz mieux que la plupart d'entre nous. Badiou est intellectuellement à deux cents chaussettes et autant de hauteurs de mollet au-dessus d'un Michel Onfray. Seulement voilà: Badiou est un philosophe qui a peur de la philosophie: tous les moyens qu'elle offre à la pensée, il les a à portée de main, voire au bout des doigts, seulement ces moyens de l'intelligence lui font peur, aussi, les met-il au service d'un système militant, tout tendu vers le sens et l'objet militant, indéfectible même quand il a tort depuis maintenant près d'un demi-siècle. Badiou sait qu'il a tort, sait qu'il se trouve dans tout ce qu'il écrit et proclame penser, mentir, être en travers de la vérité, lui faire résolument obstacle et seule pareille mauvaise foi, pareille tromperie, peut rendre compte de pareille cohérence. Badiou n'est jamais en porte à faux comme le sont les faux penseurs ordinaires, les penseurs négligeants; il dit, de manière élaborée, à vrai dire parfaite, l'exact contraire du réel et de son dévoilement, et ce n'est que dans cette perfection que se révèle la totalité de sa mauvaise foi.
Utilisateur anonyme
31 mars 2012, 19:05   Re : Trahison des clercs
Citation
Marc Briand
Il s'agit surtout d'interdire aux poètes de chanter la beauté de telle ou telle femme. Déjà dans la poésie préislamique on considérait qu'une femme dont on avait loué la beauté était souillée et donc dévalorisée. Les poètes étaient chassés à coups de pierres.

Oui mais :
« Au printemps, je vais quelquefois m'asseoir à la lisière d'un champ fleuri.
Lorsqu'une belle jeune fille m'apporte une coupe de vin, je ne pense guère à mon salut.
Si j'avais cette préoccupation, je vaudrais moins qu'un chien. »

Omar Khayyām (poète persan du XIIe siècle)
Il est vrai que c’et un musulman non arabe.
31 mars 2012, 19:12   Re : Trahison des clercs
Je crois, cher Jean-François, que ses « rubaiyat » ne sont pas très prisés des islamistes.
31 mars 2012, 20:32   Privately enticing
» le foulard, le voilement du visage des femmes, facilite leur substitutionnabilité, pour qu'enfin leur soit, comme à tout, comme aux peuples, attribuée l'indispensable interopérabilité moderne

Le contre-pied de cela n'est-il pas tout aussi envisageable ? Ce qui est voilé (et non oblitéré) de la femme l'est dans le domaine public, celui-là même où s'exerce l’interchangeabilité de l'homme des foules ; ce serait donc la marque la plus intime de la personnalité — présence du visage — qui est soustraite à l'action érosive du commerce de l'extérieur, de la rue, de la perte d'identité obligée du singulier fondu dans la masse indifférente, présence et identité ainsi préservées et rendues, intactes et comme d'autant soulignées, à la sphère privée, où la femme dévoilée retrouve tous ses atours et sa singularité.
Utilisateur anonyme
31 mars 2012, 21:27   Re : Privately enticing
(Message supprimé à la demande de son auteur)
31 mars 2012, 21:41   Re : Privately enticing
... pour son propriétaire.
31 mars 2012, 21:52   Re : Trahison des clercs
Cher Didier Bourjon,
je n'arrive pas à 11 000 messages et vous pensez donc déjà à m'exclure, à bout de patience ?
Je ne pensais pas vous excèder à ce point, d'autant que je me suis trouvé de temps à autres soutenu dans mes propos par Cassandre.
Quant à la discussion sur Popper, à part "Hum", vous n'y participâtes pas et je n'ai pas bien saisi ce que "l'on" m'y reprochait tellement. Elle a donné lieu à des échanges intéressants avec Alain Eytan, qui n'a pas semblé si agacé de ce sujet.
Maintenant je peux tout aussi bien me désinscrire, si vous le souhaitez, en étant déçu tout de même que là encore il faille s'adapter à une sorte de panthéon de références peu touchables, alors que j'espérais y trouver une liberté d'esprit dont on a tous bien besoin en ces temps...
31 mars 2012, 22:58   Re : Trahison des clercs
Cher Loïk, j'ai en effet pris un certain plaisir et de l'intérêt à notre disputation.
Quant à toucher à Heidegger, il ne manquerait plus qu'on ne le puisse pas, mais encore faudrait-il auparavant s'assurer qu'on en a vraiment pris la mesure, ce qui n'est pas une mince affaire : c'est de l'épais.
Ce qui me surprend en revanche, c'est que vous puissiez trouver des points communs entre l'auteur de cet article (que je trouve épouvantable) et Heidegger, dont l'importance et la portée me semblent tout de même, quoi qu'on pense de son "style", considérables.
Utilisateur anonyme
01 avril 2012, 00:06   Re : Trahison des clercs
Citation
Marc Briand
Je crois, cher Jean-François, que ses « rubaiyat » ne sont pas très prisés des islamistes.

Certes. Mais il fut un temps où l'islam iranien était plutôt sympathique. Je pense que ces livres sont maintenant interdits.
01 avril 2012, 02:37   Mort aux bâches !
Vous ayant parlé chaussettes et hauteurs de mollets, je devais m'attendre à ce que vous preniez le contre-pied de ma thèse cher Alain.

Le contre-pied de cela n'est-il pas tout aussi envisageable ? Ce qui est voilé (et non oblitéré) de la femme l'est dans le domaine public, celui-là même où s'exerce l’interchangeabilité de l'homme des foules ; ce serait donc la marque la plus intime de la personnalité — présence du visage — qui est soustraite à l'action érosive du commerce de l'extérieur, de la rue, de la perte d'identité obligée du singulier fondu dans la masse indifférente, présence et identité ainsi préservées et rendues, intactes et comme d'autant soulignées, à la sphère privée, où la femme dévoilée retrouve tous ses atours et sa singularité.

