Cette conjecture a ceci d'utile qu'elle permet de prendre les "Amis du Désastre" à leur propre piège. Si, comme on le propose, un paradigme éthique uni-mondialiste est né il y a trente ans environ, alors la "science de l'Autre", doit être réexaminée à l'aune de ce nouveau paradigme. La courbe des changements de paradigme n'est pas exponentielle, elle montre une courbure en plateau, lasse comme l'humanité désormais: dans les temps modernes, depuis la Révolution française, disons, il y eut un paradigme éthique dominant pendant un gros siècle, en concommitance avec celui de "la figure de l'homme" (Foucault), paradigme qui fut celui du Progrès, qui donnait à la morale un arrimage idéaliste universaliste; puis, celui-ci s'effaçant, l'humanité moderne et avancée, celle du permier monde, à ce moment du milieu des années 80 qui devait précéder de peu la défaite du Communisme, s'inventa un nouveau paradigme: celui de la préservation de l'humanité et de son biome planétaire, incarné, ce paradigme, par le rapport Brundtland (https://fr.wikipedia.org/wiki/Rapport_Brundtland, 1986). La chute du Mur advint très vite après la publication de ce rapport. Dès 1989, un mode unipolaire et une morale uni-mondiale venaient de naître conjointement.
Le nouveau paradigme éthique, remplaçant de l'idéaliste Progrès, n'était pas moins universaliste dans son objet et son inspiration: il posait la conservation, la préservation du tout humain et du tout planétaire, et se nommait (en français),
durabilité (
sustainability en langue internationale). Ce paradigme n'était plus
idéaliste et universaliste comme l'avait été celui du progrès, mais était le représentant autorisé, et relève toujours, de
l'ordre universaliste pratique et réaliste, celui, non-projectif, de l'être-déjà-là. Il ne
suppose plus (comme le radicalisme progressiste d'antan) l'universalité et l'unicité de l'humanité mais
en dresse le constat matériel et écologique, ou prétend le faire à coups d'arguments documentés, et la radicalité politique qui le porte n'est plus celle des "radico-socialistes" idéalistes mais celle de l'écologie politique qui se fait forte de gérer l'être-là planétaire.
L'uni-monde, lorsqu'une morale universelle y a été arrimée, règne en juge sur les pratiques politiques. Il en découle un régime nouveau pour le Bien. Le Bien, dès lors est mesurable à l'aune planétaire. Ce simple fait, énoncé de manière si anodine, devrait être considéré comme notre meilleur ami: les partisans d'une régularisation en France (et en Europe) des sans-papiers, de tous les sans-papiers, se posent en infraction monstrueuse à la morale nouvelle, ils violent la règle d'or de la primauté de l'intérêt de l'Autre qui fait pourtant leur crédo. En effet, le sans-papiérisme n'intégre en rien la morale mondialiste qui doit faire droit à l'intérêt de l'Afrique, cet Autre tant vanté. L'émigration qui frappe l'Afrique désole et afflige ce continent en le détournant de la recherche de remèdes et de solutions autochtones à ses maux et génère à son débit de la dépendance et de l'assujettissement envers un tiers continent, l'Europe. Le sans-papiérisme, parce qu'il nuit à l'Autre, être suprême de la morale,
est foncièrement immoral, et cette descente de la morale dans la pratique politique prouve dans ces effets,
qu'elle est désormais constitutive de toute immoralité. CQFD.