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Propos de ministres et de hauts responsables

Envoyé par Henri Rebeyrol 
Hier ou avant-hier, il a été porté à la connaissance des Français une sordide affaire, sans doute "juteuse", d'escroquerie ou de fraude à l'étiquetage. De la viande de cheval ou des produits d'équarissage ont été vendus dans des lasagnes, moussakas, hachis Parmentier, etc. de l'industrie agroalimentaire sous l'étiquette "boeuf" et cela au plus grand profit d'intermédiaires "véreux" qui seraient établis en Pologne, en Roumanie, à Chypre, au Luxembourg, aux Pays-Bas ou à Castelnaudary. Il ne semble pas que la santé des consommateurs ait été affectée par ces étiquettes mensaongères, à moins que l'on ne tienne la "malbouffe" pour du poison. La fraude est sinistre sans doute, mais des fraudes de ce genre sont banales : il s'en commet des centaines par jour dans le monde.

Ce qui attire l'attention, ce sont les propos publics tenus ce matin tôt par les ministres concernés (Le Foll, Hamon) et par des commissaires européens (Barnier) ou par les journalistes. A aucun moment, ils n'ont employé le magique "présumé" : pas de fraudeurs présumés (innocents ou fraudeurs ?), pas d'escroquerie présumée, mais de la fraude et de l'escroquerie établies. Le mot "coupable" a même été prononcé. Il n'a été nullement question d'indulgence, ni d'excuse, ni d'atermoiment, ni de misère ou de conditions sociales pousse-au-crime : aucune compassion pour les paysans de Roumanie ou de Pologne qui ont des chevaux de trait et à qui il est quasiment fait interdiction de les employer pour tirer leurs charettes, etc. C'est à qui s'indignera le plus véhémentement. Ce que les auditeurs ont entendu, ce sont des propos vindicatifs ou haineux, des appels à une répression accrue, des condamnations sévères, l'Etat ou les Etats étant incités à la plus grande vigilance. Il est sorti de la bouche des ministres les mots "impitoyable" (il faut être impitoyable pour les coupables), "sanction" et "durement sanctionnés", "enquêtes" (l'appareil d'Etat concerné est mobilisé pour enquêter sur ces fraudes et pour arrêter les coupables) menées non seulement par la police et la justice, mais aussi par l'administration, etc...

Ces propos martiaux et ce besoin de justice détonnent, non pas en eux-mêmes évidemment, mais si on les rapporte aux propos à l'eau tiède, quand ce n'est pas le silence complet, que tiennent les ministres ou les hauts responsables ou les journalistes et commentateurs, quand par hasard les medias informent les Français que des crimes épouvantables sont commis contre des personnes. Fi des coupables, des non présumés, des sanctions, de l'absence de pitié, de la répression; place à la compassion (pour les auteurs de crimes), à la misère ou aux conditions sociales qui expliquent tout, à la baisse constante des homicides depuis un siècle, au trompeur sentiment d'insécurité, etc.

De cette distorsion, on peut rire en effet ou, quand on sait comment va la France, ne pas s'étonner. Elle révèle cependant un des fondements de l'ordre nouveau qui est imposé à la France et à l'Europe depuis trente ans ou plus : ce n'est plus la personne qui est sacrée (elle est réifiée, elle devient chose, PMA et GPA par exemple), ce sont les échanges commerciaux (qu'ils existent et se développent est très bien, mais ils ne sont en rien la transcendance nouvelle) et la transparence (pas de panique : dans les étiquettes seulement) qui est censée y présider. Le résulat est qu'il est plus honteux, dans l'échelle des crimes de cette nouvelle morale, de vendre du cheval pour du boeuf que de tuer une ou plusieurs personnes. Voilà le véritable ordre dont, sans qu'ils y prennent garde, les ministres, les journalistes et les hauts responsables européens dévoilent les fondements.
Il me semble qu'à l'origine de ce contraste que vous soulignez si opportunément il y a moins la nature de l'acte ou la nature de la règle bafouée que l'identité des coupables. Rappelez-vous la différence radicale avec laquelle est traité le viol szlon qu'il s'agit, disons d'un viol "classique", à présent réprimé avec la dernière férocité, ou d'une dite "tournante" de caves de HLM qui donne lieu aux étalages larmoyants pleins de compassion — pour les auteurs, pas les victimes — auxquels nous sommes habitués.
Vous oubliez une chose : ce ne sont pas des faits supposés ou présumés, ce sont des faits établis. De la même façon, il peut y avoir un meurtre (fait avéré) et un meurtrier présumé (culpabilité non encore prouvée).
Dans cette affaire, il y a forcément des coupables. Lesquels, ce sera à l'enquête de le dire. Cela démontre une chose : malgré une myriade de contrôles et de règlements, l'autorité publique est in-foutue de nous assurer que ce que nous avons dans nos assiettes est bien ce que nous avons acheté.
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