Le site du parti de l'In-nocence

Une mauvaise plaisanterie ?

Envoyé par Michel Le Floch 
13 octobre 2008, 16:29   Une mauvaise plaisanterie ?
Lu sur le site du Monde.
Il y a quelques années, un journal britannique avait accusé, à tort, Orwell d'avoir dénoncé des militants staliniens aux services secrets de sa Gracieuse Majesté. C'est maintenant au tour de Kundera d'être traîné dans la boue.

Milan Kundera aurait collaboré avec la police secrète communiste
LEMONDE.FR avec AFP | 13.10.08 | 16h00


L'écrivain Milan Kundera, auteur du best-seller "L'insoutenable légèreté de l'être", a dénoncé, en 1950, un étudiant à la police communiste, ce qui a conduit à son arrestation et à une condamnation à 22 ans de prison. L'Institut tchèque d'études des régimes totalitaires a publié, lundi 13 octobre, le rapport de la police communiste tchécoslovaque à la suite d'une déposition de l'écrivain Milan Kundera. L'écrivain venait de publier Risibles amours, roman qui lui a valu ses premières marques de notoriété.

"Aujourd'hui vers 16 heures, un étudiant, Milan Kundera, né le 1er avril 1929 à Brno, résidant à Prague VII, Cité universitaire, rue Roi George VI, s'est présenté dans ce département et a rapporté qu'une étudiante, Iva Militka, résidant dans la même cité universitaire, avait indiqué à l'étudiant Dlask de la même cité universitaire qu'elle avait rencontré un certain Miroslav Dvoracek qu'elle connaissait", décrit le rapport rédigé, le 14 mars 1950, par un inspecteur de la section II du Commandement d'arrondissement de la sécurité nationale de Prague.

L'étudiant, un pilote tchèque, avait quitté la Tchécoslovaquie en 1948 après la prise de pouvoir des communistes. Il était recherché pour désertion et a été arrêté le jour même, selon le texte. M. Dvoracek a ensuite été condamné à 22 ans de prison alors que la peine de mort avait été requise contre lui. Astreint en prison au travail forcé dans une mine d'uranium, comme beaucoup de prisonniers politiques à l'époque, il a été relâché 14 ans plus tard, en 1963.

"AUCUNE ILLUSION SUR LUI EN TANT QU'ÊTRE HUMAIN"

L'existence de ce rapport de police a été révélée par l'enquêteur de l'Institut tchèque d'études des régimes totalitaires qui a publié, lundi, un long article résumant ses recherches dans l'hebdomadaire tchèque Respekt. Le fac-similé du procès verbal a été mis en ligne sur le site de cet institut créé en 2007 pour faire la lumière sur l'Histoire de l'ancien pays communiste à partir des archives du ministère de l'intérieur et de la police secrète.
"Miroslav Dvoracek sait qu'il a été dénoncé, alors maintenant, qui l'a fait, cela ne fait aucune différence pour lui", a déclaré à l'AFP Marketa Dvoracek Novak, épouse de cet ancien opposant installé en Suède, et désormais âgé de 80 ans. "Nous ne sommes pas étonnés" que Kundera soit mis en cause, a-t-elle ajouté. "[Kundera] est un bon écrivain, mais je n'avais aucune illusion sur lui en tant qu'être humain", a-t-elle ajouté.

Joint par le magazine, l'auteur de La plaisanterie, La vie est ailleurs, La valse aux adieux, qui vit en France depuis 1975, s'est refusé à tout commentaire.
Ne nous étonnons pas calomnier est le passe-temps préféré de nos amis les progressistes!
Rien ne sera épargné à Finkielkraut en cette triste rentrée.
13 octobre 2008, 17:59   Revenons aux faits
Je crois qu'il serait prudent, en cette affaire, d'en rester aux faits.

Associated Press développe la nouvelle, disant que l'organiseme en cause est un organisme gouvernemental tchèque, réputé crédible.

By ONDREJ HEJMA, Associated Press Writer

PRAGUE, Czech Republic - A document written by the Czech Communist police claims that author Milan Kundera informed on a purported Western spy in the 1950s, a state-sponsored institute said Monday.

The Institute for the Study of Totalitarian Regimes said a team of historians and researchers found a document written by the SNB, or Czech Communist police, that identified Kundera as the person who informed on a man who was later imprisoned for 14 years.

The reclusive Kundera, the author of "The Unbearable Lightness of Being," lives in Paris. Phone calls to his publisher seeking comment were not immediately returned.

According to the file, published on the institute's Web site, Kundera in 1950 informed on Miroslav Dvoracek, who had been recruited in Germany by the Czech emigre intelligence network to work as a spy against the Communist regime.

Dvoracek visited a woman in Prague and left a suitcase in her apartment. She told her boyfriend, who later told Kundera, and Kundera went to the police.

Dvoracek was arrested when he came to collect the suitcase. He was later sentenced to 22 years in prison and eventually served 14, working in uranium mines.

