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Un village comme autrefois

Envoyé par Louis Piron 
03 février 2012, 22:26   Un village comme autrefois
« Un village comme autrefois pour se sentir bien. » COURRIER INTERNATIONAL

Une société suisse va construire pour des patients atteints de la maladie d'Alzheimer un village au look des années 1950. Calqué sur un modèle néerlandais, ce projet a pour ambition de créer une atmosphère apaisante pour des malades qui vivent beaucoup dans le passé...

[www.courrierinternational.com]
03 février 2012, 22:31   Re : Alzheimer !
Je suis encore valide, enfin c'est mon impression mais je préfèrerais les années trente.
Comment, auriez-vous déjà oublié les années 50 ?
03 février 2012, 22:48   Re : Un village comme autrefois
Pas du tout mais comme je n'étais pas né dans les années trente, j'aimerais savoir, la nouveauté me fascine.
03 février 2012, 23:10   Re : Un village comme autrefois
Tiens, le village d'antan avait été prophétisé par Alvin Töffler dans "Le choc du futur". Il pensait qu'un nombre de plus en plus conséquent d'individus ne supporterait plus l'accélération et le mouvement de la modernité, et qu'il faudrait aménager des zones de retrait et de calme à défaut d'éviter un choc social mortel...
04 février 2012, 11:15   Re : Un village comme autrefois
Sans doute avez-vous entendu parler du concept de "ville lente" ? En France, seule la commune charentaise de Segonzac a obtenu ce "label".

La version bio de l'Eden, en somme.
04 février 2012, 19:50   Re : Un village comme autrefois
Projet non viable car obligatoirement discriminatoire à l'embauche, à moins que...
"Projet non viable car obligatoirement discriminatoire à l'embauche, à moins que..."

C'est bien sûr la première chose qui vient à l'esprit et on se demande bien comment les promoteurs de ce projet vont s'y prendre pour faire passer cette pilule, sauf à embaucher maquilleuses et perruquiers, déjà consultés, j'imagine, puisque "les personnels soignants se déguiseront en jardiniers, coiffeurs ou commerçants." (à propos, aucun prêtre, aucun pasteur ?)

La deuxième question, c'est la langue. Comment imaginer recréer l'ambiance d'un village des années 50 si les vrais-faux jardiniers sont des cévréquistes suisses de stricte obédience ? (Prévoir des cours de langue des années 50 = création d'empois, hum... la synergie, la synergie !)

La troisième, c'est la nourriture, c'est-à-dire les produits utilisés (prévoir une ferme fonctionnant comme dans les années 50 = historiens, consultants, paysans, vétérinaires etc = re-création d'empois.)


Le projet est vertigineux et donne ample matière à diverses divagations. Où il est en tout cas démontré que le passé c'est tout juste bon pour les gâteux... Aux sains d'esprit l'avenir radieux...
07 février 2012, 06:21   Re : Un village comme autrefois
Il va falloir aussi recruter les figures incontournables du "village d'autrefois": corbeaux, idiot du village, famille tuyau-de-poêle, anciens gazés de la guerre de 14, instituteur à moustache et à blouse grise dont les basques lui battent les chevilles et patenté tortionnaire d'oreilles d'enfant, curé en soutane, vieux maire goutteux et facteur à casquette façon "guerre de 70" qui pousse son vélo sans l'enfourcher et qui dans ses levées multiplie les haltes chez l'habitant pour "prendre la goutte" (pas celle du maire mais la liqueur, parfois "le jus"), café sombre et résonant sentant la sciure, la cacahuète grasse et l'huile de lin du babyfoot fracasseur de silence, pastis servi "à la ligne" à 12 centimes d'euro le verre; maréchal-ferrant, matelassier, boulanger dépressif et cocu, épouse volage et montrée du doigt; riche propriétaire terrien (et père de l'idiot du village) qui est le seul à posséder une traction-avant noire de toute beauté (aux pneus blancs!) qu'il pilote avec une lenteur désespérante en klaxonnant systématiquement à tous les angles de rue, lesquels sont fort nombreux etc... ça va en faire, des nouveaux emplois, tout ça.