La bâche préserverait le meilleur de la femme — la singularité du visage et l'identité révélée — pour la sphère intime. Après tout, on peut le voir comme ça. Mais au fait, que voit-on en vérité, dans le réel ? Que voit le monde dans la sphère publique, car la bâche est vue, elle agit dans le sensible commun, vaut signe et émet un message dans un système social polygamique. La polygamie, qui s'inscrit à cheval entre sphère publique et sociale (cette dernière notamment des régimes sociaux, de l'affirmation de droits à prestations, à parentalité, etc.) et sphère privée, celle de la chambre à coucher, fait de la bâche non point seulement un instrument d'alcôve, un accessoire érotique (voilement/dévoilement, émoustillage, colin-maillard, etc.) mais aussi un outil de signification, un artifact témoin et messager de l'usage du féminin, du corps féminin dans le corps social.

La bâche dit: cette femme en vaut une autre et quelles que soient leurs splendeurs intimes et sans égard pour l'usage privé que l'on en fait, les femmes s'équivalent et se ressemblent toutes, à preuve, voyez comme les miennes sont dénombrables dans une stricte égalité et parfaite uniformité d'aspect, comme un troupeau dans lequel une tête de bétail en vaut une autre. Les femmes sont sans distinction publique ni sociale; dénombrables collectivement, ne se discerne dans leur collection aucune individuation visible laquelle, si elle existe, ne peut se révéler, et lever le voile sur son mystère ontologique, que dans l'alcôve. Les femmes forment ainsi un cheptel, une partie du patrimoine masculin dont les éléments individuels sont interchangeables dans et pour la jouissance de leur propriétaire tout autant que pour le système social. Par la bâche, cheptel de bêtes féminines à robe uniforme et polygamie s'associent pour forger un système social et meursal où sphère publique et usage privé sont soumis aux mêmes lois, celles du pasteur bédouin et de la civilisation qu'il propage en laquelle troupeau de bêtes et troupeau de femmes sont superposables en leurs fonctions. Le cheptel féminin est cessible, la moutonne bâchée peut être vendue, répudiée, immolée à loisir, substituable à loisir; il forme un matériau humain indistinct, et qu'il puisse être composé de bêtes à plaisir dont la jouissance est réservée à l'intimité n'y change rien, n'est aucunement le contre-pied de l'indistinction et de l'interopérabilité publique, sociale et économique de ses constituants.
01 avril 2012, 05:10   Re : Mort aux bâches !
Francis, je remarque au passage qu'en voulant à tout prix prendre la bâche pour la bâchée, vous synecdoquez à mort, et réintroduisez en force dans l'espace musulman ce dont vous proclamâtes triomphalement l'absence : la métaphore.
01 avril 2012, 06:55   Re : Mort aux bâches !
Je proclamais la métaphore absente du discours sis dans cet espace et émanant de lui, et plus largement je soulignais l'absence d'interstice métaphorique entre l'action et le discours ("je te tue" dit en tuant, évoque ces mises en scène de films de cape et d'épée d'autrefois, où le héros embroche le méchant de son épée ou de son arme blanche en commentant son geste d'un "tiens, meurs, scélérat !" -- je me permets ici de rappeler ce que j'avais proposé alors, quand on ignorait tout de l'auteur de ces atrocités: le tir de pistolet à bout touchant détourne l'usage de cette arme en arme blanche, arme de contact, de corps à corps, le meurtrier se trouvant dans cet acte en contact direct avec la victime, et ce contact, mais cela est logique, appelle un commentaire, un discours du tueur en accompagnement distantatoire du meurtre ainsi exécuté; le meurtrier doit parler, doit prononcer une parole qui le sépare de sa victime, le sépare de la mort, mais cette parole minimale n'est plus alors qu'une paraphrase de l'acte et il n'y a aucune échappée métaphorique de l'un à l'autre).

Je synecdoque à mort, comme vous dîtes, dans le désert de la synecdoque: ces gens qui traitent la femme comme un bétail, dont la robe est naturellement uniforme, ne savent pas ce qu'ils font, et les féministes qui soutiennent le candidat Hollande, lequel prône une fusion égalitaire entre la civilisation qui fait cela sur la rive sud de la Méditerranée et celle des troubadours sur la rive nord, pas davantage.
01 avril 2012, 09:41   Re : Trahison des clercs
Je doute fort de la capacité du bédouin à soupçonner un mystère ontologique tant le protocole du cheptel relève aujourd'hui de l'infantilisme.
01 avril 2012, 09:50   Re : Trahison des clercs
tant le protocole du cheptel relève aujourd'hui de l'infantilisme

Soit je ne vous entends pas, soit je me suis très mal fait comprendre. Tant pis.
01 avril 2012, 14:54   Re : Trahison des clercs
C'était plus de la surenchère que de l'opposition, cher Francis mais il se peut qu'ayant mal lu j'aie mal formulé mon idée.
02 avril 2012, 22:05   Re : Trahison des clercs
Cher Alain Eytan,
j'ai donc dû m'exprimer bizarrement, ou très mal, si je rapprochais Stiegler de Heidegger. Je faisais allusion aux heideggériens ou supposés tels, qui ont surenchéris, et à un processus qui, vous e,n conviendrez, a ouvert les vannes à des catastrophes stylistiques - autant, je le crains, qu'intellectuelles...
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