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Une lettre de notre ami X

Envoyé par Renaud Camus 
18 avril 2014, 00:26   Une lettre de notre ami X
Monsieur,

Votre condamnation m'attriste beaucoup et je la regrette infiniment. Mais elle était tellement prévisible compte tenu du système de défense absurde que vous avez adopté. Il suffit de lire votre discours à vos juges pour s'en convaincre. Vos juges ne vous ont pas compris, dites-vous ? Et bien c'est de votre faute puisque vous n'avez pas su leur parler comme il convenait en vous adaptant aux capacités de votre auditoire. Totalement inconscient de la grille de lecture de vos juges, vous vous êtes égaré à vous justifier alors qu'il fallait leur montrer que vos propos ne relevaient pas des incriminations qui vous étaient reprochées.

Je vous avais proposé une défense susceptible de vous sortir d'affaire. Je me suis abaissé pour tenter de vous convaincre. Mais votre orgueil et votre prétention vous ont aveuglé au point de vous donner le sentiment que vous saviez mieux que quiconque comment vous défendre.

Aucune Schadenfreunde ne m'habite et je suis heureux que vous ayez décidé de faire appel. A condition toutefois que vous
changiez du tout au tout votre système de défense et que vous mandatiez un avocat qui n'aura d'autre parti pris que celui de défendre, non pas vos idées, mais votre droit absolu à pouvoir les exprimer. De récents arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme vont dans ce sens. Ont-ils seulement été invoqués par votre défenseur ?

La démonstration que vous n'avez aucun talent ni capacité pour vous sortir d'une telle affaire judiciaire est clairement faite. Allez-vous enfin entendre raison ? Sinon, attendez-vous à être condamné en appel tant il est vrai que l'on doit changer une équipe qui perd. Ou s'attendre à perdre encore....

Croyez; Monsieur, en l'assurance de mes sentiments de haute considération.
X vous propose un axe de défense juridique entièrement différent de la stratégie que vous avez adoptée, laquelle contient l'acceptation implicite que les accusations portées contre vous emporteraient et justifieraient une condamnation n'eussent-elles point été fausses. Vous avez plaidé la méprise de vos accusateurs sur vos propos, en leur objectant qu'ils les avaient mal ou tendancieusement interprétés, alors qu'il fallait attaquer l'illégitimité des accusations qui violent votre liberté d'expression et défendre vos propos en revendiquant votre droit de les tenir.

La critique de X, pour sévère (et peut-être intéressée) qu'elle soit, recèle un fond de vérité.

Il semble aussi que la stratégie de X ne soit pas incompatible avec la défense "politique" à laquelle vous êtes attaché.
Je ne vois pas en quoi la critique de X serait “intéressée”. Je ne la citais que pour sa valeur de témoignage “humain”. Je ne conteste pas son éventuelle pertinence juridique, qui n’a jamais été le moins du monde en cause.
Je ne le vois pas moi non plus, ne sachant pas qui est "X". J'ai écrit "peut-être" car cette personne paraît vouloir proposer un service professionnel.
Je suppose que Francis a, comme moi, été arrêté par la phrase "Je vous avais proposé une défense susceptible de vous sortir d'affaire" qui semble indiquer qu'elle vient d'un avocat qui avait suggéré une tactique à l'opposé de celle finalement suivie. Le mot intéressé ne doit pas être compris comme recherchant un intérêt financier, mais dans celui donné par Corneille dans "Au seul bien de la cause elle est intéressée".

En tout cas, ce Me X ne ménage pas sa peine : à lire cette lettre (il se peut qu'il y ait d'autres éléments inconnus de moi), il aurait proposé ses services, serait allé jusqu'à s'abaisser et aurait été éconduit. Il a, certes, des mots assez durs, mais formulés il me semble dans une lettre privée, et, surtout, il offre à nouveau des conseils qui paraissent sinon pertinents, du moins devoir être analysés.

Francis, qui n'est pas juriste, résume en une remarquable formule la situation : "l'acceptation implicite que les accusations portées contre vous emporteraient et justifieraient une condamnation n'eussent-elles point été fausses. Vous avez plaidé la méprise de vos accusateurs sur vos propos, en leur objectant qu'ils les avaient mal ou tendancieusement interprétés, alors qu'il fallait attaquer l'illégitimité des accusations qui violent votre liberté d'expression et défendre vos propos en revendiquant votre droit de les tenir". C'est ce que j'essayais de dire en indiquant qu'appeler de la décision en gardant le même système de défense était reconnaître la légitimité de la Cour à condamner les propos tenus, alors que le vrai débat est sur le droit à les tenir. Ce n'est pas une question de pertinence juridique, c'est une question de fond.
Le jugement du tribunal correctionnel est absurde et mérite toutes les critiques qui ont été exprimées par Renaud Camus dans son Journal et par d'autres ici.

L'appel permettra assurément de faire comprendre à la Cour qu'un bras armé ne se confond pas avec le reste du corps et que jamais les musulmans "en général" ne furent traités de voyous ou de "soldats"

Mais il sera sans doute difficile de faire comprendre qu'un discours prononcé lors des assises contre l'Islamisation ne concernait pas spécialement l'Islam et donc les "soldats" de l'Islam.

Et comme on voit mal des "soldats" musulmans servir d'autres intérêts que ceux de la nation musulmane, les juges risquent d'en déduire que les musulmans en général étaient bien mis en cause et eux seuls.

Certes on peut toujours considérer que le raisonnement est transposable à n'importe quelle autre religion asiatique (shintoïsme, bouddhisme, etc.) mais la transposition risque de paraître assez peu "réaliste", compte tenu des rapports historiques de la France avec ces religions asiatiques, et elle risque d'être jugée hypocrite (je n'ai pas dit qu'elle l'était), alors surtout que rien dans le discours n'indique une distance par rapport au thème particulier des assises contre l'islamisation.

La seule défense qui pourrait ouvrir l'espoir d'une relaxe serait fondée sur la revendication d'un droit à la critique de l'Islam, sur la base d'une expérience historique de quatorze siècles. Autrement dit, plutôt que de chercher à défendre la thèse d'un propos général, qui ne visait pas spécialement l'islam aux assises contre... l'islamisation, il faudrait défendre au contraire la thèse d'un propos qui met en cause une religion particulière sur la base d'une expérience historique unique particulièrement longue, en insistant notamment sur la spécificité de l'Islam par rapport aux religions asiatiques (d'un point de vue historique, pas théologique bien sûr), comme l'avait fait Lévi-Strauss.
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