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Echelle des valeurs artistiques

Envoyé par Jean-Marc du Masnau 
Bien cher Boris et bien chers amis,

En ce jour où l'on parle de la Russie et de son Empire, je me fais la reflexion que ce pays a toujours eu une bonne échelle des valeurs en matière artistique (une des remarques les plus dures en russe est "niekulturnie", ce qui est plus fort qu'inculte).

J'ai relu il y a quelques jours le récit de la présentation de Vissotsky à Richter par Marina Vlady (Nina Dorliak était très liée, pour des raisons que j'ignore, aux Baïdaroff-Poliakoff).

Richter appréciait le travail de Vissotsky, et Vissotsky admirait Richter.

Cela me semble être une bonne échelle des valeurs.

Après la mort de Vissotsky, Richter plaça ses grandes mains sur les épaules de Marina Vlady et lui dit :

" Il faut toujours être prêt à mourir, c'est le plus important".
C'est bien la Marina Vlady que l'on pouvait admirer encore dans le début des années 80 sur les planches des théâtres parisiens jouer "La Ceriseraie", comme... comme... qui déjà ? Non. Comme si Tchékov eût été nôtre.

Cette imposition des mains sur les épaules pour "transmettre le génie", le savoir, le talent est un geste extrême-oriental. Il fait partie des traditions du wu shu, qui ont cours de maître à disciple en Chine ancienne. C'est un geste où la mort est agent physique de la transmission.

("La Ceriseraie" m'a toujours paru être une oeuvre "balzacienne". Il n'y a rien d'étonnant à ce que Balzac, qui dans ses amours a toujours eu un bon demi-siècle d'avance, ait lu son destin chez les Russes; qu'il ait choisi de mourir et de lier son après-vie à l'âme russe de cette façon; Balzac était un visionnaire maladroit, mais paradoxalement exact: son mariage mortuaire au monde slave et à la Russie fut celui d'un limier de la modernité; le conservateur Balzac humait, s'enivrait de modernité révolutionnaire à venir).
11 août 2008, 20:49   Berditchev
Bien cher Francis,

Il se trouve que j'ai visité il y a quelques semaines Berditchev, sous une pluie battante (on disait d'un paysage noyé de pluie qu'il était triste comme la Pologne, on aurait dû penser à l'Ukraine).

Un petit musée est consacré à Balzac, à vingt mètres de l'église où il épousa Madame Hanska (le palais Hanski, dans la campagne, est moins intéressant).

A propos de ce mariage, les détails concernants sa demande de visa et l'attitude de la diplomatie tsariste sont consternants de mesquinerie. Il n'est pas étonnant qu'un tel régime se soit effondré.
11 août 2008, 21:14   Tchékhov
TCHÉBOUTYKINE, lisant le journal.

Balzac s’est marié à Berditchev.

(Irina chantonne doucement.)

Ça, il faut le noter.(Il note dans son carnet.)

Balzac s’est marié à Berditchev.


(Il reprend sa lecture).
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