C'est très fortement contradictoire, "le trop parfait" meurtrier n'étant autre que le stade abouti du "moyennement parfait" dès lors que vous supposez un processus (le hasard des mutations) qui conduise de l'un à l'autre, chère Cassandre. Vous ne pouvez guère affirmer qu'un processus est garant de "l'adaptation" et de la "survie" des espèces si ce même processus les conduit à leur perte par la vertu de son plein achèvement. Ce serait, dans le meilleur des cas le freinage, voire
l'empêchement du processus qui garantirait la bonne tenue de l'espèce dans le milieu.
Pour détendre un peu l'atmosphère de ce fil que je trouve étouffante, je vous invite à relire Pagnol, que vous aimez. et notamment
Marius, pièce de théâtre dans laquelle le père
César déclare au sujet de son fils, ceci que je crois très éclairant dans cette discussion :
Il n'est pas bon à rien, il est mauvais à tout.
Le sens ici est très profond et plus ambigu qu'il n'y paraît à première vue. Le survivant, celui qui franchit la barrière des époques, les murs des cataclysmes qui assurent à chaque fin d'une époque géologique ou phylogénique, sa succession, n'est ni le kador suradapté à son époque et sur-spécialisé dans son milieu, ni le "bon à rien" mais, très précisément le
"mauvais à tout", le médiocre, le moins exposé des êtres, l'obscur, l'espèce zéro, l'espèce des départs d'ère, le plus moyen des êtres, celui dont la tête ne dépasse pas du rang. Pourquoi en est-il ainsi, pourquoi les survivants sont-ils toujours des êtres passablement ternes et généralement assez navrants ? Si vous voulez que je vous livre le fond, le tréfond de ma pensée, qui n'est rien d'autre qu'un sentiment tant ce fond est enfoui: parce que l'existence sur cette terre, astre moyen, qui n'est pas sans charme mais qui, à l'échelle de l'univers, est dépourvu de toute grandeur,
est médiocre et moyennement exaltante. Voilà. C'est dit, au risque de me faire railler par Alain qui ne va pas manquer de pointer en moi le
nietzschéen de comptoir, je vous livre dans le bas-fond de ce fil, ma pensée, aussi navrante que son objet mais en cela, fidèle à sa vérité.
PS: vérification faite, la réplique n'est pas tirée de
Marius mais du
Schpountz, et c'est l'oncle, Baptiste Fabre qui l'adresse à Irénée, son neveu:
Oh que non ! Bon à rien, ce serait encore trop dire. Tu n'es pas bon à rien, tu es mauvais à tout. Je ne sais pas si tu me saisis, mais moi, je me comprends.