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Romantisme et bon sens.

Envoyé par Utilisateur anonyme 
Utilisateur anonyme
29 août 2010, 10:31   Romantisme et bon sens.
Joseph Görres (1776-1848), figure célèbre du "second romantisme allemand" ou jüngere Romantik, plus politique que le "premier romantisme" ou Frühromantik, écrivait : " C'est pour un peuple le plus déplorable de tous les aveuglements que de laisser perdre son originalité, que de méconnaître sa nature profonde, que de se laisser entrainer à des pratiques étrangères... Tout ce qui est étranger, tout ce qui s'est introduit sans raison profonde dans la vie d'un peuple, devient pour lui cause de maladie, et doit être extirpé s'il veut être sain. Au contraire, tout ce qui lui est essentiel ou particulier doit être cultivé par lui et émondé sans relâche."

In Deutschland und die Revolution (1820).
J'ai toujours du mal à suivre très loin les penseurs romantiques dont la pensée n'a pas mené à de très bonnes choses, pour la simple raison qu'elle consista très largement à fantasmer le peuple dont elle était souvent sociologiquement coupée, un peu comme nos gauchistes actuels qui ignorent ce qu'est une usine.
30 août 2010, 03:55   Re : Romantisme et bon sens.
Romantisme à double visage, relevé dans le Journal de Pavese, extrait que j'avais déjà cité ici :

« Il est curieux que le romantisme, qui passe pour la découverte et la protestation de l'individu, de l'originalité, du génie, soit tout entier imprégné d'une anxiété d'unité, de totalité cosmique : et qu'il ait inventé les mythes de la chute de la primitive Unité et recherché les moyens (poésie, amour, progrès historique, contemplation de la nature, magie etc.) de la reconstituer. Preuve de cette tendance est la création de tant de concepts collectifs (la nation, le peuple, le christianisme, le germanisme, le gothique, la latinité, etc.). »
Utilisateur anonyme
30 août 2010, 09:13   Re : L'impossible définition.
Belle citation Cher Alain. - Oui, "Romantisme à double visage", c'est pourquoi les adversaires du romantisme n'ont jamais manqué d'exploiter cette imprécision. Dans un essai resté célèbre (Politische Romantik, 1925), Carl Schmitt reproche aux romantiques de substituer à Dieu, en tant qu'instance absolue (ou tiers suprême), n'importe quel autre concept : tantôt l'Etat, tantôt le peuple, tantôt l'individu. (On connait la formule : "Le romantisme, c'est l'occasionnalisme subjectivé"). En fait, le "drame" des romantiques est d'avoir voulu parvenir, et souvent à n'importe quel prix, à une synthèse des contraires : le peuple et la nation, l'Etat et l'esprit public, l'Europe et les régions, etc. Pour être davantage précis il faudrait distinguer le romantisme français du romantisme allemand, et ces derniers du romantisme anglais. Mais définir le romantisme n'est pas chose facile : "Il faudrait avoir perdu tout esprit de rigueur pour essayer de définir le romantisme" (Valéry). A la fin du 18ème siècle, Friedrich von Schlegel avouait à son frère qu'il n'avait pas rempli moins de 124 feuillets à la recherche d'une telle définition...
Peut-être devrait-on parler surtout d'"attitude romantique", cher K., comme prédominance des valeur vitales : exaltation du sentiment et de la puissance, et donc de la puissance sociale, et ce par opposition aux valeurs intellectuelles réfléchies. On promeut alors un style de vie dans lequel l'action, l'émotion et la passion jouent les premiers rôles, le dénominateur commun résidant dans la façon de procéder et le type de rapport au monde plutôt que dans ce sur quoi ils s'exercent, individualités ou collectifs...
Utilisateur anonyme
30 août 2010, 22:50   Re : L'impossible définition.
Peut-être devrait-on parler surtout d'"attitude romantique", cher K., comme prédominance des valeur vitales : exaltation du sentiment et de la puissance... D'accord avec vous Cher Alain. D'ailleurs, toutes les "philosophies de la vie", depuis Schopenhauer et Nietzsche jusqu'à Klages et Dithley, se sont alimentées au romantisme, directement ou non.

NB : si mes souvenirs sont exacts c'est avec le Rousseau des Rêveries que l'adjectif romantique fit son apparition (?).
La référence à Nietzsche ajoutera encore à la confusion, si l'on sait la franche détestation en laquelle il tenait ces 'femmelettes hystériques" incapables de se maîtriser, en regard de son goût pour le grand style des classiques.
Il est sans aucun doute un romantique au sens le plus hard du terme, promouvant la puissance comme capacité de hiérarchisation des forces en présence, pour éviter leur mutilation réciproque, qui tire à boulets rouges sur les romantiques débilités, toutes ficelles au vent, ce qui colle bien au personnage...
Vous m'étonnez. Cette référence au Rousseau des Rêveries n'est-elle pas postérieure, rétrospective ? Il me semble que le mot apparaît en Allemagne où Novallis définit le programme ("romantiser le monde").
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