Voici, en gros, comment s'articule le rapport famille / cité selon Aristote.
Il y a chez Aristote deux théories concurrentes. La première part
effectivement de la famille, mode primitif et biologique de la
société. Mais cette société qui a pour but des sécurités matérielles,
ne trouve son expression parfaite, parce qu'autarcique, que dans la
cité.
Car dans un autre ordre c'est l'amitié qui est première, la philia,
parce qu'elle permet de vivre ensemble dans la cité, d'où la formule
répétée a satiété que l'amitié est au fondement de la cité (de mémoire
c'est dans la Politique, mais la réflexion sur l'amitié c'est l'etn)
mais elle n'est pas suffisante, il faut encore que cette vie en commun
soit morale.
Donc sa conception de la vie politique est le résultat pour Aristote
de deux réflexions. Qui s'entrecroisent. Dans l'ordre de la nature, du
besoin, du réalisme biologique, c'est la famille qui est première.
Dans l'ordre proprement politique, grec, de la valeur et de la
finalité, c'est l'amitié.
A la limite, sans l'idéal de valeurs qui fait la cité, le destin de la
famille, puis du clan, puis du village, etc c'est de former par
agrégation non une cité grecque mais un ethnos, comme dans les
monarchies orientales, puis un empire qui regroupe plusieurs ethnies.
Etre grec, donc civilisé, c'est prendre un embranchement original qui
fait aboutir à la Cité plutôt qu'à l'ethnos. Avec cet horizon plus
personnel, mais jamais individuel, qu'est la vie morale et in fine la
vie théorétique du sage.
C'est sur ce type de pensée que le politique, en partie, s'est construit en Occident. Je trouve cette pensée nettement plus féconde que celle de Todd.
Je crois qu'il vaut mieux lire, relire Aristote et laisser Todd à Taddéi.