Je fais part de la nostalgie et l'effroi que m'inspire ce qu'est devenue en l'espace d'une génération la jolie ville de Manosque -- la ville de mon enfance --, et vous nous renvoyez au Manosque patriarcal et antédiluvien de Giono.
La jeunesse de son époque ne souffrit d'ailleurs pas tant que cela de la méchanceté des curés et de la folie des pères. Elle s'en remit vite, en tout cas, du contrôle que ces derniers exerçaient sur les femmes: dès les années 60, elle basculait dans la "civilisation du cul" (Godard)... Bref, Manosque, avant de devenir une banlieue d'Alger, ne fut jamais un douar où les filles sont fliquées en permanence par les mâles; ni même un de ces pueblos étudiés par Pitt-Rivers où tout était régi par les logiques de l'honneur et l'épouvantable quand-dira-t-on.
Ceux de mes proches et connaissances qui me renvoient à cet âge où, en Provence intérieure, l'autorité des hommes était effectivement irrespirable ont toujours tendance à exagérer. Ils sont nombreux, notamment, à avoir enduré 20 ans d'analyse pour se "soigner" des 3 ans qu'ils passèrent chez les jésuites! Comme si la fréquentation du lycée Sainte-Geneviève laissait des traces aussi traumatisantes que celle d'une madrasa de Karachi....