Collaboration with the Communist Party was widespread in Czechoslovakia. The country was one of the first to publish the names of alleged collaborators, as part of the so-called "screening process" in 1991.

The Institute for the Study of Totalitarian Regimes has been assigned by the Czech government to collect and publish Communist-era files. It is widely viewed as credible.

Kundera joined the Communist Party as a student, but was expelled after criticizing its totalitarian nature. After the 1968 Soviet-led invasion of Czechoslovakia crushed the liberal reforms of Alexander Dubcek, he left the country.

The books Kundera wrote after his departure were banned from publication in his homeland until the Communist collapse in 1989, but his work was respected among dissidents.

Kundera, 79, has lived in France since 1975 and it is there that he published his most famous books, including "The Unbearable Lightness of Being," "The Book of Laughter and Forgetting," "The Art of the Novel" and "Immortality." He was granted French citizenship in 1981.

The author lives in virtual seclusion, only travels to his former homeland incognito and never speaks to the media.




Si vous vous reportez au site en question :

[www.ustrcr.cz]

Vous verrez qu'il est très anti-communiste, et on voit mal son intérêt à dénigrer gratuitement M. Kundera.

Attendons la suite avant de juger.
13 octobre 2008, 18:09   Re : Revenons aux faits
Citation
Vous verrez qu'il est très anti-communiste, et on voit mal son intérêt à dénigrer gratuitement M. Kundera

Vous devez savoir, cher Jmarc, que les anciens membres de la police politique des régimes communistes se sont infiltrés dans toutes les institutions et qu'ils font de la désinformation avec délectation !
13 octobre 2008, 18:24   Désinformation
C'est en effet une possibilité, mais je me suis borné à constater un fait : ce site est d'un anti-communisme très sympathique, et j'imagine mal ses dirigeants (qui ont souffert du communisme dans leur chair) être facilement abusés. Visitez-le, et dites-moi ce que vous en pensez. Les membres de son conseil me font la meilleure impression (ils ont été élus par le sénat tchèque, ce ne sont pas des auto-désignés à la Robert Ménard).


[www.ustrcr.cz]

Je ne dis pas que l'information soit vraie (le site, d'ailleurs, précise fort honnêtement que les détails de cette histoire ne sont connus que par le fichier de la police politique) : The story of Miroslav Dvořáček was compiled from information gathered by security bodies at the time of the investigation. It is necessary to take this into account and approach the story accordingly.



De même, l'article du Monde est au conditionnel.

Cela étant, je ne pense pas qu'un organisme anti-communiste qui aurait trouvé de tels éléments aurait dû les garder secrets : l'hypothèse que M. Kundera ait commis l'action en cause ne peut être écartée de prime abord.

C'est pourquoi je reste sur ma position : attendons la suite, et ne portons un jugement qu'après. Un point me semble cependant, d'ores et déjà, assez significatif : l'organisme en cause est très professionnel, et je pense que sa très grande connaissance des dossiers policiers lui permet de savoir si une archive policière (il semble s'agir, d'après la photo, d'un original) est de 1950 ou des années 70. Si la pièce incirminée est de 1950, alors, effectivement, il y a un problème.
13 octobre 2008, 18:59   Re : Désinformation
Je ne veux pas défendre à tout prix Kundera, mais les conditions de vie dans ces pays communistes étaint d'une incroyable cruauté (mentale et physique). J'ai entendu lors d'une émission sur Ostraïk, une intervention de Rostropovitch, racontant que le violoniste l'avait supplié de ne pas chercher à savoir pourquoi il était bien logé... l'année suivante, une famille habitant dans le même immeuble s'était volatilisée, et Rostro a entrevu l'immonde réalité, qui s'abattait sur les épaules des plus grands, s'ils voulaient continuer à vivre dans leur patrie.
À ce propos une citation de Soljénitsyne tirée du tome I de L'Archipel du Goulag, (c'est connu, mais si jamais quelques-uns ne l'avait pas lue) :
« Comment séparer le bien du mal, puisque cette frontière passe par le coeur de chaque homme ? » . (C'est de mémoire,... ).
Il suffit d'avoir vécu pendant quelques années dans un pays communiste ou socialiste de type soviétique ou dans un pays "totalitaire" pour savoir que la délation est à la fois de règle (tous les jours, des milliers de personnes sont ou étaient dénoncées par leurs voisins ou même par des membres de leur famille : cf. l'affaire Morozov) et la règle : ce qui fonde les régimes de ce type, c'est la surveillance de tous par tous et la dénonciation (récompensée) de tous par tous. C'est une façon de mettre un flic dans chaque cerveau et ainsi de contrôler tout le monde. Sans la surveillance généralisée, ces régimes se seraient vite effondrés et ils se sont effondrés quand la peur d'être dénoncé s'est évaporée. Pourquoi ? Je ne saurais le dire. Tous les dissidents et tous les opposants ont connu cela; ils l'ont raconté; ils l'ont analysé. Kundera en 1950 avait 18 ou 20 ans. Il adhérait plus ou moins au régime qui s'est mis en place après le coup de Prague. Il est dans l'ordre des choses qu'il ait commis quelque vilénie. Faut-il s'en étonner ? Non. S'en indigner ? C'est absurde. On ne va pas refaire la Tchécoslovaquie de 1950, ni le communisme. Acta fabula (tragoedia) est.
Je souscris pour ma part pleinement au point de vue de JGL. Le jeune Kundera, âgé de 21 ans en 1950, a probablement agi comme il est dit. Sa prise de conscience politique (pour dire les choses un peu grossièrement) n'en fut par la suite sans doute que plus radicale, la honte d'avoir commis cet acte de délation, avec les conséquences dramatiques décrites dans l'article, l'aiguisant à l'extrême.

