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Le procès et le sens

Envoyé par Thierry Noroit 
12 février 2015, 14:08   Le procès et le sens
L'écrivain italien Erri de Luca a été membre dans les années 1970 de la formation révolutionnaire et probablement terroriste Lotta continua. Curieusement il n'a jamais été jugé pour cela. Mais il se trouve actuellement sous les foudres de la justice transalpine pour avoir employé le verbe "saboter" dans un écrit tout récent. Pour sa défense il vient de publier un petit livre traduit en français (Gallimard) sous le titre La Parole contraire. La prière d'insérer de ce livre, rédigée par lui-même, consonne étrangement avec un débat de ce forum sur le sens (dénotation et connotation) et, surtout, avec certains propos de Renaud Camus à son propre procès. (Mais tout procès n'est peut-être après tout qu'une explication de textes).

L'accusation portée contre moi sabote mon droit constitutionnel de parole contraire. Le verbe saboter a une très large application dans le sens figuré et coïncide avec le sens d'entraver.

Les procureurs exigent que le verbe saboter ait un seul sens. Au nom de la langue italienne et de la raison, je refuse la limitation de sens.

Il suffisait de consulter le dictionnaire pour archiver cette plainte sans queue ni tête.

J'accepte volontiers une condamnation pénale, mais pas une réduction du vocabulaire
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Erri de Luca

J'accepte volontiers une condamnation pénale, mais pas une réduction du vocabulaire. Magnifique.
12 février 2015, 15:22   Re : Le procès et le sens
Selon Frege (dans Über Sinn und Bedeutung), la "dénotation" est la référence, la "connotation" est le sens ; une même expression peut n'avoir qu'un seul référent (faire référence à une seule réalité, un seul "objet"), mais avoir plusieurs sens, tous, pour autant qu'ils soient différents, étant parfaitement compatibles avec la même réalité par là désignée, "donnée" (le sens est le mode de donation de l’objet).
Pour le dire le plus simplement possible : une même réalité peut être décrite, énoncée, désignée de diverses façons : si j'ai bien compris, cher Thierry, les griefs retenus à l'encontre de Renaud Camus ne s'appuient pas sur une "réduction du sens", mais au contraire sur son élargissement possible, cela surtout au regard de certaines lois mal fichues.
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