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Pékin traite la France en Etat vassal

Envoyé par Francis Marche 
Reuter vient de publier (il y a une demi-heure) le texte du communiqué officiel de Pékin sur la rencontre du président Sarkozy et du Dalaï-Lama. Edifiant:

"Il a ignoré des demandes insistantes répétées de la Chine et refusé avec entêtement de changer de position, pleinement déterminé à franchir la ligne rouge de la Chine",.
"Cette provocation malveillante vise l'intérêt fondamental de l'unité nationale de la Chine et exigera inévitablement un lourd tribut".

Qu'on s'arrête un instant sur le terme "lourd tribut". Il contient l'idée que le président français préside une nation tributaire, périphérique à la Chine, implicitement au service de l'Empire. Sarkozy a trahi la Chine: il a violé les liens de suzeraineté auxquels il avait, on ne sait trop comment ni exactement à quelle occasion, par son attitude générale peut-être, par pliure répétée, consenti pour l'éternité.
Ce terme de "tribut" est-il le fait des traducteurs de l'AFP ou du communiqué chinois (en anglais ou en français) ?
C'est la question que je me pose. Je cherche le texte original.

En effet, venant de lire le texte anglais du communiqué publié par l'agence Xinhua dans le China Daily, je ne trouve pas de "tribut" particulier. Du reste Associated Press sur Yahoo.fr qui cite le China Daily ne mentionne aucun "tribut" (seulement des "conséquences"). Il semble que la mention d'un "lourd tribut" se trouve dans l'organe du Parti communiste chinois "le Quotidien du Peuple", torchon que je laisse à d'autres ayant le coeur mieux accroché que moi, le soin d'explorer:

Extrait de la nouvelle paru dans yahoo.fr:

La France paiera un "lourd tribut" de la rencontre entre son président Nicolas Sarkozy et le dalaï-lama, affirme lundi le Quotidien du peuple, l'organe officiel du Parti communiste chinois.
LA CHINE CONTINUE DE CRITIQUER LA RENCONTRE SARKOZY- DALAÏ LAMA

Cet éditorial au vitriol s'ajoute aux critiques virulentes déjà émises par Pékin contre l'entrevue d'une demi-heure qui a eu lieu samedi en Pologne.

Dans son édition internationale, le journal accuse Nicolas Sarkozy de faire preuve d'opportunisme politique et de mettre en péril les intérêts chinois.

"Il a ignoré des demandes insistantes répétées de la Chine et refusé avec entêtement de changer de position, pleinement déterminé à franchir la ligne rouge de la Chine", écrit-il.

"Cette provocation malveillante vise l'intérêt fondamental de l'unité nationale de la Chine et exigera inévitablement un lourd tribut", ajoute-t-il.

Pékin a réagi officiellement dimanche en convoquant l'ambassadeur de France en Chine, Hervé Ladsous, pour lui remettre une vive protestation.

La Chine avait déjà annulé lundi dernier un sommet avec l'Union européenne en prévision de cette rencontre.

Les appels aux boycotts de produits français diffusés au cours du week-end sur internet n'ont toutefois pas été suivis d'effet.

Lundi, le site internet du gouvernement chinois a rapporté sans commentaire que des inspecteurs chinois avaient décelé dans de nombreux produits en provenance d'Europe "des problèmes de qualité et de sécurité".

Parmi les produits renvoyés ou détruits, on trouvait de l'eau-de-vie italienne, des sauces britanniques et du chocolat belge, mais pas de produits français.

Le dalaï-lama, que les autorités chinoises présentent comme un dirigeant séditieux, s'est félicité pour sa part de la fermeté du président français.

Nicolas Sarkozy, qui a rencontré le chef spirituel tibétain à Gdansk en marge des célébrations du 25e anniversaire de l'attribution du prix Nobel de la paix à Lech Walesa, a déclaré ensuite que l'Europe "partageait les inquiétudes" du dalaï-lama sur la situation au Tibet.

Le dalaï-lama a déjà rencontré de nombreux autres dirigeants occidentaux, mais Pékin paraît de plus en plus fermé aux critiques de l'Ouest sur le Tibet et particulièrement irrité que Nicolas Sarkozy rencontre le chef spirituel tibétain alors que la France exerce la présidence de l'Union européenne.

L'éditorial accuse également le chef de l'Etat d'avoir décidé de rencontrer le dalaï-lama pour des questions de politique intérieure.

"Sarkozy est en difficulté. L'économie est en déclin, le chômage a grimpé et sa cote de popularité a baissé", ajoute le journal. "Il s'est donc saisi des questions des droits de l'homme et du Tibet pour chercher à détourner l'attention."

Selon le journal, son geste "nuira en fin de compte à l'ensemble des intérêts de la France et de l'Union européenne".