Rappelons que Soljenitsine fut un jeune communiste de conviction et de zèle; et que Günter Grass fut un (très) jeune membre d'une unité Waffen-SS.

Et, last but not least, et pour en revenir à un fil récent regrettablement laissé en suspens, que le chef trotskyste Raymond Molinier, au moins l'espace de quelques mois, fut hitlérien, n'est-ce pas M. Petit-Détour ?
13 octobre 2008, 19:34   Du bien et du mal
Pour ma part, je me rangerai à ce que disent Anna et JGL.

Je ne crois pas, par ailleurs, que ce genre de chose ait été perçu, dans la Tchecoslovaquie de 1950, comme une vilénie.
Utilisateur anonyme
13 octobre 2008, 19:51   Probablement ???
Pourquoi souscrire à ceci ou cela ? Pour l'instant, le ceci et le cela sont possibles également, autrement dit personne ne sait rien.
13 octobre 2008, 21:05   Re : Une mauvaise plaisanterie ?
Citation

Milan Kundera aurait collaboré avec la police secrète communiste

Tiens, ça me rappelle ma jeunesse ! Quand toute personne osant critiquer les pays de l'Est était forcément appointée par la CIA. C'est rassurant, de voir que rien ne change, finalement.
Cher Francis, Raymond Molinier n'a jamais été hitlérien. Vous êtes un trop bon connaisseur de l'histoire des sectes pour ignorer qu'une des maladies congénitales du trotskysme est l'entrisme. En 1934, Trotsky a prôné l'entrée dans la social-démocratie, cela ne faisait pas de lui un social-démocrate. Après la Seconde Guerre mondiale, les trotskystes se sont déchirés sur la question de l'entrisme sui generis dans les partis staliniens, tactique défendue par les partisans de Pablo : les fameux pablistes honnis par les lambertistes. L'entrisme est une démarche politique visant à recruter en restant près des masses. Le raisonnement de Molinier à l'époque était que l'ordre allemand allait durer un certain temps et qu'il fallait pénétrer dans les structures issues de l'ordre en question pour y faire de la propagande. En Allemagne, les trotskystes ont adhéré aux organisations d'entreprise nazies (NSBO) pour y gagner des prolétaires à leurs idées. Tout cela n'en faisait pas des partisans du Reich.
S'agissant de Kundera, je trouve que la légèreté avec laquelle Le Monde, en répercutant les informations issues des anciennes officines staliniennes de la désinformation, jette l'honneur de l'écrivain aux chiens est symptomatique d'un journalisme réduit à la propagation de la rumeur.
Une mise au point de la rédaction de Causeur à l'"affaire" Kundera.
On lira par ailleurs sur le même site un billet d'humeur assez drôle d'Elisabeth Lévy sur le battage idéologique entourant l'attribution du Nobel à Le Clézio.

Dans le magazine praguois Respekt (dont les révélations sont le plus souvent de source policière), un chercheur affecté à l’”Institut d’études sur les régimes totalitaires”, un organisme officiel tchèque – similaire à celui qui fut à l’origine de la sinistre “loi de lustration” polonaise – accuse Milan Kundera d’avoir collaboré avec la police politique de son pays en 1950. L’AFP, qui a publié un long papier sur ce “scoop” avant même la parution du magazine, ne prend pas même la peine d’utiliser des guillemets ou le conditionnel dans son titre sans appel : “Milan Kundera a collaboré avec la police secrète communiste.” Il y a donc fort à parier que tout le monde va répéter cette calomnie en boucle, notamment sur les sites d’informations abonnés à l’agence. Il est bien évident que tout cela fait penser à une cabale symétrique de 2003. Cette année-là, on avait pu lire partout, suite à une campagne orchestrée par le Guardian, qu’en 1947 Orwell avait dénoncé ses amis communistes à la police politique britannique. L’affaire Orwell s’était lamentablement dégonflée, comme se dégonflera la prétendue “Affaire Kundera”. Nous vous en reparlerons très vite.

La rédaction
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