Et encore: le garde-champêtre qui s'exprime avec un accent du Gerrssss à couper au couteau et qui interpelle les garnements avec des "Et halorrrssss!"; conscrits qui "font les conscrits" en sonnant du cors et en suspendant aux platanes et aux sophoras gigantesques de la place du village toutes les choses drôles qu'ils auront chapardées dans la nuit (charettes, âne des romanichels, etc.); chasseurs alcooliques fusilleurs de poules et de casquettes par dépit d'être bredouille et les mille et un raboliots qui défrayent en permanence la chronique du terroir...
07 février 2012, 10:01   Re : Un village comme autrefois
Il y avait aussi la venue des marchands ambulants, tout à fait comme au Moyen-Age des colporteurs, et des étameurs, remouleurs, et un marchand de fil et d'aiguilles, et même un pauvre diable qui montait de Marseille vendre sur son épaule des "pognes", grosses brioches marseillaises qui n'existent plus et qui criait: "les pognes les pognes !"... on l'entendait de trois rues au moins. Les marchands ambulants faisaient connaître leur arrivée en remettant à un enfant, un jeune adolescent pubère et plus déluré que les autres, un clairon et "la pièce" et le gamin partait comme une estafette, un tambour-major sonner l'arrivée de "Sollers", par exemple, ce qui annonçait aux babarotes qui ne sortaient jamais du village la venue non pas de l'écrivain mais de l'homme leur apportant du fil à repriser les chaussettes.

Omniprésence des enfants, à qui tout le village était terrain de jeu.

Les étés étaient torrides, mortels, on ne pouvait sortir que le soir, les hivers enneigés, les automnes inondés de pluies interminables et le printemps inondé de cerises, d'abricots, de robes à fleurs et de chansons à la mode (Bambino, Les Enfants du Pirée, La plus belle pour aller danser). La France lâchait l'Algérie. On commença à voir arriver les pieds-noirs. On commença à voir arriver des Anglais, et même des Parisiens, espèce franchement exotique. Les temps changèrent et le temps de se le dire, ils avaient déjà changé.
Autre chose. Si l'on a imaginé ces sortes de "villages d'antan" en plaçant le curseur temporel sur les "années cinquante", ce n'est sans doute pas que l'on ait considéré ces années-là furent plus tranquillisantes que d'autres dans l'absolu mais simplement parce ce qu'elles correspondent aux conditions de vie que les malades ont connu autour, grosso modo, de la vingtaine ou de la trentaine. Autrement dit, ces villages devront nécessairement évoluer, à mesure que se présenteront de nouveaux patients qui auront été jeunes en 1960, 1970, 1980 et pour qui il faudra donc reconstituer un "lieu de vie" d'antan, une bonne petite zone pavillonnaire des années 80, une banlieue des années 2000, le bon vieux temps, quoi, sans apparences de robots ni de clones...
Il faudra aussi penser à ceux qui auront été jeunes à Bamako, à Casa ou dans une province de Chine, car la maladie, elle, ne fait pas de discrimination ! Donc, villages du Rif, villages peuls, du Zhejiang, etc. dans les bourgades de la Marne et du Loir-et-Cher. Bref le Club Med pour tous les patients Alzheimer, dans le respect de leurs origines. Y a pas de raison.
07 février 2012, 12:20   Re : Un village comme autrefois
Alors Orimont faudra-t-il recréer des banlieues du genre d'Aubervilliers pour 2050, lorsque toute la société sera devenue In-nocente?
Il me semble au contraire que le "village d'antan" a quelque chose d'intemporel, un fil qui va du Moyen-Age aux années 50 voire 60/70. La rupture avec cet archétype se situe là, lorsqu'ont émergé en même temps les autoroutes, les grands ensembles, le RER, le TGV, les supermarchés etc.
"(...) un fil qui va du Moyen-Age aux années 50 voire 60/70."

Eh bien, voilà qui est clairement tranché. Les Alzheimer du futur n'auront même pas droit au "village d'antan". Pourtant, ne trouvez-vous pas que certaines images des années 90 vous ont déjà un parfum "rétro" assez prononcé ? Il est vrai que cette impression de passé affectant des périodes de plus en plus proches conduit à la négation du passé. Il sera dans ce cas difficile d'imaginer reconstituer les conditions de vie d'un individu qui aurait eu vingt ans en 2010 et serait dément quarante ans plus tard.
07 février 2012, 22:31   Re : Un village comme autrefois
L'air retro de "Mad Max" voulez-vous dire?
Utilisateur anonyme
07 février 2012, 22:42   Re : Un village comme autrefois
« Il est vrai que cette impression de passé affectant des périodes de plus en plus proches conduit à la négation du passé. »

Peut-être pas, si l'on considère — ce que je crois — que les changements historiques, culturels, civilisationnels produisant la conscience de la différence des périodes historiques s'effectuent de plus en plus vite, suivant une accélération exponentielle depuis le dit progrès technique. En ce sens, en effet, les années 90, années durant lesquelles le téléphone portable ne s'était pas encore diffusé, étaient déjà (déjà compris relativement à une remontée dans le temps) une ère comportementale (donc morale) différente, se situant assez loin de nous (la gestuelle humaine différait), d'où peut-être ce parfum de rétro.
09 février 2012, 10:14   Re : Un village comme autrefois
Utilisateur anonyme
09 février 2012, 22:16   Re : Un village comme autrefois
Dans la même veine, chanson rétro qui ne passe plus (interprétée par Michel Simon) :



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