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Entretien avec Renaud Camus dans "Mauvaise Nouvelle"

Envoyé par Marcel Meyer 
En somme, nous avons subi un effondrement apocalyptique : tout va extraordinairement plus mal qu'avant. En particulier, la culture est en train de descendre aux catacombes, ou de disparaître.
Ce qui manque, pour donner une plausibilité à ce récit, c'est une explication.

Les premiers grands réactionnaires disposaient d'une explication surnaturelle : le diable, ou la punition envoyée par Dieu pour nos péchés, ou un dessin insondable de Dieu.

Pourquoi la culture se défend-elle si mal ? Pourquoi la petite bourgeoisie généralisée n'est-elle pas attirée par la culture, que révérait ou respectait la bourgeoisie ? Pourquoi tout fout le camp ?

Faute qu'il fournisse une explication, Renaud Camus est exposé à ce qu'on mette en doute son récit, et qu'on lui réponde, par exemple (et un peu en vrac) :
. La culture populaire était largement orale, maintenant elle apparaît dans les médias. Dans la mesure où elle n'était pas orale, elle est largement oubliée, de sorte que l'on réduit la culture du passé au grand art, alors qu'elle n'était évidemment pas que cela. Bref, l'équivalent des émissions de télévision ou des chansons idiotes, cela a toujours existé.
. On n'écrit ou ne prononce pas très bien le français ? Certes, mais il est à peu ,près impossible d'imaginer un officier contemporain qui écrirait avec une orthographe aussi mauvaise que celle de Napoléon, et ils ne doivent pas être très nombreux, ceux d'entre eux qui confondent amnistie et armistice (pour ne rien dire de l'orthographe du maréchal de Saxe).
. On ne lit plus guère les auteurs du XVIIème siècle, et même ceux du XVIIIème, et le même abandon s'annonce pour les auteurs du XIXème ? Certes, mais chaque époque tend à déplacer le classicisme. Tel ne lit plus L'Iliade, qu'appréciait son arrière-grand père, mais lit Proust, et par ailleurs apprécie le roman japonais.
. De la littérature, il y en a toujours. Comme il y a toujours des Beaux-Arts (j'ai vu récemment à Naples le musée de Capodimonte : peinture, de la Renaissance au XVIIIème siècle ; à l'entrée, il y avait deux grands tableaux d'Anselm Kiefer ; eh bien. j'ai trouvé qu'ils faisaient le poids, par rapport aux Breughel ou au Caravage). En ce qui concerne les Beaux-Arts, on peut penser ce qu'on veut de l' "Art Contemporain", qui est l'art officiel, canonique (symbolisé pour moi par la "Merde d'artiste" de je ne sais quel Italien des années soixante héritier de Duchamp et de son urinoir), et personnellement je le trouve plutôt révoltant, mais il faut reconnaître qu'il n'a rien d'agréable, de facile ou de populaire, ce qui va directement contre la thèse de Renaud Camus (la petite bourgeoisie sans ambition culturelle est aux postes de commande).
. De la belle architecture, il y en a.
. Il y a aussi, de très beaux arts décoratifs populaires. Les rayons vaisselles ou ameublements d'un grand magasin de type Habitat ou BHV n'ont rien de consternant, tout au contraire. Quand on pense à la laideur de l'ameublement bourgeois traditionnel, au kitsch fréquent de la vaisselle...
. La science, qui fait partie de la culture jusqu'à nouvel ordre, ne disparaît pas.
. Anecdotiquement, signalons qu'en France actuellement,
la philosophie est à la mode. Fut-ce si fréquent dans le passé ?
les livres du professeur de littérature au collège de France (Antoine Compagnon) se vendent très bien. Là aussi, fut-ce si fréquent ?
un romancier (Michel Houellebecq) est l'objet d'un certain culte populaire. Il me semble que cela fait pas mal de temps que l'équivalent ne s'était pas produit.

Tout ça se discute, bien entendu.

Mais cette mienne (et banale) position se soutient sans difficulté, tandis pour soutenir celle de Renaud Camus, il faut une explication - qu'il ne fournit pas (Aidons-le ; ce serait une conséquence ultime de la Révolution française ; en proclamant l'égalité de tous les hommes, elle a logiquement conduit au "tout se vaut" contemporain, formule du grand nivellement ; il aurait fallu refuser la dissolution des ordres, et que le Tiers-Etat restât à sa place - la dernière. Mais la question qui alors immédiatement se poserait à Renaud Camus, évidemment, serait : pourquoi ce nivellement développe-t-il ses funestes conséquences depuis deux siècles sans que rien ne lui résiste, sauf, agitant son drapeau debout sur son radeau, moi ?.
Utilisateur anonyme
08 septembre 2014, 18:11   Re : Entretien avec Renaud Camus dans "Mauvaise Nouvelle"
Mais cette mienne (et banale) position se soutient sans difficulté, tandis pour soutenir celle de Renaud Camus, il faut une explication - qu'il ne fournit pas (Aidons-le ;



Il semblerait que votre "position banale" (banale ou complètement à côté de la plaque ?) ne passionne pas grand monde. Quant à "aider" Renaud Camus... non, rien.
Oh oui, aidons-le, sacré nom de Dieu...

« Ils se laissent choir de toute la masse de leurs préjugés ou ivres de l’ardeur de leurs faux principes. Les associer, les exorciser, les alléger, les muscler, les assouplir, puis les convaincre qu’à partir d’un certain point l’importance des idées reçues est extrêmement relative et qu’en fin de compte “l’affaire” est une affaire de vie et de mort et non de nuances à faire prévaloir au sein d’une civilisation dont le naufrage risque de ne pas laisser de trace sur l’océan de la destinée, c’est ce que je m’efforce de faire approuver autour de moi. »

Char, Feuillets d'Hypnos
"Je me plais à le répéter, j’ai une conception lazaréenne de la patrie, et tout spécialement de la patrie française, qu’on a vue à plusieurs reprises resurgir du tombeau, « fraîche et riante comme au matin des batailles », pour citer Edgar Quinet. Le problème, évidemment, est que la résurrection suppose une identité maintenue par-delà la mort et qu’une renaissance qui surviendrait à un autre peuple ne serait pas une renaissance du tout. Le Grand Remplacement, hélas, implique que la suite de l’histoire, même survenant sur le territoire de la patrie, serait en fait une autre histoire, qui ne nous concernerait plus en rien [...]"


Je trouve quelque parenté (sauf quant à la conclusion) entre le constat de Renaud Camus et la décision du dalaï lama de renoncer à perpétuer une institution qui, par conséquent, finira avec lui. "Si un 15e dalaï lama venait et faisait honte à la fonction, l'institution du dalaï lama serait ridiculisée", affirme-t-il. N'est-ce pas à dire que ce 15e dalaï lama serait issu d'une autre histoire que celle du Thibet et ne concernerait en rien les thibétains ?
Citation
Thomas Rothomago
N'est-ce pas à dire que ce 15e dalaï lama serait issu d'une autre histoire que celle du Thibet et ne concernerait en rien les thibétains ?

La Chine a toujours étroitement contrôlé le choix du dalaï-lama jusqu'à une époque récente. Ce serait le retour à une situation antérieure, la fermeture d'une parenthèse ouverte en 1903, quand la Grande-Bretagne intervint militairement au Tibet. Je vous invite à lire cet article :

Dalaï-lama


Il en est de même pour la France. Le Grand Remplacement n'implique pas nécessairement sa disparition. Son histoire continuera mais d'une autre manière. J'aime bien cette phrase d'Auguste Comte : "les morts gouvernent les vivants". Cette vision me paraît juste.
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