Polémonov sans alambic (sauf pour la prune)

"A cette place, il se sent bien. Il se sent bien, le soir, auprès des braseros où des hommes mal rasés réchauffent leurs mains gonflées, aux ongles noirs. Il se sent bien, la nuit, dans le baraquement où flotte une lourde odeur de poêle à charbon, d'alcool de prune et de pieds. Il a rêvé, enfant, de ces bivouacs et de cette fraternité guerrière, le sort les lui a refusés et voilà que sans prévenir, à un détour du chemin, il le rend à à tout ce pour quoi il était fait. En deux heures à la guerre, pense-t-il, on en apprend plus sur la vie et les hommes qu'en quatre décennies de paix. La guerre est sale, c'est vrai, la guerre est insensée, mais merde ! La vie civile est insensée aussi à force d'être morne et raisonnable et de brider les instincts. La vérité, que personne n'ose dire, c'est que la guerre est un plaisir, le plus grand des plaisirs, sinon elle s'arrêterait tout de suite. Une fois qu'on y a goûté, c'est comme l'héroïne, on veut en reprendre. On parle d'une vraie guerre, bien sûr, par de "frappes chirurgicales" et autres saloperies bonnes pour les Américains qui veulent faire le gendarme chez les autres sans risquer leurs précieux pioupious dans les combats "au sol". Le goût de la guerre, la vraie, est aussi naturel à l'homme que le goût de la paix, il est idiot de vouloir l'en amputer en répétant vertueusement : la paix c'est bien, la guerre c'est mal. En réalité, c'est comme l'homme et la femme, le yin et le yang : il faut les deux."

Emmanuel Carrère - Limonov

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Ce n'est pas demain que Richard Millet dira les choses aussi clairement qu'un Limonov.

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Citation
Orimont Bolacre
Ce n'est pas demain que Richard Millet dira les choses aussi clairement qu'un Limonov.

Orimont,

Thomas Hardy avait écrit Jude the Obscure, M. Millet a écrit Jude Boudin.

« et autres saloperies bonnes pour les Américains qui veulent faire le gendarme chez les autres sans risquer leurs précieux pioupious dans les combats "au sol" »

Bof, bof...

Citation
Marcel Meyer
« et autres saloperies bonnes pour les Américains qui veulent faire le gendarme chez les autres sans risquer leurs précieux pioupious dans les combats "au sol" »

Bof, bof...

En plus ils ont bien raison : si on peut napalmiser les méchants en les dronisant bien à fond, je ne vois pas pourquoi on irait faire périr ses soldats.

« et autres saloperies bonnes pour les Américains qui veulent faire le gendarme chez les autres sans risquer leurs précieux pioupious dans les combats "au sol" »

Bof, bof, en effet. C'est la scorie de cette sortie qui ne doit pas moins être prise en compte ; la scorie à plus d'un titre et surtout celui-là : que, contrairement à la distinction prêtée par Carrère à Limonov selon laquelle il y aurait de vraies guerres et de fausses, je crois que la personne qui pilote un drone à des milliers de kilomètres de l'endroit où elle se trouve, éprouve des frissons guerriers à pulvériser une cible, lesquels frissons s'accordent parfaitement aux émotions qu'elle a éprouvé dans son enfance en jouant à la Play.

"si on peut napalmiser les méchants en les dronisant bien à fond, je ne vois pas pourquoi on irait faire périr ses soldats." et se priver de doter la pulsion ancestrale d'armes inédites ?

La pulsion ancestrale, c'est de tuer, pas d'être tué. Voyez Céline.

Ceci dit, ce Carrère écrit très bien, vous êtes cruel de donner un tel extrait en lecture à des gens qui ont sué sur l'Eloge fait à Machin.

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Citation
Didier Bourjon
Jn-Mrc, vous êtes pénible.
Dans cet extrait, Carrère écrit comme n'importe qui.

Je ne dis pas le contraire, Orimont et moi nous nous bornons à dire qu'il écrit plus clairement, de façon moins alambiquée que M. Millet.

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Disons plutôt embourbé dans le texte de M. Millet.

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C'est pareil.

Didier, souffrez que je vous embrasse !

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(Et moi je ris, je ris...)