Chris Buckley, version française Jean-Stéphane Brosse
Oui, de toute manière, « le sens n'est pas douteux », comme on dit. Même si l'on ne pouvait invoquer la signification profonde de « tribut » en français, c'est bien de cela dont il s'agit... Croyez-vous que cette idéologie d'un autre siècle, au pouvoir en Chine, puisse encore durer longtemps ? Les entrevues de Chinois, en Chine ou même en Europe, montrent qu'elle est solidement ancrée, mais cela peut basculer assez vite... Qu'en pensez-vous ?
Sarkozy a rencontré le Dalaï-Lama, et il apparaît, comme souvent dans cette diplomatie de lointaine inspiration gaullienne, comme cela avait été le cas avec Villepin à l'ONU en 2003, que ce geste ne servira aucune cause particulière si ce n'est l'honneur de la France, enfin disons le point d'honneur quelle met à prendre des baffes de la part des puissants. Dans le cas de Chirac-Villepin (accusés d'arrogance par les Etats-Unis en 2003 dans des termes étrangement semblables à ceux dont use Pékin aujourd'hui) cela a servi à postériori et indirectement à ce que les Etats-Unis reconnaissent certaines erreurs, comme vient de le faire Georges W. Bush, admission dont Chirac était déjà ressorti grandi avant la fin de son mandat. Sarkozy a fondamentalement raison de violer la vassalité économico-politique qu'imposent les Chinois à tous leurs partenaires. La France n'y gagnera rien si ce n'est la consolation douce amère qu'on lui accorde après coup d'avoir eu raison sur le fond, d'avoir bravé l'haleine enflammée et passablement fétide du Dragon en s'y faisant griller la moustache et les sourcils sans cligner des yeux.
Bah! L'histoire ces trente dernières années a si bien montré que ce que l'on croyait immuable et qui était séculaire pouvait "basculer" en un rien de temps que je me garderai bien de conjecturer si cette "idéologie d'un autre siècle, au pouvoir en Chine" a des chances de durer encore longtemps.

En fait, elle durera tout le temps qu'on la laissera durer. Les Chinois n'ont encore compris les échanges commerciaux que dans un sens: le leur; ils n'ont pas encore bien perçu qu'eux aussi peuvent être visés par des mesures de rétorsions. Ils n'ont que cinquante pour cent d'intelligence du monde et de ses usances, n'y interagissant que depuis moins d'une génération. Une évolution à court terme est donc envisageable.
Mais, pour qu'ils comprennent, ne faudrait-il pas que la France ne soit pas seule à réagir ainsi ? Pas seule, veux-je dire, parmi les puissances de second rang car les Etats-Unis peuvent se permettre ce genre de choses sans s'attirer de menaces de "lourd tribut" à payer, n'étant pas (encore) considérés comme une province extérieure par l'empire du centre.
Il semble que les dirigeants chinois aient pris acte de l'affaiblissement politique et économique de la France, qu'ils ne tiennent plus pour une puissance qui compte. Ils se sont gardés de menacer l'Allemagne, la Grande Bretagne ou les Etats-Unis et ils n'ont exigé de ces pays, plus critiques que le nôtre à l'égard de la politique de Pékin et plus actifs que les Français dans le soutien au Tibet, aucun tribut. En revanche, ils se sentent autorisés par leur force et par notre faiblesse à donner des leçons à la France, à la faire chanter ou à la menacer de représailles. La politique internationale n'a que faire de morale. Elle résulte du seul rapport de forces et ce rapport leur est tout favorable. Ils ont fait main basse sans coup férir sur toute l'économie et sur tout le commerce de l'Afrique (surtout les anciens territoires de l'empire français), et avec une telle facilité, qu'ils sont incapables de tenir la France pour une puissance : ce en quoi ils sont réalistes et, sans doute, ils ont raison. Nous n'avons qu'à nous en prendre à nous-mêmes de la façon dont notre pays est (mal) traité sur le plan international.
Je partage largement votre analyse. Le cas Sarkozy intéresse néanmoins les Chinois particulièrement car le personnage, depuis ses valses hésitations lors des péripéties des Jeux Olympiques, est perçu comme vacillant, aisément influençable, faiblement assuré malgré les apparences, manipulable. En outre, ne pas perdre de vue que ce "remontage de bretelle" est conçu pour édifier toute l'Union européenne, que Sarkozy représente aujourd'hui. On compte exploiter à fond les faiblesses (réelles autant que supposées) du personnage pour enfoncer le clou auprès de toute l'Europe qui n'a plus qu'à se tenir à carreau. Sarkozy a montré qu'il encaissait plutôt bien les remontrances: il est vital d'en profiter tant qu'il détient la présidence de l'Europe et qu'il a acquis récemment sur la scène internationale un certain crédit d'image.
Il y a aussi cette phrase du "communiqué 770" :

« Il serait désastreux et honteux que la Chine, par des chantages économiques qui avec la crise économique internationale sont d'ailleurs de plus en plus réversibles, impose sa volonté impérialiste et annexionniste (...) »

Quelqu'un serait-il à même de commenter cette phrase ?
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